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DĂ©forestation du bassin amazonien

La dĂ©forestation du bassin amazonien s'est grandement accĂ©lĂ©rĂ©e entre 1991 et 2004, jusqu'Ă  atteindre un taux annuel de perte de surface forestiĂšre de 27 423 km2 en 2004. Bien que le taux de dĂ©forestation ait ralenti depuis 2004 (avec une rĂ©accĂ©lĂ©ration en 2008 et en 2013), la surface couverte par la forĂȘt continue de dĂ©croĂźtre[1].

Déforestation en Amazonie brésilienne en 2016.
Déforestation en Amazonie bolivienne en 2016. Le pays a des lois trÚs faibles contre la déforestation.
L'Amazone dans la forĂȘt tropicale

La forĂȘt amazonienne reprĂ©sente Ă  elle seule la moitiĂ© des forĂȘts tropicales restantes sur la Terre, et est la forĂȘt tropicale la plus grande, et celle avec la plus grande biodiversitĂ© au monde. 63 % de la forĂȘt est sur le territoire du BrĂ©sil, tandis que 10 % se trouve au PĂ©rou, 7 % en Colombie, ainsi que des parties au Venezuela, en Équateur, en Bolivie, Ă  Guyana, au Suriname et en Guyane.

La dĂ©forestation en Amazonie a pour effet une perte de capacitĂ© forestiĂšre, donc une diminution de la biocapacitĂ© par personne du BrĂ©sil, et donc de son excĂ©dent Ă©cologique. Cependant, l'essentiel de la diminution de biocapacitĂ© par tĂȘte du BrĂ©sil est dĂ» Ă  la croissance dĂ©mographique[2].

EncouragĂ©e par le commerce international de viande bovine et de cuir[3], l'industrie de l'Ă©levage bovin dans le secteur de l'Amazonie Ă©tait responsable d'environ 80 % de la dĂ©forestation de la rĂ©gion en 2009[4], ce qui reprĂ©sente 14 % de la dĂ©forestation Ă  l'Ă©chelle mondiale chaque annĂ©e, ce qui en fait le moteur de dĂ©forestation le plus important au monde[5]. En 1995, 70 % des terres qui Ă©taient auparavant de la forĂȘt Ă©taient utilisĂ©es pour l'Ă©levage bovin, ainsi que 91 % des terres issues de la dĂ©forestation depuis 1970[6] - [7]. Le dĂ©frichement par les fermiers Ă  des fins d'agriculture vivriĂšre[8] ou d'exploitation mĂ©canisĂ©e (soja et palme notamment) correspond Ă  la majoritĂ© du reste de la dĂ©forestation[9].

Histoire

Le Suriname détruisait déjà l'Amazonie en 1900.

À l'Ăšre prĂ©colombienne, certaines parties de l'Amazonie Ă©taient des zones densĂ©ment peuplĂ©es, cultivĂ©es et ouvertes. AprĂšs l'invasion europĂ©enne du XVIe siĂšcle, la combinaison de plusieurs facteurs comme la prospection d'or, les maladies apportĂ©es par les EuropĂ©ens, l'esclavage et le boom du caoutchouc, l'Amazonie se dĂ©peupla et la forĂȘt grandit[10].

Avant les annĂ©es 1970, l'accĂšs Ă  l'intĂ©rieur de la forĂȘt Ă©tait difficile car aucune route n'y avait Ă©tĂ© tracĂ©e, et mis Ă  part des dĂ©frichements prĂšs des riviĂšres la forĂȘt Ă©tait relativement intacte[11]. La dĂ©forestation s'accĂ©lĂ©ra Ă©normĂ©ment aprĂšs l'ouverture d'autoroutes au cƓur de la forĂȘt, comme la Transamazonienne en 1972.

Pendant les annĂ©es 1970, voulant exploiter au maximum l’Amazonie, l’Etat BrĂ©silien s’est engagĂ© Ă  prendre en charge l'installation des entreprises et a proposĂ© des avantages fiscaux pour celles s’installant en Amazonie. Tout ceci est organisĂ© dans le but de capitaliser l’espace libre fourni par la forĂȘt. De plus, il est associĂ© Ă  un grand programme de colonisation agricole, qui a permis aux grands propriĂ©taires le dĂ©frichement rapide d’importantes zones agricoles. Ne s'avĂ©rant pas toujours rentables, les terres gardaient tout de mĂȘme une importante valeur fonciĂšre.

