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Lamproie de rivière

Lampetra fluviatilis

La lamproie de rivière ou lamproie fluviatile (Lampetra fluviatilis) est une espèce d'agnathes, proche des poissons, filtreur à l'état larvaire et ectoparasite à l'âge adulte, en voie de régression. Elle a aussi autrefois, comme la lamproie marine (Petromyzon marinus) ou la lamproie de Planer (Lampetra planeri), été appelée « Poisson flute » à cause des alignements de trous qui ouvrent sur les branchies.

C'est une espèce migratrice.

Classification

Cette espèce fait partie des agnathes qui ne sont pas considérés comme des poissons au sens strict (les lamproies n'ont pas de mâchoires mais une ventouse, pas d'écailles, ni nageoires paires, ni surtout de colonne vertébrale osseuse).

Elles ont conservé des caractéristiques d'espèces primitives, tout en ayant développé un comportement et un mode de vie très spécialisé (ectoparasitisme chez l'adulte, régime zooplanctonique chez l'alevin ; caractéristique très rare chez les poissons).

Paléontologie

C'est une espèce dont les ancêtres et origines évolutives sont mal connus car, faute de squelette, d'écailles et de cartilages durs, les lamproies sont mal conservées par la fossilisation, mais elles ont les caractéristiques d'espèces supposées anciennes, antérieures aux poissons probablement.

Habitat, répartition

C'est un vertébré qui était présent, et souvent jugé abondant (moins que l'anguille toutefois) en Europe, du bassin méditerranéen à la mer Baltique et pour toute la façade atlantique jusqu'en mer d'Irlande, ainsi que — potentiellement — dans tous les fleuves s'y jetant ou les canaux afférents.
En France ce poisson était au XIXe siècle réputé le plus fréquent ou le plus facile à pêcher dans le bassin de la Loire où au XIXe siècle sa pêche s'est presque industrialisée.

Description

  • Taille maximale de 25 Ă  40 cm pour un poids d'environ 60 g, jusqu'Ă  50 cm pour le mâle.
  • Poids maximum : 150 g.
  • LongĂ©vitĂ© : 7 ans en moyenne et jusqu'Ă  10 ans (il est possible qu'en raison des polluants qu'elle bioaccumule l'âge moyen soit en diminution).

Elle se distingue de la lamproie marine par :

  • une taille deux fois plus petite, et une robe non marbrĂ©e ;
  • un disque buccal prĂ©sentant un moins grand nombre de « dents » (comme chez toutes les lamproies, les dents sont indĂ©pendantes de la mâchoire et la langue en est Ă©galement dotĂ©e[1]).

Dimorphisme sexuel :

  • Le mâle a les lèvres moins Ă©paisses et la bouche plus large (Ă  taille Ă©gale, par rapport Ă  une femelle).
  • La femelle est plus grande que le mâle, atteignant environ 45 cm.

Cycle de vie et Ă©thologie

En Europe de l'Ouest, la reproduction débute fin avril et se termine fin mai.

Les lamproies pondent dans des nids de galets, cailloux sable et graviers, semi-circulaire d'un diamètre pouvant mesurer de 50 cm Ă  m, sur des faciès de plat-courant et gĂ©nĂ©ralement plutĂ´t profonds (plus de 50 cm).

La femelle pondrait jusqu'Ă  120 000 Ĺ“ufs (contre 260 000 pour sa cousine marine). Les deux gĂ©niteurs (mâle et femelle) meurent après la ponte.

Les larves (ammocètes) passent environ un mois dans le nid oĂą elles se nourrissent de bactĂ©ries, diatomĂ©es et microdĂ©bris, puis s'en Ă©chappent pour rejoindre des zones de moindre courant, sablo-limoneuses dites « lits d'ammocètes » oĂą elles vont grandir durant 5 Ă  7 ans avec un rĂ©gime supposĂ© herbivore et dĂ©tritivore. Ă€ la taille d'environ 15 cm, les ammocètes se mĂ©tamorphosent en jeunes adultes capable d'entamer la dĂ©valaison (hivernale) vers la mer. On pensait Ă  la fin du XIXe siècle que si la lamproie passe au moins 4 ans au stade larvaire, une fois entamĂ©e, la mĂ©tamorphose se fait très brutalement (en une dizaine de jours selon F. BarthelĂ©my [1], avec formation du tube respiratoire, sortie des dents, disparition du velum de la bouche, la laitance transparente devient opaque et le sexage se fait alors qu'avant la larve prĂ©sentait les deux sexes distincts et sĂ©parĂ©s[1]).

