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Triose-phosphate isomérase

La triose-phosphate isomérase (TPI) est une isomérase qui catalyse la réaction :

dihydroxyacétone phosphate D-glycéraldéhyde-3-phosphate.
Triose-phosphate isomérase
Image illustrative de l’article Triose-phosphate isomĂ©rase
DimÚre de triose-phosphate isomérase humaine (PDB 1WYI[1]).
Caractéristiques générales
Symbole TPI1
N° EC 5.3.1.1
Classification
Pfam PF00121
Clan Pfam CL0036
InterPro IPR000652
PROSITE PDOC00155
SCOP 1tph
SUPERFAMILY 1tph
Homo sapiens
Locus 12p13.31
Masse molĂ©culaire 30 791 Da[2]
Nombre de rĂ©sidus 286 acides aminĂ©s[2]
Liens accessibles depuis GeneCards et HUGO.

Cette enzyme intervient Ă  la 5e Ă©tape de la glycolyse pour catalyser l'isomĂ©risation rĂ©versible de la dihydroxyacĂ©tone phosphate (DHAP) en D-glycĂ©raldĂ©hyde-3-phosphate (G3P). Ainsi, chaque molĂ©cule de ÎČ-D-fructose-1,6-bisphosphate mĂ©tabolisĂ©e par la glycolyse donne en fin de compte deux molĂ©cules de D-glycĂ©raldĂ©hyde-3-phosphate.

Dihydroxyacétone phosphate D-Glycéraldéhyde-3-phosphate

Elle est prĂ©sente chez pratiquement tous les ĂȘtres vivants oĂč on l'a recherchĂ©e, des animaux aux insectes en passant par les mycĂštes, les plantes et les bactĂ©ries. Seules quelques bactĂ©ries qui ne possĂšdent pas le matĂ©riel enzymatique nĂ©cessaire Ă  la glycolyse ne disposent pas non plus de triose-phosphate isomĂ©rase, telles que celles du genre Ureaplasma.

La triose-phosphate isomérase est une enzyme particuliÚrement efficace, qui réalise cette réaction des milliards de fois plus rapidement que naturellement en solution. Cette réaction est tellement efficace qu'il s'agit d'une enzyme parfaite : elle n'est limitée que par la vitesse de diffusion des molécules entrant et sortant du site actif[3] - [4].

Chez l'homme, un déficit en triose-phosphate isomérase (en) est une maladie neurologique grave, caractérisée par une anémie hémolytique chronique. Cette maladie est induite par diverses mutations, dont la plupart impliquent le changement du résidu de glutamate en aspartate en position 140[5].

Structure

Structure tertiaire d'un monomĂšre de triose-phosphate isomĂ©rase, formant un tonneau TIM. Les feuillets ÎČ sont reprĂ©sentĂ©s en vert tandis que les hĂ©lices α sont en marron.

La triose-phosphate isomĂ©rase est une enzyme homodimĂ©rique, c'est-Ă -dire qu'elle est formĂ©e de deux sous-unitĂ©s identiques, contenant chacune environ 250 rĂ©sidus d'acides aminĂ©s. La structure tertiaire de chaque sous-unitĂ© contient huit hĂ©lices α Ă  l'extĂ©rieur et huit feuillets ÎČ parallĂšles Ă  l'intĂ©rieur, l'ensemble formant un tonneau TIM. Le site actif de l'enzyme se trouve au centre de ce tonneau. La rĂ©action catalysĂ©e fait intervenir des rĂ©sidus de glutamate et d'histidine et la sĂ©quence entourant le site actif est conservĂ©e dans toutes les triose-phosphate isomĂ©rases connues.

La structure de cette enzyme est adaptée à sa fonction. Outre les résidus de glutamate et d'histidine judicieusement situés, une chaßne de dix ou onze résidus agit comme une boucle stabilisant l'intermédiaire réactionnel. Cette boucle, constituée des résidus 166 à 176, enferme le substrat et forme une liaison hydrogÚne avec son groupe phosphate, ce qui stabilise l'intermédiaire Únediol et les autres états intermédiaires de la réaction[6]. En particulier, la liaison hydrogÚne entre l'enzyme et le groupe phosphate a pour effet de prévenir la décomposition de ces intermédiaires en méthylglyoxal et phosphate inorganique. Le méthylglyoxal est toxique et, s'il se forme, est éliminé par le systÚme glyoxalase[7]. De plus, la formation de glyoxalate conduit à la perte d'un groupe phosphate à haut potentiel de transfert pour le reste de la glycolyse, ce qui est énergétiquement défavorable pour la cellule.

