Bromométhane
Le bromométhane ou bromure de méthyle est un composé chimique organique halogéné dont la formule chimique est la suivante : CH3Br. Il fait partie des Halogénures de méthyle (halocarbures).
Bromométhane | |
Identification | |
---|---|
Synonymes |
Bromure de méthyle |
No CAS | |
No ECHA | 100.000.740 |
No CE | 200-813-2 |
PubChem | 6323 |
ChEBI | 39275 |
SMILES | |
InChI | |
Apparence | gaz comprimé liquéfié, incolore et inodore[1]. |
Propriétés chimiques | |
Formule | CH3Br [IsomĂšres] |
Masse molaire[2] | 94,939 ± 0,002 g/mol C 12,65 %, H 3,19 %, Br 84,16 %, |
Moment dipolaire | 1,820 3 ± 0,000 4 D [3] |
Propriétés physiques | |
T° fusion | â93,66 °C [4] |
T° ébullition | 3,56 °C [4] |
Solubilité | dans l'eau à 20 °C : 1.5 ml/100 ml[1] |
ParamÚtre de solubilité Ύ | 19,6 MPa1/2 (25 °C)[5] |
Masse volumique | 3,973 9 g·cm-3 (0 °C,1 013 mbar) [4]
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T° d'auto-inflammation | 537 °C[1] |
Point dâĂ©clair | < 194 °C [4] |
Limites dâexplosivitĂ© dans lâair | 8,6â20 %vol [4] |
Pression de vapeur saturante | 1,89 bar à 20 °C 2,6 bar à 30 °C 4,9 bar à 50 °C [4] |
Point critique | (194 °C), 52,3 bar, 0,577 kg·l-1 [4] |
Point triple | (â93,7 °C), 0,002 bar [4] |
Thermochimie | |
S0liquide, 1 bar | 155,14 J·K-1·mol-1 [7] |
ÎfH0gaz | â34,3 kJ·mol-1 [7] |
ÎfH0liquide | â60,6 kJ·mol-1 [7] |
ÎfusH° | 6,0 kJ·mol-1 Ă â93,65 °C [7] |
ÎvapH° | 23,24 kJ·mol-1 [7] |
Cp | 114,6 J·K-1·mol-1 (liquide,9,85 °C) [7]
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Propriétés électroniques | |
1re énergie d'ionisation | 10,541 ± 0,003 eV (gaz)[9] |
Précautions | |
SGH[10] | |
Danger |
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SIMDUT[11] | |
A, D1A, D2B, E, |
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NFPA 704 | |
Transport[4] | |
Classification du CIRC | |
Groupe 3 : Inclassable quant à sa cancérogénicité pour l'Homme[12] | |
Ingestion | |
Autre | dĂ©pression du systĂšme nerveux central. Dommages au foie et aux reins. ArrĂȘt respiratoire. |
Ăcotoxicologie | |
LogP | 1,19 [1] |
Seuil de lâodorat | bas : 20 ppm haut : 1 000 ppm[13] |
Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire. | |
C'est un gaz toxique et trÚs écotoxique, sans couleur et ininflammable sans odeur distinctive. Ses propriétés chimiques sont tout à fait semblables à celle du chlorométhane.
C'est un pesticide (insecticide), de la famille des biocides. Il fait partie des gaz rĂ©frigĂ©rants. Le bromomĂ©thane est commercialisĂ© sous diffĂ©rents noms, dont les plus connus sont lâembafume et le terabol. Il est aussi connu sous l'appellation R40B1.
Puisque c'est à la fois un gaz à effet de serre (puissant) et l'un des gaz qui détruisent la couche d'ozone qui protÚge la Terre d'un excÚs de rayonnement ultraviolet, il est prévu de l'interdire depuis longtemps, mais seuls certains pays ont appliqué cette interdiction, la France depuis 2005 (avec des dérogations pour certains usages) et l'Union européenne depuis 2011.
Lors de la TrentiĂšme RĂ©union des Parties au Protocole de MontrĂ©al relatif Ă des substances qui appauvrissent la couche d'ozone, se dĂ©roulant Ă Quito, capitale de l'Ăquateur, le Canada, l'Australie, l'Argentine et l'Afrique du Sud obtinrent Ă©galement des dĂ©rogations pour l'utilisation de bromure de mĂ©thyle pour 2019 et 2020[14]
Origine
Le bromomĂ©thane existe en petite quantitĂ© dans la nature oĂč il se forme naturellement dans lâocĂ©an, synthĂ©tisĂ© par le phytoplancton (et le varech ?).