Sur le littoral la croissance se poursuit durant 2 ans environ, avec un mode de vie qui devient ensuite parasitaire, grâce à la ventouse buccale qui permet à la lamproie de se nourrir des fluides de la chair de poissons[2] et même à l'occasion de mammifères marins tout en se faisant transporter[3].

Écologie, services écosystémiques

De par leurs niches écologiques au cours de leur cycle de vie (tantôt lotiques, tantôt lentiques, en eau douce puis saumâtre, puis salée, puis saumâtres puis douce à nouveau), les lamproies ont un statut particulier dans le milieu et l'écosystème aquatique :

  • En tant que larve (filtreur Ă  ce stade) vivant dans le sĂ©diment durant plusieurs annĂ©es, elle joue a priori un rĂ´le très important sur le plan de la bioturbation, de l'Ă©puration et de la filtration du sĂ©diment (moindre anoxie du sĂ©diment), amĂ©liorant le substrat pour d'autres espèces). Mais c'est aussi ce qui lui porte prĂ©judice dans les environnements polluĂ©s par l'industrie, l'agriculture et les rejets d'eaux usĂ©es domestiques ;
  • leur statut d'ectoparasite Ă  l'Ă©tat adulte leur fait aussi jouer un rĂ´le probable de rĂ©gulation des populations (voire d'espèce invasive Ă  problème quand elles ont Ă©tĂ© introduites dans un nouveau milieu). Leur impact comme parasite est mal Ă©valuĂ©, d'autant que leur ventouse buccale semble ĂŞtre aussi utilisĂ©e par cette espèce pour se faire transporter par d'autres poissons plus puissants et rapides, notamment pour remonter les cours d'eau [1];
  • Au moment de la ponte et lors de la remontĂ©e, dans les zones de courant, en s'y accrochant au moyen de leurs ventouses, les adultes dĂ©placent de nombreux galets et cailloux parfois presque aussi lourds qu'eux, jouant un rĂ´le dans l'Ă©cologie des systèmes lotiques ; y contribuant par exemple au dĂ©colmatage et Ă  la rĂ©novation ou rĂ©organisation permanente des facies de fonds chaque printemps lĂ  oĂą les lamproies sont nombreuses. Aucun autre poisson ne semble jouer ce rĂ´le ;
  • Comme pour la lamproie marine et les saumons, les adultes ne reviennent de la mer vers les sources que pour pondre. Ils sont rĂ©putĂ©s ne pas se nourrir durant la remontĂ©e et vivre sur leurs rĂ©serves lipidiques et protĂ©iques[4]. Si l'on trouve des lamproies fixĂ©es par leurs ventouses Ă  des saumons ou gros poissons, c'est pour se faire remonter vers la source[1]. Mâles et femelles meurent après la ponte. Leurs cadavres libèrent alors dans la rivière le phosphore, potassium, magnĂ©sium, soufre et iode qu'ils ont accumulĂ© en se nourrissant sur les poissons marins. Ces nutriments contribueront Ă  enrichir le milieu en nutriments parfois rares car lessivĂ©s dans les hauts de bassins versants. Le milieu aquatique est enrichi, mais aussi son environnement, via par exemple les fientes et autres excrĂ©ments dispersĂ©s par les oiseaux et autres animaux piscivores ou nĂ©crophage. Depuis quelques dĂ©cennies, parce que l'industrie et l'agriculture ont introduit de nouveaux polluants dans les milieux aquatiques, la plupart des cadavres de lamproies constituent aussi un nouvel apport de polluants (organochlorĂ©s, HAP, mĂ©thylmercure...) rĂ©-apportĂ© vers les tĂŞtes de bassin-versant quand elles y sont encore prĂ©sentes.

