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Dinophyta

Dinophyta • Dinoflagellés, Dinophytes, Péridiniens

Les Dinoflagellés (Dinoflagellata), encore appelées Dinophytes ou Péridiniens, sont une super-classe d'organismes eucaryotes unicellulaires. Ce sont des microorganismes aquatiques (marins ou dulçaquicoles). Ils sont très diversifiés, en particulier par leurs comportements alimentaires. Certains sont hétérotrophes, d'autres sont mixotrophes et d'autres encore sont des organismes photosynthétiques qui sont donc assimilés à des algues unicellulaires, en majorité biflagellées. Environ 50 % des dinoflagellés sont hétérotrophes. Ils sont comme leur nom l'indique dotés de flagelles, mais certains sont « benthiques » et vivent en épiphytes sur des macroalgues ou encore dans les interstices des substrats sableux (tout en pouvant migrer verticalement pour se reproduire).

Ces microorganismes jouent un rôle trophique majeur, en particulier les protistes hétérotrophes herbivores qui régulent les populations de microalgues, et qui en mangeant ce phytoplancton en transfèrent les nutriments (mais aussi certains polluants qu'ils peuvent éventuellement bioconcentrer) vers les niveaux trophiques supérieurs (métazoaires, puis poissons, mammifères marins..).

Les études moléculaires montrent que les dinoflagellés ont un ancêtre commun dont on tente encore de savoir s'il était photosynthétique ou non[4]. Pour cela on étudie les gènes plastidiaux importés dans le génome nucléaire à la suite d'endosymbioses. On sait aussi grâce à ces études génétiques que plusieurs lignées hétérotrophes sont apparues très tôt au cours de l’évolution [4].

Ce groupe est encore assez mal connu. On a récemment encore en Bretagne — lors d'une étude des dinophyta du sédiment — trouvé plusieurs espèces jusqu'alors non décrites de Prorocentrum, Sinophysis ou Cabra[5].

Étymologie

Le mot Dinoflagellata, viendrait du grec ancien δῖνος / dinos, « tournoiement », et du latin flagellum, « fouet », littéralement « flagelle tournoyant »[6].

Présentation du taxon

Ocelloïde chez un dinophyte (indiqué par la flèche la plus épaisse).
Dinophyta de l'Amour (fleuve) vu avec un microscope Ă©lectronique. Mars 2020.

Chez beaucoup d'espèces, la cellule est protégée par une thèque constituée de plaques rigides de cellulose incrustée de silice.

Les flagelles reposent dans deux sillons superficiels : le transversal ou équatorial, appelé « cingulum », le longitudinal, appelé « sulcus » (du latin cingulum, ceinture, et sulcus, sillon) .

Le sillon équatorial sépare la cellule en une partie supérieure (l’épicone) et une partie inférieure (l’hypocone). postérieur (hyposome), et, si une thèque est présente, ces deux parties sont appelées respectivement « épithèque » et « hypothèque ».

Certaines espèces ont un « appareil photosensible », et d’autres un véritable ocelle, qui servirait vraisemblablement à détecter les proies.

Nombreuses sont les espèces photosynthétiques. Mais la grande variété de chloroplastes témoigne de plusieurs endosymbioses secondaires. Il y a eu en effet, chez un ancêtre du groupe, une endosymbiose secondaire avec un eucaryote de la lignée rouge. Certains Dinoflagellés ont perdu cet endosymbiote, et parmi ceux-ci beaucoup sont restés hétérotrophes. Mais d’autres ont effectué une endosymbiose dite tertiaire avec des Straménopiles, des Cryptophytes ou d’autres Dinoflagellés.

Caractères propres au groupe

  • Ă€ l’origine la cellule prĂ©sente « deux flagelles » orientĂ©s perpendiculairement l’un par rapport Ă  l’autre.
  • Les « alvĂ©oles sous-corticaux » propres aux alvĂ©olates contiennent des plaques de cellulose, constituant la thèque.
    • Le noyau (biologie) des DinoflagellĂ©s est original. Il est appelĂ© « dinocaryon ». Lors de l’interphase, l’ADN n'est pas associĂ© Ă  des histones comme c’est le cas chez les autres eucaryotes, mais complexĂ©s Ă  une protĂ©ine basique particulière : les DPVN (Dinoflagellate viral nucleoproteins) qui sont probablement issue d'un transfert horizontal de gène par les virus[7]. NĂ©anmoins, les sĂ©quences des histones sont encore prĂ©sentes et transcrites bien que très divergentes[8]. Pour finir, les dinoflagellĂ©s ont un gĂ©nome particulièrement grand, allant jusqu'Ă  200 pg (200 Gb environ) par noyau haploĂŻde contre 3 pg (3 Gb environ) pour l'humain[8].
  • Les membres de ce taxon effectuent ce que Guillaume Lecointre et HervĂ© Le Guyader nomment une « mitose fermĂ©e », c'est-Ă -dire qu'il n'y a pas de rupture de l'enveloppe nuclĂ©aire durant la mitose.
  • La cellule prĂ©sente des trichocystes caractĂ©ristiques du groupe.

