Gregorio ArĂĄoz de Lamadrid
Gregorio ArĂĄoz de Lamadrid ou La Madrid (San Miguel de TucumĂĄn, Vice-royautĂ© du RĂo de la Plata, 1795 â Buenos Aires, Argentine, 1857) Ă©tait un militaire et homme politique argentin. Il sâillustra dâabord dans la guerre dâindĂ©pendance de lâArgentine, puis surtout dans la guerre civile consĂ©cutive, choisissant le camp des unitaires, dont il figura comme lâun des dirigeants. Il fut gouverneur de la province de TucumĂĄn, et passagĂšrement de celles de Mendoza et de CĂłrdoba. Ăternel batailleur, rĂ©putĂ© vaillant jusquâĂ lâintrĂ©piditĂ©, il ne cessa de relancer le conflit intĂ©rieur, du reste plus souvent pour en sortir vaincu que vainqueur.
Gouverneur de CĂłrdoba |
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DĂ©cĂšs |
(Ă 61 ans) Buenos Aires |
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Francisco ArĂĄoz de Lamadrid (d) |
Grade militaire | |
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Conflit |
Origines
Gregorio ArĂĄoz de Lamadrid fut le cinquiĂšme et dernier des enfants nĂ©s du mariage que contractĂšrent en 1790, dans la ville de San Miguel de TucumĂĄn, Francisco Javier ArĂĄoz SĂĄnchez de Lamadrid, issu dâune des familles les plus importantes de lâĂ©poque coloniale dans la province de TucumĂĄn, et Andrea Ignacia ArĂĄoz LĂłpez. Dans ses Memorias, le futur gĂ©nĂ©ral ne devait jamais Ă©voquer ses parents, mais mentionner en revanche qu'il fut Ă©levĂ© par son oncle Don Manuel de La Madrid et sa tante Doña Bonifacia DĂaz de la Peña, dans leur domaine viticole dâAndalgalĂĄ, dans la province de Catamarca voisine, aprĂšs que le fils du couple, son cousin Juan JosĂ© de La Madrid, eut contractĂ© mariage, le , avec Catalina ArĂĄoz, sĆur du futur gĂ©nĂ©ral BernabĂ© ArĂĄoz.
Gregorio Lamadrid Ă©pousa Ă Buenos Aires MarĂa Luisa DĂaz VĂ©lez Insiarte (Buenos Aires, 1801 â id., 1871), qui Ă©tait la fille du docteur JosĂ© Miguel DĂaz VĂ©lez, son cousin, et de MarĂa del TrĂĄnsito Insiarte Montiel, et de qui il eut trois enfants. Alors quâil Ă©tait appelĂ© Ă devenir ensuite lâun des membres les plus Ă©minents du parti unitaire, Lamadrid sollicita Manuel Dorrego et Juan Manuel de Rosas, deux des principaux chefs de file du fĂ©dĂ©ralisme portĂšgne et ennemis futurs, de figurer comme parrains de ses enfants BĂĄrbara et Ciriaco, et EncarnaciĂłn Ezcurra, Ă©pouse de Rosas, fut marraine de ce dernier.
Si ses contemporains lâappelaient habituellement La Madrid ou Madrid, lui-mĂȘme, dans ses mĂ©moires, usa toujours du patronyme Lamadrid.
Dans lâarmĂ©e du Nord
En 1811, il sâenrĂŽla dans les milices de TucumĂĄn. BientĂŽt, il vint Ă se trouver sous les ordres du gĂ©nĂ©ral Manuel Belgrano, commandant en chef de la seconde campagne du Haut-PĂ©rou contre les troupes royalistes, et combattit, avec le grade de lieutenant, dans les batailles de TucumĂĄn, de Salta, de Vilcapugio, de Tambo Nuevo et dâAyohuma (1813). Revenant de cette derniĂšre bataille, qui sâĂ©tait soldĂ©e par une dĂ©faite des indĂ©pendantistes, il sut obtenir quelques succĂšs mineurs lors de la retraite, Ă Colpayo et Ă Posta de Quirbe.