Écotoxicologie et bioaccumulation

En 2011, très peu de données d'analyses chimiques de chair ou organes de lamproies semblent disponible via la littérature scientifique ou administrative accessible en ligne. Concernant les risques sanitaires pour l'Homme, en France, l'Afssa a recommandé d’étudier « les habitudes alimentaires de consommation régionale des poissons de rivière tels qu’anguilles ou lamproies afin de vérifier que la consommation de ces poissons de rivière ne présenterait pas de risque sanitaire pour les forts consommateurs » (à la suite de cet avis une étude, sous l'égide du ministère de la santé a porté sur l'anguille dans l'Adour, ainsi que sur des espèces carnassières (sandre, brochet, Achigan à grande bouche et perche) mais non sur les lamproies[5]. Cependant, au vu des dépassements de normes enregistrées pour les espèces étudiées, dont l'anguille, on peut penser qu'une partie au moins des lamproies sont contaminées voire très contaminées (au-delà des normes, car selon le ministère de la santé, cette étude a mis en évidence que 10 % des poissons analysés lors des trois campagnes de mesure de l’Agence de l’eau n'étaient « pas consommables selon la réglementation européenne pour le cadmium, ainsi que 6 % des poissons pour ce qui concerne le mercure et 7 % pour le plomb » ; alors que les dépassements de normes pour les HAP ou organochlorés n'ont pas été recherchés notamment car « une grande partie des dépassements des normes de comestibilité observés lors des précédentes campagnes de l’Agence de l’eau portaient sur (...) trois éléments » ; plomb, cadmium et mercure)[5].

Au début des années 2000, en Scandinavie où les larves issues des œufs pondus par des lamproies ayant fini leur croissance en mer Baltique passent quatre ans dans des vases qu'on sait significativement polluées ou ailleurs susceptibles de l'être ; avant le retour vers la mer Baltique (également polluée) pour grandir, on s'est inquiété de la teneur en certains polluants des lamproies fluviatiles et de leurs larves[6].

