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Dicyclohexylcarbodiimide

Le N,N'-dicyclohexylcarbodiimide ou DCC est un composé organique de la famille des carbodiimides principalement utilisé comme réactif pour le couplage des acides aminés en synthÚse peptidique.

Dicyclohexylcarbodiimide

Identification
Nom UICPA N,N'-dicyclohexylméthanediimine
Synonymes

N,N'-dicyclohexylcarbodiimide
DCC
1,3-dicyclohexylcarbodiimide

No CAS 538-75-0
No ECHA 100.007.914
No CE 208-704-1
No RTECS FF2160000
PubChem 10868
ChEBI 53090
SMILES
InChI
Apparence solide incolore d'odeur caractéristique[1]
Propriétés chimiques
Formule C13H22N2 [IsomĂšres]
Masse molaire[2] 206,327 2 ± 0,012 3 g/mol
C 75,68 %, H 10,75 %, N 13,58 %,
Propriétés physiques
T° fusion 34 à 35 °C[3]
34,5 à 37,0 °C[3]
35 à 36 °C[1]
T° ébullition 122 à 124 °C[1]
122 à 124 °C à 6 mmHg[3]
Solubilité pratiquement insoluble dans l'eau[1]
CH2Cl2 0,1 g·ml-1[3]
Masse volumique 0,95 g·cm-3 à 40 °C[1]
Point d’éclair 113 °C[1] - [3]
Précautions
SGH[1] - [3]
SGH05 : CorrosifSGH06 : Toxique
H302, H311, H317, H318, P280, P312 et P305+P351+P338
NFPA 704

Symbole NFPA 704.

Transport[1] - [3]
-
Écotoxicologie
DL50 400 mg/kg (rat, oral)[1]

Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.

SynthĂšse

De nombreuses voies de synthĂšse ont Ă©tĂ© Ă©laborĂ©es, les plus rĂ©centes via une rĂ©action de couplage offrent de meilleurs rendements. Historiquement, le DCC fut formĂ© par dĂ©shydratation de la dicyclohexyl-urĂ©e par le chlorure de paratoluĂšnesulfonyle en prĂ©sence de triphĂ©nylphosphine et triĂ©thylamine comme bases[4]. De la mĂȘme façon, la dicyclohexyl-thiourĂ©e rĂ©agit avec l'oxyde de mercure en formant un intermĂ©diaire oĂč l'atome de soufre est Ă©changĂ© par l'oxygĂšne. Sa dĂ©shydratation forme alors le DCC[5] :

En 1987, l'utilisation de carbonate de potassium en lieu et place des triphénylphosphine et triéthylamine comme base et d'un catalyseur de transfert de phase par le groupe de Zsuzsa Jaszay leur permet d'obtenir un rendement de 50 %. La dicyclohexylurée, un chlorure d'arÚnesulfonyle et du carbonate de potassium réagissent dans le toluÚne en présence de chlorure de benzyle triéthylammonium pour donner du N,N'-dicyclohexylcarbodiimide[6] :

Ilan Pri-Bara et Jeffrey Schwartz utilisent de l'acétate de palladium, de l'iode et de l'oxygÚne pour coupler la cyclohexylamine et l'isocyanure de cyclohexyle[7]. Des rendements jusqu'à 67 % ont été obtenus en suivant cette voie :

C6H11NH2 + C6H11N≡C + O2 → (C6H11N)2C + H2O.

L'Ă©quipe de Jiansheng Tang condensent deux isocyanates en utilisant le catalyseur OP(MeNCH2CH2)3N avec un rendement de 92 %[8] :

Propriétés et caractérisation

Le DCC est une poudre incolore avec une odeur caractĂ©ristique lourde et sucrĂ©e. Le point de fusion peu Ă©levĂ© de ce composĂ© lui permet d'ĂȘtre fondu pour une manipulation plus aisĂ©e. Il est trĂšs soluble dans le dichloromĂ©thane, le tĂ©trahydrofurane, l'acĂ©tonitrile et le dimĂ©thylformamide, mais insoluble dans l'eau.

Le cƓur N=C=N des carbodiimides est linĂ©aire et est structurellement reliĂ© aux allĂšnes (C=C=C). Trois structures de rĂ©sonance principales dĂ©crivent les carbodiimides :

RN=C=NR ↔ RN+≡C-N−R ↔ RN−-C≡N+R.

