Recyclage des pneus
Le recyclage des pneus consiste Ă les rĂ©utiliser dans des filiĂšres de revente d'occasion et de pneus rechapĂ©s ou Ă en rĂ©utiliser la matiĂšre ; la valorisation des « pneus usagĂ©s non rĂ©utilisables » (PUNR) dĂ©signe la rĂ©cupĂ©ration et valorisation â dans le pneu usagĂ© â de matĂ©riaux (caoutchouc, acier), ou de molĂ©cules Ă©nergĂ©tiques (gaz, huile) ou de produits chimiques rĂ©utilisables.
Le recyclage sâappuie sur l'une des trois approches suivantes :
- RĂ©paration du pneu pour un usage identique aprĂšs rechapage (recyclage) ;
- Utilisation du matériau pour produire de nouveaux objets d'usages différents (recyclage) ;
- Traitement du pneu-dĂ©chet pour y rĂ©cupĂ©rer tout ou partie de ses composants chimiques, afin de les rĂ©utiliser en carbochimie voire pour fabriquer du caoutchouc recyclĂ©, lequel pourrait servir Ă produire de nouveaux pneus (ce qui ne semble pas encore ĂȘtre le cas, mais depuis peu la dĂ©vulcanisation permet de recycler du caoutchouc de maniĂšre Ă le rĂ©utiliser pour produire de nouveaux objets en caoutchouc).
Remarque : en France les opĂ©rations de valorisation Ă©nergĂ©tique des pneus, tout comme celles relatives Ă leur conversion en combustible et les opĂ©rations de remblaiement ne peuvent en aucun cas ĂȘtre qualifiĂ©es d'opĂ©rations de recyclage[1].
Le principe de hiĂ©rarchisation des usages et des valorisations veut en Europe que dans la gestion des dĂ©chets, l'incinĂ©ration sans valorisation Ă©nergĂ©tique soit la derniĂšre voie dâĂ©limination choisie, quand le recyclage et dâautres formes de valorisation ne sont plus possibles dans les conditions techniques et Ă©conomiques du moment. Quand le pneu ne peut ĂȘtre recyclĂ©, dâautres formes de valorisation sont alors possibles :
- lâincinĂ©ration du matĂ©riau avec rĂ©cupĂ©ration dâĂ©nergie par exemple pour une industrie ou un rĂ©seau de chaleur urbain, avec valorisation possible des ferrailles rĂ©siduelles si elles Ă©taient encore prĂ©sentes dans le « combustible » ;
- une valorisation mixte (matiĂšre et Ă©nergie) en cimenterie ou aciĂ©rie oĂč le pneu remplace le pĂ©trole, le charbon ou le coke de pĂ©trole (il produit Ă peu prĂšs autant de chaleur que lâanthracite) et est une source de fer pour le ciment ;
- pyrolyse ou autre méthode de récupération de molécules et/ou de vecteur énergétique (gaz et/ou « char » combustible).
Les autres solutions de recyclage et de « valorisation » des pneus en fin de vie sont :
- La mise en décharge ;
- L'incinération sans valorisation énergétique
Elles sont de moins en moins tolérées dans le monde.
Tendances réglementaires et en matiÚre de gestion
Aujourd'hui aprĂšs l'utilisation comme carburant en cimenterie (qui n'est pas vraiment du recyclage), câest le broyat ou la poudrette de caoutchouc qui est la seconde voie de valorisation des pneus en fin de vie[2] avec des filiĂšres devenant dĂ©pendantes des cimenteries (ainsi le Maroc qui est dĂ©pourvu de ressources pĂ©troliĂšres importe des dĂ©chets de pneus pour alimenter ses cinq cimenteries (60 000 tonnes de broyats de pneus importĂ©es en 2008), mais quand il a interdit en 2016 durant quatre mois lâimportation de broyats de pneus pour ses cimenteries il a perturbĂ© Aliapur en France qui valorisaient au Maroc une partie des pneus collectĂ©s en France)[3].
En Europe
Depuis le 16 juillet 2006, il est interdit en Europe de mettre en décharge tout pneumatique usagé (hormis pneus de bicyclette et de diamÚtre extérieur supérieur à 1400 mm)[4].