Il prit part Ă la troisiĂšme campagne du Haut-PĂ©rou, cette fois sous le commandement de JosĂ© Rondeau, et se battit Ă Venta y Media et Ă Sipe-Sipe. De nouveau, il veilla au bon dĂ©roulement du repli de son armĂ©e, combattant dans de petits accrochages, Ă Culpina et Ă Uturango. Par un exploit personnel, il Ă©vita au gĂ©nĂ©ral Francisco FernĂĄndez de la Cruz de tomber aux mains des Espagnols, ce qui lui valut dâĂȘtre Ă©levĂ© au grade de lieutenant-colonel.
Belgrano, de nouveau nommĂ© commandant en chef de lâarmĂ©e du Nord, fit de Lamadrid son officier favori. Sur son ordre, Lamadrid fut envoyĂ© en qualitĂ© de second du colonel Juan Bautista Bustos affronter Juan Francisco Borges, caudillo originaire de Santiago du TucumĂĄn, quâil sut vaincre Ă PitambalĂĄ. Deux jours plus tard, il le fit fusiller sur ordre de Belgrano.
Peu aprĂšs, Belgrano le chargea de mener une expĂ©dition de reconnaissance et dâattaquer les royalistes dans leur arriĂšre-garde. Cependant, sâĂ©tant dĂ©routĂ© vers Tarija, il rĂ©ussit Ă battre Ă Tolomosa le colonel AndrĂ©s de Santa Cruz (futur dictateur du PĂ©rou et de Bolivie), puis Ă occuper la ville, pour remporter ensuite une autre victoire Ă Cachimayo. Passant outre les ordres de Belgrano, il avança avec 400 hommes Ă peine jusquâĂ Chuquisaca (actuelle Sucre), entreprise qui allait bien au-delĂ de ses possibilitĂ©s, et attaqua la ville par surprise. Le stratagĂšme ne rĂ©ussit pas, Lamadrid fut battu et dut fuir par la montagne et la selve, pour ĂȘtre battu derechef dans la bataille de Sopachuy, et revenir enfin Ă TucumĂĄn en passant par OrĂĄn. Il fut alors promu colonel.
La pĂ©riode dâanarchie (1819 â 1823)
LâarmĂ©e du Nord cependant tendit Ă se dĂ©tourner de sa mission originelle qui Ă©tait de mener la guerre dans le Haut-PĂ©rou, pour affronter dĂ©sormais les montoneras fĂ©dĂ©raux du Litoral argentin (il faut entendre par Litoral les provinces du nord situĂ©es sur les rives des deux grands fleuves ParanĂĄ et Uruguay). Sur ordre de Juan Bautista Bustos, Lamadrid fut mutĂ© Ă CĂłrdoba, oĂč il affronta les troupes de Estanislao LĂłpez, caudillo fĂ©dĂ©raliste de Santa Fe, et combattit dans la bataille de La Herradura. Ă la suite de cette bataille, Bustos dĂ©cida de ne plus poursuivre la guerre civile, au motif quâaucun de ses soldats ne sâĂ©tait enrĂŽlĂ© dans ce but-lĂ ; Lamadrid alors sâoffrit Ă le prendre en dĂ©tention et à « lui loger quatre balles », mais nâen obtint pas lâautorisation de Belgrano. Fin 1819, Belgrano, lassĂ© lui aussi de cette guerre fratricide, devait quitter lâarmĂ©e, pendant quâelle sâacheminait vers TucumĂĄn.
AprĂšs lâĂ©clatement de la mutinerie dâArequito, en , lors de laquelle la majeure partie de lâarmĂ©e refusa de poursuivre plus avant la guerre civile, Lamadrid voulut attaquer les insubordonnĂ©s, mais en fut retenu par ses propres hommes, qui s'Ă©taient joints Ă la rĂ©bellion.
Il se retira Ă Buenos Aires, oĂč il sâappliqua Ă soutenir Ă outrance chaque gouvernement en place, sans quâil lui apparĂ»t toujours clairement Ă qui il devait obĂ©ir. Il accompagna Manuel Dorrego dans la campagne de Santa Fe contre les caudillos autonomistes, mais ne fut pas prĂ©sent lors de la bataille de Gamonal. Il mena Ă©galement une brĂšve campagne militaire dans le sud de la province de Buenos Aires, lors de laquelle il lui fut donnĂ© de connaĂźtre Juan Manuel de Rosas, alors colonel, qui lui causa une impression agrĂ©able.