  • Le mode de vie de la larve (filtreur, enfoncĂ© dans la vase) l'expose en effet a priori Ă  un risque plus Ă©levĂ© de contamination par les mĂ©taux et mĂ©talloĂŻdes dont on sait qu'ils s'accumulent dans les sĂ©diments ou sont frĂ©quemment adsorbĂ©s sur les particules en suspension dans l'eau (argiles, matières organiques), lesquelles sont filtrĂ©es par la larve pour s'alimenter ;
    Des teneurs significatives à élevées en métaux lourds ont effectivement été mises en évidence là où des analyses ont été faites, par exemple[7] pour 51 échantillons de lamproie de rivière fraiche prélevés dans 9 rivières différentes et dans et 5 zones du delta du golfe de Botnie ;
    - 43 picogrammes/kg de cadmium (en moyenne) ;
    - 79 microgrammes/kg de mercure total, en moyenne (la limite Ă  ne pas dĂ©passer en mercure total dans le poisson commercialisable en Europe[8] : 0,5 microgrammes de mercure total par gramme (HgT/g) sauf dĂ©rogation pour une liste de 22 poissons prĂ©dateurs pour lesquels la limite tolĂ©rĂ©e a Ă©tĂ© remontĂ©e Ă  microgramme de mercure total (HgT/g) (valeur du Codex Alimentarius) ;
    - 64 microgrammes/kg de plomb dans un Ă©chantillon, alors que la dose maximale autorisĂ©e en Europe qui est de 0,3 milligramme/kg pour la « chair musculaire de poisson », (sachant que le plomb est un mĂ©tal qui s'accumule peu dans les poissons, et surtout dans le foie ou les reins, « pratiquement pas dans le muscle »[9]). Les lamproies fluviatiles capturĂ©es en baie de Botnie et dans le nord du bassin versant du golfe de Botnie prĂ©sentaient des taux significativement plus Ă©levĂ©s de cadmium et de mercure que les lamproies capturĂ©s en mer de Botnie, ou dans le sud du bassin versant du golfe, et il n'y avait pas de diffĂ©rence significative dans le contenu de Cd et de Hg dans les lamproies prises dans les rivières par rapport Ă  celles prises dans leurs domaines respectifs du delta. Il faudrait en outre tenir compte des synergies toxiques ou potentialisations entre mĂ©taux lourds, et entre mĂ©taux et d'autres polluants (voir plus bas).
  • Le mercure, neurotoxique[10], est un des polluants prĂ©occupants Ă  Ă©chelle mondiale[11], qui diminue peu dans l'environnement ou qui augmente localement (via la combustion de charbon, pĂ©trole, orpaillage, incinĂ©ration de dĂ©chets, etc.), et qui pourrait poser un problème particulier pour la lamproie fluviatile car cette espèce passe une grande partie de sa vie (stade larvaire exceptionnellement long) dans la vase. Or, c'est dans la vase qu'ont lieu une grande part des rĂ©actions de mĂ©thylation/dĂ©mĂ©thylation du mercure, conduisant Ă  la formation de monomĂ©thylmercure toxique et dimĂ©thylmercure (très rare dans la nature mais extrĂŞmement toxique) et très bioaccumulables, notamment quand la vase est anoxique et riche en bactĂ©ries, ce qui est souvent le cas dans les rivières polluĂ©es. De 0,01 Ă  10 % du mercure prĂ©sent dans l’eau et les sĂ©diments se trouve sous forme mĂ©thylĂ©e, la plus bioassimilable. Environ 15 % du mercure restant est prĂ©sent dans les algues (dont phytoplancton dont les jeunes lamproies se nourrissent durant 4 ans au moins) 20 Ă  50 % du mercure est provisoirement fixĂ© dans les invertĂ©brĂ©s (dont les micro-invertĂ©brĂ©s dont les jeunes lamproies se nourrissent). En tĂŞte de ce sous-ensemble du rĂ©seau trophique, les poissons ont en moyenne accumulĂ© 80 %[12] 84 % du mercure du milieu aquatique selon l’Afssa[13], mais sous rĂ©serve de confirmation ou infirmation par de futures Ă©tudes, les jeunes lamproies pourraient y ĂŞtre plus vulnĂ©rables. Si la lamproie ne dispose pas d'un mĂ©canisme particulier de dĂ©toxication (excrĂ©tion via les excrĂ©ments ou le mucus par exemple), elles pourraient faire partie des poissons plus contaminĂ©s que la moyenne par le mercure (sachant que de manière gĂ©nĂ©rale ce sont dĂ©jĂ  les poissons qui apportent dans l'alimentation humaine la plus grande partie du mercure alimentaire, mais qu'habituellement, leur teneur augmente avec leur place dans le niveau trophique de l'espèce et son poids ou âge.
