AccueilđŸ‡«đŸ‡·Chercher

SĂ©minaire des nobles de Madrid

Le SĂ©minaire des nobles de Madrid est un ancien Ă©tablissement d’enseignement fondĂ© en 1725 Ă  l’instigation du roi Philippe V et spĂ©cifiquement destinĂ© Ă  la noblesse.

SĂ©minaire des nobles de Madrid
Seminario de Nobles
de Madrid
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Le SĂ©minaire des nobles sur une gravure de 1860.
Histoire et statut
Fondation
Type Réservé à la noblesse
Administration
Proviseur Jorge Juan (1770-1773) ;
Antonio Angosto RodrĂ­guez
Études
Population scolaire 361 Ă©lĂšves entre 1727 et 1752
Formation GĂ©nĂ©rale, prĂ©paration Ă  la fonction publique (essentiellement dans l’armĂ©e) ;
Académie militaire à partir de 1770
Langues Espagnol, latin, grec ancien, français, anglais, hébreu
Localisation
Ville Madrid
Pays Drapeau de l'Espagne Espagne
CoordonnĂ©es 40° 25â€Č 44″ nord, 3° 42â€Č 52″ ouest
GĂ©olocalisation sur la carte : Madrid
(Voir situation sur carte : Madrid)
SĂ©minaire des nobles de Madrid

PlacĂ© sous la tutelle des jĂ©suites, le SĂ©minaire — terme Ă  ne pas prendre au sens habituel d’institution de formation de prĂȘtres catholiques — Ă©tait d’abord associĂ© au CollĂšge impĂ©rial, sous l’autoritĂ© d’un mĂȘme recteur, avant d’ĂȘtre transfĂ©rĂ© Ă  un bĂątiment d’aspect austĂšre fraĂźchement construit et situĂ© plus au nord dans Madrid. La crĂ©ation de l’établissement rĂ©pondait au souci de la monarchie Ă©clairĂ©e espagnole Ă  l’endroit de l’éducation de la noblesse, souci qui se concrĂ©tisa tout au long du XVIIIe siĂšcle par la crĂ©ation de plusieurs Ă©coles semblables, la plus importante restant celle de Madrid.

L’objectif du SĂ©minaire Ă©tait, ainsi qu’il appert de ses statuts de 1730, de « prĂ©munir [la jeune noblesse] contre les risques de la libertĂ©, de l’oisivetĂ© et des plaisirs », de soustraire les enfants des grandes familles Ă  un dĂ©lĂ©tĂšre « dĂ©sƓuvrement », et de promouvoir « une noblesse que ne fasse pas usage de ses richesses et prĂ©Ă©minences autrement que pour se rendre utile au reste du peuple ». La fondation de l’établissement, s’intĂ©grant dans une politique rĂ©formiste gĂ©nĂ©rale, dont l’enseignement n’était qu’un des aspects, Ă©tait sous-tendue par une volontĂ© politique, conforme Ă  l’idĂ©al des LumiĂšres, non de lutte contre la noblesse, mais de rĂ©gĂ©nĂ©ration de celle-ci, se traduisant en l’espĂšce et notamment par une amĂ©lioration de la formation Ă  la carriĂšre militaire. Pour rĂ©aliser ce dessein, l’on s’attacha Ă  attirer au SĂ©minaire les aĂźnĂ©s des grandes familles nobles pour leur procurer une formation adaptĂ©e aux emplois les plus Ă©levĂ©s de l’État auxquels leur lignage les dĂ©signait, et par lĂ  de mieux former les Ă©lites dont la monarchie avait besoin. Le pouvoir eut soin d’obtenir l’homologation des enseignements du SĂ©minaire par les universitĂ©s.

On peut distinguer deux grandes pĂ©riodes dans l’histoire du SĂ©minaire, sĂ©parĂ©es par la cĂ©sure que reprĂ©sente l’expulsion des JĂ©suites hors d’Espagne en 1767. La rĂ©ouverture de l’établissement en 1770 marque le dĂ©but d’un processus de militarisation, que renforça encore l’incorporation d’élĂšves provenant d’autres Ă©coles liĂ©es aux forces armĂ©es (notamment les cadets de l’acadĂ©mie militaire d’Ocaña), processus qui porta l’institution, par un nouveau plan de cours adoptĂ© en 1786 (et aussi par la nomination Ă  sa tĂȘte de l’officier de marine et mathĂ©maticien Jorge Juan), Ă  Ă©voluer vers une Ă©ducation plus laĂŻque, plus centrĂ©e sur les matiĂšres Ă  caractĂšre scientifique et technique, en phase avec le mouvement d’idĂ©es en cours dans les Sociedades econĂłmicas de amigos del paĂ­s et mieux en accord avec les dĂ©bouchĂ©s professionnels majoritairement militaires des sĂ©minaristes. Outre sur la carriĂšre des armes, les Ă©tudes au SĂ©minaire dĂ©bouchaient sur la carriĂšre ecclĂ©siastique, sur un poste dans l’administration ou sur un emploi au Palais royal, souvent une place d’écuyer du roi.

Nonobstant la prĂ©sence de plusieurs rejetons de la noblesse titrĂ©e, ancienne ou rĂ©cente, le groupe prĂ©dominant dans la clientĂšle Ă©tudiante du SĂ©minaire, avec un peu plus de 80 % des effectifs, Ă©tait formĂ© d’élĂšves issus des strates moyennes et infĂ©rieures de la noblesse, — soit implantĂ©es dans l’administration de l’État ou dans l’armĂ©e, soit composant le monde hĂ©tĂ©roclite de la noblesse provinciale, essentiellement basque —, puis aussi d’élĂ©ments venus des colonies amĂ©ricaines, dont notoirement le futur libertador San MartĂ­n. La bourgeoisie, dĂ©sireuse d’ascension sociale, qui avait le plus Ă  gagner Ă  l’inscription de ses fils dans la SĂ©minaire, y fut progressivement admise, alors qu’auparavant, une attestation rigoureuse de noblesse Ă©tait requise. Il semble cependant que la frĂ©quentation du SĂ©minaire n’ait eu qu’une faible incidence sur le futur parcours professionnel des sĂ©minaristes, attendu que tout au long du XVIIIe siĂšcle le critĂšre principal dans la carriĂšre militaire demeura l’anciennetĂ©, critĂšre inflĂ©chi seulement par un mĂ©rite exceptionnel en temps de guerre, par une forte influence Ă  la Cour, ou encore par la voie pĂ©cuniaire (achat d’un brevet d’officier), et attendu, d’autre part, que dans l’administration royale, oĂč seuls un peu plus de 10 % parvinrent Ă  occuper des postes de premier plan, le facteur familial restait dĂ©terminant, c’est-Ă -dire les mĂ©rites et Ă©tats de service accumulĂ©s de la parentĂšle, Ă  telle enseigne que plus de 60 % des anciens sĂ©minaristes remplissant des fonctions d’élite dans l’administration exerçaient ces fonctions dans le mĂȘme secteur administratif, politique ou militaire que leurs pĂšres.

De 1790 Ă  1800, la situation Ă©conomique du SĂ©minaire ne cessa de se dĂ©tĂ©riorer Ă  cause de la dĂ©valorisation des sources de revenus qui lui avaient Ă©tĂ© assignĂ©es. En 1807, Ă  la suite de l’invasion napolĂ©onienne, les soldats espagnols prirent leurs quartiers dans le bĂątiment pour organiser la dĂ©fense, et les cours durent ĂȘtre suspendus. En 1809, un dĂ©cret de Joseph Bonaparte le transforma en hĂŽpital militaire. En 1836, avec l’abolition des privilĂšges de la noblesse, le SĂ©minaire ferma dĂ©finitivement ses portes, et l’édifice servit Ă  accueillir l’universitĂ© d’AlcalĂĄ lors de son transfert Ă  Madrid, avant de retrouver une affectation comme hĂŽpital militaire. Un incendie le dĂ©truisit complĂštement dĂ©but 1889.

L’édifice

Gravure dans La IlustraciĂłn Española y Americana figurant l’incendie de l’édifice du SĂ©minaire en 1889 (dessin de Juan Comba).

Le bĂątiment du SĂ©minaire des nobles, aujourd'hui disparu, se dressait autrefois calle de la Princesa Ă  Madrid, Ă  un demi-kilomĂštre environ au nord-ouest de l’actuelle Plaza de España, Ă  la hauteur d’une rue adjacente appelĂ©e calle Seminario de Nobles. L’édifice, dans la construction duquel fut impliquĂ© l’architecte Pedro de Ribera[1], Ă©tait en majoritĂ© fait de briques et se composait de trois corps de bĂątiment placĂ©s en retour d’équerre et dĂ©terminant deux cours intĂ©rieures ; les deux tours carrĂ©es Ă  toit en pavillon qui le cantonnaient lui confĂ©raient un aspect fĂ©odal[2].

S’il Ă©tait Ă  l’origine destinĂ© Ă  loger le SĂ©minaire des nobles de Madrid, institution fondĂ©e en 1725 et liĂ©e au CollĂšge impĂ©rial de Madrid[3], le bĂątiment sera par la suite utilisĂ© Ă©galement comme prison et servit notamment Ă  incarcĂ©rer le gĂ©nĂ©ral Riego avant son exĂ©cution[2] le . AprĂšs la fermeture du SĂ©minaire des nobles en 1836, il trouva une nouvelle affectation comme hĂŽpital militaire ; celui-ci, inaugurĂ© en 1841[4], regroupait diffĂ©rents hĂŽpitaux militaires existant auparavant dans la capitale espagnole[5] et hĂ©bergeait dans ses dĂ©pendances un laboratoire de chimie ainsi que le MusĂ©e anatomopathologique[6] - [7]. L’édifice fut dĂ©truit par un incendie entre le 5 et le [6] - [7] - [8] et dĂ©moli ensuite.