AprĂšs son retour Ă Buenos Aires, il marcha ensuite sur la province de Santa Fe, qui avait Ă©tĂ© envahie par Francisco RamĂrez. Cependant, il sâenhardit Ă affronter celui-ci sans vouloir attendre dâabord lâarrivĂ©e de son ancien ennemi Estanislao LĂłpez ; il subit une lourde dĂ©faite Ă Coronda, le , au mĂȘme endroit oĂč, le jour suivant, LĂłpez allait rĂ©ussir Ă battre RamĂrez.
Il se retira de lâarmĂ©e et se consacra dĂ©sormais aux travaux des champs Ă San Miguel del Monte, dans la province de Buenos Aires, Ă peu de distance de la demeure de Rosas. Il fut rappelĂ© sous les armes pour accompagner Juan Antonio Ălvarez de Arenales, gouverneur de Salta, qui sâapprĂȘtait Ă faire mouvement vers le Haut-PĂ©rou, afin d'y affronter le dernier chef royaliste. Mais Ă peine eurent-ils pĂ©nĂ©trĂ© dans le Haut-PĂ©rou, quâils apprirent que Sucre avait dĂ©jĂ obtenu lâindĂ©pendance de ce territoire vis-Ă -vis de la couronne dâEspagne (indĂ©pendance dĂ©clarĂ©e le ) et scindĂ© la Bolivie dâavec le reste de lâArgentine.
Premier gouvernorat
Cette mĂȘme annĂ©e 1825 Ă©clata la guerre contre lâempire du BrĂ©sil, et Lamadrid fut chargĂ© par le prĂ©sident Bernardino Rivadavia de recruter des volontaires dans sa province de TucumĂĄn. Alors que la guerre civile, qui avait divisĂ© cette province pendant environ six ans, paraissait rĂ©volue, notamment Ă la suite de la mort de BernabĂ© ArĂĄoz, oncle et protecteur de Lamadrid, fusillĂ© par le gouverneur Javier LĂłpez, Lamadrid sâingĂ©nia Ă attiser le conflit.
En effet, envoyĂ© Ă Catamarca afin dây rĂ©unir des volontaires, il sâembringua dans une guerre civile locale entre deux candidats au gouvernorat. Lâun de ceux-ci le persuada de retourner Ă TucumĂĄn et de renverser Javier LĂłpez. Ă lâissue dâune brĂšve bataille, il se fit Ă©lire gouverneur par la Salle des ReprĂ©sentants le . Il se prononça ouvertement en faveur des autoritĂ©s centrales des Provinces-Unies du RĂo de la Plata, du prĂ©sident Bernardino Rivadavia, dirigeant du parti unitaire, et de la constitution unitaire de 1826, qui avait Ă©tĂ© rejetĂ©e par les gouverneurs fĂ©dĂ©raux de lâintĂ©rieur. Ensuite, il envahit Ă nouveau Catamarca pour dĂ©poser le gouverneur Acuña et installer au pouvoir son ami GutiĂ©rrez avec lâappui de Rivadavia, en vue dâĂ©tendre lâunitarisme vers les autres provinces. Ce faisant, il sâattira la haine du commandant-gĂ©nĂ©ral de La Rioja, Juan Facundo Quiroga, qui sâĂ©tait fait le garant dâun accord pacifique dans cette province. Quiroga sâefforça de convaincre les gouverneurs Bustos et Ibarra de sâunir Ă lui pour repousser la politique de Rivadavia et ses alliĂ©s.
Quiroga rĂ©solut dâagir vite : en octobre, il battit les troupes de GutiĂ©rrez, et sans plus tarder marcha ensuite sur TucumĂĄn. Lamadrid se porta Ă sa rencontre, l'affronta prĂšs de la frontiĂšre de Catamarca, dans la bataille dâEl Tala, le , lors de laquelle Quiroga rĂ©ussit Ă lui infliger une dĂ©faite totale. Dans la mĂȘlĂ©e, Lamadrid se battit seul contre quinze soldats, lesquels, ne le reconnaissant pas, lui brisĂšrent la cloison nasale et deux ou trois cĂŽtes, lui coupĂšrent une oreille, le blessĂšrent Ă lâabdomen, puis enfin lui portĂšrent le coup de grĂące. Lorsquâils eurent appris quâil sâagissait de Lamadrid, ils retournĂšrent sur leurs pas Ă la recherche du cadavre du prĂ©sumĂ© mort, lequel cependant avait disparu. Lamadrid en effet, griĂšvement blessĂ©, avait rĂ©ussi Ă se traĂźner jusquâĂ une ravine, oĂč il avait repris des forces. Une patrouille qui vint Ă passer le donna pour mort, aprĂšs quoi il alla se rĂ©fugier dans une ferme. Les gauchos se mirent alors Ă spĂ©culer sur sa supposĂ©e immortalitĂ©, ce qui ajouta Ă sa renommĂ©e de vaillance. Le caudillo de La Rioja pour sa part se retira vers le sud.