Dans certaines parties de l'Amazonie, l'agriculture basĂ©e sur les plantations n'Ă©tait pas profitable Ă  cause de la mauvaise qualitĂ© des sols. Le tournant dans la dĂ©forestation de la forĂȘt amazonienne arriva dans les annĂ©es 1960, lorsque les colons commencĂšrent Ă  crĂ©er des fermes Ă  l'intĂ©rieur de la forĂȘt. Leur systĂšme Ă©tait basĂ© sur la culture de plantes et l'agriculture sur brĂ»lis. Cependant, les colons ne surent faire prospĂ©rer leurs champs et leurs cultures, car cette mĂ©thode occasionne une perte de la fertilitĂ© du sol et des invasions par des adventices (mauvaises herbes)[12].

Dans les régions indigÚnes de l'Amazonie péruvienne, comme le bassin de la riviÚre Chambira des Urarina[13], les sols sont productifs pour seulement une courte période, ce qui pousse les cultivateurs indigÚnes comme les Urarina à se déplacer dans de nouvelles zones et à défricher encore plus de terres[12]. La colonisation de l'Amazonie était dominée par l'élevage bovin car l'élevage en ranch ne requiert que peu de travail, génÚre des profits suffisants, et donne un statut social important au sein de la communauté ; de plus, l'herbe peut pousser dans le sol amazonien, de qualité relativement faible. Cependant, la démultiplication des élevages mena à une vaste déforestation, causant de grands dégùts environnementaux[14].

On estime que 30 % de la dĂ©forestation est due aux actions des propriĂ©taires de petites parcelles. MĂȘme si ces propriĂ©taires possĂšdent finalement une partie de l'Amazone plus faible que les propriĂ©taires de parcelles de taille moyenne et grande (89 % du territoire de l'Amazonie), l'intensitĂ© de la dĂ©forestation dans les zones qu'ils possĂšdent est plus importante que dans les grandes parcelles. Ceci montre l'importance d'utiliser des terres qui ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© dĂ©frichĂ©es, au lieu de distribuer des zones qui sont encore boisĂ©es, un geste qui apparaĂźt comme plus facile politiquement[15]. Dans l'Amazonie brĂ©silienne, la proportion de propriĂ©taires de petites parcelles comparĂ©e Ă  celle des propriĂ©taires de grandes parcelles change frĂ©quemment en fonction des pressions dĂ©mographiques et Ă©conomiques.

En 2009, le prĂ©sident pĂ©ruvien Alan GarcĂ­a installa par dĂ©cret exĂ©cutif la loi 840[16] (aussi connue sous le nom de la « Ley de la Selva », « la loi de la jungle » ou simplement la « loi forestiĂšre »), qui autorisait la vente par l'État de terres amazoniennes non cultivĂ©es Ă  des entreprises privĂ©es, sans aucune date limite oĂč les droits de propriĂ©tĂ© expirent[17]. Bien que la loi fĂ»t promue comme Ă©tant une mesure de « reforestation », elle fut critiquĂ©e car la privatisation causerait au contraire plus de dĂ©forestation[18], tout en renonçant aux droits que l'État exerce sur les ressources naturelles pour les donner aux investisseurs, et en laissant le destin des peuples indigĂšnes du PĂ©rou, qui n'ont bien souvent pas de titres formels de propriĂ©tĂ© concernant les portions de forĂȘts qu'ils occupent et qu'ils utilisent pour leur subsistance, dans l'incertitude[16] - [19]. La loi 840 rencontra une forte rĂ©sistance, et finit par ĂȘtre annulĂ©e par la lĂ©gislature du PĂ©rou car considĂ©rĂ©e comme anticonstitutionnelle[16].

En avril 2022, 1012 km2 ont été rasés. C'est un nouveau record de destruction qui correspond à une multiplication par deux de la surface rasée en avril 2021 alors que ce mois, durant la saison humide, est habituellement moins porté à d'importantes opérations de déforestation[20].