Quand il est biogĂ©nique (d'origine naturelle, produit par le vivant), il joue dans la nature un rĂŽle encore incompris. Il pourrait peut ĂȘtre impliquĂ© dans le rĂ©trocontrĂŽle du climat (car si son temps de sĂ©jour dans l'atmosphĂšre est court (environ 1 an[15]), c'est un puissant gaz Ă effet de serre[15] et il inhibe la production d'ozone stratosphĂ©rique[15].
Lors d'une expérience récente de géoingénierie visant à augmenter les capacités de puits de carbone marin par fertilisation de l'océan en fer à moyenne échelle (surface de moins de 1 000 km2), il a été constaté un effet adverse : une production accrue de bromométhane océanique[15].
Il provient Ă©galement de certaines plantes terrestres, notamment celles de la famille des brassica.
Industriellement, en tant que biocide, il est fabriquĂ© par rĂ©action du mĂ©thanol avec lâacide bromhydrique.
Utilisations
Jusqu'à ce que sa production et son usage aient été réduits ou proscrits par le protocole de Montréal (signé en 1987, mais encore incomplÚtement respecté), il était couramment et massivement employé comme agent de stérilisation des sols, principalement pour la production de semences mais également pour certaines cultures maraßchÚres comme les fraises.
Le bromomĂ©thane a Ă©tĂ© Ă©galement utilisĂ© comme fumigant d'usage universel pour Ă©liminer une grande variĂ©tĂ© de nuisibles, des rats aux insectes, en passant par les champignons microscopiques. Il l'est encore pour certains usages (dĂ©sinfection de bois importĂ©s). Il sert Ă©galement de prĂ©curseur pour la fabrication d'autres produits chimiques, et il a Ă©tĂ© utilisĂ© comme solvant pour lâextraction des huiles Ă partir des graines et comme dĂ©graissant de la laine.
Lorsque le protocole de MontrĂ©al a sĂ©vĂšrement restreint l'utilisation du bromomĂ©thane au niveau international, certains pays, dont les Ătats-Unis ont incitĂ© Ă des dĂ©rogations pour lâemploi du produit en usage contrĂŽlĂ©. En 2004, la derniĂšre annĂ©e pour laquelle les donnĂ©es sont disponibles, plus de 3 000 tonnes de bromomĂ©thane ont ainsi Ă©tĂ© pulvĂ©risĂ©es dans les champs californiens.
En 2017, prĂšs de 10 000 tonnes de bromure de mĂ©thyle avaient Ă©tĂ© utilisĂ©es pour la quarantaine et les traitements prĂ©alables Ă lâexpĂ©dition et ce chiffre Ă©tait en hausse. Au cours des dix derniĂšres annĂ©es, la quantitĂ© de bromure de mĂ©thyle utilisĂ©e pour la quarantaine et les traitements prĂ©alables Ă lâexpĂ©dition avait plus que doublĂ© dans certaines pays, en raison peut-ĂȘtre dâune intensification des Ă©changes commerciaux, des dangers posĂ©s par les ravageurs de quarantaine, et/ou dâune classification abusive de certaines utilisations comme utilisations pour la quarantaine et les traitements prĂ©alables Ă lâexpĂ©dition. Ces derniĂšres Ă©taient la principale composante des Ă©missions globales, reprĂ©sentant approximativement 7 500 tonnes par an. Le bromure de mĂ©thyle utilisĂ© pour la quarantaine et les traitements prĂ©alables Ă lâexpĂ©dition Ă©tait hautement volatil (jusquâĂ 95 % du bromure de mĂ©thyle ainsi utilisĂ© pourrait ĂȘtre rejetĂ© directement dans lâatmosphĂšre aprĂšs la fumigation). Les avancĂ©es dans les techniques de rĂ©cupĂ©ration et de destruction pourraient, toutefois, rĂ©duire sensiblement les Ă©missions[16].
Le bromométhane était autrefois utilisé dans les extincteurs spéciaux, avant l'avÚnement des halons moins toxiques, car il est électriquement non conducteur et ne laisse aucun résidu. Il était principalement utilisé pour les sous-stations électriques, les avions militaires et contre certains risques industriels. Il n'a jamais été aussi populaire que d'autres agents en raison de son coût élevé et de sa toxicité. Le bromométhane a été utilisé des années 1920 aux années 1960. En France, le décret n° 59-449 du interdit à compter du , la fabrication, la détention, le remplissage, la cession à titre onéreux ou gratuit des extincteurs d'incendie chargés en bromure de méthyle ou en tétrachlorure de carbone[17].