Certaines études suggÚrent qu'un résidu de lysine en position 12, proche du site actif, joue également un rÎle déterminant dans le fonctionnement de l'enzyme. Ce résidu est protoné à pH physiologique et pourrait ainsi contribuer à neutraliser la charge électrique négative du groupe phosphate. L'enzyme perd toute activité lorsque ce résidu est remplacé par celui d'un acide aminé neutre au cours d'une mutation génétique, tandis qu'elle conserve une certaine activité si ce résidu est remplacé par celui d'un autre acide aminé à chaßne latérale basique[8].

MĂ©canisme

Le mĂ©canisme rĂ©actionnel de la triose-phosphate isomĂ©rase implique la formation d'un intermĂ©diaire Ăšnediol. L'enthalpie libre de l'Ă©tat fondamental et de l'Ă©tat de transition de chaque intermĂ©diaire a pu ĂȘtre dĂ©terminĂ© expĂ©rimentalement et son Ă©volution est tracĂ©e sur la figure ci-dessous[3] :

La structure de la triose-phosphate isomĂ©rase facilite l'interconversion entre la dihydroxyacĂ©tone phosphate et le glycĂ©raldĂ©hyde-3-phosphate. Le rĂ©sidu nuclĂ©ophile de Glu-165 de l'enzyme agit en dĂ©protonant le substrat[9], tandis que le rĂ©sidu Ă©lectrophile d'His-95 cĂšde un proton pour former l'intermĂ©diaire Ăšnediol[10] - [11]. L'intermĂ©diaire Ăšnediolate dĂ©protonĂ© absorbe un proton du rĂ©sidu de Glu-165 protonĂ© pour donner le glycĂ©raldĂ©hyde-3-phosphate. La rĂ©action inverse est catalysĂ©e de façon analogue, avec le mĂȘme intermĂ©diaire Ăšnediol, mais avec une rĂ©action sur l'atome d'oxygĂšne en C2[6].

La triose-phosphate isomĂ©rase est une enzyme limitĂ©e par la diffusion des substrats — c'est-Ă -dire une enzyme parfaite. D'un point de vue thermodynamique, la formation de dihydroxyacĂ©tone phosphate est favorisĂ©e Ă  20:1 par rapport Ă  la formation de glycĂ©raldĂ©hyde-3-phosphate[12]. Cependant, ce dernier est consommĂ© par la glycĂ©raldĂ©hyde-3-phosphate dĂ©shydrogĂ©nase ou cours de la glycolyse, ce qui dĂ©place l'Ă©quilibre vers la formation de ce composĂ© au dĂ©triment du dihydroxyacĂ©tone phosphate.

La triose-phosphate isomĂ©rase est inhibĂ©e par les ions sulfate SO42−, phosphate PO43− et arsĂ©niate AsO43−, qui se lient au site actif[13]. Parmi les autres inhibiteurs de cette enzyme, on note le 2-phosphoglycolate, un analogue de l'Ă©tat de transition (en), et le D-glycĂ©rol-1-phosphate (en), analogue structurel du substrat[14].