Causes de la déforestation

DĂ©forestation en Colombie.
Une consĂ©quence de la dĂ©forestation de la forĂȘt amazonienne : des nuages Ă©pais de fumĂ©e au-dessus de la forĂȘt
Extraction illégale d'or en Amazonie à Madre de Dios,Pérou.

La dĂ©forestation de la forĂȘt amazonienne peut ĂȘtre attribuĂ©e Ă  de nombreux facteurs au niveau local, national et international. La forĂȘt amazonienne est vue comme une ressource Ă  exploiter, fournissant des pĂąturages pour les Ă©levages, des bois de valeur, des remĂšdes mĂ©dicinaux, et de l'espace pour construire des habitations ou Ă©tablir des fermes (surtout pour le soja), et pour construire des routes (autoroutes et petites routes).

Élevage bovin

Un rapport de Greenpeace de 2009 évalue la déforestation causée par l'élevage bovin en Amazonie, soutenu par le commerce international de viande bovine et de cuir, comme correspondant à 80 % de la déforestation totale dans la région[4], soit environ 14 % de la déforestation annuelle mondiale, ce qui en fait le plus grand moteur de déforestation au monde[5]. Selon un rapport de 2006 par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, 70 % des terres qui étaient boisées dans le passé, et 91 % des terres déboisées depuis 1970, sont utilisées pour les ranches des élevages bovins[6] - [21].

Agriculture vivriĂšre

D'autres dĂ©frichements en Amazonie sont causĂ©s par des fermiers, qui dĂ©boisent des terres pour y faire de l'agriculture vivriĂšre[8] ou pour les exploiter avec des machines. Des scientifiques ont utilisĂ© des donnĂ©es satellites de la NASA pour montrer en 2006 que les dĂ©boisements causĂ©s par l'agriculture mĂ©canisĂ©e sont devenus un moteur important de dĂ©forestation en Amazonie. Il est possible que ce changement perturbe le climat de la rĂ©gion. Des chercheurs ont Ă©galement montrĂ© qu'en 2003, une annĂ©e de dĂ©forestation record, plus de 20 % des forĂȘts de l'État du Mato Grosso furent converties en des terres arables[9]. En 2005, les prix du soja chutĂšrent de plus de 25 %, et l'on peut constater dans certaines zones du Mato Grosso un recul du nombre de grands Ă©vĂšnements de dĂ©forestation, ce qui suggĂšre que l'augmentation ou la chute des prix d'autres denrĂ©es, du bƓuf ou du bois pourraient aussi avoir un impact important sur l'utilisation des sols dans la rĂ©gion[9].

Culture du soja

Jusqu'en 2006, un moteur important de dĂ©forestation en Amazonie Ă©tait la culture de soja, principalement pour la production et l'exportation et de tourteaux de soja pour l'alimentation animale[22] et de biodiesel[23] ; l'augmentation des prix du soja a poussĂ© les cultivateurs de soja Ă  continuer Ă  dĂ©boiser des forĂȘts au nord de la forĂȘt amazonienne[24]. Cependant, un accord au sein de la filiĂšre, le Moratoire du Soja, a aidĂ© Ă  rĂ©duire considĂ©rablement la dĂ©forestation liĂ©e au soja dans la rĂ©gion. En 2006, plusieurs entreprises dans le commerce de marchandises comme Cargill se sont mises d'accord pour refuser d'acheter du soja produit dans des zones rĂ©cemment dĂ©boisĂ©es en Amazonie brĂ©silienne. Avant ce moratoire, 30 % de l'expansion de la culture du soja se faisait grĂące Ă  la dĂ©forestation, ce qui contribua Ă  des taux de dĂ©forestation record. Une Ă©tude de 2015 montra que huit ans aprĂšs l'instauration de ce moratoire, la culture de soja s'Ă©tait Ă©tendue sur 1,3 million d'hectares, mais seulement 1 % de cette expansion s'Ă©tait faite au dĂ©triment de la forĂȘt ; les cultivateurs de soja, en rĂ©action au moratoire, plantaient sur des terrains dĂ©jĂ  dĂ©boisĂ©s[24].