En France
En 2003, la gestion des dĂ©chets de pneus passe sous la responsabilitĂ© Ă©largie des producteurs[5] ou « REP ». Ceci implique que les metteurs sur le marchĂ© (manufacturiers, importateurs de pneus ou dâengins munis de pneusâŠ) doivent chaque annĂ©e « sans frais pour les dĂ©tenteurs et les distributeurs »[6] collecter et traiter une quantitĂ© de dĂ©chets de pneumatiques Ă hauteur des quantitĂ©s neuves mises sur le marchĂ© l'annĂ©e nâ1).
Leurs obligations « sont rĂ©parties entre eux au prorata et dans la limite des tonnages de pneumatiques que chacun a mis sur le marchĂ© l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente »[6]. Dans tous les cas les dĂ©chets de pneumatiques collectĂ©s doivent ĂȘtre repris par les producteurs et stockĂ©s de maniĂšre Ă conserver leur intĂ©gritĂ©, en les sĂ©parant dâautres types de dĂ©chets, et en les triant par type[7] puis remis Ă des « collecteurs agrĂ©Ă©s » (par la prĂ©fecture du dĂ©partement de lâinstallation de regroupement ou sinon par le prĂ©fet du dĂ©partement du siĂšge social ou du lieu de rĂ©sidence du producteur).
En 2006, tous les types de pneus étaient concernés (voitures, poids lourds, motos, engins de travaux publics, tracteurs, etc.), hors pneus de vélos et cyclomoteurs (< 50 cm et vitesse maximale de 45 km/h).
Vers 2015, la majorité (66 %) des producteurs français avaient opté pour l'adhésion à Aliapur ou à FRP, Ardag (Guyane), AVPUR (Réunion), Association TDA (Guadeloupe) et TDA PNUR (à partir de 2003, les distributeurs et détenteurs ont du choisir entre déléguer à des organismes collectifs (OC) le soin de remplir leurs obligations en matiÚre de collecte et de traitement des déchets de pneumatiques, ou individuellement négocier des contrats de collecte et de traitement avec des professionnels).
En 2015, un dĂ©cret relatif Ă la gestion des dĂ©chets de pneumatiques a fixĂ© (en aoĂ»t) un nouveau cadre rĂ©glementaire, suivi de trois arrĂȘtĂ©s (dĂ©cembre) prĂ©cisant les conditions de la collecte des pneus, les objectifs assignĂ©s aux Ă©co-organismes ainsi quâaux systĂšmes individuels, avec un plafonnement en 2020 de la valorisation Ă©nergĂ©tique (50 % de la valorisation au maximum). Les producteurs (ex. : Goodyear, Michelin, Pirelli) doivent mettre en place des « actions en matiĂšre d'Ă©coconception liĂ©e Ă la fin de vie des produits visant Ă notamment rĂ©duire la teneur en substances nocives des dĂ©chets de pneumatiques, Ă faciliter leur traitement, et la quantitĂ© de dĂ©chets gĂ©nĂ©rĂ©s »[8] et une « Ă©comodulation » doit ĂȘtre « liĂ©e Ă l'Ă©coconception des produits, dans le montant des contributions versĂ©es par les metteurs sur le marchĂ© »[9]. En 2015, alors que selon le ministĂšre de l'Environnement, environ 45 millions de pneus (460 700 t/an) sont annuellement mis sur le marchĂ©, la rĂ©glementation sur la gestion du pneu-dĂ©chet a Ă©tĂ© prĂ©cisĂ©e, dont en matiĂšre de sanction en cas de non-atteinte des objectifs, de rattrapage, de couverture territoriale, de recyclage et de valorisation des dĂ©chets de pneumatiques, et de concertation avec l'ensemble de la filiĂšre[10]. Il sâagit notamment de prĂ©parer l'Ă©chĂ©ance (2020) dâagrĂ©ment des organismes collectifs et l'approbation des systĂšmes individuels en matiĂšre de gestion des dĂ©chets.
En octobre 2015, les pneus de cyclomoteurs doivent ĂȘtre dĂ©clarĂ©s[11].
En 2016, un arrĂȘtĂ© a prĂ©cisĂ© les informations relatives Ă la gestion des dĂ©chets de pneumatiques qui doivent ĂȘtre communiquĂ©s Ă lâadministration[12]
Hiérarchisation des usages et valorisations
Reprenant le principe européen de la hiérarchisation des usages et des valorisations, l'article R. 543-140 précise en France que :
« Tout dĂ©chet de pneumatique collectĂ© doit ĂȘtre traitĂ© selon les modes suivants, en privilĂ©giant, par ordre » :
- La préparation en vue de la réutilisation ;
- Le recyclage ;
- Les autres modes de valorisation, y compris la valorisation énergétique.
