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Marais salant

Les marais salants ou salins correspondent à des installations d'origine anthropique dont le but est de favoriser l'extraction et la collecte de sel marin à partir de l'entrée d'une ressource, l'eau de mer[1]. Il s'agit le plus souvent d'un dispositif de barrages, de vannes, de canaux et de différents bassins de rétention menant finalement à des bassins de faible profondeurs appelés carreaux, dans lesquels est récolté le sel, obtenu par l'évaporation de l'eau de mer, sous l'action combinée du soleil et du vent.

Marais salants de la baie de San Francisco.

Ils constituent une exploitation de type agricole, dont l'activité se nomme saliculture, ou sous sa forme ancienne, la saunerie. Les personnes qui récoltent le sel des marais salants sont appelées des saliculteurs, sauniers ou paludiers[2], voire marin-salants. Sous l'Ancien Régime, les paludiers étaient ceux qui récoltaient le sel, le terme de sauniers désignant ceux qui le transportent pour le vendre.

Sauner (latin populaire salinare, du latin classique salinae, saline) est l'action de produire du sel Ă  partir de la saumure.

Principes

Hormis quelques exceptions dans des lacs salĂ©s, les salines sont littorales et fonctionnent avec de l'eau de mer. Celle-ci est conduite par gravitĂ© lors des marĂ©es moyennes et fortes (coefficient supĂ©rieur Ă  80) Ă  travers un grand rĂ©seau de canaux d'amenĂ©e (les Ă©tiers) jusqu'Ă  des rĂ©servoirs ou bassins intermĂ©diaires, appelĂ©s vasiĂšres et adernes. De lĂ , elle est ensuite conduite dans les bassins de rĂ©colte, les cristallisoirs ou Ɠillets. En saison chaude, tout au long de ce parcours, la salinitĂ© augmente rĂ©guliĂšrement avant mĂȘme l'entrĂ©e de l'eau dans les cristallisoirs.

Dans les vasiĂšres, profondes de plusieurs dizaines de centimĂštres, les matiĂšres en suspension se dĂ©posent par dĂ©cantation, formant une couche de plusieurs centimĂštres par an, nettoyĂ©e durant l'hiver. En plus d'ĂȘtre un bassin de dĂ©cantation, la vasiĂšre peut parfois servir de rĂ©serve d’eau pendant l’entretien et la rĂ©colte (pĂ©riode de fĂ©vrier Ă  octobre). On y retrouve parfois des rats ou des souris.

Le cobier, moins profond (quelques centimĂštres), assure une dĂ©cantation secondaire et permet d'entamer le processus d'Ă©vaporation proprement dit. L'eau de mer contient en moyenne 35 g de sel par litre.

Les fares sont des piĂšces d’eau rectangulaires qui permettent une augmentation importante du degrĂ© de salinitĂ© de l’eau.

Enfin, les adernes ont deux fonctions : poursuivre l’évaporation tout en stockant l’eau nĂ©cessaire au remplissage des Ɠillets (elles permettent de rĂ©approvisionner, en eau fortement chargĂ©e en sel, les Ɠillets aprĂšs une journĂ©e d’évaporation).

À partir de lĂ , des canaux plus fins, les sauniers, alimentent en eau fortement chargĂ©e en sel des aires de cristallisation ou cristallisoirs, frĂ©quemment appelĂ©s Ɠillets ou aire saunante. Dans ces petits bassins rectangulaires gĂ©nĂ©ralement, la faible couche d'eau (infĂ©rieure au centimĂštre, de l'ordre de mm en gĂ©nĂ©ral) est favorable Ă  son rĂ©chauffement et donc Ă  son Ă©vaporation jusqu'Ă  prĂ©cipitation du sel. Les bords de l’Ɠillet sont gĂ©nĂ©ralement plus creux (en pente douce sur les cinquante premiers centimĂštres du bord) pour rĂ©cupĂ©rer un maximum de fleur de sel car autrement il n’y a pas une Ă©paisseur d’eau suffisante pour la rĂ©colte.

Dans les cristallisoirs, le sel est récolté sous forme de relativement gros cristaux précipitant au fond de la mince couche d'eau saturée. Le saunier peut aussi cueillir de la fleur de sel constituée de cristaux plus petits restant à fleur d'eau si les conditions sont favorables (présence de vent).