Projets d'infrastructures

Les besoins des cultivateurs de soja ont Ă©tĂ© utilisĂ©s pour justifier des projets d'infrastructures controversĂ©s qui se sont dĂ©veloppĂ©s dans l'Amazonie[11]. Les deux premiĂšres autoroutes, l'autoroute de BelĂ©m-BrasĂ­lia (1958) et l'autoroute de Cuiaba-Porto Velho (1968), Ă©taient les seules autoroutes fĂ©dĂ©rales de l'AmazĂŽnia Legal Ă  ĂȘtre goudronnĂ©es et empruntables tout au long de l'annĂ©e avant la fin des annĂ©es 1990. On dit souvent de ces deux autoroutes qu'elles sont au cƓur de « l'arc de dĂ©forestation », qui est Ă  l'heure actuelle le point focal de la dĂ©forestation amazonienne. L'autoroute de BelĂ©m-BrasĂ­lia attira presque 2 millions de colons dans les 20 premiĂšres annĂ©es : l'ouverture de la forĂȘt fut poursuivie en continuant Ă  construire des routes goudronnĂ©es, ce qui crĂ©e la possibilitĂ© de s'installer dans la forĂȘt. La fin de la construction de ces routes fut suivie par une vague de relocalisation, et ces colons eurent Ă©galement un impact important sur la forĂȘt[25].

Des recherches menĂ©es par Leydimere Oliveira et ses coauteurs ont montrĂ© que plus la forĂȘt amazonienne est dĂ©frichĂ©e, moins la rĂ©gion bĂ©nĂ©ficie de prĂ©cipitations, ce qui fait baisser les rendements par hectare. Ainsi, Ă  l'Ă©chelle du BrĂ©sil, il n'y a pas de gain Ă©conomique Ă  couper les arbres, les vendre et utiliser les terres dĂ©frichĂ©es Ă  des fins agricoles[26].

Taux de perte de forĂȘt

Le taux annuel de dĂ©forestation dans la rĂ©gion de l'Amazonie augmenta de façon spectaculaire entre 1991 et 2003[11]. Entre 1991 et 2000, la surface totale de forĂȘt amazonienne dĂ©frichĂ©e depuis 1970 passa de 419 010 km2 Ă  575 903 km2[1], ce qui est comparable Ă  la superficie de l'Espagne, Madagascar ou le Manitoba. La plupart de la forĂȘt perdue fut transformĂ©e en pĂąturages pour bovins[27].

La dĂ©forestation de la forĂȘt amazonienne continua d'accĂ©lĂ©rer au dĂ©but des annĂ©es 2000, atteignant un taux de 27 423 km2 de forĂȘt perdue en 2004. De nos jours la taille de la forĂȘt continue de dĂ©croĂźtre, mĂȘme si le taux annuel de dĂ©forestation continue de dĂ©croĂźtre depuis 2004, si l'on ne compte pas l'augmentation du taux en 2008[28] et en 2013[29].

PĂ©riode[1] ForĂȘt restante (estimĂ©e)

dans l'Amazonie brĂ©silienne (kmÂČ)

Perte annuelle de

forĂȘt (kmÂČ)

Pourcentage de la forĂȘt

restante

Perte totale de forĂȘt

depuis 1970 (kmÂČ)

Avant 1970 4 100 000 — — —
1977 3 955 870 21 130 96,5 % 144 130
1978–1987 3 744 570 21 130 91,0 % 355 430
1988 3 723 520 21 050 90,8 % 376 480
1989 3 705 750 17 770 90,4 % 394 250
1990 3 692 020 13 730 90,0 % 407 980
1991 3 680 990 11 030 89,8 % 419 010
1992 3 667 204 13 786 89,4 % 432 796
1993 3 652 308 14 896 89,1 % 447 692
1994 3 637 412 14 896 88,7 % 462 588
1995 3 608 353 29 059 88,0 % 491 647
1996 3 590 192 18 161 87,6 % 509 808
1997 3 576 965 13 227 87,2 % 523 035
1998 3 559 582 17 383 86,8 % 540 418
1999 3 542 323 17 259 86,4 % 557 677
2000 3 524 097 18 226 86,0 % 575 903
2001 3 505 932 18 165 85,5 % 594 068
2002 3 484 538 21 394 85,0 % 615 462
2003 3 459 291 25 247 84,4 % 640 709
2004 3 431 868 27 423 83,7 % 668 132
2005 3 413 022 18 846 83,2 % 686 978
2006 3 398 913 14 109 82,9 % 701 087
2007 3 387 381 11 532 82,6 % 712 619
2008 3 375 413 11 968 82,3 % 724 587
2009 3 367 949 7 464 82,2 % 732 051
2010 3 360 949 7 000 82,0 % 739 051
2011 3 354 711 6 238 81,8 % 745 289
2012 3 350 140 4 571 81,7 % 749 860
2013 3 344 297 5 843 81,6 % 755 703
2014 3 339 446 4 848 81,4 % 760 551
2015 3 330 689 6 207 81,2 % 769 311
2016 3 322 796 7 893 81,0 % 777 204
2017 3 315 849 6 947 80,9 % 784 151
2018 3 307 949 7 900 80,7 % 792 051

