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Borohydrure

Le terme borohydrure dĂ©signe aussi bien l'anion BH4− que ses sels. Il peut Ă©galement servir pour dĂ©signer des composĂ©s du type BH4–nXn−, comme pour le cyanoborohydrure de sodium Na+BH3CN− et le triĂ©thylborohydrure de lithium Li+(CH3CH2)3BH−.

Les borohydrures sont trĂšs utilisĂ©s comme rĂ©ducteurs en synthĂšse organique. Ils peuvent Ă©galement prĂ©senter un intĂ©rĂȘt acadĂ©mique et industriel en chimie minĂ©rale[1]. Le borohydrure de lithium LiBH4 et le borohydrure de sodium NaBH4 sont les plus importants, mais d'autres borohydrures sont Ă©galement bien connus[2].

Histoire

Les borohydrures de métaux alcalins ont été décrits pour la premiÚre fois en 1940 par Hermann Irving Schlesinger et Herbert C. Brown. Ils avaient obtenu du borohydrure de lithium à partir de diborane B2H6 :

2 MH + B2H6 ⟶ 2 M[BH4] (M = Li, Na, K, etc.).

Ils poursuivirent leurs travaux dans les années 1940 en vue de produire des dérivés volatils de l'uranium avant l'utilisation de l'hexafluorure d'uranium UF6, et obtirent ainsi du borohydrure d'uranium(IV) U(BH4)4 et des dérivés méthylés U(BH4)3BH3CH3 et U(BH3CH3)4, qui s'avérÚrent particuliÚrement volatils[3].

Les méthodes de production contemporaines font intervenir la réduction du borate de triméthyle B(OCH3)3 avec de l'hydrure de sodium NaH[2].

Structure

L'anion borohydrure prĂ©sente une gĂ©omĂ©trie tĂ©traĂ©drique qu'il conserve dans la plupart des composĂ©s qui l'incorporent[4]. La rĂ©activitĂ© des liaisons B–H dĂ©pend des autres ligands. Les groupes donneurs d'Ă©lectrons comme le groupe Ă©thyle –CH2CH3 rendent l'anion borohydrure trĂšs nuclĂ©ophile, comme dans les triĂ©thylborohydrures, qui contiennent l'anion (CH3CH2)3BH−. A contrario, l'anion cyanoborohydrure BH3CN− est un rĂ©ducteur plus faible en raison de la nature acceptrice d'Ă©lectrons du substituant cyano –C≡N. Le contre-ion influence Ă©galement le pouvoir rĂ©ducteur du rĂ©actif.

Quelques propriétés de différents sels de borohydrure
Borohydrure
[no CAS]
M. mol.
(g/mol)
Masse vol.
(g/cm3)
Point de fusion
(°C)
Sol. dans H2O
(g/100 mL à 25 °C)
Sol. dans MeOH
(g/100 mL à 25 °C)
Sol. dans Et2O
(g/100 mL à 25 °C)
Sol. dans THF
(g/100 mL à 25 °C)
LiBH4
[16949-15-8]
21,78 0,66 280 20,9 DĂ©comp. (44 dans EtOH) 4,3 22,5
NaBH4
[16940-66-2]
37,83 1,07 505 55 16,4 (à 20 °C) Insoluble 0,1 (à 20 °C)
NaBH3CN
[25895-60-7]
62,84 1,20 240 avec décomp. Toléré[5] 217 Insoluble 36
KBH4
[13762-51-1]
53,94 1,17 585 (sous H2) 19 Insoluble Insoluble Insoluble
LiBHEt3
[22560-16-3]
105,94 — — Insoluble Insoluble N/A ÉlevĂ©e

Applications

Le borohydrure de sodium est le principal borohydrure produit industriellement, notamment pour réduire le dioxyde de soufre SO2 en dithionite de sodium Na2S2SO4 :

NaBH4 + 8 NaOH + 8 SO2 ⟶ 4 Na2S2SO4 + NaBO2 + 6 H2O.

Le dithionite est utilisé pour blanchir la pùte de bois[2]. Le borohydrure de sodium est également utilisé pour réduire les aldéhydes et les cétones dans la fabrication de produits pharmaceutiques, notamment le chloramphénicol, le thiamphénicol, la vitamine A, l'atropine et la scopolamine, ainsi que de nombreux parfums et arÎmes.

En raison de leur teneur Ă©levĂ©e en hydrogĂšne, les complexes et les sels de borohydrure ont Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©s pour de possibles applications de stockage de l'hydrogĂšne[6]. Comme cela avait Ă©tĂ© mis en Ă©vidence lors de travaux connexes sur le borazane BH3NH3, les difficultĂ©s liĂ©es Ă  la mise en Ɠuvre de ces technologies avaient trait Ă  la cinĂ©tique lente des rĂ©actions, les rendements en hydrogĂšne faibles et des difficultĂ©s de rĂ©gĂ©nĂ©ration des borohydrures initiaux.

Complexes

ModĂšle tridimensionnel du complexe Zr(BH4)4.

Dans ses complexes, l'ion borohydrure est liĂ© Ă  l'ion mĂ©tallique par l'intermĂ©diaire de un Ă  trois atomes d'hydrogĂšne pontants[1] - [7] - [8]. Dans la plupart de ces complexes, l'ion BH4− est bidentĂ©. Certains complexes homoleptiques de borohydrures sont volatils, comme le borohydrure d'uranium U(BH4)4[3].