Ce motif N=C=N a une signature caractĂ©ristique en spectroscopique IR Ă  2117 cm−1[8]. Le spectre RMN du 15N montre un dĂ©placement chimique caractĂ©ristique de 275,0 ppm vers les champs forts par rapport Ă  l'acide nitrique et le spectre RMN 13C comporte un pic Ă  environ 139 ppm en aval du TMS[9].

Usage

Le DCC est un rĂ©actif qui peut ĂȘtre utilisĂ© pour des dĂ©shydratations, des estĂ©rifications et d'autres activations dans des conditions trĂšs douces.

DĂ©shydratation

Le DCC est un agent de déshydratation pour la préparation d'alcÚnes, de nitriles. Dans ces réactions, le DCC s'hydrate pour former la dicyclohexyl-urée (DCU) qui est insoluble dans l'eau.

Ainsi, la déshydratation des alcools procÚde en donnant d'abord l'intermédiaire O-acyl urée qui est ensuite coupé par hydrogénolyse pour produire l'alcÚne correspondant :

RCHOHCH2R' + (C6H11N)2C → RCH=CHR' + (C6H11NH)2CO.

Oxydation de Moffatt

Une solution de DCC dans le dimĂ©thylsulfoxyde (DMSO) permet d'effectuer ce qui est appelĂ© une oxydation de Pfitzner-Moffatt. Cette rĂ©action est utilisĂ©e pour l'oxydation des alcools en aldĂ©hydes et cĂ©tones. Contrairement aux oxydations via des ions mĂ©talliques, les conditions avec DCC sont suffisamment douces pour Ă©viter la sur-oxydation des aldĂ©hydes en acides carboxyliques. En gĂ©nĂ©ral, trois Ă©quivalents de DCC pour 0,5 Ă©quivalent d'alcool dans le DMSO sont laissĂ©s une nuit Ă  tempĂ©rature ambiante. La rĂ©action est arrĂȘtĂ©e par acidification.

Estérification et amidation

DCC est principalement utilisé dans la synthÚse d'esters et d'amides organiques, en particulier quand les composés à réagir sont encombrés ou peu réactifs, il permet un accroissement important des rendements[10]. En outre, il effectue, et contrairement à l'estérification de Fischer, ces estérifications et amidations dans des conditions trÚs douces ce qui est trÚs intéressant avec les composés peu nucléophiles comme l'alcool ter-butylique.

Par conséquent, DCC joue également un rÎle important dans la synthÚse de peptides in vitro et dans l'introduction de groupes protecteurs.

Inversion d'alcools secondaires

Les alcools secondaires peuvent ĂȘtre inversĂ©s stĂ©rĂ©ochimiquement par formation d'un ester de formyle, suivie d'une saponification. L'alcool secondaire est mĂ©langĂ© directement avec du DCC, de l'acide formique et une base forte telle que le mĂ©thylate de sodium.

Estérification de Steglich

Une large gamme d'alcools, y compris mĂȘme certains alcools tertiaires, peuvent ĂȘtre estĂ©rifiĂ©s avec un acide carboxylique en prĂ©sence de DCC et une quantitĂ© catalytique de 4-dimĂ©thylaminopyridine, DMAP[11] - [12].

En fait, tout groupe carboxyle (>C=O) s'ajoute rapidement sur une des doubles liaisons C=N du DCC, formant le dérivé O-acyl urée correspondant. Cet intermédiaire est trÚs réactif, sa réactivité étant comparable à celle d'un anhydride d'acide[13], de sorte qu'il est rapidement et facilement converti en amide par réaction sur une amine. Pour son couplage avec des alcools, un agent d'acyl-transfert comme DMAP est en outre nécessaire. C'est ce qui est appelé une estérification de Steglich[14]. En somme, le résultat de ces condensations de l'acide lié au DCC avec un alcool ou une amine est un ester ou un amide respectivement, et une molécule d'eau captée par le DCC qui se transforme en N,N'-dicyclohexyl urée, (C6H11-NH)2C=O.