En dĂ©cembre, Lamadrid, fort de nouveaux appuis reçus depuis Buenos Aires, dâoĂč Rivadavia le requit de renverser les gouvernements provinciaux rĂ©fractaires Ă son autoritĂ©, reprit le pouvoir dans sa province et envoya une division envahir (pour la troisiĂšme fois) la province de Catamarca. Quiroga, qui Ă©tait alors de retour dâune campagne militaire, menĂ©e avec peu dâeffusion de sang Ă San Juan, envahit une nouvelle fois la province de Lamadrid, et derechef lui infligea une dĂ©faite, lors de la bataille de RincĂłn de Valladares, le .
Premier retour : de Navarro Ă La Ciudadela (1827 â 1831)
Lamadrid sâen fut se rĂ©fugier en Bolivie, mais en dĂ©cembre de la mĂȘme annĂ©e 1827 dĂ©cida de retourner sur ses terres dans la province de Buenos Aires. La rĂ©volution de , par laquelle Juan Lavalle renversa le gouverneur Manuel Dorrego, le prit de surprise, mais il se joignit Ă lâarmĂ©e de Lavalle et combattit Ă la bataille de Navarro. AprĂšs que Dorrego eut Ă©tĂ© capturĂ©, il tenta dâempĂȘcher, mais sans succĂšs, lâexĂ©cution du gouverneur ordonnĂ©e par Lavalle. Avant son exĂ©cution, Dorrego lui remit sa jaquette militaire pour quâil la fĂźt parvenir Ă sa famille en mĂȘme temps quâune lettre adressĂ©e Ă son Ă©pouse Ăngela Baudrix.
Il rallia lâexpĂ©dition du gĂ©nĂ©ral JosĂ© MarĂa Paz dans lâintĂ©rieur et prit part aux victoires unitaires de San Roque et de La Tablada, dans la province de CĂłrdoba. Dans la suite, il se signala par la cruautĂ© avec laquelle il traita les fĂ©dĂ©ralistes, pacifiant Ă feu et Ă sang les zones montagneuses. Il fut promu par Paz au grade de gĂ©nĂ©ral, et combattit sous ses ordres Ă Oncativo, en , comme chef dâune aile de cavalerie. Ă lâissue de la bataille, il persĂ©cuta avec acharnement les vaincus, assassinant les soldats que se rendaient Ă lui, tant il brĂ»lait d'atteindre Quiroga.
AprĂšs la bataille d'Oncativo (dite aussi bataille de Laguna Larga), Paz fit marcher des divisions unitaires sur les provinces de Cuyo, afin de sâemparer de celles-ci pour le compte du parti unitaire. Les provinces de TucumĂĄn et Salta avaient dĂ©jĂ des gouvernements dĂ©vouĂ©s, et restaient donc La Rioja et Santiago. Il envoya Ă cette derniĂšre province le colonel RomĂĄn Deheza, et Ă la province de La Rioja Lamadrid. Celui-ci occupa la province avec une extrĂȘme cruautĂ©, se vengeant, en son absence, du gĂ©nĂ©ral Quiroga qui lâavait battu par deux fois, et se fit nommer gouverneur. Il sâappliqua ensuite Ă trouver les trĂ©sors cachĂ©s (tapados) de Quiroga â bourses dâargent, rĂ©elles ou imaginaires, enterrĂ©es en pleine campagne, dans des endroits Ă©parpillĂ©s sur toute la province et connus du maĂźtre seulementâ, dont il tenta de dĂ©terminer les emplacements par la subornation et la torture. Ă cet effet p.ex., Lamadrid obligea la mĂšre de Quiroga Ă balayer, chargĂ©e de chaĂźnes, la GrandâPlace de La Rioja. En guise de reprĂ©sailles, Ă la suite de la mort de son second, Pedro MeliĂĄn, il fit passer par les armes 200 soldats fĂ©dĂ©ralistes.