  • Comme l'anguille et tous les poissons migrateurs, la lamproie a un organisme relativement riche en lipides, ce qui est une caractĂ©ristique connues pour favoriser l'accumulation de certains polluants organiques (hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), et composĂ©s organochlorĂ©s notamment, dont dioxines et polychlorobiphĂ©nyles (PCB) particulièrement prĂ©sents dans les sĂ©diments)[6]. On pouvait supposer que cette espèce est la plus vulnĂ©rable au stade larvaire oĂą la peau de chaque lamproies est entièrement en contact avec le sĂ©diment dont la teneur en divers toxique est gĂ©nĂ©ralement bien plus Ă©levĂ©e que l'eau elle-mĂŞme. Quelques Ă©tudes avaient dĂ©jĂ  portĂ© sur les impacts de l'exposition de la lamproie fluviatile Ă  des mĂ©taux lourds prĂ©sents dans les sĂ©diments, mais non sur les organochlorĂ©s[6]. On s'est donc intĂ©ressĂ© Ă  la contamination des larves par les douze polluants organiques persistants (POP) et en particulier aux 3 des 12 pops que sont les dioxines, furannes et polychlorobiphĂ©nyles (PCB) qui font maintenant en Europe l'objet d'une « StratĂ©gie communautaire (...) afin de protĂ©ger la santĂ© humaine[14] et animale et l'environnement »[15] - [16]). Une première Ă©tude sur les organochlorĂ©s a eu lieu dans le sud-Finlande dans le fleuve Kymijoki connu pour la contamination de ses sĂ©diments par des polluants polychlorĂ©s, dont on avait dĂ©jĂ  montrĂ© qu'ils Ă©taient bioaccumulĂ©s par d'autres espèces de poissons tout au long de la chaine alimentaire[6].
    En tant que filtreur à l'état larvaire puis ectoparasite à l'état adulte, le statut de la lamproie dans la chaîne alimentaire est particulier et on ignorait à quel degré elle pouvait se contaminer par des polluants lipophiles dans un environnement plus ou moins pollué. L'étude finlandaise a porté sur la contamination des larves durant leur lent développement dans les sédiments contaminés[6]. Pour cela, des larves de trois tailles (petites, moyennes et grandes) ont été prélevées pour analyse, ainsi que des échantillons de sédiments recueillis sur le lieu de capture. Ceci a été fait dans quatre portions de la partie aval du fleuve Kymijoki. Les polluants organiques persistants recherchés et quantifiés ont été MeO-PBDE, PBDE, PCB, PCDD, PCDEs, les PCDF et PCDTs. Les valeurs (en TEQ) ont été calculées, ainsi que trois facteurs de transfert (bioaccumulation) (à partir des sédiments vers la larve, à partir des sédiments vers les lipides (BSAFlw) de la larve, et à partir du carbone organique du sédiment vers les lipide (BSAFoc) de la larve de lamproie fluviatile.
    Les rĂ©sultats ont montrĂ© que la charge toxique (TEQ) Ă©tait la plus importante (environ 500 picogrammes par gramme (en poids humide) chez les larves les plus grandes, principalement en raison d'une bioaccumulation Ă©levĂ©e en PCB 118, 1,2,3,4,7,8-hexachlorodibenzo-p-dioxine (D66) et pour les penta- Ă  octa-CDF. Une corrĂ©lation positive hautement significative a Ă©tĂ© trouvĂ©e entre le poids et la longueur de la larve, mais la teneur en lipides n'Ă©tait pas significativement corrĂ©lĂ©e Ă  la taille ni au poids des larves. Le carbone organique trouvĂ© dans les larves ou les sĂ©diments (qui peut jouer un le rĂ´le de traceur) n'Ă©tait pas significativement corrĂ©lĂ© avec l'une des valeurs calculĂ©es FABS (facteur d'accumulation biote-sĂ©diments ou BSAF pour les anglophones), BSAFlw et BSAFoc, ce qui fait que des comparaisons statistiques entre les propriĂ©tĂ©s de la substance et le taux de bioaccumulation n'ont Ă©tĂ© possibles que pour les facteurs d’accumulation biote-sĂ©diments (FABS)[6].
    Ces comparaisons ont montré une augmentation légèrement significative pour les PCB, mais le poids moléculaire des organochlorés semble avoir une importance. On a constaté une baisse très significative de bioaccumulation par la larve de PCDF à partir du sédiment quand le nombre d'atomes de chlore (NCI) de la molécule augmente. Cette particularité relative au PCDF chlorés laisse penser qu'il existe un certain contrôle de la cinétique des organochlorés lors des phénomènes de bioaccumulation par libération lente de ces produits à partir des sédiments vers l'eau et la chaîne alimentaire. la part relative des organochlorés absorbés par la peau, la nourriture ou l'eau n'a pas été calculée[6].
    Ces premiers résultats ont incité les chercheurs à souligner que les POPs bioaccumulés dans les larves de lamproie fluviatile sont une source possible de « danger toxique » sur le plan de la sécurité alimentaire pour l'alimentation humaine pour les pays baltes, si ce n'est pour les pays d'Europe de l'Ouest où peu de données sur la lamproie semblent disponibles[17] - Renault T. Groupe de Travail Afssa « Aspects nutritionnels et sanitaires des poissons, mollusques et crustacés » (GT PMC, 2005-2008), 2008, mais aussi pour le bon développement des lamproies et de leurs populations. Ils suggèrent qu'à la fois les larves et les adultes des lamproies devrait être mieux étudiés afin de mieux comprendre les impacts de leur contamination par les POP, par rapport à d'autres expériences faites sur l'impact des POP pour la santé humaine et sur d'autre espèces de la faune[6].