La production elle-mĂȘme n'a lieu que de mi-juin Ă  mi-septembre dans l'hĂ©misphĂšre nord ; le reste de l'annĂ©e est consacrĂ© Ă  l'entretien de la saline ou Ă  sa prĂ©servation des intempĂ©ries par submersion par la mer.

En Méditerranée, le soleil accélÚre l'évaporation ; ainsi la saison de production est plus longue et surtout la sécheresse de l'été donne la possibilité d'effectuer une récolte de sel sec, naturellement blanc, alors qu'en Bretagne, la récolte se fait de juin à septembre, donnant un sel gris et humide.

En effet, sur la façade Atlantique, et notamment sur la presqu’üle de GuĂ©rande et les Ăźles de RĂ© et Noirmoutier, la rĂ©colte du sel s’effectue Ă  de juin Ă  septembre, lorsque les conditions mĂ©tĂ©orologiques sont rĂ©unies. Depuis des millĂ©naires, la cueillette du sel est rĂ©alisĂ©e Ă  la main, de façon artisanale par les paludiers, Ă  l’aide d’outils comme la lousse pour la Fleur de sel et le las pour le gros sel.

La Fleur de sel est quant Ă  elle rĂ©coltĂ©e Ă  la surface de l’eau. Ses cristaux forment une pellicule fine et fragile qui flotte Ă  la surface des Ɠillets, et que les paludiers peuvent alors cueillir dĂ©licatement pour prĂ©server toutes ses qualitĂ©s.

Couleur

Marais salant Ă  Fuencaliente de la Palma. Leur couleur est due Ă  l'algue Dunaliella salina. Mars 2019.

La couleur des marais salants varie selon la salinité et dépend des micro-organismes présents dans l'eau. Elle peut aller du vert pùle au rouge intense.

Les marais dont la salinité est plutÎt basse auront une couleur verte du fait de la prédominance d'algues de cette couleur. Quand la salinité augmente, l'algue Dunaliella salina produit une teinte s'étalant du rose au rouge. De petites crevettes, Artemia salina, évoluant dans des eaux de salinité moyenne donnent une teinte orangée aux marais[3]. Des bactéries comme Stichococcus contribuent également aux teintes.

Conditions de production

Toutes les salines ne sont pas littorales, telles les Salines de Bilma, au Niger, ici en décembre 1985.

Un cristallisoir mesure de 20 Ă  100 m2. La surface des cristallisoirs reprĂ©sente une faible fraction de la surface totale de la saline. De nombreux paramĂštres influent sur la production annuelle d'un Ɠillet. Elle est de l'ordre d'une tonne de sel.

Le savoir-faire du saunier repose avant tout sur l'exploitation optimale des conditions naturelles, surtout mĂ©tĂ©orologiques. L'Ă©vaporation est accĂ©lĂ©rĂ©e par les facteurs suivants (par ordre d'importance) : (1) le vent, (2) une Ă©paisseur d’eau aussi faible que possible, (3) le soleil et (4) la mise en mouvement de l'eau. En dehors de la pĂ©riode de production, le saunier a Ă©galement une importante responsabilitĂ© dans l'entretien individuel et collectif de la saline. Ces divers investissements justifient souvent la recherche d'une reconnaissance quelconque de la qualitĂ© spĂ©cifique du sel produit.

Utilisation

Le sel marin peut ĂȘtre utilisĂ© pour l'alimentation, l'agroalimentaire (agent conservateur), certains usages industriels ou de loisirs.

Il est aussi mais plus rarement et sous forme de déchets (sédiments de salines) utilisé comme agent fondant comme sel de déneigement et pour le déglaçage des routes (on lui préfÚre le sel de carriÚre moins coûteux).

Principales zones de marais salants

Caraïbes néerlandaises

Exploitation industrielle de salines Ă  Bonaire.
Exploitation industrielle de salines Ă  Bonaire, terminal de chargement marin.

Espagne

  • Les Salines de la Trinidad (delta de l'Èbre).

Italie

États-Unis

  • Les Salines de San Francisco[4].

CĂŽte atlantique

Ils se caractérisent par une exploitation artisanale non mécanisée avec de faibles volumes de production.