Le séminaire

Fondation et histoire

Le SĂ©minaire des nobles de Madrid fut fondĂ© sur ordre du roi Philippe V dans le but d’offrir, sous la tutelle des jĂ©suites, un enseignement particulier Ă  la jeunesse noble d’Espagne. Le SĂ©minaire trouva d’abord Ă  s’installer dans un bĂątiment proche du CollĂšge impĂ©rial, sis rue de TolĂšde, et constituait avec celui-ci un corps Ă©ducatif unique sous l’autoritĂ© d’un seul recteur. Le , il fut dotĂ©, par convention avec la Chambre de Castille, des recettes du commerce du tabac. Le terme de sĂ©minaire (Ă  ne pas prendre au sens d’institution de formation Ă  la prĂȘtrise) choisi pour dĂ©signer cette nouvelle institution reflĂšte clairement sa condition d’établissement d’enseignement visant Ă  une formation intĂ©grale, non uniquement universitaire, de ses Ă©tudiants[9].

Le SĂ©minaire figure aussi comme une expression du souci des LumiĂšres espagnoles Ă  l’endroit de l’éducation de la noblesse, souci qui se concrĂ©tisa tout au long du XVIIIe siĂšcle par la crĂ©ation de plusieurs « sĂ©minaires » destinĂ©s Ă  la formation de la jeunesse aristocratique, parmi lesquels se distinguait plus particuliĂšrement, par les fonctions qui lui furent attribuĂ©es et par les privilĂšges dont il jouissait, celui de Madrid[10].

Le CollĂšge impĂ©rial, dans le quartier de la rue de TolĂšde Ă  Madrid. Le CollĂšge des nobles lui Ă©tait associĂ© Ă  ses dĂ©buts, sous l’autoritĂ© d’un mĂȘme recteur, avant de prendre son autonomie et de se transfĂ©rer plus au nord dans la ville.

SchĂ©matiquement, l’on peut distinguer dans l’histoire du SĂ©minaire deux grandes pĂ©riodes, sĂ©parĂ©es par la cĂ©sure que reprĂ©sente l’expulsion des JĂ©suites hors d’Espagne en 1767. Le rĂšgne de Ferdinand VI (1746-1759) peut ĂȘtre vu comme l’apogĂ©e de l’établissement, oĂč le monarque lui dispensa sa plus haute protection, ce qui se traduisit notamment par deux visites au SĂ©minaire, en 1747 et en 1751, et par l’octroi en 1747 Ă  tous les jeunes gens sĂ©minaristes de mercedes de hĂĄbito (titre distinctif de noblesse) de l’un ou l’autre des Ordres militaires. Cette protection fut corroborĂ©e par une disposition des ordonnances de 1755, en vertu de laquelle Ă©tait accordĂ©e aux sĂ©minaristes une prĂ©fĂ©rence absolue dans l’attribution des emplois publics[11].

AprĂšs l’expulsion des jĂ©suites, le SĂ©minaire rouvrit ses portes en 1770 sous la direction du cĂ©lĂšbre scientifique et officier de marine Jorge Juan[12]. Cette date marque le dĂ©but d’un processus, lent mais ininterrompu, de militarisation de l’institution, processus qui culmina dans les derniĂšres dĂ©cennies du siĂšcle Ă  la suite de la suppression du CollĂšge de cadets de cavalerie d’Ocaña et le subsĂ©quent transfert de tous les Ă©lĂšves dudit collĂšge vers le SĂ©minaire des nobles en . À peu prĂšs un an aprĂšs, en , les jeunes gens de la Real Casa de Pajes (Ă©cole de pages), rejoignirent Ă©galement le SĂ©minaire, pour y rester jusqu’en . En 1786, le prĂ©cepteur chargĂ© de l’éducation des pages passa au SĂ©minaire au titre de directeur en second, ce qui entraĂźna un renforcement du processus de militarisation, attendu que le poste de prĂ©cepteur Ă©tait occupĂ© par un officier de l’armĂ©e portant le grade de colonel ou de lieutenant-colonel[11] - [13].

Ainsi, Ă  partir de 1785, le SĂ©minaire se transforma-t-il en un centre Ă©ducatif Ă  forte composante militaire, par suite donc de l’incorporation d’élĂšves provenant d’autres Ă©tablissements d’enseignement liĂ©s aux forces armĂ©es. Si le collĂšge d’Ocaña avait pour but de former des cadets se destinant Ă  la cavalerie, la Casa de Pajes avait elle aussi une fonction semblable, puisque les Ă©tudes y dĂ©bouchaient principalement soit sur la carriĂšre ecclĂ©siastique, soit sur un emploi au Palais royal — essentiellement des postes d’écuyer du roi — ou dans l’armĂ©e, cette derniĂšre affectation ayant une importance particuliĂšre, Ă©tant donnĂ© que les pages bĂ©nĂ©ficiaient d’un accĂšs privilĂ©giĂ© au corps d’officiers, montant en effet directement au grade de capitaine de cavalerie ou de seconds lieutenants des Gardes espagnoles, sans devoir en passer par les Ă©tapes prĂ©alables, Ă  savoir celles de cadet, d’enseigne et de lieutenant de cavallerie, resp. de cadet et d’enseigne dans les Gardes[14].

Devant les difficultĂ©s financiĂšres de l’établissement, une tentative de revitalisation fut menĂ©e en 1785, sous les espĂšces d’un plan de rĂ©forme prĂ©sentĂ© par celui qui Ă©tait alors le directeur du SĂ©minaire, le brigadier d’artillerie Antonio Angosto RodrĂ­guez. Outre la rĂ©forme Ă©ducative contenue dans le nouveau plan d’études, son projet comportait un nouveau systĂšme d’entrĂ©e au SĂ©minaire modulĂ© selon les ressources Ă©conomiques des aspirants. Cependant, les difficultĂ©s Ă  assurer financiĂšrement la subsistance du SĂ©minaire ne furent pas rĂ©solues par le nouveau systĂšme, et l’on se saisit alors de la solution de rechange consistant Ă  intensifier le processus de militarisation, ce dont atteste le fait que Charles III accĂ©da Ă  la requĂȘte d’Angosto formulĂ©e quelques annĂ©es auparavant et tendant Ă  ce que les sĂ©minaristes qui s’engageraient dans la carriĂšre des armes eussent les mĂȘmes prĂ©rogatives que les fils d’officiers de l’armĂ©e, Ă  savoir qu’une place leur serait garantie et que leur anciennetĂ© courrait dĂšs l’ñge de douze ans. Toutefois, ni ces mesures, ni l’admission de gentilshommes des AmĂ©riques, approuvĂ©e en , ne suffiront Ă  Ă©liminer les tracas financiers du SĂ©minaire. À partir de cette date, l’établissement sombra dans une profonde crise caractĂ©risĂ©e par une pĂ©nurie d’élĂšves, des coĂ»ts Ă©levĂ©s, une fuite continuelle vers l’armĂ©e, et un relĂąchement de l’intĂ©rĂȘt pour la science[15].

La mise au point en 1786 d’un nouveau plan de cours s’appliquant uniformĂ©ment Ă  l’ensemble des sĂ©minaires d’Espagne, suivi de son approbation en 1790, n’apporta pas davantage la solution, nonobstant que ce nouveau plan, consacrant la promotion de la bourgeoisie jusque dans ces institutions particuliĂšres, en permĂźt l’accĂšs pour la premiĂšre fois Ă  des gens accommodĂ©s (=fortunĂ©s)[16]. Une pĂ©riode de nette dĂ©cadence s’était ainsi amorcĂ©e, dĂ©terminĂ©e par un faisceau de facteurs, notamment : l’arrivĂ©e d’élĂšves venus d’Ocaña et de la Casa de Pajes ; les difficultĂ©s financiĂšres ; la perte du caractĂšre Ă©litiste de cette institution nobiliaire par suite de l’admission d’étudiants boursiers Ă  partir de ces annĂ©es ; l’évolution vers un centre de formation militaire ; et enfin la nomination de directeurs de peu de prestige scientifique[17].

De 1790 Ă  1800, la situation Ă©conomique du SĂ©minaire se fit de plus en plus critique par la dĂ©valuation des valeurs royales, qui devaient lui servir Ă  faire face Ă  ses obligations financiĂšres, et par le retard ou l’arrivĂ©e irrĂ©guliĂšre des revenus des Indes, son autre source de financement. En 1807, devant l’invasion napolĂ©onienne, le bĂątiment fut fermĂ© aux cours et occupĂ© par des soldats espagnols afin d’y organiser la dĂ©fense. En 1809, un dĂ©cret de Joseph Bonaparte convertit l’édifice en hĂŽpital militaire[9].

En 1835, le SĂ©minaire des nobles changea sa dĂ©nomination en Seminario Cristino, puis l’annĂ©e suivante, en 1836, au lendemain de la suppression des privilĂšges de la noblesse, cessa dĂ©finitivement d’exister, ses locaux servant dĂ©sormais Ă  accueillir l’universitĂ© d’AlcalĂĄ fraĂźchement transfĂ©rĂ©e Ă  Madrid[9].