Plus tard, Quiroga écrivit à Lamadrid une lettre ainsi conçue :
- « Alors que vous partiez pour CĂłrdoba, lâon attrapa le perfide dĂ©couvreur de mes tapados... On trouva sur lui, dans une de ses poches, un billet de vous, dans lequel vous lui disiez : "Ne me faites pas rapport du montant du dernier tapado sans au prĂ©alable en prĂ©lever pour moi deux ou trois cents onces, car je nâai pas, par pure dĂ©licatesse, pris un seul peso des deux prĂ©cĂ©dents..." Parmi mes commandants, il nâen manquait pas qui eussent voulu transmettre Ă la presse de San Juan ledit votre billet, mais je ne voulus point le permettre, en dĂ©pit de ce que vous n'ayez encore restituĂ© que quarante et quelque mille pesos des quatre-vingt-treize mille qui me furent extraits de Los Llanos ; ce dont je dĂ©duis que vous en avez, par pure dĂ©licatesse, absorbĂ© la majeure partie... »
Lamadrid se transporta ensuite Ă San Juan, oĂč il endossa Ă©galement la fonction de gouverneur. Il revint Ă CĂłrdoba aussitĂŽt aprĂšs le dĂ©clenchement de la guerre contre Estanislao LĂłpez, le caudillo de Santa Fe, mais en arrivant fut mis devant le fait que Paz avait Ă©tĂ© inopinĂ©ment capturĂ© par les troupes de LĂłpez. Lamadrid prit alors sur lui de diriger lâarmĂ©e, mais cernĂ© par LĂłpez Ă lâest et par Quiroga Ă lâouest (celui-ci venant dâenvahir Cuyo), il se replia sur TucumĂĄn avec lâensemble de son armĂ©e.
Lamadrid se proposa d'Ă©tendre sa domination sur Catamarca Ă©galement, mais cette province tomba aux mains de Quiroga, et la province de Salta ne lui envoya que fort peu dâaide. Le gouverneur de TucumĂĄn, le mĂȘme Javier LĂłpez quâil avait battu six ans auparavant, dĂ©mobilisa ses troupes. Avec ce qui lui restait dâarmĂ©e, Lamadrid fut Ă nouveau vaincu par Quiroga Ă la bataille de La Ciudadela, le . Avec son nouveau dĂ©part en exil vers la Bolivie prit fin cette phase de la guerre civile argentine, phase qui avait commencĂ© en 1828.
Peu aprÚs la bataille de La Ciudadela, comme Lamadrid réclamait un sauf-conduit pour son épouse, Quiroga lui fit parvenir la note suivante :
- « VoilĂ Ă prĂ©sent que vous me recommandez votre famille, comme si jâeusse eu besoin de vos recommandations pour lâavoir traitĂ©e comme je lâai fait ; dans votre lettre, vous faites Ă©tat des considĂ©rations dont, dites-vous, vous fĂźtes bĂ©nĂ©ficier ma famille Ă San Juan, comme Ă madame ma mĂšre Ă Los Llanos, mais sans vous souvenir de la pesante chaĂźne que vous fĂźtes traĂźner Ă ma vieille mĂšre Ă La Rioja... Mais je ne fais aucun cas de cela et nâai pas hĂ©sitĂ© un seul instant Ă accĂ©der Ă votre requĂȘte ; cela non Ă cause de la protestation que vous mâadressez, mais parce quâil ne me paraĂźt pas juste dâaffliger lâinnocent. »
- « Vous savez trĂšs bien que je ne manque pas de raisons de nâaccorder aucun crĂ©dit Ă votre parole, car jâai bien gardĂ© Ă lâesprit les protestations que vous me fĂźtes en lâan vingt-sept pour que je vous laissasse le chemin libre et que vous pussiez retourner au sein de votre famille ; je le fis alors, et nâen Ă©prouve aucun dĂ©pit, alors mĂȘme que vous vous ĂȘtes conduit de la maniĂšre la plus perverse, que vous mâavez fait la guerre et que vous avez projetĂ© mon extermination, cela nâayant en effet rien dâĂ©trange, attendu que nous Ă©tions divisĂ©s en opinion, mais que vous mâayez insultĂ© en controuvant des communications, voilĂ des actions propres Ă une Ăąme basse. »
- « (...) je pensais ne pas prendre part Ă la guerre, aprĂšs que je fus battu, cependant lâinjustice faite Ă ma famille a pu me dĂ©cider Ă embrasser la guerre avec plus dâardeur encore. »
- « Au revoir, gĂ©nĂ©ral, jusquâĂ ce que nous puissions nous mettre en prĂ©sence lâun de lâautre, pour que lâun de nous deux disparaisse, puisque câest lĂ la rĂ©solution inaltĂ©rable de son ennemi. » (signĂ©) Juan Facundo Quiroga.