À titre d'exemple, les marais salants de GuĂ©rande, en Loire-Atlantique, produisent en moyenne chaque annĂ©e prĂšs de dix mille tonnes d'un sel naturellement riche en chlorure de magnĂ©sium et oligo-Ă©lĂ©ments. Les marais salants de GuĂ©rande sont exploitĂ©s depuis l'antiquitĂ©[8] pour la production de fleur de sel, de gros sel et de sel fin. La production de sel est rĂ©alisĂ©e dans des exploitations artisanales Ă  taille humaine oĂč les paludiers utilisent un savoir-faire ancestral[9] et des outils comme la lousse ou le las pour rĂ©colter le sel Ă  la main. Cette technique de rĂ©colte est rĂ©alisĂ©e sans l'utilisation de machines[10], ce qui permet de conserver l'authenticitĂ© et l'intĂ©gritĂ© du sel naturel.

CÎte méditerranéenne

Production souvent fortement mĂ©canisĂ©e, avec des volumes trĂšs importants. La Compagnie des Salins du midi produit quatre millions de tonnes par an. Le groupe est Ă©galement le seul producteur europĂ©en Ă  mettre en Ɠuvre les trois technologies de production (solaire, thermique et miniĂšre).

  • « Camelles » (colline) de sel aux Salins du Midi Ă  Salin-de-Giraud (Arles).
    « Camelles » (colline) de sel aux Salins du Midi à Salin-de-Giraud (Arles).

D'autres salins historiques ne produisent plus qu'en quantité limitée.