En 1996, il fut signalĂ© que le taux de dĂ©forestation de la forĂȘt amazonienne avait augmentĂ© de 34 % depuis 1992[30]. Le taux moyen annuel de dĂ©forestation entre 2000 et 2005 (22 392 km2 par an) Ă©tait supĂ©rieur de 18 % au taux cinq ans auparavant (19 018 km2 par an)[31].

Au BrĂ©sil, l'Instituto Nacional de Pesquisas Espaciais (INPE, ou Institut national pour la recherche spatiale) publie les chiffres de la dĂ©forestation chaque annĂ©e. Leurs chiffres sont dĂ©rivĂ©s de 100 Ă  220 images prises pendant la saison sĂšche en Amazonie par le satellite Landsat, et ne prennent en compte que la perte de forĂȘt tropicale, et pas la perte de champs sauvages ou de savane dans la forĂȘt. Selon l'INPE, le biome amazonien originel du BrĂ©sil de 4,1 millions de kmÂČ ne faisait plus que 3.403 millions de kmÂČ en 2005, ce qui reprĂ©sente une perte de 17.1%[32]. Pour la pĂ©riode comprise entre aoĂ»t 2015 et juillet 2016, l'INPE annonce une destruction au BrĂ©sil de 8 000 km2, soit une augmentation de 29 % par rapport au relevĂ© prĂ©cĂ©dent[33].

Outils d'évaluation au Brésil

L’INPE dispose de deux systùmes de veille :

  1. DETER (« SystĂšme de dĂ©tection de la dĂ©forestation en temps rĂ©el »), qui gĂ©nĂšre une alerte automatique pour tout dĂ©frichement de plus de 3 hectares dĂ©tectĂ© en forĂȘt amazonienne, avec une mise Ă  jour hebdomadaire des donnĂ©es. Le systĂšme est doublĂ© par le systĂšme de « surveillance par satellites de la dĂ©forestation en Amazonie (PRODES) » qui gĂ©nĂšre les taux de dĂ©forestation annuels officiels du BrĂ©sil, calculĂ©s sur SIG via des images en haute rĂ©solution prises par diffĂ©rents satellites.
    Quand le DETER est entrĂ© en service (2004) le taux de dĂ©forestation illĂ©gale a immĂ©diatement chutĂ© (de 80% entre 2004 et 2012), avant de lĂ©gĂšrement remonter (7500 kilomĂštres carrĂ©s de forĂȘt dĂ©frichĂ©es en 2018).
    Le DETER indique que 4200 km2 de forĂȘts ont Ă©tĂ© coupĂ©s en Amazonie brĂ©silienne entre le 1er janvier 2019 (date de l’entrĂ©e en fonction de Bolsonaro), et le 24 juillet, 7 mois plus tard : C’est 50% de plus qu’au cours des 7 premiers mois de 2018, et plus du double de la surface dĂ©boisĂ©e Ă  la mĂȘme pĂ©riode en 2017[34].
  1. PRODES systÚme de « surveillance par satellites de la déforestation en Amazonie (PRODES) » qui génÚre les taux de déforestation annuels officiels du Brésil, calculés sur SIG via des images en haute résolution prises par différents satellites. PRODES est plus précis que DETER mais ne produit son rapport qu'annuellement (en décembre). Pour le début de l'année il semble confirmer la tendance enregistrée par DETER[34].

