Virus Zika
Le virus Zika est l'agent infectieux Ă l'origine, chez l'homme, de l'infection Ă virus Zika. Il s'agit d'un virus Ă ARN monocatĂ©naire de polaritĂ© positive, relevant donc du groupe IV de la classification Baltimore, et appartenant au genre Flavivirus. Il est notamment apparentĂ© aux virus de la dengue, de la fiĂšvre jaune, de l'encĂ©phalite japonaise et du Nil occidental[3]. Il appartient au mĂȘme sĂ©rogroupe que le virus Spondweni[4] - [5].
Le nom du virus fait rĂ©fĂ©rence Ă la forĂȘt de Zika, prĂšs d'Entebbe (Ouganda), oĂč il a Ă©tĂ© isolĂ© en 1947 sur un macaque rhĂ©sus avant d'ĂȘtre caractĂ©risĂ© en 1952 comme une nouvelle espĂšce virale[6]. Il existe en fait deux lignĂ©es de virus Zika, l'une originaire d'Afrique et l'autre d'Asie.
En , faisant suite Ă l'apparition de l'Ă©pidĂ©mie d'infections Ă virus Zika au BrĂ©sil, l'Organisation mondiale de la santĂ© « a rendu lâavis que le groupe rĂ©cent de cas de microcĂ©phalie et dâautres troubles neurologiques signalĂ©s au BrĂ©sil, faisant suite Ă un regroupement similaire de cas en PolynĂ©sie française en 2014, constitue une urgence de santĂ© publique de portĂ©e internationale (USPPI) »[7].
Phylogénie
Il existe deux lignĂ©es de virus Zika, l'une originaire d'Afrique et l'autre d'Asie[8]. Des Ă©tudes phylogĂ©nĂ©tiques indiquent que le virus qui se propage sur le continent amĂ©ricain est identique Ă 89 % aux gĂ©notype africains mais est apparentĂ© plus Ă©troitement aux souches asiatiques qui ont circulĂ© en PolynĂ©sie française au cours de l'Ă©pidĂ©mie de 2013-2014[9] - [10]. La souche asiatique semble s'ĂȘtre diffĂ©renciĂ©e aux alentours de 1928[11].
- Les souches de virus Zika séquencées à Rio de Janeiro en 2016 (marquées d'un point noir ⏀ en haut de l'arbre) sont proches de celles identifiées en Polynésie française en 2013[12].
GĂ©nome et structure
Ce virus enveloppé d'environ 50 nm de diamÚtre présente une capside icosaédrique recouverte d'une membrane et contenant l'ARN viral[13]. Il a un génome non segmenté long de 10 kilobases[14] qui code trois protéines structurelles et sept protéines non structurelles[15]. La séquence de l'ARN d'une souche de virus Zika issue de l'épidémie de 2013 en Polynésie française a ainsi montré un génome de 10 617 nucléotides avec un cadre de lecture ouvert de 10 272 nucléotides codant une polyprotéine clivée en les protéines suivantes[16] : protéine de capside C de 105 résidus d'acides aminés ; protéine de prémembrane prM de 187 résidus ; protéine d'enveloppe E de 505 résidus comprenant le motif de glycosylation de 154 résidus précédemment associé à la virulence ; et sept protéines non structurelles : NS1 de 352 résidus ; NS2A de 217 résidus ; NS2B de 139 résidus ; NS3 de 619 résidus, une hélicase[17] ayant une activité de protéase à sérine en complexe NS2B-NS3[18] ; NS4A de 127 résidus ; NS4B de 255 résidus ; NS5 de 904 résidus, une ARN polymérase ARN-dépendante[19].
L'une de ces protéines structurelles, la glycoprotéine d'enveloppe E, encapsule le virus et se lie à la membrane de l'endosome de la cellule hÎte pour déclencher l'endocytose[20]. L'ARN viral forme une nucléocapside avec la protéine de capside C de 12 kDa. Cette nucléocapside est enveloppée dans une membrane dérivée de la membrane plasmique de la cellule hÎte, modifiée avec deux glycoprotéines virales[21]. La réplication nécessite une ARN polymérase ARN-dépendante.
L'extrĂ©mitĂ© 5â de l'ARN viral porte une coiffe tandis que l'extrĂ©mitĂ© 3â est dĂ©pourvue de queue poly(A) mais forme une Ă©pingle Ă cheveux reconnue par l'exoribonuclĂ©ase cellulaire XRN1 (en) qui la clive[13].
- Représentation d'une capside de virus Zika[22] montrant les protéines de capside en jaune, orange et rouge-orangé pour mettre en évidence la symétrie icosaédrique. Les pointes couleur cyan sont des chaßnes polyosidiques.
- Coupe[22] d'un virion de virus Zika (à gauche) montrant les protéines d'enveloppe E représentées en rouge et les protéines de membrane M en magenta incluses dans la membrane lipidique en violet et interagissant avec les récepteurs membranaires à la surface des cellules en vert. Dans la capside, le génome d'ARN en jaune est lié aux protéines de capside C en orange.
Le virion a un diamÚtre ne dépassant pas 50 nm avec une capside à géométrie icosaédrique dont chaque face contient trois homodimÚres de la protéine d'enveloppe E[13], tandis que la protéine transmembranaire M se loge dans l'enveloppe virale et la protéine de capside C contient l'ARN viral.
