Coefficient de Poisson
Mis en évidence (analytiquement) par Siméon Denis Poisson, le coefficient de Poisson (aussi appelé coefficient principal de Poisson) permet de caractériser la contraction de la matiÚre perpendiculairement à la direction de l'effort appliqué.
DĂ©finition
Dans le cas le plus général le coefficient de Poisson dépend de la direction de l'allongement, mais :
- dans le cas important des matériaux isotropes il en est indépendant ;
- dans le cas d'un matériau isotrope transverse (en) on définit trois coefficients de Poisson (dont deux liés par une relation) ;
- dans le cas d'un matériau orthotrope on définit deux coefficients de Poisson (liés par une relation) pour chacune des trois directions principales.
Le coefficient de Poisson fait partie des constantes Ă©lastiques. Il est nĂ©cessairement compris entre â1 et 0,5, mais gĂ©nĂ©ralement positif. Certains matĂ©riaux artificiels et quelques matĂ©riaux naturels (certaines roches sĂ©dimentaires riches en quartz[1]) ont un coefficient de Poisson nĂ©gatif ; ces matĂ©riaux particuliers sont dits auxĂ©tiques. Les valeurs expĂ©rimentales obtenues pour un matĂ©riau quelconque sont souvent voisines de 0,3.
Relations
Cas d'un matériau isotrope
- Le changement de volume ÎV/V dĂ» Ă la contraction du matĂ©riau peut ĂȘtre donnĂ© par la formule (uniquement valable pour de petites dĂ©formations) :
- Le module d'élasticité isostatique () est lié au Module de Young () par le coefficient de Poisson () au travers de la relation :
Cette relation montre que doit rester infĂ©rieur Ă Âœ pour que le module d'Ă©lasticitĂ© isostatique reste positif. On note Ă©galement les valeurs particuliĂšres de Îœ :
- pour Μ = 1/3 on a K = E.
- pour Îœ â 0,5 on a K â â incompressibilitĂ© (cas du caoutchouc, par exemple)
- Avec le module de Young () exprimé en fonction du module de cisaillement () et de :
- .
Cette relation met en Ă©vidence le fait que ne peut ĂȘtre infĂ©rieur Ă -1, sinon son module de cisaillement serait nĂ©gatif (il serait sollicitĂ© en traction dĂšs qu'on le comprimerait !).
Cas d'un stratifié (isotrope transverse)
Un coefficient secondaire de Poisson est alors défini par la relation suivante :
oĂč et sont les modules de Young des matĂ©riaux et est le coefficient secondaire de Poisson.
Cas des matériaux naturels
Le coefficient de Poisson peut ĂȘtre calculĂ© Ă partir de l'allongement longitudinal et du rĂ©trĂ©cissement transversal, mesurĂ©s directement.
Pour les matĂ©riaux trĂšs rigides il peut ĂȘtre plus commode de mesurer la vitesse de propagation des ondes P et des ondes S et d'en dĂ©duire le coefficient de Poisson, grĂące Ă la relation :
- .
Corps simples
La plupart des corps simples à l'état solide ont un coefficient de Poisson compris entre 0,2 et 0,4. Sur 64 de ces corps simples[1], 6 seulement ont un coefficient supérieur à 0,4 (Si : 0,422 ; Au : 0,424 ; Pb : 0,442 ; Mo : 0,458 ; Cs : 0,460 ; Tl : 0,468), et 4 un coefficient inférieur à 0,2 (Ru : 0,188 ; Eu : 0,139 ; Be : 0,121 ; U : 0,095) ; aucun n'est auxétique.
Oxydes
Sur 160 oxydes testĂ©s en 2018[1], un seul est auxĂ©tique dans les conditions ambiantes, la cristobalite α[alpha 1] (Îœ = â0,164[2]), et elle le reste de 20 Ă 1 500 °C. Le quartz a aussi un coefficient de Poisson nettement plus petit que les autres oxydes : (Îœ = 0,08 Ă tempĂ©rature ambiante.
Pour 97,4 % des oxydes le coefficient de Poisson est compris entre 0,150 et 0,400 (moyenne : 0,256 ; Ă©cart type : 0,050). D'une maniĂšre gĂ©nĂ©rale le coefficient de Poisson est corrĂ©lĂ© positivement avec la masse volumique : (en excluant la cristobalite et le quartz) mais le coefficient de dĂ©termination r2 n'est pas trĂšs Ă©levĂ© : 0,28. La corrĂ©lation est meilleure quand on ne considĂšre que les oxydes cristallisant dans un mĂȘme systĂšme rĂ©ticulaire :
SystĂšme[grec 1] | n[grec 2] | Ăquation de corrĂ©lation | r2 |
---|---|---|---|
hexagonal | 8 | 0,99 | |
trigonal | 24 | 0,83 | |
cubique | 70 | 0,46 | |
tétragonal | 19 | 0,36 | |
orthorhombique | 33 | 0,27 |
- L'unique oxyde monoclinique étudié a un coefficient de Poisson égal à 2,271.
- n : nombre d'oxydes pris en compte dans la régression linéaire.
Silicates
Le coefficient de Poisson des 301 silicates testĂ©s en 2018 (9 cyclosilicates, 43 inosilicates, 219 nĂ©sosilicates, 5 phyllosilicates et 25 tectosilicates)[1] varie entre 0,080 pour le quartz[alpha 2] et 0,365 pour le zircon. Si l'on excepte ces deux extrĂȘmes, Îœ varie entre 0,200 et 0,350 (moyenne : 0,261 ; Ă©cart-type : 0,030).
Autres composés inorganiques
Le coefficient de Poisson des carbonates, des halogénures, des phosphates, des sulfates et des sulfures s'étage entre 0,091 et 0,379 :
ComposĂ©s | n | Intervalle de valeurs | Moyenne | Ăcart type |
---|---|---|---|---|
Carbonates | 12 | 0,178-0,319 | 0,288 | 0,041 |
Halogénures | 10 | 0,133-0,310 | 0,258 | 0,048 |
Phosphates | 8 | 0,091-0,316 | 0,243 | 0,083 |
Sulfates | 8 | 0,191-0,379 | 0,305 | 0,057 |
Sulfures | 10 | 0,160-0,376 | 0,290 | 0,086 |
Quelques valeurs numériques
Les caractéristiques mécaniques des matériaux sont variables d'un échantillon à l'autre. Néanmoins, pour les calculs, on peut considérer en bonne approximation les valeurs suivantes. Le coefficient de Poisson n'a pas d'unité.
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Notes et références
Notes
- La cristobalite α est un polymorphe métastable du dioxyde de silicium SiO2.
- Le quartz n'est pas à proprement parler un silicate (c'est un oxyde), mais il est classé parmi les tectosilicates dans les différentes classifications de minéraux.
Références
- (en) Shaocheng Ji, Le Li, Hem Bahadur Motra, Frank Wuttke, Shengsi Sun et al., « Poisson's Ratio and Auxetic Properties of Natural Rocks », Journal of Geophysical Research â Solid Earth, vol. 123, no 2,â , p. 1161-1185 (DOI 10.1002/2017JB014606).
- (en) A. Yeganeh-Haeri, D. J. Weidner et J. B. Parise, « Elasticity of α-cristobalite: A silicon dioxide with a negative Poissonâs ratio », Science, vol. 257, no 5070,â , p. 650-652 (DOI 10.1126/science.257.5070.650).