RĂŽle de Bolsonaro et de son gouvernement

En mai 2019, d'aprĂšs les donnĂ©es satellitales, 739 kilomĂštres carrĂ©s de forĂȘt tropicale ont Ă©tĂ© dĂ©truits, soit le niveau de dĂ©forestation le plus Ă©levĂ© des 10 derniĂšres annĂ©es[35] - [36].

Le prĂ©sident d’extrĂȘme droite, Jair Bolsonaro, est jugĂ© en partie responsable car durant la pĂ©riode Ă©lectorale et aprĂšs son Ă©lection, il a publiquement encouragĂ© l'extension de l'agriculture et l'exploitation miniĂšre, y compris dans les aires protĂ©gĂ©es de l'Amazonie. AprĂšs la publication des chiffres montrant que la dĂ©forestation a en quelques mois Ă  nouveau atteint des niveaux records, Bolsonaro affirme que les donnĂ©es de l'Institut national de recherche spatiale du BrĂ©sil (INPE) ne sont pas fiables, qualifiant mĂȘme ses chiffres de « mensonges » devant des journalistes le 19 juillet, en suggĂ©rant au directeur de l'INPE, Ricardo GalvĂŁo, « d'aller servir une organisation non gouvernementale »[34]. La Coalition pour la science et la sociĂ©tĂ© scientifique, un groupe de scientifiques, indique alors : « Les satellites ne sont pas responsables de la dĂ©forestation - ils enregistrent simplement objectivement ce qui se passe. [
] Les faits scientifiques prĂ©vaudront, que les gens croient en eux ou non »[37] - [38]. Bolsonaro tempĂšre ensuite ses critiques, mais insiste pour que l'INPE (dont toutes les donnĂ©es Ă©taient publiques) consulte Ă  l'avenir le gouvernement avant de publier ses donnĂ©es sur la dĂ©forestation car cette situation nuirait Ă  l'image du BrĂ©sil Ă  l'Ă©tranger[34].

Selon les spĂ©cialistes de l'Amazonie, ce taux de dĂ©forestation est prĂ©occupant, mais il n'est pas surprenant car, d'une part, il confirme de nombreuses informations remontant du terrain, et, d'autre part, car il est une suite logique au « climat d'impunitĂ© promu par la rhĂ©torique de l'administration » ; Bolsonaro critique fortement la rĂ©glementation environnementale et les organismes chargĂ©s de faire respecter l'environnement, qu'il estime trop contraignants pour l'agriculture et le dĂ©veloppement Ă©conomique tels qu'il les souhaite. Parmi ses premiĂšres actions, il a ainsi transfĂ©rĂ© le contrĂŽle des terres autochtones au ministĂšre de l'Agriculture, et il s'est engagĂ© Ă  redĂ©finir les contours des parcs nationaux et des autres aires protĂ©gĂ©es qui, selon lui, freinent le progrĂšs au BrĂ©sil[34]. Marcos Pontes, ministre brĂ©silien de la Science et de la Technologie, membre du parti de Bolsonaro, est un ancien astronaute[34] ; ce sont ses services qui supervise l’institut INPE. Le 22 juillet, Marco Pontes dĂ©clare qu'il tient l'INPE « en haute estime » tout en soutenant les prĂ©occupations de Bolsonaro. Pontes demande un « rapport technique complet » Ă  l'INPE sur les donnĂ©es de dĂ©forestation de juillet 2017 Ă  juillet 2019, affirmant que son ministĂšre avait invitĂ© GalvĂŁo Ă  formuler des « Ă©claircissements et des conseils » dĂšs que possible[34].

En , l'Amazonie est en proie Ă  de gigantesques incendies provoquĂ©s, selon les organisations caritatives, par l'augmentation significative de la dĂ©forestation et du systĂšme agraire forestier, accrus depuis l'arrivĂ©e au pouvoir de Bolsonaro[39]. Le 20 aoĂ»t, l'INPE signale la dĂ©tection de « 39 194 incendies » depuis janvier[40], soit 77 % de plus que sur la mĂȘme pĂ©riode l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente.

