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Florent Schmitt

Biographie

Florent Schmitt étudia à Nancy puis au Conservatoire de Paris où il fut élève de Massenet et Fauré. En 1900, après 3 tentatives, il reçut le Premier Grand Prix de Rome pour sa cantate Sémiramis. En 1904, Schmitt acheva son grandiose et tonitruant Psaume XLVII, qui lui valut le succès lors de sa création. Pour Norbert Dufourcq, « l’apparition en 1906 du Psaume XLVII a été l’événement le plus important de la musique française depuis Pelléas. » L’humour vache du Sanglier des Ardennes (son surnom), libre et franc voire rude, et sa facétie à la Satie, avec qui il était ami, s’exprimaient aussi en titres mystificateurs : Suite en rocaille, Çançunik, Suite sans esprit de suite, Fonctionnaire MCMXII inaction musicale, Sonate libre en deux parties enchaînées, Habeyssée, etc.

Présent à Toul en 1915, il fait l'objet d'un portrait cubiste par Albert Gleizes intitulé Le Chant de guerre.

Marqué dans sa jeunesse par les mouvements symboliste et impressionniste autant que par Chopin, il développa une esthétique opulente, appuyée sur un savant contrepoint. L’emploi d’effets de percussion primitive l’apparente avant la lettre aux recherches de la musique russe moderne. Son art sans demi-teinte fut à l’image de son caractère dont l’esprit caustique n’excluait nullement la bienveillance. En 1924, la création à l’Opéra du ballet Le Petit Elfe ferme-l’œil révéla un délicieux peintre de l’enfance tandis qu’Antoine et Cléopâtre (1920), Salammbô (1925) et le somptueux Oriane et le Prince d’Amour (1938) consacraient l’orientaliste inspiré et le symphoniste héritier des classiques purs. Membre du cercle des Apaches, Schmitt fut cofondateur en 1909 de la Société musicale indépendante avec Maurice Ravel, Gabriel Fauré, Émile Vuillermoz, Louis Aubert, Charles Koechlin, et Jean Huré.

Edouard Herriot fit appel à lui pour remplacer Augustin Savard au conservatoire de Lyon. Il en fut le directeur de 1921 à 1924, avec notamment pour élève César Geoffray.

Il fut aussi chroniqueur du journal Le Temps de 1929 Ă  1939.

Personnalité assez rude, indépendante, ennemie des dogmes et des systèmes, avec une fécondité rare due à sa longue vie, il composa dans tous les domaines excepté l’opéra. Sa musique vigoureuse, caractérisée par un dynamisme rythmique et une ligne mélodique sensuelle, possède un langage harmonique riche et suave d’inspiration aussi bien classique que romantique. L’exotisme apprécié à l’époque se ressent dans plusieurs de ses compositions, tel le lyrique poème symphonique La Tragédie de Salomé, dédié à Igor Stravinsky et honoré par Diaghilev. Ces deux œuvres furent les plus appréciées avec son Quintette pour piano et cordes qui recueillit l’admiration, entre autres, d’un Georges Enesco. Sa Deuxième Symphonie fut créée par Charles Munch quelques semaines avant sa mort.

Florent Schmitt fut nommé membre de l’Académie des beaux-arts en 1936, reçut le Grand Prix musical de la ville de Paris en 1957. Mais cet artiste majeur du XXe siècle qui a laissé une œuvre monumentale est aujourd’hui encore méconnu du grand public français. Sa grande indépendance et son faible attachement à la renommée et aux suiveurs de modes ne sont pas étrangers à ce fait. Aujourd’hui, on peut considérer qu’il a fortement marqué l’histoire de la musique française de la première moitié du XXe siècle, au même titre que Debussy, Ravel et Roussel. Il est reconnu comme « l’un des piliers du répertoire musical pour le quatuor de saxophones »[2].

Il est enterré au cimetière parisien de Bagneux[3].

Son frère, Henri, né le 28 août 1873, fut aussi organiste, critique musical et compositeur.

Florent Schmitt (1870-1958), compositeur. Gravure par Marcel Amiguet, publiée dans "Visages", Paris 1928

Polémique

En dehors de son activité musicale, Florent Schmitt est aussi connu pour ses positions favorables à l’Allemagne nazie dans les années trente. L’épisode le plus connu autour cette controverse est le concert parisien du 26 novembre 1933, qui avait au programme trois extraits d’une opérette de Kurt Weill, compositeur juif allemand exilé, et face auquel Schmitt a lancé du public « Vive Hitler ». Ces propos sont rapportés par Robert Brasillach, puis cités par Lucien Rebatet, deux journalistes qui se marqueront en 1940-1944 par leur participation à la politique collaborationniste. Selon Rebatet, Schmitt aurait ajouté « Nous avons déjà assez de mauvais musiciens pour avoir à accueillir les Juifs allemands »[4] - [5]. Si on peut objecter que la politique antisémite d'Hitler n'était pas encore tout à fait en 1933 ce qu'elle devint à partir de la Nuit de Cristal en 1938 puis de la seconde guerre mondiale, cet épisode n'a pourtant pas donné lieu ultérieurement à une clarification publique.