Ătat des lieux
En France
En 2015, avec l'aide de l'Ătat, les « stocks historiques » (d'avant 2003) ont Ă©tĂ© rĂ©sorbĂ©s par l'association Recyvalor (crĂ©Ă©e pour cela).
En 2014-2015, une controverse concerne le statut du pneu : le « statut de déchet » s'applique à tout pneu abandonné par son dernier détenteur. Ce statut est critiqué par des entreprises exportant des pneus pour diverses formes de réemploi ou de rechapage[13], soutenues par le Syndicat national du caoutchouc et des polymÚres (SNPC) et en 2014 par l'association Travaux de normalisation du pneumatique pour la France (TNPF) en 2014. Ces derniers reprochaient à la législation européenne sur les déchets d'encourager leur traitement en Europe et de décourager leur export vers les pays pauvres. En 2007 un nouveau rÚglement sur les transferts transfrontaliers de déchets[14] a remplacé et simplifié celui de 1993 mais le déchet reste soumis à la convention de Bùle. Le transport, le stockage, la traçabilité, leur sécurité et leur gestion est considérée plus sévÚrement par la douane et les autorités gérant le risque et les transports que s'il s'agissait de déchets verts, ce qui est jugé trop contraignant par ces entreprises.
Les administrations rappellent que des pneus en fin de vie â sâils nâĂ©taient plus considĂ©rĂ©s comme « dĂ©chets » â pourraient trop facilement ĂȘtre exportĂ©s pour ĂȘtre enfouis Ă moindre coĂ»t ou utilisĂ©s comme combustible dans de mauvaises conditions dans des pays pauvres oĂč ils deviennent de nouvelles sources de pollution et de risque pour la santĂ©. S'il est interdit en Europe d'exporter des dĂ©chets en vue de leur Ă©limination dans des pays non membres de l'UE ou de l'Association europĂ©enne de libre Ă©change (AELE) c'est prĂ©cisĂ©ment pour prĂ©venir le transfert massif de dĂ©chets problĂ©matiques vers les pays en dĂ©veloppement (dont vĂ©hicules hors d'usage)[15].
Au mĂȘme moment (2014), les cimentiers font valoir que quand un pneu est utilisĂ© comme combustible, sa partie inorganique (fer, silice, soufre et zinc, soit 12,55 % des tonnages de dĂ©chets pneumatiques collectĂ©s en 2015 par Aliapur en France) est incorporĂ©e dans le clinker, ce qui constitue selon eux une valorisation matiĂšre alors que cette part Ă©tait autrefois comptabilisĂ©e sous forme de valorisation Ă©nergĂ©tique[13]. Un nouveau mode de calcul dit de « valorisation mixte » (Ă la fois Ă©nergĂ©tique et matiĂšre) s'est ensuivi, lequel Ă©tait dĂ©jĂ en cours en Espagne et au Portugal selon les cimentiers. Depuis 2014, 23,75 % du tonnage de pneus brĂ»lĂ©s en cimenterie est considĂ©rĂ© par les cimentiers comme de la valorisation matiĂšre[13].
En 2016, les opĂ©rateurs ont dĂ©clarĂ© 432 655 tonnes de pneumatiques usagĂ©s traitĂ©es (toutes catĂ©gories confondues), soit 1,9 % de moins qu'en 2015 (Aliapur qui en avait traitĂ© 335 107 t en 2015 n'en a traitĂ© que 307 656 t en 2016, alors que le nombre de pneus mis sur le marchĂ© est en augmentation depuis 2012)[16]. Le stockage croĂźt Ă nouveau (delta-stock 2016 de 32 702 tonnes, soit +12 %)[16]. La valorisation Ă©nergĂ©tique en cimenterie domine (43,6 % des pneus rĂ©cupĂ©rĂ©s en 2016) devant la granulation (24,4 %) et la revente dâoccasion (13,8 %)[16].