Lamadrid, mis au courant de ce que Quiroga permit à sa famille de voyager, lui répondit :
- «...Vous pourrez, gĂ©nĂ©ral, ĂȘtre mon ennemi tant que vous le voudrez, mais je nâoublierai jamais le geste que vous avez fait de mâenvoyer ma famille, que jâattends avec anxiĂ©tĂ©. »
DeuxiĂšme retour : la coalition du Nord (1840 â 1846)
AprĂšs un bref passage par Montevideo, il fut rappelĂ© par le gouverneur Rosas et invitĂ© Ă sâunir Ă son armĂ©e. La raison de cette demande demeure Ă©nigmatique ; plus Ă©nigmatique encore est le fait que Rosas envoya Lamadrid sur la province de TucumĂĄn, afin de rĂ©cupĂ©rer lâarmement que Buenos Aires y avait expĂ©diĂ©, en vue d'une courte guerre contre la Bolivie. En outre, il reçut mission de renverser les gouvernements provinciaux unitaires qui sâĂ©taient constituĂ©s dans le nord-est et qui venaient de sâassocier en la dĂ©nommĂ©e coalition du Nord, crĂ©Ă©e par Marco Avellaneda, et comprenant cinq provinces. Il fit le trajet vers le nord chantant des ritournelles en lâhonneur de Rosas et accusant les unitaires de trahison Ă la patrie. Ă ses cĂŽtĂ©s cheminait son jeune neveu Juan CrisĂłstomo Ălvarez.
SitĂŽt quâil fut arrivĂ© dans sa ville natale, il se joignit, avec Mariano Acha et Anselmo Rojo, au gouvernement unitaire en place et fut nommĂ© commandant en chef de lâarmĂ©e tucumane ; le commandant en titre de lâarmĂ©e de la Coalition Ă©tait le gouverneur de La Rioja, TomĂĄs Brizuela, cela pour satisfaire Ă la condition quâavait posĂ©e celui-ci avant de sâunir Ă la Coalition. Lamadrid lança une campagne militaire contre Santiago del Estero, mais la dĂ©fection du commandant Celedonio GutiĂ©rrez le contraignit Ă rebrousser chemin. Vers la mĂȘme Ă©poque, Lavalle Ă©chouait Ă envahir Buenos Aires et dut se replier sur CĂłrdoba. Lamadrid fit alors mouvement vers cette ville, oĂč, dĂšs que lâon sut que son armĂ©e approchait, Ă©clata une rĂ©volution qui destitua le gouverneur Manuel LĂłpez, alias Quebracho. Lamadrid fut alors nommĂ© commandant des troupes de la province de CĂłrdoba. Il conclut ensuite un accord avec Lavalle, en vue dâunir leurs troupes respectives, puis de marcher ensemble sur Buenos Aires. Cependant, Lavalle fut Ă ce point harcelĂ© par les troupes fĂ©dĂ©ralistes de Manuel Oribe, aux abords de la frontiĂšre entre les provinces de CĂłrdoba et Santa Fe, quâil ne fut pas en mesure de rejoindre Lamadrid Ă la date convenue, et fut en outre empĂȘchĂ© dâaviser Lamadrid de son retard, ce qui porta ce dernier Ă abandonner le lieu de rencontre pour se mettre Ă la recherche de Quebracho LĂłpez. Ce malentendu se rĂ©vĂ©la fatal, et Lavalle fut Ă©crasĂ© Ă la bataille de Quebracho Herrado, le . Leurs troupes dĂ©bandĂ©es, les deux gĂ©nĂ©raux unitaires abandonnĂšrent CĂłrdoba en , et se retirĂšrent vers le nord, Lavalle menant dans la province de La Rioja une campagne de diversion Ă lâintention dâOribe, tandis que Lamadrid sâemployait Ă rĂ©unir une nouvelle armĂ©e dans sa propre province. Lavalle quitta La Rioja pour TucumĂĄn, laissant Ă Lamadrid le soin de mener une offensive sur Cuyo.