PĂŞche

  • Cette espèce est pĂŞchĂ©e en Europe depuis l'antiquitĂ© comme le montrent de nombreux tĂ©moignages de chroniqueurs, poètes anciens, miniatures mĂ©diĂ©vales, diverses recettes de cuisines, tableaux anciens montrant des Ă©tals de poissonniers et tĂ©moignages plus rĂ©cents de pĂŞcheurs ou des administrations chargĂ©es du contrĂ´le des pĂŞches.
  • Un grand nombre d'engins de pĂŞche diffĂ©rents (Nasses, filets...) semble avoir Ă©tĂ© utilisĂ© pour cette espèce qui a mĂŞme pu ĂŞtre abondamment braconnĂ©e Ă  la main et Ă  la lumière[1] en France dans les annĂ©es 1800.
  • Les braconniers pouvaient parfois poser des filets dans tout le travers d’une rivière (en travers de l'Adour par exemple) ou guider par des filets plus ou moins discrets les poissons vers leurs nasses en en prenant des quantitĂ©s importantes [18] et dans les annĂ©es 1990, malgrĂ© un dĂ©but de prise de conscience de l’effondrement de nombreuses populations d’anguilles, le braconnage Ă©tait encore localement pratiquĂ© « parfois Ă  l'Ă©chelle semi-industrielle »[19].
  • Ă€ titre d'exemple, pour la Loire, en 1999, selon le COGEPOMI (ComitĂ© de gestion des poissons migrateurs), les prises professionnelles dĂ©clarĂ©es de lamproies, aloses, truites de mer et anguilles adultes ont atteint 56 t auxquelles il faut ajouter 43 t de mulet ; Sur ce total, les lamproies ont constituĂ© 26 %, soit plus que l’anguille (24 %).
  • En thĂ©orie, en Europe, c'est le principe (ALARA, As Low As Reasonably Achievable) qui fixe les teneurs maximales acceptables en contaminants des produits alimentaires, au niveau le plus faible que permettent raisonnablement les bonnes pratiques de fabrication ou les bonnes pratiques agricoles. De plus, les produits dont les taux de contaminants dĂ©passent les teneurs maximales ne doivent pas ĂŞtre mis sur le marchĂ©. En rĂ©alitĂ©, peu d'analyses sont faites et certains poissons polluĂ©s peuvent aboutir dans des usines de farines de poisson et la pĂŞche bĂ©nĂ©ficie de dĂ©rogations Ă  ces principes ; Pour permettre aux pĂŞcheurs de poursuivre leur activitĂ©, Ă  la suite des Ă©tudes faites dans le bassin de la Baltique qui ont montrĂ© que les lamproies et d'autres espèces sont contaminĂ©es au-delĂ  des normes en vigueur par divers polluants, un règlement europĂ©en spĂ©cial[8] - [20] a dĂ» ĂŞtre Ă©dictĂ© pour accorder « Ă  la Finlande et Ă  la Suède une dĂ©rogation pour le dĂ©passement de dioxines et de PCB de type dioxine (dioxine-like) jusqu'au 31 dĂ©cembre 2011 » pour qu'elles puissent ĂŞtre autorisĂ©s Ă  la vente (de mĂŞme que pour le saumon, hareng, la truite, l'omble et les Ĺ“ufs de corĂ©gone blanc originaires de la Baltique). Des efforts importants sont faits pour tenter d'atteindre l'objectif de « bon Ă©tat Ă©cologique » en 2015, en limitant en amont les apports terrigènes de polluants Ă  la Baltique, mais de nouveaux problèmes pourraient se poser avec les anciennes dĂ©charges immergĂ©es de munitions comprenant des armes chimiques en raison de la corrosion de ces dernières.
  • On ne dispose pas en France de statistiques sur le taux de lamproies pĂŞchĂ©es relâchĂ©es ou effectivement mangĂ©es, mais dans le bassin de l'Adour oĂą les lamproies sont encore relativement abondantes, sur 1 052 pĂŞcheurs mangeant leur poisson interrogĂ©s dans ce bassin, 40,2 % dĂ©clarent toujours consommer le poisson qu’ils pĂŞchent, 31,4 % le consomment souvent et 28,4 % quelquefois (5,4 % disent ne jamais manger jamais le poisson qu'ils ont pĂŞchĂ©), sans variations significative observĂ©es liĂ©es Ă  l'âge, la catĂ©gorie socioprofessionnelle, le sexe ou le pays d'origine concernant la frĂ©quence de consommation gĂ©nĂ©rale du poisson pĂŞchĂ© [5] - [21].