Maroc

Mexique

Commune de Ngathie Naode/Kaolack

Parasel, Farabougoun, Ndoffane Massercine, Daga DiakhatĂ©, Keur Toro, un chapelet de villages situĂ©s aux environs de Kaolack et qu'on dĂ©passe en allant vers Kaffrine et Tambacounda. Ils constituent en outre la « route du sel ». Ce dernier, omniprĂ©sent et stockĂ© tout au long de la route, se devine par ailleurs sur le littoral Ă  droite, Ă  travers les incursions salines du Saloum (bras de mer) sur le continent. À un point presque anonyme de ce cercle vertueux de production de ce que certains auteurs ont appelĂ© l'« aumĂŽne de Dieu », se dresse Ngathie NaoudĂ©, l'un des plus grands villages centres traditionnels de collecte du sel. Ngathie NaoudĂ© entretient encore l'Ăąme d'une pratique hĂ©ritĂ©e de la tradition et qui, ailleurs, se motorise et se mĂ©canise de plus en plus. Comme Ă  la sociĂ©tĂ© nouvelle des salins du Saloum. Tout le contraire de Ngathie NaoudĂ© oĂč tout est encore artisanal. À la faveur de la marĂ©e haute, une ouverture canalisĂ©e est faite du bras de mer vers un point spĂ©cifique du continent amĂ©nagĂ© Ă  cet effet qui ainsi se remplit des dĂ©versements d'eau saline. Des personnes, choisies par la communautĂ©, sont prĂ©posĂ©es pour la surveillance de l'Ă©tang salĂ© dont le contenu liquide s'Ă©vapore Ă  longueur des jours de veille. AprĂšs dessĂšchement de l'Ă©tang artificiel (au bout de quinze Ă  vingt jours), les gardiens s'en vont au village porter la bonne nouvelle. Les anciens se rĂ©unissent alors afin de fixer, pour toute la communautĂ©, le jour de la rĂ©cole, la plupart du temps un lundi ou un jeudi, prĂ©cise Moussa Faye, le chef de village de Ngathie NaoudĂ©. Ceci conformĂ©ment Ă  l'esprit de la tradition qui veut qu'il y ait des jours prisĂ©s par les esprits qui favorisent les grandes entreprises. La population est alors invitĂ©e Ă  une rĂ©colte individuelle dont le produit continue Ă  ĂȘtre rĂ©partie en trois tas, comme du temps des anciens. Un lot revenant Ă  la communautĂ© rurale qui y tire l'essentiel de ses revenus, Ă©valuĂ©s, selon la fluctuation du prix du sel, entre deux et quatre millions de francs CFA par saison, souligne M. Faye. Absolument rien n'a Ă©voluĂ© de ce point. Jusqu'aux offrandes que l'on fait Ă  l'endroit des esprits, en particulier quand la saison semble donner des signes de morositĂ©. La seule touche moderne introduite dans la pratique est venue de l'UNICEF qui encadre les populations de Ngathie NaoudĂ© dans l'iodation du sel rĂ©coltĂ© ici. Le reste relĂšve tout entier de la tradition, d'une certaine culture perpĂ©tuĂ©e et acquise des ancĂȘtres. De la stratĂ©gie d'emprisonnement du salin Ă  la rĂ©colte, phase la plus exaltante de ce travail. Tout est manuel. Et puis, il y a ce corps Ă  corps intime, presque amoureux, avec la rĂ©colte. Une dimension qui est abolie au niveau de la sociĂ©tĂ© nouvelle des salins du Saloum, mĂ©canique et tout motorisĂ©e. La sociĂ©tĂ© s'est en outre dotĂ©e des formes de gestions les plus actuelles, participation au capital, conseil d'administration, etc. Tout ce qui rend anonyme, et Ă  outrance, le fruit du travail, l'effort du travailleur. Pour saisir cette dimension manuelle, humanisante de la rĂ©colte du sel telle qu'elle se fait Ă  Ngathie NaoudĂ©, il faut se laisser conter en images la descente des femmes dans l'Ă©tang salĂ©, le travail de cueillette avec les mains, la remontĂ©e en terre pleine, le travail de lavage du sel Ă  l'eau claire. Tous les petits soins apportĂ©s cette activitĂ© et qui rendent compte de la dimension presque culturelle et patrimoniale de la rĂ©colte traditionnelle du sel Ă  Ngathie NaoudĂ© et dans tous les villages environnants. Un bienfait du Saloum ? Toujours est-il que par la grĂące de cette activitĂ©, ces localitĂ©s peuvent revendiquer un progrĂšs dans l'intĂ©gration ouest-africaine et le commerce intrafricain. Les chasseurs et autres courtiers de cette denrĂ©e prĂ©cieuse, prĂ©sents ici, viennent en effet du Mali, de la CĂŽte d'Ivoire et d'ailleurs. De plus, Ngathie NaoudĂ© qui reste une localitĂ© essentiellement paysanne a comme inversĂ© le spectre de l'exode rural et de la mystique urbaine. Ici, explique Moussa Faye, les jeunes ne vont presque plus en ville pendant la saison sĂšche. Ils s'investissent plutĂŽt dans cette activitĂ© mĂȘme si, ajoute-t-il, ils prĂ©fĂšrent la mise en sac et le transport Ă  la rĂ©colte, qui Ă©choit essentiellement Ă  la gent fĂ©minine. Pour dire que quand la rĂ©volution saline est Ă  l'Ɠuvre, cette mystique urbaine nĂ©e du mirage de l'urbanitĂ© et de l'exode rural s'Ă©teint de plus en plus. Alors mĂȘme que Ngathie NaoudĂ© s'africanise au mĂȘme rythme.

L'exploitation du sel constitue la principale activité des populations pendant la période allant de janvier à mai. Le conseil rural tire l'essentiel de ses recettes à partir de cette ressource naturelle (prÚs de quatre millions par an). Aussi, de cette exploitation du sel, les populations de cette communauté rurale parviennent à disposer de revenus permettant de faire face à leurs besoins quotidiens. Cependant, dans cette localité du département de Kaolacks, on note une insuffisance notoire des infrastructures : hydrauliques, routes, électricité, téléphone De plus, l'inexistence d'une ambulance constitue une des préoccupations de ses populations.