La campagne militaire de Cuyo
Brizuela dĂ©cĂ©dĂ©, Lavalle encerclĂ©, Acha battu, les unitaires dĂ©cidĂšrent que Lavalle dĂ©fendrait TucumĂĄn, tandis que Lamadrid sâen irait conquĂ©rir Cuyo.
Lamadrid entama sa campagne avec quelque 3 000 hommes de troupe, avançant lentement vers le sud, et envoyant en avant-garde le colonel Acha. Celui-ci, aprĂšs avoir dâabord esquivĂ© BenavĂdez et Aldao, occupa la ville de San Juan, puis vainquit les deux gĂ©nĂ©raux fĂ©dĂ©ralistes dans la bataille dâAngaco. Cependant, ayant perdu dans cette bataille la moitiĂ© de ses effectifs, il fut bientĂŽt dĂ©fait Ă son tour par BenavĂdez Ă la bataille de La Chacarilla ; fait prisonnier, Acha sera exĂ©cutĂ© sur ordre dâAldao, le .
Lamadrid sâempara de San Juan et mit en dĂ©tention la famille de BenavĂdez en la menaçant de mort, mais le gouverneur refusa de nĂ©gocier. Sans mettre ses menaces Ă exĂ©cution, Lamadrid poursuivit jusquâĂ Mendoza, prenant la ville et se faisant nommer gouverneur le . Au cours des quelques jours quâil y exerça le pouvoir, il persĂ©cuta ses ennemis et opposants, donnant ordre de fusiller neuf personnes.
Il fut dĂ©fait par les troupes fĂ©dĂ©ralistes, commandĂ©es par le gĂ©nĂ©ral Ăngel Pacheco, lors de la bataille de Rodeo del Medio, le . Il partit alors, accompagnĂ© de la majeure partie de ses troupes, pour lâexil au Chili voisin, avec lâaide de Domingo Faustino Sarmiento, lui aussi exilĂ© dans ce pays. Selon certaines versions, plusieurs de ceux qui accompagnĂšrent La Madrid passĂšrent leurs annĂ©es dâexil dans la ville chilienne de Coquimbo, tandis que de nombreux autres rĂ©ussirent Ă se cacher dans les environs du lieu de la bataille, et y restĂšrent ensuite Ă demeure. Cela expliquerait quâune localitĂ© de la province de Mendoza, proche du lieu de la bataille, se nomme aujourdâhui Coquimbito, nom dans lequel on peut voir un diminutif de Coquimbo.
Lamadrid fit insĂ©rer dans le journal chilien El Mercurio la demande dâaide suivante, adressĂ©e Ă ses compatriotes, et justifiĂ©e par sa dĂ©plorable situation Ă©conomique :
- « Jâai quarante-deux ans, dont trente-deux de services vouĂ©s Ă lâindĂ©pendance amĂ©ricaine et Ă la libertĂ© argentine ; jâai pris part Ă cent-soixante-quatre combats et batailles, je porte sur le corps dix-neuf cicatrices de blessures que je reçus en combattant ; jâai fait de mes fils des soldats aptes Ă porter une Ă©pĂ©e, et un dâeux est dĂ©jĂ martyre pour sa patrie. Je me trouve en terre Ă©trangĂšre, ayant une famille Ă charge, sans argent et sans abri. VoilĂ les titres au nom desquels je demande Ă mes compatriotes du pain pour ma famille. »
Peu de jours auparavant, Lavalle avait Ă©tĂ© battu dans la bataille de FamaillĂĄ, en , et devait mourir peu aprĂšs Ă San Salvador de Jujuy. Ces Ă©vĂ©nements signĂšrent la fin de la coalition du Nord et eurent pour effet de suspendre la guerre civile pour plusieurs annĂ©es. Les fĂ©dĂ©ralistes et Rosas allaient dominer le pays sans rencontrer dâopposition notable durant les dix annĂ©es suivantes. En 1846, La Madrid quitta le Chili pour Montevideo, oĂč il rallia les forces hostiles au rĂ©gime rosiste.