Origine sociale des Ă©lĂšves et conditions d’admission

Le roi Philippe V, Ă  l’instigation de qui le CollĂšge des nobles fut crĂ©Ă© en 1725.

Le SĂ©minaire royal des nobles de Madrid fut fondĂ© en 1725, exactement un siĂšcle aprĂšs le CollĂšge impĂ©rial dont il dĂ©pendait. GĂ©rĂ© lui aussi par les jĂ©suites, le SĂ©minaire s’adressait Ă  une clientĂšle bien prĂ©cise que les statuts de l’établissement rĂ©digĂ©s en 1730 spĂ©cifiaient ainsi que suit :

« Aussi, pour favoriser une Ă©ducation idoine dans les vertus et les lettres, Sa MajestĂ© a-t-elle voulu en donner les moyens Ă  la noblesse espagnole. Elle a balayĂ© du regard son royaume et l’a trouvĂ© suffisamment dotĂ© d’études gĂ©nĂ©rales, d’universitĂ©s, de sĂ©minaires et de collĂšges majeurs et mineurs fort appropriĂ©s pour former la jeunesse Ă  l’état ecclĂ©siastique et au gouvernement et pour pourvoir les tribunaux de justice et les conseils supĂ©rieurs d’hommes insignes, qui en tous temps ont toujours fleuri en leur sein ; mais il n’a trouvĂ© aucun SĂ©minaire vouĂ© Ă  l’éducation de cette partie de la noblesse qui ne frĂ©quente pas rĂ©guliĂšrement les universitĂ©s, et qui ordinairement trouve Ă  s’employer au service de son Palais et de sa Cour, de ses armĂ©es de mer et de terre, dans le gouvernement Ă©conomique et politique, dans la gestion des affaires de l’État ; et de ceux qui, demeurant dans leurs villes, gouvernant leurs maisons et leurs majorats agrandis, doivent ĂȘtre, de par leur naissance, des PĂšres de leurs Patries. C’est pour tous ceux-lĂ  principalement que j’ai voulu fonder en ma Cour ce SĂ©minaire royal[18]. »

La crĂ©ation du SĂ©minaire royal des nobles, sur le modĂšle parisien de l’« Illustre SĂ©minaire appelĂ© de Louis le Grand, tellement cĂ©lĂ©brĂ© et frĂ©quentĂ© par toutes les nations »[19], traduit en effet la volontĂ© du pouvoir royal de mieux former — c’est-Ă -dire selon les critĂšres sous-tendus par les valeurs idĂ©ologiques de l’époque — les Ă©lites dont la monarchie avait besoin. L’argument mis en avant par les intellectuels des LumiĂšres Ă©tait que les Ă©tablissements existants, le CollĂšge impĂ©rial et les universitĂ©s, n’avaient pas rĂ©ussi Ă  arracher les enfants des grandes familles de ce « dĂ©sƓuvrement » que ne cessera de dĂ©noncer le ministre Campomanes en 1785[20].

La premiĂšre condition Ă  remplir par les candidats sĂ©minaristes Ă©tait d’ĂȘtre purs de toute mauvaise race : ils devaient ĂȘtre de noblesse notoire et hĂ©rĂ©ditaire, et non uniquement de privilĂšge[21]. PrĂ©alablement Ă  leur admission, ils devaient fournir une information gĂ©nĂ©alogique complĂšte, comprenant en particulier : l’acte de baptĂȘme ; une dĂ©position devant la justice ordinaire « attestant qu’ils sont des gentilshommes notoires au regard des lois de Castille, purs de sang et prĂ©servĂ©s des mĂ©tiers mĂ©caniques sur les deux lignĂ©es » — les mĂ©tiers mĂ©caniques (oficios viles y mecĂĄnicos) Ă©tant les mĂ©tiers artisanaux et manuels, considĂ©rĂ©s vils et incompatibles avec la noblesse sous l’Ancien RĂ©gime ; « les tĂ©moignages des jouissances de noblesse de ses parents et grands-parents aussi bien en lignĂ©e maternelle que paternelle, avec les distinctions dont ont joui et jouissent leurs familles dans les villages d’origine ou du voisinage ». Seuls restaient dispensĂ©s de ces renseignements de noblesse les membres d’ordres militaires, les fils de militaires Ă  partir de lieutenant-colonel et au-dessus, et ceux qui avaient un frĂšre ayant dĂ©jĂ  Ă©tĂ© admis dans le SĂ©minaire[20].

Si la naissance Ă©tait le premier critĂšre de sĂ©lection pour entrer dans l’établissement, dans les faits l’extraction sociale des Ă©lĂšves varia de façon trĂšs significative au cours du siĂšcle. L’un des changements les plus importants eut lieu en 1755, lorsque les nouveaux statuts (Constituciones) du SĂ©minaire vinrent implicitement rabaisser les conditions sociales Ă  remplir. À partir de cette date en effet, le SĂ©minaire ouvrait dĂ©sormais ses portes Ă  quiconque pouvait justifier de la « puretĂ© de sang et de la noblesse de parents et grands-parents maternels et paternels »[22], ce qui, par exclusion, rendait possible l’accĂšs au SĂ©minaire Ă  ceux qui avaient acquis la noblesse Ă  travers un privilĂšge royal, Ă  quoi l’on parvenait souvent, dans la premiĂšre moitiĂ© du XVIIIe siĂšcle, par des dĂ©marches vĂ©nales ; de fait, cette circonstance impliquait la facultĂ© d’immatriculer dans le SĂ©minaire des Ă©lĂšves de quelques familles appartenant aux couches bourgeoises de la sociĂ©tĂ©[23]. Les critĂšres d’ascendance iront cependant en se relativisant davantage encore vers la fin du siĂšcle, puisque le plan de direction publiĂ© en 1790 Ă  l’intention de tous les sĂ©minaires d’Espagne ajoutait au terme de « nobles » celui de « gentes acomodadas » (gens fortunĂ©s), suivant en cela l’exemple du SĂ©minaire royal de Vergara, Ă©rigĂ© par la Sociedad Vascongada de Amigos del PaĂ­s en 1776[24].

La consĂ©quence la plus importante de ces rĂ©visions Ă©tait un accroissement substantiel du nombre d’élĂšves. Alors que le nombre des inscriptions se situait en moyenne Ă  13,5 Ă©lĂšves par an dans les premiĂšres dĂ©cennies de l’existence du SĂ©minaire, l’on enregistra dans la dĂ©cennie prĂ©cĂ©dant l’expulsion des jĂ©suites une moyenne de 19,7 Ă©lĂšves par an. Significativement, il se produisit alors une considĂ©rable hausse du nombre d’étudiants provenant spĂ©cifiquement de Cadix, principal foyer d’une bourgeoisie enrichie par le commerce amĂ©ricain. C’est l’époque oĂč fut inscrit JosĂ© Cadalso, mais Ă©galement des Ă©lĂšves de familles d’origine Ă©trangĂšre, ainsi que — mais dans une mesure moindre — issus de familles des AmĂ©riques : en effet, en 1785, une fois rendue possible l’entrĂ©e de jeunes gens amĂ©ricains des « classes accommodĂ©es », quelques familles de Cuzco, Lima, Buenos Aires et La Havane arriveront Ă  envoyer plusieurs de leurs fils Ă©tudier Ă  Madrid. Les effets de cette mesure et de celle ultĂ©rieure, de 1790, autorisant Ă  admettre des enfants de la bourgeoisie, allĂšrent Ă  rebours de l’effet recherchĂ© sur le nombre d’étudiants, puisque la noblesse allait finir par bouder le SĂ©minaire[25].

Mais ce qui, davantage encore que l’admission des classes aisĂ©es, Ă©tait de nature Ă  remettre en cause la primautĂ© du critĂšre de naissance, Ă©taient les conditions Ă©conomiques Ă  satisfaire pour entrer au SĂ©minaire. Le prix de la pension, fixĂ© au dĂ©but Ă  six reales par jour, monta ensuite Ă  8, 10, 12 et 14 reales, selon les moyens des parents, pour atteindre en 1799 le montant de 5110 reales par semestre, comparable Ă  ce que se payait dans les meilleurs collĂšges aristocratiques de France, et qui reprĂ©sentait cinq fois ce qui Ă©tait exigĂ© en 1730. S’y ajoutait que les sĂ©minaristes Ă©taient tenus d’apporter au collĂšge non seulement leurs uniformes et leurs vĂȘtements, dont la qualitĂ© et la quantitĂ© Ă©taient rĂ©glementĂ©es avec prĂ©cision, mais aussi tout leur mobilier. Les deux critĂšres conjuguĂ©s de la naissance et de la richesse sera Ă  l’origine au sein du SĂ©minaire d’une compĂ©tition ouverte entre les Ă©lĂšves autour du montant des dĂ©penses au chapitre des vĂȘtements et de parures[26].