La vie tout entière de Florent Schmitt est rythmée par les voyages qui s’inscrivent dans le cadre de son activité musicale : Italie, Suisse, Autriche, Espagne, Maroc, Grèce, Turquie, Orient[6]. Parmi ses voyages, il s’est aussi rendu en Allemagne pendant les années trente puis sous l’Occupation où il a été membre de la Section musicale du Comité France–Allemagne, créé en 1935. Il a assisté à une réunion de musiciens français et allemands organisée à Vienne en décembre 1941 pour rendre hommage à Mozart, et a été le coprésident d’honneur de la Section musicale du Groupe Collaboration à partir de décembre 1941[7].

À la Libération, pour avoir prêté son nom au Groupe Collaboration[8], des poursuites judiciaires ont été engagées contre Florent Schmitt pour indignité nationale par Joseph-Eugène Szyfer de la section Musique du Comité d’épuration. Cependant, après enquête, comme il s'est toujours positionné d’un point de vue musical, ces poursuites ont été classées sans suite. Toutefois, il a été condamné dans le cadre de l’épuration professionnelle : le , le Comité national d’épuration des gens de lettres, auteurs et compositeurs a prononcé contre lui une peine d’interdiction d’éditer ou de faire jouer ses œuvres d’une durée d’un an, interdiction partant du 1er octobre 1944[8].

Florent Schmitt a expliqué son voyage en Allemagne par la volonté de revoir son fils, resté prisonnier dans le Stalag XXIII de Pirmasens depuis juin 1940. Il a justifié son appartenance au Groupe Collaboration par son souci de défendre la musique française, et a indiqué son absence d’implication politique dans le groupe[9]. Dans les faits, sa position lui aura permis de signer des pétitions en faveur de musiciens israélites tels que la cantatrice Madeleine Grey, le pianiste François Lang, le compositeur Fernand Ochsé ou de soutenir ses amis Paul Dukas, Alexandre Tansman ou Arnold Schönberg qu’il appréciait et défendait vigoureusement[10].

Bien qu'honoré à plusieurs reprises après la guerre (voir rubrique « Honneurs »), l'exhumation du passé controversé du compositeur en 1996 a provoqué de nombreuses réactions, dont le changement de nom d'un lycée portant son nom à Saint-Cloud[11]. La salle de concerts du conservatoire à rayonnement régional de Nancy lui avait été dédiée. Mais à la suite de polémiques, la communauté urbaine a pris la décision de la débaptiser.

Honneurs

Principales Ĺ“uvres

  • Musique orchestrale :
3 symphonies : Symphonie concertante pour orchestre et piano op .82 ; Deuxième Symphonie op. 137 ; Janiana, symphonie pour cordes, op. 101
Antoine et Cléopâtre
Enfants
Introït, récit et congé pour violoncelle et orchestre
Kermesse-Valse tiré de l’éventail de Jeanne, (ballet, collectif, 1926)
Le Palais hanté
Le Petit Elfe Ferme-l'Ĺ“il
LĂ©gende pour saxophone alto (ou alto ou violon) et orchestre
Musique de scène pour Antoine et Cléopâtre, deux suites d’orchestre
Musique en plein air
Ronde burlesque
Rhapsodie viennoise
RĂŞves
Scherzo vif, pour violon et orchestre
Scènes de la vie moyenne
SĂ©lamlik, divertissement pour musique militaire
Çançunik
Dionysiaques (1913), pour orchestre d’harmonie militaire
Salammbô (musique de film, dont seront tirées trois suites d’orchestre)
  • Musique de chambre :
Andantino op.30 (1906)
Chants Alizés
Ă€ tour d'anches
Pour presque tous les temps, pour flûte et trio avec piano
Hasards, Petit concert en quatre parties, Op.96, pour violon, alto, violoncelle et piano
Quatuor pour saxophones
Quatuor pour flûtes
Quatuor Ă  cordes
Quintette avec piano
Sonate libre en deux parties enchaînées pour violon et piano
Sonatine en trio pour flûte, clarinette et clavier
Suite en rocaille op. 84 pour flûte, harpe et trio à cordes
Trio Ă  cordes
Nombreuses pièces pour vents, piano, piano à quatre mains ou deux pianos.
  • Musique vocale :
Nombreuses mélodies et chœurs
Le chant de nuit, pour solistes, chœur et orchestre
Messe pour quatre voix et orgue
Psaume XLVII op. 38, pour soprano, chœur, orgue et orchestre (1906)
  • Ballets :
La Tragédie de Salomé op. 50, ballet en deux actes, d’après un poème de Robert d'Humières (1907)
Oriane et le prince d’amour
  • Piano :
Musiques intimes, livre 1 op. 16 (1891 - 1901)
3 Préludes op. 3 (1890 - 95)
10 Préludes op. 5 (1896)
Reflets d’Allemagne op. 28 (1905)
Musiques intimes, livre 2 op. 29 (1904)
Musiques foraines op. 22
Crépuscules op. 56
Ombres op. 64
Mirages op. 70

