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La bĂŞte est morte !

La bête est morte ! est un album de bande dessinée publié en 1944, dessiné par Edmond-François Calvo, sur un scénario de Victor Dancette[1], éditeur de publications pour la jeunesse, et de Jacques Zimmermann[2].

La bĂŞte est morte !
SĂ©rie
Scénario Victor Dancette
Jacques Zimmermann
Dessin Edmond-François Calvo
Couleurs Edmond-François Calvo
Genre(s) Bande dessinée animalière

Thèmes Satire du conflit avec les Nazis
Lieu de l’action Europe, Océan Pacifique
Époque de l’action Seconde Guerre mondiale

Pays France
Autres titres La Guerre Mondiale chez les animaux
Éditeur Éditions G.P.
Première publication 1944
ISBN 2-07-059073-9

L'album

La bête est morte ! raconte, en deux volumes, la Seconde Guerre mondiale, sous forme de satire animalière du conflit et de l'occupation. La bande dessinée ayant été publiée après la libération de la France, mais quelques mois avant la fin du conflit en Europe, la fin de l'histoire annonce la chute d'Hitler sans la décrire. Le récit raconte pour l'essentiel le conflit en Europe, mais une page est consacrée à la guerre du Pacifique.

C'est une des rares bandes dessinées françaises réalisées sur l'Occupation, avec Les Trois Mousquetaires du maquis de Marijac. L'œuvre est créée peu après le dessin animé Blitz Wolf de Tex Avery, mais il semble peu probable que les auteurs aient pu le voir. Le style de Calvo, en revanche, est influencé par les dessins animés de Walt Disney[3].

Un extrait

« La défaite indiscutable, totale, décisive infligée aux Barbares par les Bisons et les Dogs après leur débarquement, le soulèvement magnifique des Lapins de notre capitale, la libération des neuf dixièmes de notre sol par les Bisons, la délivrance du pays des Lionceaux par les Dogs, l’avance foudroyante et irrésistible des Ours à travers la Barbarie, tous ces évènements inouïs que nous attendons depuis plus d’un lustre et qui se précipitaient, fulgurants, en l’espace de quelques lunes, sonnaient bien le glas de la domination du Grand Loup.

La Bête déchainée – dont le règne devait durer mille ans ! était enfin terrassée après cinq années de luttes, de souffrances et de sacrifices de tous les animaux pacifiques. On devinait son agonie toute proche et déjà le régime qu’il avait instauré sentait le cadavre. »

Les deux fascicules

  • Quand la bĂŞte est dĂ©chainĂ©e. « Entre Le VĂ©sinet et MĂ©nilmontant, dans la gueule du Grand Loup (Adolf Hitler), au groin du Cochon dĂ©corĂ© (Hermann Göring), et sans l'autorisation du Putois bavard (Joseph Goebbels), cet album a Ă©tĂ© conçu et rĂ©digĂ© par Victor Dancette et Jacques Zimmermann, et illustrĂ© par Calvo sous la direction artistique de William PĂ©ra. Il a Ă©tĂ© gravĂ© et imprimĂ© par la NĂ©ogravure, pendant le troisième mois de la LibĂ©ration. »
  • Quand la bĂŞte est terrassĂ©e, conçu sous l'occupation et rĂ©alisĂ© dans la libertĂ©, ce deuxième fascicule a Ă©tĂ© Ă©crit par Victor Dancette sous les calmes ombrages du VĂ©sinet, encore illustrĂ© par Calvo et « achevĂ© d'imprimer en juin 45 avec l'espoir que la bĂŞte est bien morte ».

Des rééditions sont sorties en 1977 chez Futuropolis et en 1995 chez Gallimard. L'édition Futuropolis contient également des reproductions monochromes pleine page de Calvo parues initialement dans le journal L'Armée française au combat à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Elle reproduit aussi, en pages intérieures, les couvertures des deux albums initiaux, mais en des dessins grisés et quelque peu agrandis, alors qu'ils étaient polychromes. La comparaison des deux représentations du Grand Loup sont parlantes : la première le montre dans la fierté de la victoire, alors que la seconde lui attribue un œil crevé caché par un vilain morceau de cuir, un plaie à la patte gauche. Alors que le premier salue le bras droit levé et affiche un regard mauvais, le second lève les deux bras en signe de désespoir, voire de capitulation ; son nez est comme cassé, béant et partiellement recousu ; sa vareuse est déchirée au coude et en d'autres endroits, sa botte droite laisse passer ses orteils ; la fin est proche.

Transpositions

Animaux

Les différents peuples et personnages impliqués dans la guerre sont représentés par des animaux :