Notes et références

  1. (en) T. Kinoshita, R. Maruki, M. Warizaya, H. Nakajima et S. Nishimura, « Structure of a high-resolution crystal form of human triosephosphate isomerase: improvement of crystals using the gel-tube method », Acta Crystallographica Section F, vol. 61, no Pt 4,‎ , p. 346-349 (PMID 16511037, PMCID 1952429, DOI 10.1107/S1744309105008341, lire en ligne)
  2. Les valeurs de la masse et du nombre de résidus indiquées ici sont celles du précurseur protéique issu de la traduction du gÚne, avant modifications post-traductionnelles, et peuvent différer significativement des valeurs correspondantes pour la protéine fonctionnelle.
  3. (en) W. John Albery et Jeremy R. Knowles, « Free-energy profile for the reaction catalyzed by triosephosphate isomerase », Biochemistry, vol. 15, no 25,‎ , p. 5627-5631 (PMID 999838, DOI 10.1021/bi00670a031, lire en ligne)
  4. (en) Irwin A. Rose, Wen Jian Fung et Jessie V. B. Warms, « Proton diffusion in the active site of triosephosphate isomerase », Biochemistry, vol. 29, no 18,‎ , p. 4312-4317 (PMID 2161683, DOI 10.1021/bi00470a008, lire en ligne)
  5. (en) Ferenc Orosz, Judit OlĂĄh et Judit OvĂĄdi, « Triosephosphate isomerase deficiency: Facts and doubts », IUBMB Life, vol. 58, no 12,‎ , p. 703-715 (PMID 17424909, DOI 10.1080/15216540601115960, lire en ligne)
  6. (en) Jeremy R. Knowles, « Enzyme catalysis: not different, just better », Nature, vol. 350, no 6314,‎ , p. 121-124 (PMID 2005961, DOI 10.1038/350121a0, lire en ligne)
  7. (en) Donald J. Creighton et Diana S. Hamilton, « Brief History of Glyoxalase I and What We Have Learned about Metal Ion-Dependent, Enzyme-Catalyzed Isomerizations », Archives of Biochemistry and Biophysics, vol. 387, no 1,‎ , p. 1-10 (PMID 11368170, DOI 10.1006/abbi.2000.2253, lire en ligne)
  8. (en) Patricia J. Lodi, Louise C. Chang, Jeremy R. Knowles et Elizabeth A. Komives, « Triosephosphate Isomerase Requires a Positively Charged Active Site: The Role of Lysine-12 », Biochemistry, vol. 33, no 10,‎ , p. 2809-2814 (PMID 8130193, DOI 10.1021/bi00176a009, lire en ligne)
  9. (en) T. Alber, D. W. Banner, A. C. Bloomer, G. A. Petsko, David Phillips, P. S. Rivers et I. A. Wilson, « On the Three-Dimensional Structure and Catalytic Mechanism of Triose Phosphate Isomerase », Philosophical Transactions B, vol. 293, no 1063,‎ , p. 159-171 (PMID 6115415, DOI 10.1098/rstb.1981.0069, lire en ligne)
  10. (en) Elliott B. Nickbarg, Robert C. Davenport, Gregory A. Petsko et Jeremy R. Knowles, « Triosephosphate isomerase: removal of a putatively electrophilic histidine residue results in a subtle change in catalytic mechanism », Biochemistry, vol. 27, no 16,‎ , p. 5948-5960 (PMID 2847777, DOI 10.1021/bi00416a019, lire en ligne)
  11. (en) Elizabeth A. Komives, Louise C. Chang, Elias Lolis, Robert F. Tilton, Gregory A. Petsko et Jeremy R. Knowles, « Electrophilic catalysis in triosephosphate isomerase: the role of histidine-95 », Biochemistry, vol. 30, no 12,‎ , p. 3011-3019 (PMID 2007138, DOI 10.1021/bi00226a005, lire en ligne)
  12. (en) Thomas K. Harris, Robert N. Cole, Frank I. Comer et Albert S. Mildvan, « Proton Transfer in the Mechanism of Triosephosphate Isomerase », Biochemistry, vol. 37, no 47,‎ , p. 16828-16838 (PMID 9843453, DOI 10.1021/bi982089f, lire en ligne)
  13. (en) Anne-Marie Lambeir, Fred R. Opperdoes et Rik K. Wierenga, « Kinetic properties of triose-phosphate isomerase from Trypanosoma brucei brucei », The FEBS Journal, vol. 168, no 1,‎ , p. 69-74 (PMID 3311744, DOI 10.1111/j.1432-1033.1987.tb13388.x, lire en ligne)
  14. (en) Elias Lolis et Gregory A. Petsko, « Crystallographic analysis of the complex between triosephosphate isomerase and 2-phosphoglycolate at 2.5-Å resolution: implications for catalysis », Biochemistry, vol. 29, no 28,‎ , p. 6619-6625 (PMID 2204418, DOI 10.1021/bi00480a010, lire en ligne)
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