État, pressions menaces

L'espèce est considérée comme globalement en régression sur toute son aire de répartition, mais ne figure par comme l'anguille sur la liste rouge des espèces menacée. Comme les anguilles, autrefois réputées encore plus résistantes que les lamproies, cette espèce semble avoir beaucoup régressé, en raison de facteurs multiples dont :

  • le braconnage ;
  • une surpĂŞche locale ;
  • l'existence de barrages infranchissables. Grâce Ă  sa ventouse ou en se fixant sur un poisson plus fort qu'elle, les lamproies peuvent remonter les seuils naturels et de petits barrages, mais non les grands barrages. Elle peut aussi emprunter les passes Ă  poissons et passes Ă  anguilles.
  • la dĂ©gradation de ses habitats (il lui faut Ă  la fois des frayères de graviers propres et non colmatĂ©s, et - Ă  proximitĂ© en aval - des lits de vase non polluĂ©es (« lits d'ammocètes ») ;
  • L'espèce soufre sans doute de sa facultĂ© Ă  bioaccumuler des polluants liposolubles (POPs notamment) auxquels la larve est fortement exposĂ©e durant ses 4 ans de vie larvaire dans le sĂ©diment, souvent durablement contaminĂ© ;
  • des perturbateurs endocriniens prĂ©sents dans l'eau ou le sĂ©diment semblent pouvoir affecter l'espèce (Ceci ne semble pas avoir Ă©tĂ© Ă©tudiĂ© chez la lamproie, mais a Ă©tĂ© mis en Ă©vidence in vitro et in vivo chez de nombreuses autres espèces ; Or, chez les larves de la lamproie fluviatile, les deux sexes restent conjointement prĂ©sents chez tous les individus (au moins durant 4 ans) jusqu'Ă  la mĂ©tamorphose[1], ce qui est a priori un facteur de vulnĂ©rabilitĂ©. Dans les sĂ©diments des hormones ou pseudohormones peuvent rester actives des annĂ©es Ă  dĂ©cennies (voir article Perturbation endocrinienne).
  • De plus cette espèce semble dĂ©pendre d'autres espèces non seulement pour se nourrir quand elle est adulte, mais aussi pour se dĂ©placer (comme certains poissons-ventouses).
    Faute de nageoires et de musculature adaptées, les lamproies ne semblent en effet pas être de bonnes nageuses au long cours contre les forts courants ; « ce n'est que grâce à leur puissante souche-ventouse, en procédant par bonds et en se fixant après chaque saut à un corps solide, qu'elles parviennent ainsi à franchir des barrages. Chose singulière, elles vont jusqu'à s'attacher au corps des saumons et des aloses en compagnie desquels elles remontent les rivières » notait F. Barthélemy en 1912[1] ; Si les grands poissons migrateurs régressent (ce qui est le cas depuis plusieurs siècles), les lamproies voient donc également leurs chances de survie diminuer. En mer baltique et peut-être le long du littoral français, les lamproies pourraient aussi être victimes de séquelles de guerre, et être déjà (ou dans un proche avenir) exposés à certains toxiques (métaux lourds, métalloïdes et organochlorés perdus par les nombreux dépôts de munitions immergées faits en mer ou en eau douce après la Première Guerre mondiale et moindrement après la Seconde Guerre mondiale ou plus tardivement encore (certains de ces dépôts contiennent de nombreuses armes chimiques et beaucoup d'autres munitions toxiques.