Ces conditions Ă©conomiques expliquent sans doute le nombre relativement faible des Ă©lĂšves accueillis, nombre que l’on a pu calculer Ă  l’aide de la documentation des Archives historiques nationales. Le SĂ©minaire comptait 361 Ă©lĂšves entre 1727 et 1752, soit un effectif annuel moyen de quinze Ă©lĂšves, avec au moment de l’expulsion des jĂ©suites un total de 98. De 1770 jusqu’à 1785 (annĂ©e oĂč eut lieu l’incorporation des cadets d’Ocaña et l’ouverture aux jeunes gens venus d’AmĂ©rique), la moyenne du nombre de sĂ©minaristes s’inscrivant au SĂ©minaire s’élevait Ă  17 par an. L’atonie des annĂ©es qui courent de 1791 Ă  1799 se reflĂšte dans le chiffre moyen de huit inscriptions annuelles, recul imputable Ă  la dĂ©fection de la noblesse, principalement de la noblesse titrĂ©e. Si entre 1770 et 1790, il y eut au SĂ©minaire un total de 78 fils de nobles titrĂ©s — reprĂ©sentant 21,5 % des effectifs —, il ne viendra plus y Ă©tudier dans les annĂ©es entre 1791 et 1799 que six fils de nobles titrĂ©s, chiffre correspondant Ă  8 % du total des Ă©lĂšves immatriculĂ©s durant cette dĂ©cennie. En 1803, on recense un total de 78 Ă©lĂšves[27] - [25].

Si donc l’on note parmi les gentilshommes qui se sont inscrits dans le SĂ©minaire tout au long du XVIIIe siĂšcle la prĂ©sence de plusieurs rejetons de la noblesse titrĂ©e, ancienne ou rĂ©cente, y compris plusieurs chevaliers de Santiago, une Ă©tude de ces inscriptions fait surtout ressortir que le groupe prĂ©dominant, avec un peu plus de 80 %, Ă©tait composĂ© d’élĂšves issus des strates moyennes et infĂ©rieures de la noblesse, implantĂ©es dans l’administration centrale de l’État, dans l’armĂ©e, ou composant le monde bigarrĂ© de la noblesse dite « des provinces », essentiellement du Pays basque, ou des colonies amĂ©ricaines[28] - [29], oligarchies locales, regidors, grands alcades, et hidalgos disposant de revenus suffisants pour en investir une partie dans la formation de leurs fils. Encore que cette derniĂšre fraction de la noblesse de province soit plus malaisĂ©e Ă  identifier, il ressort des registres du SĂ©minaire pour la pĂ©riode 1727-1757 que les oligarchies locales formaient le principal vivier de gentilshommes sĂ©minaristes. Il ne s’agit pas de la vieille aristocratie de souche mais majoritairement de cette nouvelle noblesse surgie depuis le milieu du XVIIe siĂšcle et sous le rĂšgne de Philippe V Ă  la faveur de la possibilitĂ© de se voir octroyer des titres pour services rendus Ă  la Couronne et par la vente permanente de titres nobiliaires. Parmi les sĂ©minaristes fils de nobles titrĂ©s, autour de 50 % Ă©taient issus de familles ayant obtenu le titre de noblesse au XVIIIe siĂšcle. IndĂ©pendamment de l’anciennetĂ©, ce sont, dans une mesure Ă©gale, tant des familles qui servaient dĂ©jĂ  le roi Ă  divers postes de l’administration et de l’armĂ©e, que des familles qui souhaitaient former leurs fils et s’approcher du tout-puissant monde de la Cour de Madrid, qui se tournaient vers le SĂ©minaire des nobles[30]. Quant aux caractĂ©ristiques professionnelles des milieux d’origine, ceux-ci, faisant Ă©cho aux principaux futurs dĂ©bouchĂ©s des Ă©lĂšves — l’administration et l’armĂ©e —, reproduisaient le mĂȘme canevas professionnel, Ă  quoi s’agrĂ©geaient les oligarchies locales qui ambitionnaient de s’élever jusqu’aux centres de service de la monarchie. Selon une comptabilisation menĂ©e par AndĂșjar Castillo, la quasi-totalitĂ© des Ă©lĂšves dont la profession paternelle a pu ĂȘtre identifiĂ©e avaient des parents remplissant quelque office dans l’administration royale. Au fil du temps, de plus en plus de fils de militaires s’inscriront, tandis que dans une proportion Ă©gale la part des autres secteurs de l’administration, des Conseils, de la justice et de la bureaucratie tendra Ă  baisser[31]. D’autre part, bon nombre de fils de bonne naissance, mais de fortune rĂ©guliĂšre, choisissaient des sĂ©minaires moins exigeants, comme celui de Calatayud, de prĂ©fĂ©rence Ă  celui de la Cour de Madrid[26].

Les registres des Ă©lĂšves du SĂ©minaire mettent par ailleurs en lumiĂšre une anomalie sans doute dĂ©cisive et dont se plaignaient les enseignants, Ă  savoir : la durĂ©e de sĂ©jour au SĂ©minaire dĂ©pendait du bon vouloir des parents, Ă  qui il Ă©tait loisible d’amener leurs enfants Ă  n’importe quelle date de l’annĂ©e et de les en retirer quand ils le souhaitaient, bien qu’officiellement les cours dussent commencer le 1er octobre et se terminer Ă  la mi-septembre. Aussi voyait-on, Ă  cĂŽtĂ© de sĂ©minaristes ne restant guĂšre plus de quelques jours ou quelques mois, d’autres qui y demeuraient toute une dĂ©cennie. Cette licence donnĂ©e aux parents Ă©tait Ă  l’origine d’un constant va-et-vient et de la coexistence, au sein d’une mĂȘme section, d’élĂšves avancĂ©s et d’autres en retard, ce qui compromettait toute progression logique dans la mise en Ɠuvre des programmes de cours ; ces conditions concrĂštes de travail rendaient vaines les visĂ©es des plans d’études, et sont de nature Ă  nous faire douter de l’efficacitĂ© de la formation rĂ©ellement dispensĂ©e dans le SĂ©minaire. Au surplus, et nonobstant que les statuts prescrivaient une limite d’ñge minimum et maximum pour l’inscription — respectivement de sept et douze ans, aux termes du rĂšglement de 1755 —, il arrivait que dans une mĂȘme annĂ©e, des sĂ©minaristes se voyaient admis dĂšs l’ñge de six ans, pendant que d’autres s’inscrivaient alors qu’ils avaient dĂ©jĂ  atteint l’ñge de 17 ans. Ces disparitĂ©s d’ñge et de durĂ©e de sĂ©jour dans l’établissement, trĂšs alĂ©atoires, sont rĂ©vĂ©latrices de la grande distance entre projet Ă©ducatif et rĂ©alitĂ©[32] - [33].

La bourgeoisie, dĂ©sireuse d’ascension sociale, Ă©tait le groupe qui avait le plus Ă  gagner Ă  l’entrĂ©e de ses rejetons dans la SĂ©minaire. L’avantage Ă©tait double : entrer en relation directe avec toutes les couches du vaste Ă©tat de la noblesse, et s’approcher de ce pouvoir central qui attribuait les postes, mais qui octroyait aussi des rĂ©compenses de toutes sortes, de titres de chevalier des ordres militaires jusqu’à des titres nobiliaires. Pour la bourgeoisie, mĂȘme celle dĂ©jĂ  parĂ©e de l’hidalguĂ­a, le SĂ©minaire permettait de signifier qu’elle avait atteint la plus haute marche de l’escalier d’honneur, qui culminait dans le convoitĂ© statut nobiliaire.

Sur un total de 178 jeunes gens inscrits au SĂ©minaire entre 1757 et 1765, au moins 24 embrasseront la carriĂšre des armes. De ces 24, rien moins que 13 entreront dans l’armĂ©e par le moyen de l’achat d’un poste d’officier, voie rapide mais exceptionnelle ouverte dans les premiĂšres annĂ©es du rĂšgne de Charles III Ă  l’occasion d’une expansion des corps de cavalerie et de dragons, de la crĂ©ation de quelques rĂ©giments en 1766, et d’une opĂ©ration de vente directe de brevets d’officier ourdie entre 1766 et 1774 dans les officines du secrĂ©tariat du Cabinet de la guerre. C’est de cette pĂ©riode que date l’acquisition par l’un des plus cĂ©lĂšbres sĂ©minaristes, JosĂ© Cadalso, de son brevet de capitaine du rĂ©giment de cavalerie de Bourbon en contrepartie du service, rendu par lui, d’avoir financĂ© au bĂ©nĂ©fice du corps de cavalerie 50 places de cavaliers, avec monture, tenue et Ă©quipage[34].

Le fait que plus de 50 % des sĂ©minaristes ayant ensuite embrassĂ© la carriĂšre militaire y Ă©taient parvenus par la voie vĂ©nale implique cependant l’existence de certaines relations allant au-delĂ  de la simple possession d’argent. Il y fallait des connaissances prĂ©cises, savoir oĂč se vendaient les emplois, qui Ă©taient les intermĂ©diaires, aussi bien les recruteurs des rĂ©giments que ceux du secrĂ©tariat du Cabinet de la guerre lui-mĂȘme ; or ces connaissances circulaient et se transmettaient dans les salles de classe du SĂ©minaire des nobles, oĂč les amitiĂ©s et l’échange d’informations Ă©taient deux Ă©lĂ©ments complĂ©mentaires Ă  continuer d’entretenir, une fois que l’on aurait laissĂ© derriĂšre soi les salles de classe de l’établissement[35].

Parmi les séminaristes illustres, on relÚve en particulier, outre le militaire et homme des LumiÚres José Cadalso, déjà mentionné, le futur libertador du Río de la Plata, José de San Martín. Selon toute apparence, San Martín fut élÚve du Séminaire des nobles entre 1785 et 1789, encore que son nom ne figure pas dans les répertoires de séminaristes de ces années[36].