Écologie

Efflorescence algale de Dinoflagellés à La Jolla (Californie)

Les Dinoflagellés font partie du plancton d’eaux douces et surtout des eaux marines. Certaines espèces sont aussi retrouvées dans la neige. D’autres espèces, les Zooxanthelles, vivent en symbiose avec des protistes ou des Invertébrés marins (éponges, Coraux, Vers plats, Mollusques, Crustacés). Les espèces chlorophylliennes effectuent la photosynthèse grâce à des plastes. Les espèces non pigmentées se nourrissent de plancton. Il existe des formes bioluminescentes comme Noctiluca qui utilise une enzyme, la luciférase, et un substrat, la luciférine. L’accumulation de Noctiluca miliaris et Noctiluca scintillans entraîne des efflorescences et des phénomènes de marées rouges dans certaines conditions.

Dinoflagellés et phycotoxines

Certaines espèces planctoniques, essentiellement des Dinoflagellés et des Diatomées, peuvent sécréter des phycotoxines (des toxines algales) dans certaines circonstances mal connues, en particulier à l'occasion des multiplications soudaines (on parle alors d'efflorescences localisées, bloom en anglais). Ces toxines seraient un moyen de protection et de limitation de la prédation par les phytophages (zooplancton, coquillages filtreurs).

Ces toxines provoquent différents troubles, base de la classification :