En 2016, selon lâ« Observatoire des pneumatiques usagĂ©s » :
- les usages de pneu broyĂ© comme « matĂ©riau drainant » en « bassin d'infiltration ou de rĂ©tention d'eau » tendent Ă basculer vers la catĂ©gorie « autre (bassin dâinfiltration) » considĂ©rĂ©e depuis 2014 comme du « recyclage ». Les pneus dans ce type de traitement sont transformĂ©s en matĂ©riau drainant ou de couverture de dĂ©charge de type|ISDND (installations de stockage de dĂ©chets non dangereux), usage qui a fortement augmentĂ© de 2015 Ă 2016 (+ 10 % en un an chez France Recyclage pneumatiques ou « FRP » de 2015 Ă 2016[16]) ;
- 26 % des pneus rĂ©coltĂ©s en France ont Ă©tĂ© exportĂ©s pour ĂȘtre traitĂ©s ailleurs (sur un total de 432 655 t dĂ©clarĂ©es traitĂ©es)[16]. Le tonnage traitĂ© en France a nĂ©anmoins augmentĂ© de +6 % de 2015 Ă 2016[16]. Les exports de pneus (Ă©ventuellement dĂ©chiquetĂ©s) Ă partir de France se font principalement vers lâEurope occidentale et lâAfrique (BĂ©nin, Burkina Faso, Cameroun, Congo, CĂŽte d'Ivoire, Gabon, GuinĂ©e, Madagascar, Mali, Maroc, Mauritanie, SĂ©nĂ©gal, Tchad, Togo, Tunisie)[16], avec des flux en diminution en 2016 Ă la suite notamment d'une interdiction d'importation maintenue par le Maroc durant quatre mois[3]) En 2015-2016 un flux croissant est partie vers l'Asie (respectivement 1,6 % et 9,3 % du total des exports[16]. L'Allemagne, l'Italie et les Pays-Bas bĂ©nĂ©ficient en Europe d'un statut spĂ©cial pour ce qui concerne les pneus exportĂ©s (s'ils sont clairement destinĂ©s Ă ĂȘtre rechapĂ©s)[17] (non considĂ©rĂ©s comme dĂ©chets, mĂȘme sâils ont Ă©tĂ© abandonnĂ©s par leur propriĂ©taire). L'association de lobby europĂ©en « European tyre and rubber manufacturers association » ou ETRMA rĂ©clamait en 2014 une harmonisation des terminologies, des statuts et de leurs critĂšres techniques pour faciliter les flux transfrontaliers de pneus[17]. En rĂ©ponse, la France a dit Ă©tudier une catĂ©gorie nouvelle de « pneus prĂ©parĂ©s pour le rechapage » et Ă©tiquetĂ©s comme tels pour limiter le risque de trafic de dĂ©chets et quâils soient Ă©liminĂ©s comme des dĂ©chets Ă l'Ă©tranger dans de mauvaises conditions[17] - [18] et rĂ©flĂ©chir Ă un statut spĂ©cial pour le granulat produit Ă partir de pneus[17].
Dans les annĂ©es 2000-2015, le marchĂ© français du pneu d'occasion reste atone ; et il sâinscrit en outre en partie dans « une Ă©conomie grise, voire noire » regrette l'Ă©co-organisme Aliapur (membre du Conseil national des dĂ©chets) qui en 2014 ne pouvait envoyer que 17 % des pneus collectĂ©s vers une filiĂšre de rĂ©emploi. Le pneu d'occasion exportĂ© s'Ă©panouit par contre en Afrique et en Europe de l'Est[17] (en 2014 « 3,6 des 4,8 millions de pneus collectĂ©s en France et destinĂ©s au rĂ©emploi sont exportĂ©s » selon Aliapur[17]).
Suivi et Ă©valuation
Sous lâĂ©gide de l'Ademe, un « Observatoire des pneumatiques usagĂ©s » recueille les dĂ©clarations d'une partie de la filiĂšre[19] - [16].
Selon ses chiffres : 504 025 tonnes de pneus ont été mises sur le marché français en 2016, avec un taux de collecte national de 99 % (taux de traitement national de 89 %).
Cet observatoire est intégré au site internet unique « SystÚme déclaratif des filiÚres REP » (SYDEREP) qui rassemble tous les Registres et Observatoires des filiÚres de déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE), piles et accumulateurs (PA), gaz fluorés (GF), pneumatiques usagés (PU) et véhicules hors d'usage (VHU).
En 2016 la traçabilitĂ© complĂšte de la filiĂšre nâest pas encore atteinte ; ainsi en France les collecteurs ne sont tenus de dĂ©clarer que la premiĂšre destination des pneus ; « dans le cas de grossistes, lâObservatoire ne peut pas connaĂźtre la destination finale effective des pneus »[16].
Enjeux
Les pneus-déchets sont produits par millions chaque année dans le monde (environ sept millions de tonnes selon Hita en 2015[20]).