Hommage

Le lycée Florent-Schmitt à Saint-Cloud a porté son nom de 1968 à 2005. Mais il a été rebaptisé Alexandre Dumas après le développement d'une polémique lancée en 1996 par les enseignants de l'établissement au sujet de ses sympathies, connues mais oubliées, envers l'Allemagne nazie et son antisémitisme[12] - [13].

Bibliographie

Ouvrages généraux

  • Paul Pittion, La Musique et son histoire : tome II — de Beethoven Ă  nos jours, Paris, Éditions Ouvrières, .

Monographies

Correspondances

  • Maurice Ravel, L'intĂ©grale : Correspondance (1895-1937), Ă©crits et entretiens : Ă©dition Ă©tablie, prĂ©sentĂ©e et annotĂ©e par Manuel Cornejo, Paris, Le Passeur Éditeur, , 1769 p. (ISBN 978-2-36890-577-7 et 2-36890-577-4, BNF 45607052)
    Contient 11 correspondances de Ravel Ă  Schmitt (1899-1921) -et 1 correspondance de Ravel Ă  l'Ă©pouse de Schmitt-, 15 correspondances de Schmitt Ă  Ravel (1901-1915) et 7 correspondances de Schmitt sur Ravel (1903-1919)

Discographie

Musique de chambre

Musique lyrique

  • Ă€ contre-voix, six chĹ“urs pour voix mixtes a cappella, op.104 : Groupe Vocal de France, dirigĂ© par John Alldis, enreg. 1991, EMI (complĂ©ments = Debussy, Milhaud, Ravel, Sauguet)
  • Schmitt: Ĺ’uvres pour voix de femmes (Works for Female Voices), Calliope - Voix de femmes, dirigĂ© par RĂ©gine ThĂ©odoresco, Marie-CĂ©cile Milan (piano), Timpani

Musique symphonique et chorale

Notes et références

  1. « https://uvic2.coppul.archivematica.org/florent-schmitt-fonds » (consulté le )
  2. Sax, Mule & Co, Jean-Pierre Thiollet, H & D, Paris, 2004, p. 176.
  3. Bertrand Beyern, « 50 célébrités du cimetière parisien de Bagneux ».
  4. Cité in R. Bulot, Lucien Rebatet, Éditions du Seuil, Paris, 1994, p.144. https://books.google.fr/books?ei=yPNgT_u7N7CX0QWPvfitBw&hl=fr&id=IluuAAAAIAAJ&dq=FLORENT+SCHMITT+hitler&q=%22vive+hitler%22#search_anchor et note 155 https://books.google.fr/books?ei=yPNgT_u7N7CX0QWPvfitBw&hl=fr&id=IluuAAAAIAAJ&dq=FLORENT+SCHMITT+hitler&q=155#search_anchor.
  5. JĂĽrgen Schebera, Kurt Weill : An Illustrated Life, Yale University OPress, (lire en ligne), p. 221.
  6. Florent Schmitt précurseur et contestataire, Académie des beaux-arts, 1970, no 3.
  7. Philippe Burrin, La France à l’heure allemande 1940-1944, Le Seuil, 1995, p. 61, 353 et 412.
  8. Herbert Lottman, L'Epuration 1943-1953, Fayard, 1986, p. 428.
  9. Bibliothèque nationale de France, Questionnaire Schmitt, pièce 1-4.
  10. Politique magazine, no 6, FĂ©vrier 2003, p. 3
  11. « Le lycée Florent-Schmitt change de nom », leparisien.fr,‎ 2004-09-30cest00:00:00+02:00 (lire en ligne, consulté le )
  12. Le Parisien du 25 mai 2003,
  13. Les compositeurs et la Collaboration,

Liens externes

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