Les complexes métalliques de borohydrure par simple élimination du sel[9] :

TiCl4 + 4 LiBH4 + Et2O (solvant) ⟶ Ti(BH4)4(Et2O) + 4 LiCl.

Certains borohydrures mĂ©talliques donnent des borures mĂ©talliques sous l'effet de la chaleur. Lorsque le complexe de borohydrure est volatil, cette dĂ©composition est Ă  la base du dĂ©pĂŽt chimique en phase vapeur (CVD) de couches minces de borures mĂ©talliques[10]. Par exemple, le diborure de zirconium ZrB2 et le diborure d'hafnium HfB2, deux cĂ©ramiques ultrarĂ©fractaires, peuvent ĂȘtre obtenus par dĂ©pĂŽt en phase vapeur de borohydrure de zirconium(IV) Zr(BH4)4 et de borohydrure d'hafnium Hf(BH4)4[10] :

M(BH4)4 ⟶ MB2 + B2H6 + 5 H2, oĂč M = Zr, Hf.

Ces diborures mĂ©talliques sont utilisĂ©s comme revĂȘtements en raison de leur trĂšs grande duretĂ© et des valeurs Ă©levĂ©es de leur point de fusion, de leur rĂ©sistance mĂ©canique, de leur rĂ©sistance Ă  l'usure et Ă  la corrosion, et de leur conductivitĂ© Ă©lectrique[10].

Notes et références

  1. (en) Viktor D. Makhaev, « Structural and dynamic properties of tetrahydroborate complexes », Russian Chemical Reviews, vol. 69, no 9,‎ , p. 727 (DOI 10.1070/RC2000v069n09ABEH000580, lire en ligne)
  2. (en) Ulrich Wietelmann, Michael Felderhoff et Peter Rittmeyer, « Hydrides », Ullmann's Encyclopedia of Industrial Chemistry,‎ (DOI 10.1002/14356007.a13_199.pub2, lire en ligne)
  3. (en) H. I. Schlesinger, Herbert C. Brown, B. Abraham, A. C. Bond, Norman Davidson, A. E. Finholt, James R. Gilbreath, Henry Hoekstra, Leo Horvitz, Earl K. Hyde, J. J. Katz, J. Knight, R. A. Lad, Darwin L. Mayfield, Louis Rapp, D. M. Ritter, Anthony M. Schwartz, Irving Sheft, L. D. Tuck et A. O. Walker, « New Developments in the Chemistry of Diborane and the Borohydrides. I. General Summary », Journal of the American Chemical Society, vol. 75, no 1,‎ , p. 186-190 (DOI 10.1021/ja01097a049, lire en ligne)
  4. (en) Norman N. Greenwood et Alan Earnshaw, Chemistry of the Elements, 2e Ă©d., Butterworth-Heinemann, 1997. (ISBN 978-0-08-037941-8)
  5. Robert O. Hutchins, MaryGail K. Hutchins et Matthew L. Crawley, « Encyclopedia of Reagents for Organic Synthesis, 8 Volume Set », dans Robert O. Hutchins, MaryGail K. Hutchins, Matthew L. Crawley, Encyclopedia of Reagents for Organic Synthesis, (ISBN 978-0471936237, DOI 10.1002/047084289X.rs059.pub2), « Sodium Cyanoborohydride »
  6. (en) Tomasz JaroƄ, Wojciech Wegner et Wojciech Grochala, « M[Y(BH4)4] and M2Li[Y(BH4)6−xClx] (M = Rb, Cs): new borohydride derivatives of yttrium and their hydrogen storage properties », Dalton Transactions, vol. 42, no 19,‎ , p. 6886-6893 (PMID 23503711, DOI 10.1039/C3DT33048F, lire en ligne)
  7. (en) Tobin J. Marks et John R. Kolb, « Covalent transition metal, lanthanide, and actinide tetrahydroborate complexes », Chemical Reviews, vol. 77, no 2,‎ , p. 263-293 (DOI 10.1021/cr60306a004, lire en ligne)
  8. (en) Maria Besora et AgustĂ­ LledĂłs, « Coordination Modes and Hydride Exchange Dynamics in Transition Metal Tetrahydroborate Complexes », Contemporary Metal Boron Chemistry I,‎ , p. 149-202 (ISBN 978-3-540-78633-7, DOI 10.1007/430_2007_076, lire en ligne)
  9. (de) K. Franz, H. Fusstetter et H. Nöth, « Metallboranate und Boranatometallate. IX [1]; Äther‐Addukte von Tris(boranato)‐titan(III) und dimere Alkoxy‐bis(boranato)‐titan(III)‐Verbindungen », Zeitschrift fĂŒr anorganische und allgemeine Chemie, vol. 472, no 2,‎ , p. 97-113 (DOI 10.1002/zaac.654270202, lire en ligne)
  10. (en) James A. Jensen, John E. Gozum, Deborah M. Pollina, and Gregory S. Girolami, « Titanium, zirconium, and hafnium tetrahydroborates as "tailored" CVD precursors for metal diboride thin films », Journal of the American Chemical Society, vol. 110, no 5,‎ , p. 1643-1644 (DOI 10.1021/ja00213a058, lire en ligne)
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