  • toxines diarrhĂ©iques (en anglais DSP, Diarrheic Shellfish Poison), produites par les DinoflagellĂ©s des genres Dinophysis et Prorocentrum, dont le type est l'acide okadaĂŻque. Elles provoquent plus ou moins rapidement diarrhĂ©e et vomissements (en 30 minutes Ă  12 heures après l'ingestion de coquillages contaminĂ©s[9]), rĂ©trocĂ©dant spontanĂ©ment en 2 Ă  3 jours, sans sĂ©quelles. On y associe les pectenotoxines hĂ©patotoxiques, les yessotoxines sans toxicitĂ© avĂ©rĂ©e et les azaspiracides diarrhĂ©iques. Les normes retenues sont de 160 Âµg/kg pour l'acide okadaĂŻque et les azaspiracides, et mg/kg pour les pectenotoxines. On utilise prĂ©fĂ©rentiellement un test biologique sur souris. Ces intoxications alimentaires sont relativement communes, sur toutes les cĂ´tes, souvent aux changements de saison (printemps, automne).
  • toxines paralysantes (en anglais PSP, Paralytic Shellfish Poison), produites par les DinoflagellĂ©s des genres Alexandrium, Gonyaulax, Gymnodinium et Pyrodinium, dont le type est la saxitoxine. Elles provoquent rapidement après l'ingestion de coquillages contaminĂ©s une paresthĂ©sie brutale (en 5 Ă  30 min) des lèvres, du visage, des bras puis des jambes. Des cas graves sont signalĂ©s avec une incoordination motrice, de l'incohĂ©rence et un risque de dĂ©cès par paralysie respiratoire. Les normes retenues sont de 80 Âµg/kg pour la saxitoxine. Il s'agit de la première phycointoxication connue (rĂ©trospectivement) en Colombie-Britannique (Canada) en 1798. Des efflorescences d'Alexandrium sont repĂ©rĂ©es de temps Ă  autre l'Ă©tĂ© le long des cĂ´tes françaises, mais aucune intoxication n'a encore Ă©tĂ© dĂ©clarĂ©e en France.
  • toxines amnĂ©siantes (en anglais ASP, Amnesic Shellfish Poison), produites par les diatomĂ©es du genre Pseudo-nitzschia, dont le type est l'acide domoĂŻque. Elles provoquent rapidement après l'ingestion de coquillages contaminĂ©s une gastroentĂ©rite (diarrhĂ©e et vomissements en 2 Ă  24 h) puis des symptĂ´mes neurologiques, avec cĂ©phalĂ©es, confusion, dĂ©sorientation, et dans les cas graves, amnĂ©sie, puis coma mortel. Les enfants et les personnes âgĂ©es sont les plus sensibles. Les normes retenues sont de 20 mg/kg pour l'acide domoĂŻque. Des efflorescences de Pseudo-nitzschia sont repĂ©rĂ©es rĂ©gulièrement l'Ă©tĂ© le long des cĂ´tes françaises, mais aucune intoxication n'a encore Ă©tĂ© dĂ©clarĂ©e en France. Tous les coquillages peuvent ĂŞtre contaminĂ©s (huĂ®tres, moules, Pecten), mais aussi certains poissons (anchois), qui intoxiquent alors les oiseaux piscivores.
  • toxines cutanĂ©es, produites par le DinoflagellĂ© Ostreopsis ovata, dont le type est la palytoxine. Il s'agit d'une neurotoxine susceptible de provoquer des irritations cutanĂ©es, de la fièvre et une gĂŞne respiratoire, la contamination se faisant par contact ou inhalation des embruns (aĂ©rosols marins, chargĂ©s en phycotoxines), et consommation des produits de la pĂŞche contaminĂ©s. L'espèce est benthique (dans les sĂ©diments marins), mais remonte en surface pour la floraison, et la toxine peut alors se concentrer dans la chaĂ®ne alimentaire. Il y a eu quelques Ă©pisodes toxiques en Italie (1998), et une alerte Ă  Marseille en 2006.
  • ciguatera, produite par le DinoflagellĂ© Gambierdiscus toxicus, dont les types sont les cigatoxines et les maĂŻtotoxines. Il s'agit d'une intoxication alimentaire par consommation de chair de poissons contaminĂ©s (ichtyosarcotoxisme). L'algue se multiplie sur le squelette du corail mort, et est broutĂ©e par les poissons perroquets. Ces poissons peuvent Ă  leur tour contaminer leurs prĂ©dateurs. Le symptĂ´me principal est la "gratte", dĂ©mangeaison cutanĂ©e intense, avec une gastroentĂ©rite et une paresthĂ©sie du visage. La guĂ©rison spontanĂ©e est plus ou moins rapide, avec quelquefois des sĂ©quelles neurologiques. Souvent associĂ© Ă  d'autres phycotoxines (palytoxine). C'est l'intoxication type et bien connue des mers tropicales, mais des cas ont toutefois Ă©tĂ© dĂ©clarĂ© rĂ©cemment dans l’est de la MĂ©diterranĂ©e.
  • Pfiesteria piscicida libère aussi des neurotoxines. Cette maladie devient prĂ©occupante surtout en Caroline du Nord avec des intoxications induites par la consommation de poisson.

La production et la pêche des coquillages comestibles sont, dans la plupart des pays, placées sous le contrôle d'une autorité chargée de la surveillance des eaux marines et des coquillages produits[10], afin de garantir l'innocuité des denrées.

Cependant, la plupart des espèces de Dinoflagellés ne sont pas toxiques et sont à la base de la nutrition de nombreuses espèces : zooplancton, poissons.

GĂ©nomique

Les études génétiques ont essentiellement concerné des dinoflagellés photosynthétiques. Crypthecodinium cohnii est le premier dinoflagellé hétérotrophe ayant fait l'objet d'une étude génomique[11]

Étant donné la taille de leur génome le séquençage s'avère particulièrement coûteux. Seul les génomes de Symbiodinium microadriaticum, Symbiodinium minutum et Symbiodinium kawagutii, des symbiotes des coraux, ont été séquencés en 2016 et leur taille est entre 1 et 5 Gb [12].

Paléontologie

Les plus anciens restes fossiles incontestables de Dinoflagellés datent du Trias(~250 Ma). Une forme présumée, datée du Silurien (420 Ma), Arpylorus sp., serait plutôt une structure de stockage produite par un arthropode[13]. Certaines thèques fossiles pouvant avoir appartenu à des Dinoflagellés primitifs existent dans le Cambrien inférieur (-540 Ma).

Phylogénie

Liste des ordres de Dinoflagellata selon World Register of Marine Species (5 janvier 2014)[14] : ...