Dans les annĂ©es 1980 Ă 1990, ils commençaient Ă s'accumuler dangereusement (par exemple en 1990, plus d'un milliard de pneus usĂ©s Ă©taient entreposĂ©s aux Ătats-Unis). Ce stock se rĂ©sorbe. En 2015, « seuls » 67 millions restent en stock[21]. En 2003, l'EPA estimait que le marchĂ© du recyclage et des usages alternatifs concernaient 80,4 % des pneus usĂ©s des Ătats-Unis (soit environ 233 millions de pneus par an). En attribuant un poids moyen de 10,2 kg Ă chaque pneu, le rapport de 2003 Ă©value cette masse Ă 2,62 millions de tonnes[22].
Cependant le nombre de véhicules d'occasion exporté (avec leurs pneus d'origine en général) des pays riches vers des pays moins riches augmente, et ce nombre devrait encore croßtre avec le développement des véhicules électriques.
Dans les pays en développement ces pneus (déjà usés) auront une espérance de vie diminuée par des routes fréquemment en « mauvais état ».
Pour ces raisons les pneus trĂšs dĂ©gradĂ©s sâaccumulent donc proportionnellement plus vite et massivement dans les pays pauvres.
Les pneus abandonnĂ©s, usĂ©s ou irrĂ©parables constituent un dĂ©chet problĂ©matique Ă forte empreinte carbone : polluants et non-biodĂ©gradables dans la nature, ils consomment un espace coĂ»teux dans les sites d'enfouissement ; leurs stocks peuvent en outre facilement produire des incendies difficiles Ă Ă©teindre aux fumĂ©es et rĂ©sidus extrĂȘmement polluants, dont Ă cause d'organochlorĂ©s[23] et nombreux produits cancĂ©rigĂšnes.
Les sols ayant autrefois supporté de grands dépÎts de pneus se montrent durablement pollués (par le cadmium si les pneus ont brûlé[24]).
Il reste difficile de sĂ©parer et rĂ©cupĂ©rer proprement les composants physiques (textile, carcasse mĂ©tallique) et chimiques initiaux du pneu (composĂ©s hydrocarbonĂ©s, mĂ©taux, mĂ©talloĂŻdes, minĂ©raux, additifs, etc.[25]), et les produits chimiques et mĂ©taux quâil contiennent sont Ă©cotoxicologiquement problĂ©matiques[26].
De 1994 Ă 2010, la valorisation des pneus-dĂ©chets est passĂ© 25 % du gisement annuel Ă prĂšs de 95 %, avec environ la moitiĂ© des pneus usagĂ©s utilisĂ©s pour produite de l'Ă©nergie, principalement en cimenterie[27]. Elle contribue Ă diminuer leur empreinte carbone et peut ĂȘtre prise en compte dans les plans dâallocation de quotas de CO2[28] ; en Ă©change, les industriels qui brĂ»lent des pneus doivent annuellement calculer et dĂ©clarer Ă lâAdministration leurs Ă©missions de CO2 (dont celles liĂ©es Ă la combustion des PUNR).
Selon Price et al. (2006), les nouveaux usages des pneus en fin de vie gĂ©nĂšrent plus d'activitĂ© Ă©conomique que leur combustion, tout en rĂ©duisant les flux de dĂ©chets finaux[29], et â selon les fabricants â sans gĂ©nĂ©rer dâĂ©missions ou de pollution excessive via les opĂ©rations de recyclage et de valorisation.
Analyse du cycle de vie (ACV) : l'observatoire français des pneus usagés (PU) a estimé (en juin 2010) avoir illustré son ACV par les équivalences suivantes (par type de traitement)[30] :
- valoriser 150 t de granulats de PUNR reviendrait Ă la construction d'un terrain de football ;
- 1 t de PUNR valorisé en bassins d'infiltration remplacerait 6 t de grave (sable plus gravillon) ;
- 1 t de PUNR valorisé en aciérie remplacerait 590 kg d'anthracite et 160 kg de ferraille ; en cimenterie, elle remplacerait 0,7 t de coke et 0,29 t de charbon.
Utilisations de pneus en fin de vie
Des annĂ©es 1970 Ă 2018, les pneus restent principalement brĂ»lĂ©s en cimenterie et non recyclĂ©s, mais des efforts se dĂ©veloppent pour leur (re)trouver une valeur via de nouveaux usages (« valorisation matiĂšre ») ; en 2016, en Europe de lâOuest les filiĂšres de traitement les plus utilisĂ©es sont la granulation (59 %) et la valorisation Ă©nergĂ©tique en cimenterie (24 %)[31].