TroisiĂšme retour : bataille de Caseros (1852)
En 1852, le gĂ©nĂ©ral Justo JosĂ© de Urquiza le fit mander pour prendre la tĂȘte dâun des contingents de la Grande ArmĂ©e (EjĂ©rcito Grande) appelĂ©e Ă lutter contre les forces du gĂ©nĂ©ral Rosas. Il participa ainsi Ă la bataille de Caseros, en tant que commandant de lâextrĂȘme aile droite de lâarmĂ©e. Lorsque celle-ci fit son entrĂ©e triomphale dans Buenos Aires, le peuple le prit Ă bas de son cheval et le porta sur ses Ă©paules Ă travers la ville, en reconnaissance de son prestige et en hommage Ă sa vaillance.
Il appuya la rĂ©volution du , Ă la suite de laquelle la province de Buenos Aires fut sĂ©parĂ©e de la ConfĂ©dĂ©ration argentine pendant les neuf annĂ©es suivantes. Cet appui semble indiquer quâil Ă©tait, non pas un fĂ©dĂ©raliste attachĂ© Ă combattre spĂ©cifiquement les caudillos, comme lâont laissĂ© supposer ses panĂ©gyristes, mais un unitaire convaincu et intransigeant, hostile Ă tous les fĂ©dĂ©ralistes sans distinction.
En 1853, Lamadrid rĂ©digea ses cĂ©lĂšbres Memorias, ouvrage d'une grande valeur documentaire pour lâĂ©tude de lâhistoire argentine de la premiĂšre moitiĂ© du XIXe siĂšcle, et qui lâeĂ»t sans doute Ă©tĂ© davantage encore si son auteur ne sâĂ©vertuait pas sans cesse de se prĂ©senter comme la vedette de tous les Ă©vĂ©nements auxquels il eut quelque part, fĂ»t-ce comme acteur de second plan. Curieusement, Lamadrid, dans ses mĂ©moires, se montre surpris de ne pas ĂȘtre sorti vainqueur de toutes ses batailles. Dâautre part, Paz et Lamadrid avaient rĂ©ciproquement lu avant publication les brouillons de leurs mĂ©moires respectives, de sorte que leurs livres renferment de nombreuses rĂ©futations de lâun Ă lâautre.
DĂ©cĂšs et jugement posthume
Il mourut Ă Buenos Aires le , et ses restes furent transfĂ©rĂ©es Ă la cathĂ©drale de San Miguel de TucumĂĄn, oĂč ils reposent encore Ă lâheure actuelle.
Lamadrid fut un combattant tĂ©mĂ©raire, valeureux, dâune imprudence parfois consternante et grand organisateur dâarmĂ©es. Nonobstant les conditions rudes et violentes de son temps, il ne fut jamais dĂ©loyal. Face Ă lâadversitĂ© qui le poursuivit presque toute sa vie durant, il se signala par sa tĂ©nacitĂ© et sa fidĂ©litĂ© Ă ses troupes, mais aussi par sa fĂ©rocitĂ©. Il Ă©tait vivement aimĂ© de ses gauchos et de ses paysans, et avait coutume de se rendre sur le champ de bataille plein dâentrain, en poussant cris et hurlements, et mĂąchant des caramels.
Bibliographie
Ouvrages rédigés par Gregorio Aråoz de Lamadrid
- Memorias del General Gregorio ArĂĄoz de la Madrid, Buenos Aires, 1895.
- Observaciones sobre las Memorias postumas del brigadier general d. José M. Paz, Buenos Aires, 1855.
- Las guerras civiles, el Rosismo.
- Orijen de los males y desgracias de las repĂșblicas del Plata, documentos curiosos para la historia.
Ouvrages sur Gregorio ArĂĄoz de Lamadrid
- Alaniz, Rogelio, Gregorio ArĂĄoz de Lamadrid, Periodismo y opiniĂłn, http://www.rogelioalaniz.com.ar/?p=515, .
- BazĂĄn, Armando R., Historia de La Rioja, Ă©d. Plus Ultra, Buenos Aires, 1991.
- Beverina, Juan, Las campañas de los ejércitos libertadores 1838-1852, Buenos Aires, 1923.
- Cutolo, Vicente, Nuevo Diccionario BiogrĂĄfico Argentino, Buenos Aires, Ă©d. Elche, 1968.
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