  • classe des Dinophyceae
    • ordre des Actiniscales
    • ordre des Amphilothales
    • ordre des Blastodiniales
    • ordre des Brachidiniales
    • ordre des Coccidiniales
    • ordre des Desmomastigales
    • ordre des Dinophysiales
    • ordre des Gonyaulacales
    • ordre des Gymnodiniales
    • ordre des Lophodiniales
    • ordre des Noctilucales
    • ordre des Oxyrrhinales
    • ordre des Peridiniales
    • ordre des Phytodiniales
    • ordre des Prorocentrales
    • ordre des Pyrocystales
    • ordre des Suessiales
    • ordre des Syndiniales
    • ordre des Thoracosphaerales

Liste de DinoflagellĂ©s communs (2 200 espèces connues) :

Notes et références

  1. Gómez F, « A checklist and classification of living dinoflagellates (Dinoflagellata, Alveolata) », CICIMAR Oceánides, vol. 27, no 1,‎ , p. 65–140 (DOI 10.37543/oceanides.v27i1.111 Accès libre)
  2. Ruggiero et al., Higher Level Classification of All Living Organisms, vol. 10, , e0119248 (PMID 25923521, PMCID 4418965, DOI 10.1371/journal.pone.0119248 Accès libre, Bibcode 2015PLoSO..1019248R), chap. 4
  3. Silar, Philippe, Protistes Eucaryotes: Origine, Evolution et Biologie des Microbes Eucaryotes, , 1–462 p. (lire en ligne [archive du ])
  4. Sanchez-Puerta M. V., Lippmeier J. C., Apt K. E. and Delwiche C. F. (2007). Plastid Genes in a Non-Photosynthetic Dinoflagellate. Protist. 158, p. 105-117
  5. Inventaire des dinoflagellés benthiques marins en Sud Bretagne : première approche de la diversité CHOMERAT N. IFREMER Station de Concarneau, in « Colloque Concarneau ; Biodiversité et environnement marin : connaissance, gestion et protection »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), 2009
  6. (en) J. Patrick Kociolek, John D. Wehr, Robert G. Sheath, Freshwater Algae of North America. Ecology and Classification, Elsevier Science, , p. 773.
  7. (en) Nicholas A. T. Irwin, Benjamin J. E. Martin, Barry P. Young et Martin J. G. Browne, « Viral proteins as a potential driver of histone depletion in dinoflagellates », Nature Communications, vol. 9, no 1,‎ (ISSN 2041-1723, PMID 29670105, PMCID PMC5906630, DOI 10.1038/s41467-018-03993-4, lire en ligne, consulté le )
  8. (en) Ross F. Waller, Geoffrey I. McFadden, Antony Bacic et Terrence D. Mulhern, « Loss of Nucleosomal DNA Condensation Coincides with Appearance of a Novel Nuclear Protein in Dinoflagellates », Current Biology, vol. 22, no 24,‎ , p. 2303–2312 (ISSN 0960-9822, PMID 23159597, DOI 10.1016/j.cub.2012.10.036, lire en ligne, consulté le )
  9. Guide d'information sur les phycotoxines: complexe des toxines lipophiles : diarrhĂ©iques (DSP) et associĂ©es / Zouher Amzil, janvier 2006 - Document Pdf, 543 ko, section 1.4 « ActivitĂ© toxique », page 5, disponible sur le site Environnement de l'Ifremer, dans la partie Publications (voir section Phytoplancton et Phycotoxines)
  10. Affaires Maritimes et Services Vétérinaires en France, avec l'appui technique de l'IFREMER, par exemple, ou encore la FDA (Food and Drug Administration) aux États-Unis d’Amérique.
  11. Article publié dans la revue Protist par l’équipe du Pr Sanchez-Puerta (Département de Biologie Cellulaire et Génétique Moléculaire, Université du Maryland, États-Unis)
  12. (en) M. Aranda, Y. Li, Y. J. Liew et S. Baumgarten, « Genomes of coral dinoflagellate symbionts highlight evolutionary adaptations conducive to a symbiotic lifestyle », Scientific Reports, vol. 6, no 1,‎ (ISSN 2045-2322, PMID 28004835, PMCID PMC5177918, DOI 10.1038/srep39734, lire en ligne, consulté le )
  13. ALAIN LE HERISSE, EDWIGE MASURE, EMMANUELLE J JAVAUX, and CRAIG P MARSHALL
    THE END OF A MYTH: ARPYLORUS ANTIQUUS PALEOZOIC DINOFLAGELLATE CYST
    PALAIOS, June 2012, v. 27, p. 414-423, published online 29 June 2012, doi:10.2110/palo.2011.p. 11-110r
  14. World Register of Marine Species, consulté le 5 janvier 2014

Voir aussi

Articles connexes

Références taxinomiques

Bibliographie

Liens externes

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