Autres usages :
- la « poudrette de caoutchouc » est fusible dans le solvant que constitue l'asphalte trÚs chaud, ce qui permet de produire des chaussées bitumineuses en partie recyclée (CRM-RAP)[32] - [33] (on suppose que les produits toxiques contenus dans le pneu seront alors inertés dans l'asphalte) ;
- la mĂȘme poudrette est de plus en plus utilisĂ©e comme agrĂ©gat dans certains bĂ©tons de ciment Portland (parfois alors dĂ©nommĂ©s rubcrete, mot composĂ© Ă partir des mots anglais rubber et concrete)[34] ;
- aprÚs dévulcanisation, la poudrette de pneus déchiquetés peut servir de « matiÚre premiÚre secondaire » pour produire des pneus neufs, mais à ce jour ces derniers ne peuvent intégrer que 5 % au plus de matériaux recyclés ou ils perdent de leur qualité par rapport aux pneus neufs[2] (durée de vie et résistance réduites[35]) ;
- le « broyat de pneu dĂ©chiquetĂ© » est dĂ©fini comme fragments de pneu de 2 Ă 35 cm. Il commence Ă ĂȘtre normalisĂ© (normes expĂ©rimentales), dont en France depuis 2005 avec la commission de normalisation « PUNR-AFNOR » au sein du groupe europĂ©en de normalisation CEN TC366 (Materials obtained from End-of-Life Tyres (ELT[36]) pour qualifier objectivement ses caractĂ©ristiques dimensionnelles afin de les classer en trois sous-catĂ©gories selon leur taille : « small » (35 Ă 110 mm) ; « medium » (40 Ă 140 mm) et « large » (50 Ă 200 mm)[37]). Selon sa taille et la courbure des fragments, il prend plus ou moins de place Ă poids Ă©gal, ce qui influe sur les coĂ»ts de transport. En France Aliapur a mis au point un systĂšme (logiciel + matĂ©riel) dâanalyse qui caractĂ©rise les broyats de pneu Ă partir dâimages vidĂ©o. Trois paramĂštres interviennent pour lâĂ©valuation de la qualitĂ© du broyat : format, qualitĂ© de coupe et composition[38]. Toujours selon Aliapur, en France en 2014-2015, un broyat de pneu contient en moyenne plus de 90 % de molĂ©cules combinant du carbone, de lâhydrogĂšne et de lâoxygĂšne, ainsi que du fer, de la silice, du zinc et du soufre, avec des taux variant toutefois significativement selon les catĂ©gories A, B, C et D (tourisme, camionsâŠ) mais quatre valeurs importantes pour la valorisation Ă©nergĂ©tiques (PCI, C, C biomasse et Soufre sont relativement homogĂšnes)[38]. Des pneus dĂ©chiquetĂ©s ont Ă©tĂ© utilisĂ©s comme mulch, dont comme paillis dans des jardins (Ă la place d'Ă©corces) pour retenir l'humiditĂ© du sol et empĂȘcher la croissance de « mauvaises herbes » ;
- des bùtiments (privés et publics), murs, digues, etc., ont été fabriqués en partie à partir de pneus usagés ;
- la pyrolyse â en portant le pneu Ă haute tempĂ©rature dans une atmosphĂšre sans oxygĂšne â produit :
- des gaz (CO et CO2) ; et une fraction importante de gaz combustibles (dihydrogĂšne (H2), hydrocarbures de type CxHy (et principalement C1âC4 de type paraffines et olĂ©fines)), avec hĂ©las des traces significatives de H2S, SO2 et de NH3[39]. Les gaz soufrĂ©s proviennent du soufre utilisĂ© pour vulcaniser/polymĂ©riser le caoutchouc. Si le processus est bien conduit, le mĂ©thane et des butĂšnes (butadiĂšne notamment) vont prĂ©dominer, mais la part et quantitĂ© de ces gaz varient beaucoup selon les conditions de la pyrolyse,
- des huiles ; lâhuile de pyrolyse de dĂ©chet de pneu a comme dĂ©faut un taux Ă©levĂ© en soufre (acidifiant et corrosif) et en composĂ©s aromatiques, ainsi quâune forte proportion de molĂ©cules lourdes. RĂ©cemment (2016) il a Ă©tĂ© proposĂ© une stratĂ©gie sĂ©quentielle passant par un hydrotraitement puis un hydrocraquage pour surmonter simultanĂ©ment ces limitations et produire des carburants de haute qualitĂ©[20], avec des solutions pouvant ĂȘtre conduites sans catalyseurs[40] - [41]. EN 2017, en utilisant des atdditifs non toxiques (CaO, Fe, FeO, olivine calcinĂ©e) Choi et al. ont rĂ©ussi Ă produire une huile Ă moins de Ă 0,45 % de soufre, jusquâĂ 0,39 % en poids)[41],