Infection des cellules hĂŽtes
Une étude a montré que six heures aprÚs l'infection de cellules par le virus Zika, les vacuoles et les mitochondries de ces cellules commencent à enfler. Ce gonflement devient suffisamment sévÚre pour déclencher la paraptose (en) des cellules. Cette forme de mort cellulaire programmée requiert l'expression de certains gÚnes.
Le virus Zika cible particuliÚrement les cellules de la peau[23] et les cellules souches neuronales[24], entraßnant des malformations sévÚres chez le nouveau-né[25] et des atteintes neurologiques graves, comme le syndrome de Guillain-Barré[26].
La protéine IFITM3 (en) est une protéine transmembranaire des cellules capable de protéger ces derniÚres de l'infection virale en bloquant l'attachement du virus. Les cellules les plus sensibles à l'infection au virus Zika sont celles qui ont un faible taux de protéine IFITM3. Une fois les cellules infectées, le virus réorganise le réticulum endoplasmique en formant de grandes vacuoles, ce qui tue la cellule[27].
Maladie
L'infection Ă virus Zika est une virose gĂ©nĂ©ralement asymptomatique avec quelques cas prĂ©sentant des symptĂŽmes peu marquĂ©s Ă©voquant la dengue[28] - [29]. Parmi les symptĂŽmes de la maladie, on relĂšve fiĂšvre, yeux rouges, douleurs articulaires, maux de tĂȘte, Ă©ruptions cutanĂ©es[28] - [30] - [31]. Ils se prolongent gĂ©nĂ©ralement moins d'une semaine et ne sont pas mortels[32], en revanche la transmission du virus de la femme enceinte Ă son fĆtus est susceptible d'entraĂźner une microcĂ©phalie et diverses autres malformations du cerveau chez le nouveau-nĂ©[33] - [34], tandis qu'on peut observer un syndrome de Guillain-BarrĂ© chez l'adulte[32].
On peut contracter la maladie essentiellement par piqĂ»re de moustiques du genre Aedes[30], mais elle peut Ă©galement se transmettre sexuellement ainsi qu'Ă©ventuellement lors de transfusions sanguines[30] - [35]. Les femmes enceintes peuvent transmettre le virus Ă leur bĂ©bĂ©[33] - [34]. Le virus peut encore ĂȘtre excrĂ©tĂ©e dans l'urine Ă taux Ă©levĂ©s plus de 10 jours aprĂšs le dĂ©but de la maladie, aprĂšs qu'on ne le trouve plus dans le sĂ©rum[36].
Le diagnostic est réalisé par prélÚvement de sang, d'urine ou de salive pour y rechercher la présence d'ARN viral, ou pour rechercher des anticorps dans le sang chez les patients présentant les symptÎmes depuis plus d'une semaine[28] - [30].
Manipulation de l'hĂŽte, de son odeur et des moustiques par le virus
Comme dans le cas de la dengue et probablement dans le cas d'autres maladies vectorielles dont le vecteur est le moustique, le virus peut modifier l'odeur corporelle de son hĂŽte Ă son profit, en le rendant plus attractif pour les moustiques, ce qui permet au virus de mieux ĂȘtre gĂ©ographiquement dispersĂ© et de trouver d'autres hĂŽtes chez lesquels il aura une chance de se faire dupliquer. Ceci a Ă©tĂ© montrĂ© en Chine en 2022, Ă l'UniversitĂ© Tsinghua (PĂ©kin), chez la souris de laboratoire[37].
La modification de l'odeur de l'hĂŽte lors d'une maladie est connue depuis longtemps. On avait dĂ©jĂ montrĂ© que le parasite causant le paludisme change l'odeur corporelle de son hĂŽte, qui attire alors plus les moustiques femelles[38], et ce type de manipulation est Ă©galement connu chez les vĂ©gĂ©taux (ex : le virus de la mosaĂŻque du concombre fait libĂ©rer par sa plante hĂŽte une molĂ©cule attirant les pucerons, qui seront le vecteur de dispersion pour le virus[39]). Les virus Zika et celui de la dengue font que certaines bactĂ©ries du microbiote cutanĂ© de la souris ou de l'humain produisent environ dix fois plus d'acĂ©tophĂ©none que la normale. Et des souris saines ou des humains expĂ©rimentalement badigeonnĂ©s avec l'acĂ©tophĂ©none attirent effectivement plus les moustiques. Il semble que le virus inhibe la production d'une protĂ©ine antimicrobienne normalement sĂ©crĂ©tĂ©e par la peau. Le gĂšne codant pour cette protĂ©ine est inhibĂ© chez les souris infectĂ©es par le virus Zika (ou de la dengue)[37]. On a constatĂ© que les humains infectĂ©s par ces virus produisent plus d'acĂ©tophĂ©none au niveau de leurs aisselles que ceux qui ne sont pas infectĂ©s. La vitamine A (connue pour traiter certaines affections cutanĂ©es) diminue la quantitĂ© d'acĂ©tophĂ©none exsudĂ©e par les animaux ; ce qui en fait un candidat pour les antiviraux, qui sera testĂ© en Malaisie, oĂč la Dengue est endĂ©mique[37].
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