Programme d’études

Les statuts de 1730, qui insistent sur la nĂ©cessitĂ© de « se prĂ©munir contre les risques de la libertĂ©, de l’oisivetĂ© et des plaisirs », dĂ©finissent comme suit les objectifs du SĂ©minaire :

1) Le but primordial de ce sĂ©minaire est d’enseigner et de conduire ses Ă©lĂšves Ă  ĂȘtre des gentilshommes chrĂ©tiens, en les Ă©levant dans toute vertu, afin qu’ensuite ils puissent, par leurs paroles et par leur exemple, enseigner Ă  leur famille les exercices de vertu, de piĂ©tĂ© et de modestie chrĂ©tiennes.
2) Le but moins primordial, quoique principal lui aussi, est qu’ils soient instruits dans celles-lĂ , parmi les facultĂ©s et sciences, qui ornent le plus la noblesse[28].

Cette primautĂ© accordĂ©e Ă  la vertu, caractĂ©ristique de la conception jĂ©suitique de l’enseignement, explique le choix du rĂ©gime de vie en communautĂ© — rĂ©gime qualifiĂ© par Vicente de la Fuente de cĂ©nobite[37] — que l’on imposait aux sĂ©minaristes et qui diffĂ©renciait le nouvel Ă©tablissement de son prĂ©dĂ©cesseur, le CollĂšge impĂ©rial. De mĂȘme, cela explique l’accent mis par tous les statuts et rĂšglements sur la religion, dont les exercices occupaient plusieurs moments de l’horaire quotidien des Ă©lĂšves. L’enseignement de la doctrine religieuse allait de pair avec celui de la courtoisie, dont l’importance Ă©tait Ă©galement soulignĂ©e par les statuts ; en effet, dans la suite du texte sont spĂ©cifiĂ©s les principaux commandements et principales interdictions, en particulier « dans la conversation, lors du jeu et Ă  table, (qui) sont en quelque sorte les thĂ©Ăątres de l’urbanitĂ© et de la politesse ». Il est certain qu’une des originalitĂ©s du SĂ©minaire Ă©tait d’ĂȘtre une Ă©cole d’urbanitĂ©, se donnant pour tĂąche d’instruire les futurs courtisans dans les maniĂšres raffinĂ©es inhĂ©rentes Ă  cette fonction[38].

Les statuts prĂ©voyaient deux niveaux d’études : une Ă©cole primaire (primeras letras), oĂč l’on enseignait, en trois ou quatre annĂ©es, Ă  lire, Ă©crire et compter, en plus de l’orthographe et de la grammaire espagnoles ; et une classe de latinitĂ©, oĂč Ă©taient dispensĂ©s, tout au long d’un cursus de cinq ans, les enseignements suivants : poĂ©tique et rhĂ©torique, poĂ©sie latine et castillane, philosophie et logique, physique gĂ©nĂ©rale et expĂ©rimentale, mathĂ©matiques, histoire, gĂ©ographie, langue française, et droit canon[39]. Ordinairement, les sĂ©minaristes entraient Ă  sept ou huit ans et quittaient l’école Ă  quinze, sous rĂ©serve d’autorisation Ă  s’inscrire avant l’ñge de sept ans ou de rester au-delĂ  de ses quinze ans[40]. Cette fonction double du SĂ©minaire, Ă  la fois Ă©cole de premiĂšres lettres et de latinitĂ©, sera rĂ©affirmĂ©e Ă  plusieurs reprises dans les plans d’études successifs, lesquels avaient soin aussi de prĂ©ciser le contenu des enseignements et d’indiquer les principaux manuels et livres de classe Ă  utiliser[41].

Les ouvrages retenus pour l’apprentissage de la lecture Ă©taient le CatĂ©chisme de Fleury, La expediciĂłn de los catalanes y aragoneses contra turcos y griegos de Moncada, et les fables de Samaniego. La grammaire espagnole et latine s’enseignaient Ă  partir des traitĂ©s thĂ©oriques de l’AcadĂ©mie royale espagnole, du commentaire grammatical des fables de Samaniego et de PhĂšdre, de la traduction espagnole de CĂ©sar (Commentaires) et de CicĂ©ron (De officiis), et de la traduction latine de Louis de Grenade et de Mariana. L’enseignement de l’histoire Ă©tait associĂ© Ă  celui de la gĂ©ographie et de la chronologie, et se basait sur le Discours sur l'histoire universelle de Bossuet et sur le Tableau chronologique de l'histoire universelle de Bufier. L’on enseignait l’histoire gĂ©nĂ©rale, l’histoire de l’AntiquitĂ© et l’histoire moderne, en s'attardant plus spĂ©cifiquement sur celle de l’Espagne et des pays voisins. Les mathĂ©matiques eurent toujours une grande importance dans l’établissement, Ă  telle enseigne qu’il compta parmi ses professeurs, avant l’expulsion, d’éminentes figures telles que TomĂ s CerdĂ , Lorenzo HervĂĄs y Panduro (qui devint directeur du SĂ©minaire), Gaspar Álvarez (auteur de Elementos geomĂ©tricos de Euclides, de 1739) et Juan Wendlingen. Mais plus tard encore, Ă  partir de 1770, cette prĂ©Ă©minence des mathĂ©matiques sera confirmĂ©e avec l’introduction d’une option permettant aux Ă©tudiants qui se destinaient Ă  la carriĂšre militaire d’approfondir cette science, de prĂ©fĂ©rence Ă  la poĂ©tique et Ă  la rhĂ©torique ; le cursus, s’échelonnant sur quatre ans, comprenait l’arithmĂ©tique, la gĂ©omĂ©trie, la trigonomĂ©trie, l’algĂšbre, l’astronomie, la mĂ©canique (Ă  l’aide du manuel de Benito Bails), l’architecture, l’artillerie et la science nautique. Le dessin, conçu comme prolongation des mathĂ©matiques, incluait le dessin militaire, la perspective et la fortification. L’enseignement de la philosophie se prolongeait sur trois ans : logique et mĂ©taphysique la premiĂšre annĂ©e, physique gĂ©nĂ©rale et expĂ©rimentale la deuxiĂšme, philosophie morale et politique la troisiĂšme ; les manuels utilisĂ©s Ă©taient celui de Cesare Baldinotti pour la logique, d’Antonio Genuensi pour la mĂ©taphysique, de Bech pour la physique, et de Francis Hutcheson pour la morale[42].

Le mathĂ©maticien et officier de marine Jorge Juan, directeur du SĂ©minaire de 1770 jusqu’à sa mort en 1773, et l’un des promoteurs de la militarisation du SĂ©minaire.

Le programme d’apprentissage des langues mĂ©rite une attention particuliĂšre. Jusqu’en 1785, la seule langue vivante Ă  ĂȘtre obligatoire Ă©tait le français, mais il Ă©tait loisible aux Ă©lĂšves de suivre aussi des cours optionnels d’italien. À partir de 1785, l’enseignement des langues se diversifia, avec l’introduction de l’anglais, du grec et de l’hĂ©breu, pendant que dans le mĂȘme temps Ă©tait rĂ©novĂ©e la pĂ©dagogie du français, dont enseignement Ă©tait dĂ©sormais confiĂ© Ă  un professeur français (et jusqu’à la fin du siĂšcle, ce sera toujours un prĂȘtre), Ă  l’instar de la pratique dĂ©jĂ  Ă©tablie dans le collĂšge des Gardes Ă  SĂ©govie, afin que les Ă©lĂšves, au lieu d’apprendre des rĂšgles thĂ©oriques, entendent « la voix vive, qui les impressionne plus que l’étude journaliĂšre, en particulier les trĂšs jeunes »[43].

Une heure et demie Ă©tait quotidiennement consacrĂ©e Ă  l’étude de la danse et de la musique (connaissance de base en musique et maniement du violon). L’équitation Ă©tait pratiquĂ©e durant deux heures trois fois par semaine. Les Ă©tudiants se destinant Ă  la carriĂšre des armes avaient en outre des cours de tactique et des exercices militaires[43].

Pour évaluer les progrÚs des séminaristes, ceux-ci étaient soumis des examens secrets trimestriels et à un concours public tous les deux ans[43].

On perçoit, au fil des dĂ©cennies, une nette Ă©volution vers une plus grande modernitĂ©, surtout scientifique, Ă©volution s’inscrivant en parallĂšle du mouvement d’idĂ©es en cours dans les Sociedades econĂłmicas de amigos del paĂ­s et tendant Ă  donner Ă  l’état aristocratique, plus particuliĂšrement Ă  ceux destinĂ©s Ă  la carriĂšre militaire, une formation mieux adaptĂ©e aux exigences de l’époque que celle qu’offraient les universitĂ©s. La volontĂ© de mettre le SĂ©minaire des nobles sur un pied d’égalitĂ© avec les universitĂ©s transparaĂźt clairement dans le DĂ©cret royal de Ferdinand VI en date du (confirmĂ© par Charles III le ) qui prĂ©voyait l’homologation des enseignements du SĂ©minaire par les universitĂ©s ; Ă  l’inverse, le plan d’études de 1790 (applicable aux sĂ©minaires non seulement de Madrid, mais de toute l’Espagne) limitait la fonction de ces Ă©tablissements Ă  offrir des « connaissances prĂ©liminaires »[43], l’objectif des sĂ©minaires Ă©tant en effet que les Ă©lĂšves disposent Ă  l’instant de les quitter de notions gĂ©nĂ©rales et fondĂ©es, propres Ă  les rendre aptes aux Ă©tudes sĂ©rieuses[32].