Pour quelqu'un qui effectue ce voyage pour la premiĂšre fois Ă  partir de Fatick, il faut aller jusqu'Ă  Kaolack, puis emprunter la route nationale no 1. Tout juste aprĂšs Kahone, une commune rattachĂ©e maintenant au dĂ©partement de Kaolack, des centaines de sacs de sels proposĂ©s Ă  la vente sont disposĂ©s tout le long de la route. Ce qui laisse penser que l'exploitation du sel dans cette zone constitue une des principales activitĂ©s des populations dans cette zone. Et c'est le mĂȘme constat jusqu'Ă  Ngathie NaoudĂ©. Dans cette communautĂ© rurale, la ressource naturelle qu'est le sel constitue un atout de taille. Chaque annĂ©e, plus prĂ©cisĂ©ment de janvier Ă  mai, la rĂ©colte du sel devient pratiquement l'unique activitĂ© des habitants de ce terroir. Et c'est le conseil rural qui organise l'exploitation de la ressource. DĂšs le dĂ©but du mois de janvier, le conseil rural recrute des gens qu'on appelle lĂ -bas « Sakh-Sakh ». Ce sont eux qui veillent au niveau des salins. Et lorsque le sel arrive Ă  maturitĂ©, il choisit le jour du dĂ©marrage des activitĂ©s mais en informant la veille les populations de la communautĂ© rurale. Ainsi, c'est le grand rush vers les salins. Selon un conseiller rural et prĂ©sident de la commission « Environnement et hydrauliques », prĂšs de huit cents personnes s'investissent dans cette activitĂ© (hommes et femmes) bien organisĂ©e par le conseil rural. Si une personne parvient Ă  extraire le sel, elle le divise en trois parties dont l'une revient Ă  la communautĂ© rurale. Pour la commercialisation, notre interlocuteur soutient que des « dioulas » venant du pays, du Mali, de la Gambie et mĂȘme de la GuinĂ©e-Bissau, viennent acheter le produit. Le sac de 100 kg est vendu au maximum Ă  750 francs. AprĂšs la commercialisation, le conseil rural dĂ©sintĂ©resse les veilleurs, les contrĂŽleurs et ceux de la commission de vente en leur octroyant le tiers de ses recettes tirĂ©es de cette ressource. Ainsi, le conseil communal affirme que chaque annĂ©e, le conseil rural fait entrer dans ses caisses prĂšs de quatre millions de francs avec l'exploitation du sel et que des centaines de familles parviennent Ă  disposer de revenus leur permettant de vivre pour le reste de l'annĂ©e.

Histoire

Les premiers marais salants semblent avoir Ă©tĂ© inventĂ©s par les Romains sur le pourtour de la MĂ©diterranĂ©e ainsi qu'en Europe de l'Ouest, Ă  cette Ă©poque dans le nord de la France et en Belgique, ou plus au sud en VendĂ©e (BrĂ©tignolles-sur-Mer), en Loire-Atlantique (Piriac-sur-Mer) ou encore dans la zone de l'actuel marais poitevin[11], la production le sel Ă©tait « ignigĂšne », c'est-Ă -dire issue de l'Ă©vaporation de saumures dans des fours alimentĂ©s par du bois. Les saumures Ă©tant elles-mĂȘmes issues de grandes quantitĂ©s d'eau de mer. Elles Ă©taient chauffĂ©es et cristallisĂ©es dans de fins creusets d'argile dont le gabarit a Ă©voluĂ© dans le temps et d'une rĂ©gion Ă  l'autre. Il faut attendre le Moyen Âge pour que l'Atlantique voit apparaĂźtre les premiers amĂ©nagements des marais salants en eaux et en bassins.

Mais bien plus tĂŽt les Étrusques, les PhĂ©niciens, les Grecs construisaient des marais salants. Les routes du sel sont Ă©voquĂ©es dĂšs l'AntiquitĂ©. HĂ©rodote et Strabon, gĂ©ographes, Ă©voquent ce commerce du sel dans de nombreux textes. Le sel circulait non seulement dans le bassin mĂ©diterranĂ©en, mais Ă©galement dans le Moyen-Orient sur les routes qui joignent le golfe Persique Ă  la MĂ©diterranĂ©e orientale se croisant Ă  Tadmor, l'antique Palmyre, dont les salines Ă©taient considĂ©rables. On voit les rivages de la mer Noire devenir l'ouverture des chemins du sel Ă  l'Europe orientale et ainsi fournir Ă  Byzance une monnaie d'Ă©change avec les Slaves.

Le sel transitait par Rome venant des salines d'Ostre par le sud, et il partait vers le nord par la « via salaria» (la route du sel) pour aller jusqu'aux confins septentrionaux de l'empire.

En Provence on a commencé à exploiter le sel durant l'Antiquité (à l'époque des Grecs), les Phocéens en faisaient le commerce. Puis à partir du VIe siÚcle, le Languedoc (marais de Peccais), la Provence et la Sardaigne deviennent des producteurs de sel. Des salins, développés dans ces régions à partir de cette époque, sont toujours en activité.