- un résidu solide pyrolitique, dénommé « char »[42] - [43]). Ce char est riche en noir de carbone (de qualité moyenne et contenant trop de contaminants pour pouvoir servir à la fabrication de nouveaux pneus[44]. Diverses méthodes de pyrolyse produisant du charbon actif et du noir de carbone de meilleure qualité ont été suggérées[45] ;
- des pneus sont parfois brûlés lors de manifestations, en étant source d'une forte pollution ;
- parfois, et illĂ©galement souvent, ils servent Ă allumer des feux. Ainsi des pneus ont Ă©tĂ© ou sont encore utilisĂ©s (en Afrique rurale notamment) pour sĂ©cher et carboniser des carcasses et ossements animaux (de bovins principalement) afin de produire des engrais minĂ©raux pour les champs et jardins, et â ce qui est encore plus prĂ©occupant â pour produire des additifs (prĂ©sentĂ©s comme nutriments) Ă de la nourriture dâanimaux dâĂ©levage.
Les engrais et « nutriments » ainsi produits, et le sol sous-jacent de ces sites sont gravement polluĂ©s par la fumĂ©e du caoutchouc industriel, en particulier par le cadmium, un peu dâarsenic, du plomb (facteur de saturnisme) et dâautres produits indĂ©sirables, cancĂ©rigĂšnes ou mutagĂšnes notamment[24].
Une étude a montré en 2011 que ces métaux étaient retrouvés dans les plantes exposées à ces produits[24].
Cas particulier de la fabrication de ciment
Des millions de pneus usagés (déchiquetés ou entiers selon les cas) alimentent depuis des années les fours de cimenterie, qui se font payer pour les éliminer.
Ces pneus sont introduits dans les fours à ciment par exemple à l'extrémité supérieure d'un four de préchauffage et/ou en les faisant tomber à travers une ouverture placée à mi-chemin le long du four tubulaire. Dans tous les cas les températures élevées des gaz (1 000 à 1 200 °C) provoquent une combustion presque instantanée du caoutchouc, combustion complÚte et sans fumée, et une partie des métaux lourds sont ensuite spontanément piégés dans le ciment.
Une variante consiste à injecter dans une chambre de combustion de précalcinateur des copeaux de pneus (5 à 10 mm)[46].
Aux Ătats-Unis (l'un des premiers gisements de pneus usagĂ©s au monde), les pneus sont le plus souvent Ă©liminĂ©s en cimenterie, mais de nombreux autres moyens d'Ă©limination existent.
Cas particulier du pneu comme élément de construction
Quelques maisons entiĂšres ont Ă©tĂ© construites (principalement aux Ătats-Unis) avec des pneus emplis de sable ou de terre puis recouvert de bĂ©ton.
ReliĂ©s entre eux des pneus ont aussi Ă©tĂ© utilisĂ©s pour produire divers types de barriĂšres amortissantes en cas de collision (le long de parcours de circuits automobiles, lors de rallyesâŠ).
Dans certains pays des pneus ont servi Ă former des tapis de sous-couche routiĂšre.
Des récifs artificiels ont été construits à l'aide de pneus assemblés ou non, projets trÚs controversés qui se sont conclus en fiascos environnementaux avec par exemple le « Osborne Reef Project » devenu un couteux cauchemar environnemental qui coûtera des millions de dollars à rectifier.
Des pneus (entiers ou non) ont Ă©tĂ© utilisĂ©s (avec plus ou moins de bonheur) en gĂ©nie civil (GC), pour stabiliser des remblais, pour contrĂŽler l'Ă©rosion de sols ou de pentes, comme tapis de dynamitage, contre lâaction des vagues le long de jetĂ©es ou dans des marais, comme mur anti-bruit (entre des routes et des rĂ©sidences), comme moule perdu pour couler le bĂ©ton de culĂ©es de pont ou de corps morts, dans des projets de dĂ©charges ou mĂȘme de fosses septiques.