À la suite de l’expulsion des jĂ©suites, l’institution Ă©volua vers une Ă©ducation plus laĂŻque, plus centrĂ©e sur les matiĂšres Ă  caractĂšre scientifique et technique, en accord avec les dĂ©bouchĂ©s professionnels majoritairement militaires des sĂ©minaristes. Une comparaison des exercices littĂ©raires qui se tenaient pĂ©riodiquement permet de s’aviser de cette mutation ; les exercices correspondant Ă  la premiĂšre Ă©tape (la pĂ©riode sous la direction des jĂ©suites) couvrent toutes les matiĂšres du cursus, des mathĂ©matiques et de la physique jusqu’à la philosophie et les lettres en gĂ©nĂ©ral, tandis que ceux de la seconde pĂ©riode, surtout vers la fin du siĂšcle, comprenaient dĂ©jĂ , en plus de ces mĂȘmes matiĂšres, l’architecture militaire, et mĂȘme l’astronomie, lorsqu’à l’aube du XIXe siĂšcle Isidoro AntillĂłn devint (Ă  l’ñge de seulement 23 ans) titulaire du cours de gĂ©ographie, de chronologie et d’histoire[44].

Cependant, l’empreinte des jĂ©suites allait perdurer dans le SĂ©minaire des nobles durant plusieurs annĂ©es encore aprĂšs leur expulsion, en particulier par les ouvrages qui avaient Ă©tĂ© remis aux Ă©lĂšves pour leur usage personnel et qui Ă©taient censĂ©s, comme les autres possessions des Ă©lĂšves, profiter aussi aux parents. Dans quatre listes de livres examinĂ©s par le chercheur AndĂșjar Castillo reviennent ces trois mĂȘmes titres : El joven Joseph (littĂ©r. le Jeune Joseph), ouvrage de morale catholique, Ɠuvre du jĂ©suite Cesare Calini ; le Compendio de la historia universal, en quatre volumes, ouvrage Ă©crit au XVIe siĂšcle par Orazio Tursellino, Ă©galement un jĂ©suite italien ; et la ColecciĂłn de varios tratados curiosos, propios y muy Ăștiles para la instrucciĂłn de la noble juventud española (littĂ©r. Recueil de divers traitĂ©s curieux, appropriĂ©s et trĂšs utiles pour l’instruction de la noble jeunesse espagnole), ouvrage prĂ©parĂ© par les jĂ©suites qui dirigeaient le SĂ©minaire en 1757, date de sa premiĂšre Ă©dition, et qui fit office de prĂ©cis d’histoire sacrĂ©e, ecclĂ©siastique, romaine, mythologique et de l’Espagne. Cette petite bibliothĂšque particuliĂšre de l’élĂšve n’était complĂ©tĂ©e que par un seul ouvrage qui fĂ»t plus au diapason du dĂ©bouchĂ© professionnel des sĂ©minaristes : le Curso de matemĂĄticas que Tadeo Lope y Aguilar venait de commencer Ă  faire paraĂźtre en 1794[45].

DĂ©bouchĂ©s d’emploi des sĂ©minaristes

La formation reçue dans le SĂ©minaire apparaĂźt n’avoir Ă©tĂ© que de peu de poids dans le dĂ©roulement des carriĂšres ultĂ©rieures des sĂ©minaristes au sein de l’administration royale. Les Ă©tudes au SĂ©minaire des nobles reprĂ©sentaient certes un atout dans lesdites carriĂšres, mais n’eurent jamais une valeur dĂ©cisive lors des promotions professionnelles, qui dĂ©pendaient essentiellement d’autres facteurs[46].

Le DĂ©cret royal de Ferdinand VI de 1755 spĂ©cifiait les trois orientations principales, c’est-Ă -dire les trois types d’emploi, qui s’offraient aux sĂ©minaristes :

  • l’administration royale, pour laquelle le dĂ©cret assurait aux sĂ©minaristes une prĂ©fĂ©rence absolue[32] ;
  • la carriĂšre des armes, pour laquelle des privilĂšges Ă©taient Ă©galement octroyĂ©s ;
  • l’universitĂ©, c’est-Ă -dire poursuivre une carriĂšre grĂące aux homologations susmentionnĂ©es[47].

Jacques Soubeyroux, qui a compulsĂ© les registres du SĂ©minaire en 1995, dans le but de vĂ©rifier si « la rĂ©alitĂ© correspondait Ă  la thĂ©orie, c’est-Ă -dire si le sĂ©minaire madrilĂšne remplissait effectivement cette fonction de formation d’élites, de cadres administratifs et militaires ». L’auteur s’attache d’abord Ă  rappeler, d’une part, qu’au niveau de la politique Ă©ducative, la comparaison entre les diffĂ©rents plans d’études du SĂ©minaire rĂ©vĂšle une Ă©volution qui s’inscrit dans le contexte plus gĂ©nĂ©ral d’une tentative de rĂ©novation de l’enseignement supĂ©rieur en mĂȘme temps que d’une rĂ©flexiĂłn sur la mise en place d’un nouvel enseignement moyen ; et d’autre part que, sur le plan social, la crĂ©ation et le dĂ©veloppement du SĂ©minaire de Madrid dĂ©notent une volontĂ© politique, non de lutte contre la noblesse, mais de rĂ©gĂ©nĂ©ration de celle-ci, se traduisant en l’espĂšce par une amĂ©lioration de la formation Ă  la carriĂšre militaire. Le projet s’intĂšgre clairement dans une politique gĂ©nĂ©rale de la monarchie, dont l’enseignement n’est qu’un des aspects, visant Ă  promouvoir « une noblesse que ne fasse pas usage de ses richesses et prĂ©Ă©minences autrement que pour se rendre utile au reste du peuple », s’opposant Ă  « une noblesse qui ne sert de rien ». Pour rĂ©aliser ce dessein, conforme Ă  l’idĂ©al des LumiĂšres, l’on s’efforça d’attirer au SĂ©minaire les aĂźnĂ©s des grandes familles nobles pour les Ă©loigner de la vie oisive et leur procurer une formation adaptĂ©e aux emplois les plus Ă©levĂ©s de l’État auxquels leur lignage les dĂ©signait[48]. Soubeyroux constate ainsi qu’entre 1727 et 1752 :

  • 218 sortirent de l’établissement sans occuper d’emploi (60,38 %)
  • 108 choisirent la carriĂšre des armes (29,91 %)
  • 13 choisirent une carriĂšre dans l’administration (3,60 %)
  • 9 s’engagĂšrent dans une carriĂšre ecclĂ©siastique (2,40 %)
  • 7 choisirent une carriĂšre Ă  la Cour royale (1,93%)
  • 5 poursuivirent un cursus universitaire (1,38 %)
  • 1 opta pour une carriĂšre universitaire (enseignant) (0,27 %)[47].

Pour les 25 annĂ©es examinĂ©es par Soubeyroux, l’administration de l’État n’accueillit donc, selon les donnĂ©es de l’auteur, que treize anciens sĂ©minaristes (9 % des emplois). La carriĂšre ecclĂ©siastique fut choisie par neuf ex-Ă©lĂšves, dont cinq rejoignirent la Compagnie de JĂ©sus. Sept sĂ©minaristes trouvĂšrent Ă  s’employer Ă  la Cour royale, au service de Sa MajestĂ© : trois majordomes, deux employĂ©s de palais, un gentilhomme de chambre, et un page. Seuls cinq anciens sĂ©minaristes poursuivront un cursus dans l’un des collĂšges majeurs de l’universitĂ© de Salamanque ou d’AlcalĂĄ, proportion fort faible[49].

Sur la base de ces donnĂ©es, l’auteur conclut que le projet est en grande partie un Ă©chec : d’un cĂŽtĂ© parce que le SĂ©minaire ne rĂ©ussit Ă  attirer que principalement les fils de la petite noblesse provinciale, et seulement les puĂźnĂ©s de quelques grandes familles (critĂšre de l’élite de naissance) ; de l’autre, parce que le recrutement ne se distinguait pas non plus par le mĂ©rite des sĂ©minaristes inscrits (critĂšre de l’élite du savoir) ; en outre, le SĂ©minaire ne parvint pas Ă  s’ériger en une pĂ©piniĂšre pour les hautes fonctions de l’État[48]. Le fort pourcentage de nobles qui ne passĂšrent pas Ă  occuper quelque emploi aprĂšs leur sĂ©jour au SĂ©minaire pourrait donc, selon Soubeyroux, ĂȘtre interprĂ©tĂ© comme un Ă©chec de celui-ci Ă  figurer comme centre de formation de la noblesse se donnant pour tĂąche d’écarter la jeunesse de l’oisivetĂ© et la pousser Ă  se rendre active et utile, mĂȘme si l’auteur signale aussi que le SĂ©minaire Ă©tait ouvert Ă©galement aux PĂšres de leurs domaines (« Padres de sus Patrias »), qui se destinaient Ă  gĂ©rer leurs maisons et propriĂ©tĂ©s, sans viser Ă  aucun emploi. Plus de 75 % des Ă©lĂšves occupant un emploi ont choisi la carriĂšre militaire[50]. La majoritĂ© des fils de familles aristocratiques frĂ©quentant le SĂ©minaire dans la premiĂšre moitiĂ© du siĂšcle se contenteront de la formation gĂ©nĂ©rale, appropriĂ©e Ă  leur classe, que l’institution leur offrait. Pour ce qui est de la deuxiĂšme moitiĂ© du siĂšcle, les renseignements disponibles ne concernent que 56 sĂ©minaristes, dont 18 n’occuperont pas d’emploi. La destination des 38 qui « se casĂšrent » (« se acomodaron ») confirme les rĂ©sultats prĂ©cĂ©dents et la prĂ©dominance absolue de la carriĂšre militaire, choisie par 32 des anciens Ă©lĂšves[49].