Population Animaux représentatifs Personnalité Animal représentatif
AllemandsloupsAdolf Hitler« le Grand Loup » « toujours en fureur »
Hermann Göring« le Cochon Décoré »
Erwin Rommel« le fameux lieutenant du Grand Loup »
Joseph Goebbels« le Putois Bavard » « un avorton de putois, hargneux et contrefait »
Rudolf Hess« le plus fidèle lieutenant du Grand Loup »
AméricainsbisonsFranklin Roosevelt« l'Élu des Bisons »
Congrès des États-Unis« le Congrès des Bisons »
Grecsun peuple millénaire dont les exploits remontent à l'Antiquité
Australienskangourous
Belgeslionceaux
Suissesbergers
Britanniquesdogs (chiens)Winston Churchill« le Premier des Dogs »
Bernard Montgomery« Un Dog choisi parmi les Dogs maigres »
Chinoisbuffles et dragons
Danoisdogue danois (au pelage arlequin)le roi des Danois
ÉthiopienslionsHailé Sélassié« le Roi des rois des Animaux »
Françaislapins, grenouilles, écureuils et cigognesCharles de Gaulle« notre cigogne nationale »
Troupes coloniales françaises[Note 1]léopards
ItalienshyènesBenito Mussolini« la Hyène à peau de louve »
Japonaissinges jaunesHirohito« le Grand Singe »
NĂ©erlandaisvaches[Note 2]
Polonaislapins[Note 3]
Soviétiquesours polairesStaline« le Grand Ours », « maréchal de l'Ourserie »
IranienschatsShah d'Iran« le Chat impérial »

Toponymes

Pays/lieu Nom dans la BD
Égypte Le pays des dix plaies
Ligne Maginot Livarot
La Grande Allemagne du Troisième Reich La Barbarie
Pearl Harbor la base principale des Bisons dans ces régions lointaines
ĂŽles hawaĂŻennes du Nord-Ouest (bataille de Midway) Le Pays des guitares
Tulle (Massacre de Tulle) Une cité célèbre pour ses dentelles
Oradour-sur-Glane (Massacre d'Oradour-sur-Glane) un petit village qu'ils cernèrent

Style et thèmes abordés

  • La Shoah est Ă©voquĂ©e brièvement, en deux cases, mais de manière explicite, et l'Ă©toile jaune apparaĂ®t dans le dĂ©tail d'un dessin. Didier Pasamonik note qu'il s'agit lĂ  de la première Ă©vocation du gĂ©nocide juif dans une bande dessinĂ©e[4], bien que sa description, qui assimile les victimes du rĂ©gime nazi Ă  des opposants politiques, ait pu ĂŞtre critiquĂ©e a posteriori[5]. Le texte, page 25, dĂ©crit ainsi la dĂ©portation et le gĂ©nocide, dont la spĂ©cificitĂ© et l'ampleur n'avaient pas Ă©tĂ© encore rĂ©alisĂ©es Ă  la fin 1944 : « Poursuivant plus particulièrement leur vengeance contre certaines tribus d’animaux pacifiques que nous hĂ©bergions et Ă  qui nous avions bien souvent ouvert nos portes pour les abriter contre la fureur de la BĂŞte dĂ©chaĂ®nĂ©e, les hordes du Grand loup avaient commencĂ© le plus atroce plan de destruction des races rebelles, dispersant les membres de leurs tribus dans des rĂ©gions lointaines, sĂ©parant les femmes de leurs Ă©poux, les enfants de leur mère, visant ainsi l’anĂ©antissement total de ces foules inoffensives qui n’avaient commis d’autre crime que celui de ne pas se soumettre Ă  la volontĂ© de la BĂŞte ».
  • La libĂ©ration de Paris est symbolisĂ©e par une transcription du cĂ©lèbre tableau d'Eugène Delacroix, La LibertĂ© guidant le peuple, avec des diffĂ©rences importantes dans la mimique des personnages. Alors que les visages de Delacroix sont graves, que la LibertĂ© regarde derrière elle les hommes qui montent Ă  l'assaut, les visages de Calvo sont rigolards, la LibertĂ© affiche sa joie. Au fond, le SacrĂ©-CĹ“ur de Montmartre matĂ©rialise bien le parisianisme de l'Ă©vènement. Le texte souligne la joie des journĂ©es d' : « Je ne pense pas que dans l'Histoire notre capitale ait jamais connu pareilles journĂ©es d'universelle exaltation ! » (p. 88) La page suivante poursuit sur le mĂŞme thème d'enthousiasme, montrant le char Sherman « IĂ©na » dans une rue Ă©troite du centre de Paris ; les tours de Notre Dame ferment le fond de la rue. Le nom du char[Note 4] - [6] rappelle la bataille d'IĂ©na (1806), qui s'est terminĂ©e par une victoire totale des Français contre les Prussiens alliĂ©s aux Saxons. Au premier plan des deux pages, des restes de l'armĂ©e allemande (cadavres p. 88, casque, casquette et fusil p. 89) affichent l'Ă©croulement de l'ennemi. La prĂ©sence des deux Ă©difices religieux rappellent les cloches sonnant Ă  toute volĂ©e lorsque la 2e DB (2e division blindĂ©e) est entrĂ©e dans Paris. DĂ©jĂ , p. 30, « les bonnes sĹ“urs de charitĂ© » avaient matĂ©rialisĂ© le dĂ©vouement des femmes qui « se dĂ©vouaient jusque sous le feu de l'ennemi. »

Notes et références

Notes

  1. Particulièrement les Spahis, compte tenu de leurs atours.
  2. Visibles au travers des possessions en Indonésie dans le cadre de leur empire colonial.
  3. Ce qui donne l'idée des accords stratégiques alors en place avec la France, ainsi que l'imminence du désastre de la débâcle, comme le sort fut jeté lors de l'invasion de la Pologne.
  4. Le char Sherman « Iéna » a bien existé : il faisait partie du 501e régiment de chars, et donc de la 2e division blindée.

Références

Voir aussi

Bibliographie

Article connexe

Liens externes

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