Couplage peptidique promu par DCC

Au cours d'une synthĂšse de peptide ou de protĂ©ine (par exemple par Fmoc solid-state synthesizer), l'extrĂ©mitĂ© N-terminale est souvent utilisĂ©e comme le site de fixation sur lequel les acides aminĂ©s sont ajoutĂ©s. Pour amĂ©liorer l'Ă©lectrophilie du groupe carboxylate de l'acide aminĂ© dĂ©protonĂ© Ă  ajouter, l'atome d'oxygĂšne chargĂ© nĂ©gativement doit d'abord ĂȘtre activĂ© en un meilleur groupe partant. Le DCC est utilisĂ© Ă  cet effet. L'atome d'oxygĂšne chargĂ© nĂ©gativement qui est donc nuclĂ©ophile, attaque facilement l'atome de carbone central du DCC qui est donc temporairement attachĂ© au groupe carboxylate et forme un intermĂ©diaire hautement Ă©lectrophile, ce qui rend l'attaque nuclĂ©ophile par le groupe amino terminal du peptide en construction bien plus efficace.

Sécurité

En plus d'ĂȘtre toxique, le dicyclohexylcarbodiimide est aussi un allergĂšne puissant et Ă  effet de sensibilisation, causant souvent des Ă©ruptions cutanĂ©es.

Notes et références

  1. EntrĂ©e « Dicyclohexylcarbodiimid Â» dans la base de donnĂ©es de produits chimiques GESTIS de la IFA (organisme allemand responsable de la sĂ©curitĂ© et de la santĂ© au travail) (allemand, anglais) (JavaScript nĂ©cessaire)
  2. Masse molaire calculĂ©e d’aprĂšs « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  3. N,Nâ€Č-Dicyclohexylcarbodiimide ≄99.0% (GC) chez Sigma-Aldrich.
  4. (de)R. Appel, R. KleinstĂŒck, K.-D. Ziehn, Über die gemeinsame Einwirkung von Phosphinen und Tetrachlorkohlenstoff auf Ammoniak (Derivate), IV Notiz ĂŒber eine neue Carbodiimid-Synthese, Chem. Ber., 1971, vol. 104, p. 1335-1336. DOI 10.1002/cber.19711040438.
  5. (de) S. Hauptmann, J. Graefe, H. Remane, Lehrbuch der organischen Chemie', Deutscher Verlag fĂŒr Grundstoffindustrie, Leipzig, 1976, p. 433.
  6. Zsuzsa Jaszay, Imre Petnehazy, Laszlo Toke, Bela Szajani, Preparation of Carbodiimides Using Phase-Transfer Catalysis, Synthesis, 1987, vol. 5(5), p. 520–523. DOI 10.1055/s-1987-27992.
  7. Ilan Pri-Bara, Jeffrey Schwartz, N,N-Dialkylcarbodiimide synthesis by palladium-catalysed coupling of amines with isonitriles, Chem. Commun., 1997, vol. 4(4), p. 347. DOI 10.1039/a606012i.
  8. Jiansheng Tang, Thyagarajan Mohan, John G. Verkade, Selective and Efficient Syntheses of Perhydro-1,3,5-triazine-2,4,6-triones and Carbodiimides from Isocyanates Using ZP(MeNCH2CH2)sN Catalysts. J. Org. Chem., 1994, vol. 59(17), p. 4931-4938. DOI 10.1021/jo00096a041.
  9. Issa Yavari, John D. Roberts, Nitrogen-15 Nuclear Magnetic Resonance Spectroscopy. Carbodiimides. J. Org. Chem., 1978, vol. 43(25), p. 4689–4690. DOI 10.1021/jo00419a001.
  10. H. Wiener, C. Gilon, An improved method for the catalytic preparation of t-butyl esters of carboxylic and fatty acid, J. Mol. Catal., 1986, vol. 37, p. 45-52. DOI 10.1016/0304-5102(86)85136-7.
  11. B. Neises, W. Steglich, Esterification of Carboxylic Acids with Dicyclohexylcarbodiimide/4-Dimethylaminopyridine: Tert-Butyl Ethyl Fumarate, Org. Synth., coll. « vol. 7 », , p. 93
  12. B. Neises, W. Steglich, Simple Method for the Esterification of Carboxylic Acids, Angew. Chem. Int. Ed., 1978, vol. 17, p. 522–524.DOI 10.1002/anie.197805221.
  13. R. Milcent et F. Chau, Chimie organique hétérocyclique : Structures fondamentales, chimie et biochimie des principaux composés naturels, EDP Sciences, 2003. (ISBN 9782868835833), présentation en ligne
  14. E. F. V. Scriven, 4-Dialkylaminopyridines: Super Acylation and Alkylation Catalysts, Chem. Soc. Rev., 1983, vol. 12, p. 129-161.
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