La gabelle Ă©tait une taxe sur le sel en France au Moyen Âge et Ă  l'Ă©poque moderne. Les contrebandiers s'opposant Ă  cette taxe, dont l'un des plus connus est Louis Mandrin, Ă©taient appelĂ©s des faux-sauniers, en oppositions aux sauniers producteurs de sel.

Aspects sanitaires et environnementaux

La vie biologique de la saline est contrainte par la forte teneur en sel qui ne permet la vie que de certains microbes et de quelques crustacés (artemia). Cette vie microbienne, et l'effet du rayonnement UV solaire contribuent à assainir l'eau d'une grande partie de sa pollution organique (si les contaminants sont biodégradables).

Lors de l'Ă©vaporation de l'eau, certains polluants sont fortement concentrĂ©s dans le sĂ©diment de la saline et peuvent ĂȘtre retrouvĂ©s dans le sel rĂ©coltĂ© Ă  sa surface[12]. Le plomb est l'un des contaminants les plus frĂ©quents des salines[12], et problĂ©matique car source de saturnisme. Le sel marin ainsi rĂ©coltĂ© en contient toujours un peu, mais habituellement moins de mg/kg (seuil Ă  ne pas dĂ©passer)[13].

Des contaminations « externes » peuvent survenir Ă  partir de l'eau introduite dans la saline et/ou de retombĂ©es Ă  partir de l'environnement, et notamment par du plomb de chasse et/ou de ball-trap. Ainsi en 2018 Ă  la suite d'analyses faites par la DGCCRF[14] sur du sel de GuĂ©rande vendu par Lidl, le journal Sud Ouest relaye[15] l'information qu'une partie du sel de GuĂ©rande mis sur le marchĂ© d' Ă  (sous forme de sachets, de bocaux de fleur de sel et de gros sel) contenait environ 11 mg de plomb par kg soit plus de cinq fois le seuil maximal (fixĂ© Ă  mg/kg). Un seul bassin est touchĂ© par ce phĂ©nomĂšne et la cause de la contamination est un apport de grenaille de plomb autrefois reçue d'un ball-trap proche, comme l’avait dĂ©jĂ  fait constater par huissier l’ancien propriĂ©taire du lieu (seize ans plus tĂŽt, en 2002[15]). Depuis, la sociĂ©tĂ© de chasse de La Turballe a Ă©loignĂ© son ball-trap annuel de trois cents mĂštres, mais la contamination persiste (et si le plomb est interdit depuis 2005 pour les tirs portĂ©s vers les zones humides, il reste autorisĂ© et mĂȘme parfois imposĂ©[16] pour le ball-trap).

Le sel est connu pour fortement augmenter la corrosion du plomb-métal (et de la plupart des métaux) et pour augmenter la lixiviation de ces métaux dans le sol ou le sédiment (plus encore si le milieu est acide)[17].

On sait depuis plus d'un siĂšcle que, comme l'eau acide, l'eau salĂ©e interagit avec certains composĂ©s du plomb en les solubilisant[18]. Il a mĂȘme Ă©tĂ© proposĂ© dans le passĂ© d'utiliser de l'eau salĂ©e pour dĂ©contaminer (en les lavant) des sols polluĂ©s par du plomb[19], dont des « buttes de tir » contaminĂ©es par le plomb de munitions[20]. Le sel augmente la mobilitĂ© et la phytotoxicitĂ© du plomb et peut aggraver la pollution d'eaux de drainage issues d'un sol contenant du plomb[21]. Dans les salines, le plomb peut contaminer le sel mais aussi les petits crustacĂ©s (type Artemia qui s'y dĂ©veloppent)[22].