En 2020, la pandĂ©mie de Covid-19 a eu un impact considĂ©rable sur la dĂ©forestation de la forĂȘt amazonienne. En effet, l’Ibama, la police environnementale brĂ©silienne, a dĂ» rĂ©duire au minimum ses patrouilles, ce qui a eu pour consĂ©quence une forte hausse des violences au sein de la forĂȘt. On estime que prĂšs de 326 km2 ont Ă©tĂ© rasĂ©s en mars 2020, ce qui reprĂ©sente une hausse de 30 % par rapport au mĂȘme mois de l’annĂ©e derniĂšre. Selon certaines ONG, le gouvernement de Jair Bolsonaro aurait volontairement rĂ©duit les patrouilles au sein de la forĂȘt pour inciter les bĂ»cherons Ă  dĂ©forester[41].

Le rapport de l'INPE publiĂ© en novembre 2021 Ă©value le dĂ©boisement Ă  13 235 km2 entre aoĂ»t 2020 et juillet 2021, en hausse de 22 %. Depuis 3 ans, la dĂ©forestation de l'Amazonie brĂ©silienne a atteint une moyenne annuelle d'environ 10 000 km2, contre quelque 6 500 km2 pendant la dĂ©cennie prĂ©cĂ©dente[42].

Dans Le Monde, en septembre 2022, Marcel Bursztyn, professeur au centre de développement durable de l'Université de Brasilia, qualifie le gouvernement de Jair Bolsonaro d'« écocidaire ». Lors de l'élection présidentielle brésilienne de 2022, Christophe Ventura, spécialiste de l'Amérique latine, qualifie sur France Info le mandat de Jair Bolsonaro de « catastrophique » sur le plan environnemental. Ce point de vue est partagé par l'organisation écologiste Greenpeace[43].

Impact sur les peuples autochtones

Les tribus indigĂšnes de l'Amazonie ont souvent Ă©tĂ© maltraitĂ©es pendant les opĂ©rations de dĂ©forestation de l'Amazonie. Les bĂ»cherons tuent des indigĂšnes et empiĂštent sur leurs terres[44]. De nombreux peuples isolĂ©s sortent de la jungle pour se mĂȘler Ă  la sociĂ©tĂ© en gĂ©nĂ©ral aprĂšs les menaces des Ă©trangers[45]. Les peuples non contactĂ©s qui nouent un premier contact avec des Ă©trangers sont sensibles aux maladies auxquelles ils sont peu immunisĂ©s. Les tribus peuvent facilement ĂȘtre dĂ©cimĂ©es, les dĂ©cĂšs en rĂ©sultant ont Ă©tĂ© comparĂ©s Ă  un gĂ©nocide[46].

La mort de Jorginho Guajajara, un des leaders du groupe de dĂ©fense de l’Amazonie, les « Gardiens de la forĂȘt », survenue en aoĂ»t 2018, paraĂźt suspecte, surtout aprĂšs l'assassinat depuis l'annĂ©e 2000 d'environ 80 indigĂšnes Guajajara[47]. En novembre 2019, Paulo Paulino, autre militant indigĂšne et leader du groupe de dĂ©fense, est tuĂ© lors d’une altercation avec des trafiquants de bois[48].

En 2020, le gouvernement Bolsonaro dĂ©fend un projet de loi visant Ă  autoriser l'exploration miniĂšre sur les terres indigĂšnes, ce qui aurait pour effet de stimuler la dĂ©forestation, selon de nombreuses ONG. Ce texte est qualifiĂ© de « rĂȘve » par Jair Bolsonaro, et de « cauchemar » par des leaders indigĂšnes et des militants Ă©cologistes[49].

En 2021, l'analyse rétrospective de 36 ans d'imagerie satellitale, montre que l'activité miniÚre illicite en territoire autochtone et dans d'autres zones théoriquement protégées par la loi ont encore atteint des niveaux records sous le régime de Jair Bolsonaro, aggravant la déforestation et la pollution par le mercure[50]. Dans la décennie 2010, les incursions miniÚres illégales (orpaillage artisanal principalement) ont quintuplé sur les terres indigÚnes et triplé dans d'autres aires naturelles protégées du pays, confirmant les alertes et rapports de l'Institut national brésilien de recherche spatiale (INPE) émis depuis plusieurs années[50].
Depuis 2019, les groupes autochtones doivent affronter, parfois violemment, un nombre croissant d'orpailleurs et mineurs, et ils demandent plus de protection pour leurs terres[50]. Selon l'anthropologue Glenn Shepard, la situation n'a jamais été pire pour les amérindiens du Brésil depuis la signature de la constitution en 1988, c'est-à-dire depuis la fin de la dictature militaire. Le gouvernement Bolsonaro a sapé les politiques du Brésil qui avant lui était reconnu comme leader en termes de soutenabilité, notamment pour le travail de l'ancien président Luiz Inåcio « Lula » da Silva et de son Parti des travailleurs qui avaient réussi à freiner la déforestation de plus de 80 % dans le pays entre 2004 et 2012[50].