Voir aussi

Articles connexes

Références taxonomiques

Bibliographie

  • Logrami, Fiche technique (Association pour la restauration et la gestion des poissons migrateurs sur le bassin de la Loire)

Notes et références

  1. F. Barthélemy, Les lamproies, Le Cordon Bleu, no 685, 15 décembre 1912
  2. Portail de l'Association pour la restauration et la gestion des poissons migrateurs sur le bassin de la Loire
  3. Maxiscience Lamproie photographiée sur le dos d'un cétacé
  4. Cardigan Bay SAC, River and Sea Lamprey River Lamprey (Lampetra fluviatilis) & Sea Lamprey (Petromyzon marinus), consulté 2011-10-15
  5. Christine Ricoux, Barbara Gasztowtt, Évaluation des risques sanitaires liés à l’exposition de forts consommateurs de produits de la pêche de rivière contaminés par des toxiques de l’environnement, DRASS Midi-Pyrénées
  6. Markus Soimasuo, Seija Sinkkonen et Jaakko Paasivirta, Bioaccumulation of POPs from contaminated sediment to lamprey (lampetra fluviatilis l. ) larva ; Journal of Soils and Sediments Volume 4, Number 2, 2004, 75-83, DOI: 10.1007/BF02991049
  7. Merivirta Lauri O., Nordlund Jorma et Korkeala Hannu J., [Cadmium, mercury and lead content of river lamprey caught in finnish rivers (= Dosage du cadmium, du mercure et du plomb dans les lamproies de rivière pêchées en Finlande) ; Archiv für Lebensmittelhygiene ; (ISSN 0003-925X), 2001, vol. 52, no3, p. 69-71 (Lien Inist-CNRS)
  8. Règlement (CE) no 1881/2006 du 19 décembre 2006 portant fixation de teneurs maximales pour certains contaminants dans les denrées alimentaires] ; Voir aussi acte(s) modificatif(s)
  9. CIRE Rhône-Alpes, Fiche toxicologique synthétique sur le plomb, janvier 2010
  10. Clarkson T. Metal toxicity in the central nervous system. Environ Health Perspect 1987; 75:59-64.
  11. United nations environment programme c. Global mercury assessment. 2002
  12. Slooff W, Van Beelen P, Annema J, Janus J. Integrated criteria document mercury. National institut for public health and environment protection (RIVM) - The Netherlands. 601014008. 1995.
  13. Agence française de sécurité sanitaire des aliments. Avis relatif à la réévaluation des risques sanitaires du méthylmercure liés à la consommation des produits de la pêche au regard de la nouvelle dose hebdomadaire tolérable provisoire (DHTP). 16-3-2004.
  14. EPA U. Water quality criterion for the protection of human health. Office of water W, editor. EPA-823-R-01-001. 2001.
  15. Stratégie communautaire concernant les dioxines, les furannes et les PCBb
  16. La Communauté européenne a un objectif de bon état écologique des masses d'eau pour 2015 (Directive cadre sur l'eau) et a également signée plusieurs conventions internationales à ce sujet et a signé la Convention de Stockholm sur les POPs.
  17. Leblanc JC. Calipso : étude des consommations alimentaires de produits de la mer et imprégnation aux éléments traces, polluants et oméga 3. Afssa, Inra, août 2006.
  18. Centre culturel du Pays d’Orthe, « La Pêche & les Pêcheurs (3 »
  19. GIP Loire-Estuaire Pêches professionnelles de la Maine à la mer, Atlas environnemental de la Loire, consulté 2011-10-08
  20. Pour le détail des chiffres, voir tableau 3 intitulé "Tableau 3. Médianes des fréquences de pêche et de consommation de poissons des pêcheurs des groupes 1 et 1 bis", dans l'étude déjà citée Évaluation des risques sanitaires liés à l’exposition de forts consommateurs de produits de la pêche de rivière contaminés par des toxiques de l’environnement
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