Notes et références

  1. En espagnol, il s'agit des salinas. L'ancien français saline s'applique dÚs l'époque moderne et encore aujourd'hui à des exploitations de sel terrestres.
  2. Selon l'auteur d'un livre ancien ré-édité en 2015, saunier était en France plutÎt employé au sud de la Loire, tandis que paludier était employé au nord. Voir (en) EugÚne Lefebvre et Ligaran, Le sel: Essai sur la chimie, Ligaran, , 85 p. (ISBN 978-2-335-05465-1, lire en ligne).
  3. la-palma24.info.
  4. (en) « Salt Ponds of San Francisco », sur Atlas Obscura (consulté le ).
  5. Alice Drouin, « Les marais salants d'Aunis et de Saintonge (jusqu'en 1789). II -Île de RĂ© », dans Revue de Saintonge & d'Aunis, 1936, 46e vol., 1re livraison, p. 17-19, lire en ligne.
  6. Alice Drouin, « Les marais salants d'Aunis et de Saintonge (jusqu'en 1789). III -Saintonge », dans Revue de Saintonge & d'Aunis, 1936, 46e vol., 1re livraison, p. 19-32, lire en ligne.
  7. Alice Drouin, « Les marais salants d'Aunis et de Saintonge (jusqu'en 1789). IV -Île d'OlĂ©ron », dans Revue de Saintonge & d'Aunis, 1936, 46e vol., 1re livraison, p. 32-33, lire en ligne.
  8. Marais salants de Guérande.
  9. Comité des Salines de France, L'exploitation du sel dans la France protohistorique et ses marges. Table ronde du Comité des Salines de France, Paris, 18 mai 1998.
  10. Jeanneau S. (1997), « Dynamique des sels nutritifs, des métaux en traces et des bactéries hétérotrophes dans le systÚme salicole de Guérande (Loire atlantique) » (thÚse, Nantes), résumé.
  11. Boury, M. (1938), « Le plomb dans le milieu marin », Revue des Travaux de l'Institut des PĂȘches Maritimes, 11(2), 157-165.
  12. MinistĂšre de l'Économie et des finances (2018), Avis de rappel de sel de guĂ©rande.
  13. Du plomb découvert dans du sel de Guérande, Sud Ouest, 2018/03/05.
  14. Exemple : la page de présentation du ball-trap du BTC Les Gardes Celtiques précise qu'une condition pour y participer est d'avoir son fusil personnel et ses cartouches chargées à 28 grammes de plomb maximum (no 9 à 7). Les cartouches « à billes d'acier sont interdites » (consulté 2018-03-07).
  15. http://espace.inrs.ca/1763/ résumé INRS.
  16. Mauri L. (1907), Recherches sur la décomposition de l'oxalate de plomb par des solutions salines, L. Reggiani.
  17. Djedidi, Z., Narasiah, M. S. K., Cheikh, M. R. B., Blais, M. J. F., Mercier, M. G. et Drogui, M. P. (2004), EnlÚvement du plomb de sol contaminé par lixiviation chimique.
  18. Guemiza K. (2013), Décontamination à l'échelle pilote des particules fines de sols de buttes de tir à l'arme légÚre polluées en cuivre, plomb, antimoine et zinc par lixiviation acide et saline (thÚse, Université du Québec, Institut national de la recherche scientifique).
  19. El-Azab K.M. (2005), Mobilité, biodisponibilité et phytotoxicité du plomb et du zinc en conditions salines : cas du ray-grass dans une terre argilo-limoneuse et application aux risques de réutilisation des eaux de drainage pour l'irrigation dans le delta du Nil (thÚse, Nancy 1).
  20. Aloui, N., Amorri, M. et Choub, L. (2010), Étude d’impact des mĂ©taux traces (Hg, Cd, Pb, Cu et Zn) dans les cystes et la biomasse d’Artemia exploitĂ©s dans la saline de Sfax.

Voir aussi

Bibliographie

  • Gildas Buron, Hommes du sel - Bretagne des marais salants, Skol Vreizh, Morlaix (ISBN 2-911447-42-5).
  • Gildas Buron, Bretagne des marais salants - Deux mille ans d'histoire, Skol Vreizh, Morlaix (ISBN 2-911447-58-1).
  • Jean-Claude Hocquet, Hommes et paysages du sel, une aventure millĂ©naire, Actes Sud, 2001.
  • Georges Drano, Nicole Drano et les Ă©lĂšves de l’école publique d’AssĂ©rac, Les Marais-salants bretons, dans Chantier BibliothĂšque de travail 944 de l'ICEM, , texte par Marjolaine Billebault [PDF], dĂ©cembre 2012.

Articles connexes

Liens externes

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