L’historien Francisco AndĂșjar Castillo cependant arrive Ă  des conclusions qui diffĂšrent de celles de Soubeyroux, plus particuliĂšrement en ce qui touche aux dĂ©bouchĂ©s dans l’administration royale, l’auteur notant en effet d’abord que Soubeyroux comptabilisa, comme affectation des Ă©lĂšves, seulement les emplois consignĂ©s dans le premier registre du SĂ©minaire, mais la non consignation dans ces registres ne signifie pas dans tous les cas absence de future affectation au service de la monarchie. D’autre part, Soubeyroux semble considĂ©rer que le poste tel que notĂ© dans le registre reprĂ©sente le niveau finalement atteint au service du monarque ; p. ex., un Ă©lĂšve enrĂŽlĂ© dans les Gardes royales, rĂ©pertoriĂ© comme enseigne ou comme capitaine dudit corps, fut retenu tel par Soubeyroux, comme si sa carriĂšre professionnelle se fĂ»t arrĂȘtĂ©e Ă  ce stade[51]. En somme, tout ce qui n’apparaissait pas dans les registres n’a pas Ă©tĂ© pris en compte. Un cas flagrant est celui de MartĂ­n de Mayorga, sĂ©minariste entre et , de qui il est indiquĂ© dans les registres qu’il passa au service des Gardes d’infanterie espagnoles, mais non qu’il monta ensuite au grade de gĂ©nĂ©ral, puis au grade de marĂ©chal de camp, ni qu’il fut gouverneur et capitaine gĂ©nĂ©ral du Guatemala en 1772 et vice-roi de Nouvelle-Espagne en 1779[52]. Une difficultĂ© supplĂ©mentaire est le caractĂšre sommaire des registres postĂ©rieurs Ă  1765, lesquels se bornent Ă  signaler les noms des sĂ©minaristes et de leurs parents[53].

Le libertador du Río de la Plata José de San Martin avait été élÚve du Séminaire probablement entre 1785 et 1789.

Si, ainsi que le dĂ©montrent toutes les Ă©tudes publiĂ©es, l’armĂ©e Ă©tait la principale voie de sortie pour les sĂ©minaristes, il y a lieu alors d’examiner quel fut le poids des Ă©tudes au SĂ©minaire, de la formation scientifico-technique qui y Ă©tait dispensĂ©e, dans l’admission et dans l’avancement des officiers dans les forces armĂ©es bourbonniennes. Or il appert que tout au long du XVIIIe siĂšcle le critĂšre fondamental de promotion Ă©tait l’anciennetĂ©, ou, ce qui revient au mĂȘme, le nombre d’annĂ©es de service. Ce critĂšre prĂ©dominant ne pouvait ĂȘtre inflĂ©chi qu’en cas seulement de mĂ©rite exceptionnel en temps de guerre, ou Ă  la faveur d’une forte influence Ă  la Cour, ou au nom d’une origine sociale nobiliaire (moyennant, en mĂȘme temps, de solides appuis Ă  la Cour), ou encore par la voie pĂ©cuniaire, c’est-Ă -dire par l’achat direct d’un brevet d’officier de l’armĂ©e, tantĂŽt Ă  l’occasion de la levĂ©e de nouvelles unitĂ©s, tantĂŽt lorsque les postes se vendaient directement dans les officines du secrĂ©tariat du ministĂšre de la Guerre. Quant aux conditions d’accĂšs Ă  une place de cadet dans n’importe lequel des rĂ©giments, la seule chose requise Ă©tait de pouvoir produire une attestation de noblesse, au minimum la qualitĂ© d’hidalgo[54].

Au XVIIIe siĂšcle coexistaient en Espagne ce qu’AndĂșjar Castillo appelle une « armĂ©e courtisane » et une « armĂ©e rĂ©guliĂšre », avec deux filiĂšres trĂšs distinctes. L’appartenance Ă  la premiĂšre, c’est-Ă -dire aux corps des Gardes royales, et en particulier aux Guardias de Corps, comportait la jouissance d’une infinitĂ© de privilĂšges, parmi lesquels, comme l’un des principaux, la dĂ©tention de grades plus Ă©levĂ©s que dans l’armĂ©e rĂ©guliĂšre, lesquels grades permettaient ensuite d’atteindre Ă  celui de gĂ©nĂ©ral Ă  un rythme beaucoup plus rapide que pour ceux qui Ă©voluaient dans les rĂ©giments ordinaires. Eu Ă©gard Ă  ces critĂšres, la valeur Ă  assigner aux Ă©tudes Ă©tait fort rĂ©duite, voire quasi nulle, au sein d’une institution — les forces armĂ©es — qui considĂ©rait que la meilleure formation dont pouvait bĂ©nĂ©ficier un futur officier Ă©tait l’expĂ©rience directe sur le champ de bataille. Certes, avoir Ă©tudiĂ© les mathĂ©matiques dans les acadĂ©mies de Barcelone, d’Avila ou de Cadix reprĂ©sentait un mĂ©rite dans le parcours de tout officier, mais jamais un critĂšre prĂ©fĂ©rentiel, et la promotion d’un grade Ă  un autre ne dĂ©pendait pas de la compĂ©tence ni de l’aptitude professionnelle. Ce n’était que dans les armes techniques — artillerie et gĂ©nie militaire, qui du reste disposaient de leurs propres centres de formation —, que les Ă©tudes Ă©taient essentielles pour la future carriĂšre d’un officier. Cependant, ces deux armes n’eurent tout au long du siĂšcle qu’un poids trĂšs rĂ©duit dans l’ensemble de l’institution militaire[55].

On peut admettre Ă  coup sĂ»r que sur le total de 1023 « gentilshommes sĂ©minaristes », un tiers au moins trouvĂšrent un dĂ©bouchĂ© dans l’une des deux grandes destinations indiquĂ©es dans les statuts mĂȘmes du SĂ©minaire : la carriĂšre des armes et le service dans l’administration royale. Toutefois, cette proportion doit sans doute ĂȘtre corrigĂ©e vers le haut, jusqu’à au moins 40 %, compte tenu que depuis 1752 l’information relative Ă  la destinĂ©e des sĂ©minaristes se fait plus parcimonieuse et qu’il n’a Ă©tĂ© possible de comptabiliser que ceux qui avaient su se hisser Ă  un poste important dans les forces armĂ©es, dans la marine, ou dans l’administration. Progressivement, le SĂ©minaire des nobles allait se reconfigurer de plus en plus comme un centre de formation axĂ© avant tout sur la carriĂšre militaire, ce qui tendra Ă  s’accentuer encore aprĂšs la rĂ©ouverture du SĂ©minaire en 1770 ; en effet, pendant cette seconde pĂ©riode, le principal dĂ©bouchĂ© des sĂ©minaristes fut, et de loin, l’armĂ©e, laquelle non seulement prenait Ă  son compte 71 % du total de ceux entrĂ©s au service de la monarchie, mais encore absorba, au bas mot, 18 % du total des Ă©lĂšves ayant frĂ©quentĂ© les cours du SĂ©minaire entre 1770 et 1799. À ce poids relatif de l’armĂ©e s’ajoute le fait spĂ©cifique que dĂšs le dĂ©but une interconnexion existait entre le SĂ©minaire et l’un des corps les plus importants de l’armĂ©e : les Gardes d’infanterie espagnoles. Des 187 Ă©tudiants qui s’engagĂšrent ensuite dans la carriĂšre militaire, 35 % devaient aller, au dĂ©part du SĂ©minaire, s’intĂ©grer dans ce corps privilĂ©giĂ©, qui remplissait la double fonction d’assurer la garde du roi Ă  l’extĂ©rieur du palais royal, et d’intervenir en tant que troupe d’élite dans les conflits guerriers. Les salaires plus importants, les grades plus Ă©levĂ©s que ceux des autres corps d’armĂ©e — le grade de capitaine des Gardes d’infanterie Ă©quivalant au grade de colonel des armĂ©es royales —, un accĂšs facilitĂ© et plus rapide au gĂ©nĂ©ralat, un for spĂ©cifique, la proximitĂ© avec le monarque et des titres aristocratiques Ă©taient quelques-uns des avantages de ce corps[56].

Selon une premiĂšre approximation, seuls un peu plus de 10 % — la proportion oscillant entre 9,7 % dans la premiĂšre pĂ©riode et 11,7 % dans la seconde — des « gentilshommes » inscrits dans le SĂ©minaire des nobles entre 1727 et 1765 parvinrent Ă  occuper des postes de premier plan dans la haute administration[57]. Les autres dĂ©comptes fournissent des chiffres fort semblables, et laissent entrevoir le vaste Ă©ventail de postes dans la bureaucratie royale et l’enchevĂȘtrement complexe des serviteurs de palais dans les diffĂ©rentes Maisons royales. Il est vraisemblable que, en ce qui concerne l’administration, la hausse constatĂ©e de la proportion de sĂ©minaristes passant dans les officines royales puisse s’expliquer par le dĂ©passement du traditionnel conflit entre science et expĂ©rience : les fonctionnaires des secrĂ©tariats du Cabinet avaient de plus en plus besoin de connaissances dans leur domaine de travail, ce qui supposerait une certaine victoire pour les thĂšses favorables Ă  la formation thĂ©orique[58].