Destruction de la couche dâozone
Le bromomĂ©thane est sur la liste des substances interdites par le protocole de MontrĂ©al Ă cause des risques de destruction de la couche dâozone. Puisque le brome est 60 fois plus nocif que le chlore, mĂȘme une faible quantitĂ© de bromomĂ©thane suffit Ă causer des dommages considĂ©rables Ă la couche d'ozone. En 2005 et 2006, cependant, on lui a accordĂ© une dĂ©rogation pour un usage contrĂŽlĂ© dans le cadre du protocole de MontrĂ©al.
Controverses
Le protocole de MontrĂ©al stipule que l'usage du bromomĂ©thane doit ĂȘtre interdit, mais ce produit prĂ©sentait de nombreux avantages notamment pour le traitement des bois, sols, grains et semences, et pour certains usages, il n'y a pas de produits de substitution disponible au mĂȘme coĂ»t ou aussi pratique. Le bromomĂ©thane est utilisĂ© aux Ătats-Unis pour prĂ©parer les terrains de golf et le gazon des surfaces utilisĂ©es pour diffĂ©rentes compĂ©titions sportives, en particulier pour l'entretien de gazons de Cynodon dactylon. L'administration de George W. Bush a adoptĂ© des dĂ©rogations pour empĂȘcher la dĂ©sorganisation des marchĂ©s.
Une évaluation des risques a été mise à jour en 2010 par l'EFSA[18]
Effets sur la santé
Sâil est inhalĂ© Ă une concentration Ă©levĂ©e pendant une pĂ©riode courte, il provoque des maux de tĂȘte, des vertiges, des nausĂ©es, des vomissements des malaises. Ces symptĂŽmes peuvent ĂȘtre suivis de signes d'excitation nerveuse, convulsions et mĂȘme de troubles psychiques aigus Ă type dâagitation maniaque. Lâinhalation prolongĂ©e Ă des concentrations plus faibles peut causer une irritation bronchique et des troubles pulmonaires.
Le liquide brûle la peau, provoque des démangeaisons et un érythÚme, puis des phlyctÚnes plusieurs heures aprÚs contact. Le liquide et le gaz provoquent des brûlures oculaires sévÚres.
Les niveaux d'exposition pouvant provoquer la mort varient de 1 600 à 60 000 ppm, suivant la durée de l'exposition.
Les atteintes respiratoires, rĂ©nales, et neurologiques concernent davantage de personnes. Aucun cas dâeffets graves Ă long terme sur le systĂšme nerveux n'a Ă©tĂ© notĂ© chez lâhomme Ă la suite dâune exposition Ă des niveaux faibles, mais des Ă©tudes sur les lapins et les singes ont montrĂ© des lĂ©sions qualifiĂ©es de modĂ©rĂ©es Ă graves.
Production et dégradation
Les sources de production du CH3Br comprennent la production ocĂ©anique, les Ă©missions des plantes et des marais, la combustion de la biomasse, la fumigation des sols, et les gaz dâĂ©chappement des vĂ©hicules fonctionnant au carburant plombĂ©, ainsi que lâindustrie, la production de biens de consommation durable et de denrĂ©es pĂ©rissables. Sa production industrielle dĂ©cline, mais n'a pas Ă©tĂ© stoppĂ©e, y compris en France[19]
La dégradation du polluant se fait par décomposition photochimique dans l'atmosphÚre (réaction avec le radical chimique hydroxyle(OH)) et par oxydation[20] (qui donne comme produits secondaires BrC(O)CH3 et BrC(O)H), ou par photodécomposition à des altitudes plus élevées.
Ă ces moyens dâĂ©limination il faut ajouter les pertes (adsorption, dĂ©gradation) dans les sols, la dĂ©gradation chimique et biologique dans l'ocĂ©an, et un certain recyclage par les plantes vertes.
Alternatives
Pour de nombreux usages (ex : traitement du bois, fumigation du sol avant plantation[21]), il n'existe aucune alternative aussi facile Ă mettre en Ćuvre (ou alors, avec un risque toxique plus important, si l'on utilise par exemple comme alternative la chloropicrine utilisĂ©e durant la PremiĂšre Guerre mondiale comme gaz de combat et comme gaz pour tuer les animaux dans leurs terriers, ou le dazomet...)