Avenir de la forĂȘt amazonienne

En se basant sur les taux de dĂ©forestation de 2005, on a estimĂ© que la taille de la forĂȘt amazonienne serait rĂ©duite de 40 % en 20 ans[51]. Le taux de dĂ©forestation ralentit : les taux de dĂ©forestation en 2012 Ă©taient les plus bas jamais enregistrĂ©s. Cependant, la forĂȘt est toujours en train de rapetisser[52] - [53].

Le premier ministre norvĂ©gien Jens Stoltenberg annonça le 16 septembre 2008 que le gouvernement norvĂ©gien allait donner 1 milliard de dollars au fonds amazonien nouvellement crĂ©Ă©. Cet argent est destinĂ© Ă  des projets qui visent Ă  ralentir la dĂ©forestation de la forĂȘt amazonienne[54].

En septembre 2015, la prĂ©sidente brĂ©silienne Dilma Rousseff dĂ©clara aux Nations unies que le BrĂ©sil avait rĂ©ussi Ă  rĂ©duire le taux de dĂ©forestation en Amazonie de 82 %. Elle annonça aussi que le BrĂ©sil avait pour objectif pour les 15 prochaines annĂ©es d'Ă©liminer la dĂ©forestation illĂ©gale, restaurer et reboiser 120 000 km2 de terres et rĂ©cupĂ©rer 150 000 km2 de terres dĂ©tĂ©riorĂ©es[55].

En aoĂ»t 2017, le prĂ©sident brĂ©silien Michel Temer signe un dĂ©cret autorisant l'exploitation par des sociĂ©tĂ©s privĂ©es d'une rĂ©serve naturelle amazonienne de 47 000 km2 plus grande que la Suisse, la rĂ©serve de Renca crĂ©Ă©e en 1984 Ă  cheval entre les États de ParĂĄ et AmapĂĄ [56] Ce dĂ©cret sera finalement annulĂ© en septembre 2017[57]. - [58]

En janvier 2019, premier mois de prĂ©sidence de Jair Bolsonaro, la dĂ©forestation en Amazonie a augmentĂ© de 54%[59]. La combinaison du rĂ©chauffement climatique et de la dĂ©forestation assĂšche le climat rĂ©gional et pourrait transformer une grande partie de la forĂȘt pluviale en une savane[60].

Selon les donnĂ©es de l'Institut de recherche spatiale (INPE), plus de 280 kmÂČ ont Ă©tĂ© dĂ©boisĂ©s en Amazonie en janvier 2020. Ce chiffre a Ă©tĂ© augmentĂ© de plus de 108% par rapport Ă  janvier 2019. Depuis plusieurs annĂ©es, cette surface est la plus grande superficie de destruction connue au sein de la forĂȘt amazonienne. Ces chiffres sont issus du systĂšme DETER, obtenus grĂące Ă  des images satellites faites par l'INPE.

De plus, par les effets de la pandĂ©mie du COVID-19, certains Ă©cologistes craignent que la protection de la forĂȘt soit dĂ©laissĂ©e pour lutter contre le virus. Ceci aurait donc une consĂ©quence encore plus importante sur la superficie restante de la forĂȘt, qui diminue de jour en jour[61].

Dans la culture populaire

On peut voir certains effets de la dĂ©forestation amazonienne dans le film britannique La ForĂȘt d'Ă©meraude (1985) de John Boorman.

La cause de la lutte contre la déforestation et la protection des peuples indigÚnes a été popularisée à la fin des années 1980 notamment par le chanteur Sting et le chef Raoni. C'est un des thÚmes majeurs de la chanson et du clip d'Earth Song de Michael Jackson (1995).

Articles connexes

Bibliographie

Références

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Liens externes

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