Mais plus important encore que la formation dans le choix des carriĂšres Ă©tait le facteur familial, comme l'atteste de façon Ă©loquente les chiffres calculĂ©s pour la pĂ©riode 1727-1765, lesquels font apparaĂźtre que 62 % des sĂ©minaristes remplissant des fonctions d’élite au service de la monarchie exerçaient ces fonctions dans le mĂȘme espace administratif, politique ou militaire que leurs pĂšres. Les charges certes ne s’hĂ©ritaient pas, mais l’influence familiale Ă©tait bien dĂ©cisive pour l’avenir de tout individu ambitionnant de se hisser aux postes de plus haut rang de la monarchie[59]. En effet, les Ă©tats de service des grands-pĂšres, pĂšres, oncles ou de quelque parent direct que ce soit furent toujours un Ă©lĂ©ment d’apprĂ©ciation dans l’ensemble des mĂ©rites de tout candidat Ă  un poste au service du roi. La « tradition familiale » servait toujours de point d’appui fondamental pour tout mĂ©moire de candidature Ă  telle ou telle fonction, agissait comme une sorte d’hĂ©rĂ©ditĂ© immatĂ©rielle, constituĂ©e des mĂ©rites accumulĂ©s des ancĂȘtres, et bĂ©nĂ©ficiait Ă  88 % des sĂ©minaristes ayant rĂ©ussi Ă  obtenir un emploi de haut rang dans l’administration. L’élite se reproduisait elle-mĂȘme et de surcroĂźt figurait dans cette pĂ©riode comme un groupe impermĂ©able, fermĂ©, avec peu de possibilitĂ©s d’ouverture vers des Ă©lĂ©ments extĂ©rieurs[60].

Il restait ensuite un faible nombre d’individus qui parvinrent, en dĂ©pit de mĂ©diocres appuis, Ă  s’introduire dans les hautes sphĂšres de la monarchie par leurs propres mĂ©rites, sans origine sociale illustre et sans parentĂšle prĂ©alablement installĂ©e dans les institutions. C’est le cas notoirement du Gaditan d’origine italienne Francisco de Paula Bucheli, qui s’inscrivit, en mĂȘme temps que son frĂšre RamĂłn, dans le SĂ©minaire en [61].

Références

  1. M. VerdĂș Ruiz (1990), p. 317-334
  2. (es) « Incendio del Hospital Militar », El Correo Militar, Madrid, no 4.001,‎ , p. 2 (ISSN 2171-701X, lire en ligne)
  3. J. Soubeyroux (1995), p. 201-204.
  4. Á. Fernåndez de los Ríos (1876), p. 615-616.
  5. R. de Mesonero Romanos (1844), p. 342.
  6. M. M. Moratinos Palomero, F. Moratinos MartĂ­nez, F. MartĂ­n Sierra & F. J. Guijarro Escribano (2003), p. 5-17.
  7. L. Conde-Salazar GĂłmez & F. Heras-Mendaza (2012).
  8. (es) « Madrid: incendio del Hospital Militar », La IlustraciĂłn Española y Americana, Madrid, vol. XXXIII, no 6,‎ , p. 93 (ISSN 1889-8394, lire en ligne)
  9. (es) « Institución - Seminario de Nobles de Madrid (España) », sur PARES, Portal de Archivos Españoles, Madrid, Gobierno de España. Ministerio de Cultura y Deporte (consulté le ).
  10. J. Soubeyroux (1995), p. 202.
  11. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 207.
  12. F. Aguilar Piñal (1980), p. 333. CitĂ© par F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 207.
  13. Sur la militarisation du Séminaire, voir aussi (es) José Luis Peset, « La enseñanza y la universidad : Ciencia, nobleza y ejército en el Seminario de Nobles de Madrid (1770-1788) », Valence, Biblioteca Valenciana Digital (BIVALDI) (consulté le ).
  14. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 207-208.
  15. JosĂ© Luis Peset Reig, La enseñanza militar y la nueva ciencia en la España ilustrada, dans E. Balaguer y E. GimĂ©nez (Ă©ds.), EjĂ©rcito, Ciencia y Sociedad en la España del Antiguo RĂ©gimen, Alicante, 1995, p. 388. CitĂ© par F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 208.
  16. F. Aguilar Piñal (1980), p. 343. CitĂ© par F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 208.
  17. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 208-209.
  18. Constituciones del Real Seminario de Nobles de Madrid, p. 18-19, cité par J. Soubeyroux (1995), p. 202.
  19. Constituciones del Real Seminario de Nobles de Madrid, p. 25, cité par J. Soubeyroux (1995), p. 203.
  20. J. Soubeyroux (1995), p. 203.
  21. Constituciones del Real Seminario de Nobles de Madrid, p. 74, cité par J. Soubeyroux (1995), p. 203.
  22. Constituciones del Real Seminario de Nobles de esta Corte. CitĂ© par F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 210.
  23. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 210.
  24. Plan de gobierno y estudios, formado de orden del Consejo, para los seminarios de educación de la nobleza y gentes acomodadas que se establezcan en las capitales de provincias, Madrid, Viuda de Marín, 1790. Cité par J. Soubeyroux (1995), p. 204.
  25. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 211.
  26. J. Soubeyroux (1995), p. 204.
  27. J. Soubeyroux (1995), p. 204-205.
  28. J. Soubeyroux (1995), p. 205.
  29. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 212.
  30. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 212-213.
  31. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 213.
  32. J. Soubeyroux (1995), p. 209.
  33. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 203-204.
  34. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 222.
  35. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 223.
  36. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 202.
  37. Historia de las Universidades, colegios y demås establecimientos de España, Madrid, éd. Fuenebro, tome III, p. 364. Cité par J. Soubeyroux (1995), p. 205.
  38. J. Soubeyroux (1995), p. 205-206.
  39. Constituciones del Real Seminario de Nobles de Madrid, p. 188. Cité par J. Soubeyroux (1995), p. 206.
  40. J. Soubeyroux (1995), p. 206.
  41. J. Soubeyroux (1995), p. 206-207.
  42. J. Soubeyroux (1995), p. 207.
  43. J. Soubeyroux (1995), p. 208.
  44. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 209.
  45. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 209-210.
  46. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 214.
  47. J. Soubeyroux (1995), p. 210.
  48. J. Soubeyroux (1995), p. 212.
  49. J. Soubeyroux (1995), p. 211.
  50. J. Soubeyroux (1995), p. 210.
  51. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 204.
  52. JosĂ© Antonio CalderĂłn Quijano, Los virreyes de Nueva España en el reinado de Carlos III, tome II, SĂ©ville, 1978. CitĂ© par F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 205.
  53. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 205.
  54. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 205-206.
  55. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 206.
  56. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 215-216.
  57. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 217.
  58. MarĂ­a Teresa Nava RodrĂ­guez, Del colegio a la secretarĂ­a: formaciĂłn e instrucciĂłn de ministros y oficiales en el setecientos español, dans E. MartĂ­nez Ruiz (coord.), Poder y mentalidad en España e IberoamĂ©rica, Seminario Hispano-Venezolano, Madrid, 2000, p. 453. CitĂ© par F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 218.
  59. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 218.
  60. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 219.
  61. F. AndĂșjar Castillo (2004), p. 220.

Bibliographie

  • (es) Ángel FernĂĄndez de los RĂ­os, GuĂ­a de Madrid: Manual del madrileño y del forastero, Madrid, Oficinas de la IlustraciĂłn Espanïžąola y Americana,‎ (lire en ligne).
  • (es) RamĂłn de Mesonero Romanos, Manual histĂłrico-topogrĂĄfico, administrativo y artistico de Madrid, Madrid, A. Yenes, (lire en ligne).
  • (es) P. Moratinos Palomero, M. M. Moratinos MartĂ­nez, F. MartĂ­n Sierra et F. J. Guijarro Escribano, « Historia del Instituto de Medicina Preventiva del E. T. "CapitĂĄn MĂ©dico RamĂłn y Cajal" », Medicina Militar, vol. 59, no 2,‎ , p. 5-17 (ISSN 0212-3568).
  • (es) Jacques Soubeyroux, « El real seminario de nobles de Madrid y la formaciĂłn de las Ă©lites en el siglo XVIII », Bulletin hispanique, vol. 97, no 1,‎ , p. 201-212 (ISSN 1775-3821, lire en ligne).
  • (es) Matilde VerdĂș Ruiz, « CreaciĂłn del Real Seminario de Nobles de Madrid, responsabilidad del arquitecto Pedro de Ribera en su proceso constructivo », Anales del Instituto de Estudios Madrileños, Instituto de Estudios Madrileños, vol. 28,‎ , p. 317-334 (ISSN 0584-6374, lire en ligne).
  • (es) Francisco AndĂșjar Castillo, « El Seminario de Nobles de Madrid en el siglo XVIII. Un estudio social », Cuadernos de Historia Moderna (anejos), Madrid, Universidad Complutense de Madrid, vol. III,‎ , p. 201-225 (ISBN 84-95215-92-6, lire en ligne, consultĂ© le ).
  • (es) Francisco Aguilar Piñal, « Los Reales Seminarios de Nobles en la polĂ­tica ilustrada española », Cuadernos Hispanoamericanos, Madrid, Agencia Española de CooperaciĂłn Internacional (AECID), no 355,‎ , p. 329-349 (lire en ligne).
Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplĂ©mentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimĂ©dias.