- Des traitements thermiques sont utilisables pour dĂ©sinfecter les sols de serre (hormis contre les vitres) ou de poulailler (avec le mĂȘme matĂ©riel que pour le dĂ©sherbage thermique Ă©ventuellement)
- Lutte intégrée ; par exemple selon l'Anses[22], pour l'agriculture, l'agriculteur peut associer
- lâexamen attentif des parcelles de multiplication,
- la culture de variétés à haut niveau de résistance,
- la production de semences sur des parcelles indemnes,
- lâĂ©chantillonnage et analyse des lots de semences,
- lâĂ©limination des dĂ©bris vĂ©gĂ©taux associĂ©s aux semences,
- des pratiques culturales limitant les risques de pullulation d'un pathogĂšne (rotations, etc.).
Notes et références
- BROMURE DE METHYLE, Fiches internationales de sécurité chimique
- Masse molaire calculĂ©e dâaprĂšs « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
- (en) David R. Lide, Handbook of chemistry and physics, Boca Raton, CRC, , 89e Ă©d., 2736 p. (ISBN 978-1-4200-6679-1 et 1-4200-6679-X), p. 9-50
- Entrée « Bromomethane » dans la base de données de produits chimiques GESTIS de la IFA (organisme allemand responsable de la sécurité et de la santé au travail) (allemand, anglais), accÚs le 19 février 2009 (JavaScript nécessaire)
- (en) James E. Mark, Physical Properties of Polymer Handbook, Springer, , 2e éd., 1076 p. (ISBN 978-0-387-69002-5 et 0-387-69002-6, présentation en ligne), p. 294
- (en) Robert H. Perry et Donald W. Green, Perry's Chemical Engineers' Handbook, USA, McGraw-Hill, , 7e Ă©d., 2400 p. (ISBN 0-07-049841-5), p. 2-50
- (en) « Methyl bromide », sur NIST/WebBook, consulté le
- (en) Carl L. Yaws, Handbook of Thermodynamic Diagrams, vol. 1, 2 et 3, Huston, Texas, Gulf Pub. Co., (ISBN 0-88415-857-8, 0-88415-858-6 et 0-88415-859-4)
- (en) David R. Lide, Handbook of chemistry and physics, Boca Raton, CRC, , 89e Ă©d., 2736 p. (ISBN 978-1-4200-6679-1), p. 10-205
- Numéro index rÚglement CE N° 1272/2008 (16 décembre 2008) dans le tableau 3.1 de l'annexe VI du
- « Bromométhane » dans la base de données de produits chimiques Reptox de la CSST (organisme québécois responsable de la sécurité et de la santé au travail), consulté le 25 avril 2009
- IARC Working Group on the Evaluation of Carcinogenic Risks to Humans, « Ăvaluations globales de la cancĂ©rogĂ©nicitĂ© pour l'Homme, Groupe 3 : Inclassables quant Ă leur cancĂ©rogĂ©nicitĂ© pour l'Homme », sur http://monographs.iarc.fr, CIRC, (consultĂ© le )
- « Methyl bromide », sur hazmap.nlm.nih.gov (consulté le )
- Programme des Nations Unies pour l'environnement, Rapport de la trentiÚme Réunion des Parties au Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone, Décision XXX/9: Dérogations pour utilisations critiques de bromure de méthyle pour 2019 et 2020.
- Fertilisation des océans : atténuation des impacts environnementaux de la recherche scientifique ; Secrétariat canadien de consultation scientifique Avis scientifique 2010/012 (version publiée en avril 2010 et mise à jour: juin 2010, consultée 2013-09-17) ; voir page 9/15 du PDF
- Rapport de la trentiÚme Réunion des Parties au Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone, UNEP/Ozl.Pro.30/11, Annexe VI, au paragraphe 74.
- « interdiction des extincteurs d'incendie chargés en bromure de méthyle », sur legifrance (consulté le )
- EFSA 12/01/11 <Peer Review of the pesticide risk assessment of the active substance methyl bromide
- |http://www.ifen.fr/uploads/media/couche_ozone_01.pdf Données actuelles et prospectives de production pour la France]
- Atmospheric Oxidation Mechanism of Bromoethane
- Duniway, J. M. (2002). Status of chemical alternatives to methyl bromide for pre-plant fumigation of soil. Phytopathology, 92(12), 1337-1343.
- Anses (2013) Analyse de risque phytosanitaire Ditylenchus dipsaci sur luzerne Avis de lâAnses Rapport dâexpertise collective, avril 2013, PDF, 146 pages
Liens externes
- (fr) Fiche toxicologique de l'INRS (version 2007)
- (fr) Fiche canadienne sur la Lutte antiparasitaire durable et intégrée suppression du bromure de méthyle (PDF, 41p)
- MSDS : Hazardous Chemical Database
- ChemSub Online (Bromométhane).