L'EPA en 2003 prĂ©voyait dans un rapport la valorisation Ă©nergĂ©tique (TDF pour « Tire derived fuel ») serait le premier marchĂ© de valorisation (avec 130 millions de pneus), mais suivi des usages en gĂ©nie civil (56 millions de pneus), loin devant dâautres usages.
LâEPA envisageait aussi un marchĂ© dâexportation pour utilisation-matiĂšre (pneus coupĂ©s, estampĂ©s, poinçonnĂ©s, etc.[47].
La rĂ©utilisation du caoutchouc en granulat et/ou comme substance Ă faire fondre dans de lâasphalte routier bouillant augmente.
Le pneu dĂ©chiquetĂ© (ou TDA pour « Tire Derived Aggregate ») a Ă©tĂ© inventĂ© pour ĂȘtre vendu ou offert comme agrĂ©gat caoutchouteux.
Ce matériau a depuis quelques décennies certaines applications en génie civil (ex. : en Amérique du Nord comme matériau de comblement pour des murs de soutÚnement, des puits de collecte et des tranchées d'enfouissement de conduites de gaz, en situations de glissements de terrain). Il a été testé pour amortir les vibrations de lignes de chemin de fer ou de tremblements de terre.
Broyé en morceaux de taille moyenne, ce caoutchouc a été utilisé comme « paillis de caoutchouc ».
Moulu en poudrette plus fine, le pneu sert Ă fabriquer des matĂ©riaux de pavage et des produits moulables ; ex. : asphalte modifiĂ© au caoutchouc (RMA), bĂ©ton additivĂ© de caoutchouc (utilisĂ© comme agrĂ©gat). Parmi les produits moulĂ©s, on trouve des Ă©lĂ©ments de rembourrage et de type tapis, dalles de revĂȘtement de sol, pare-chocs de quai, subtrats pour terrasses, tapis pour le bĂ©tail, Ă©lĂ©ments de trottoirs, de ralentisseur, de bordure, etc. Des rĂ©sines additivĂ©es de caoutchouc ont mĂȘme Ă©tĂ© moulĂ©es en traverses de chemin de fer. La poudrette est aussi trĂšs utilisĂ©e comme matĂ©riau intercalaire de remplissage des gazons synthĂ©tiques (seul ou en mĂ©lange avec du sable grossier).
- Les aciéries peuvent utiliser des pneus comme source de carbone, remplaçant le charbon ou le coke dans la fabrication d'acier[48].
- Les pneus sont également souvent recyclés pour une utilisation sur les terrains de basket et de nouveaux produits de chaussures.
Cas particulier de la pyrolyse
La pyrolyse (ou pyrogazĂ©ification) est l'un des moyens de tirer de pneus usagĂ©s des carburants (gaz et liquide) et/ou des molĂ©cules d'intĂ©rĂȘt pour la carbochimie.
Des installations dédiées ont été mises au point, dont par exemple par Metso[49] en Finlande (groupe issu de la fusion de Valmet et Rauma Oy ou Biogreen[50] en France.
Les pneus sont chauffés (entiers ou aprÚs déchiquetage) à haute température dans la cuve du réacteur, dans une « atmosphÚre » initiale proche du vide[39] ou en tous cas sans oxygÚne (azote par exemple).
Le caoutchouc sây ramolli puis ses polymĂšres se dĂ©composent en HAP et COV et en molĂ©cules plus petites qui finissent par se vaporiser et sortir du rĂ©acteur. Elles peuvent alors ĂȘtre brĂ»lĂ©es pour produire de l'Ă©nergie ou pour partie condensĂ©es en une huile Ă©paisse Ă©galement utilisable comme combustible (les molĂ©cules trop lĂ©gĂšres pour se condenser forment un gaz rĂ©siduel qui peut ĂȘtre brĂ»lĂ©.
La pyrolyse requiert une Ă©nergie externe pour ĂȘtre lancĂ©e (four Ă gaz, Ă arc Ă©lectrique, Ă effet joule ou Ă micro-ondes). Elle peut ĂȘtre accĂ©lĂ©rĂ©e par lâajout de catalyseur(s) dans le four.
Les pneus pyrolysés donnent environ (en poids) :
- 1/3 d'acier (avec traces de laiton, zinc, cadmium) ; cet acier peut en ĂȘtre retirĂ© du rĂ©sidu Ă lâaide d'aimants et recyclĂ© ;
- 1/3 dâhuile et de gaz non condensables ;
- 1/3 Ă 40 % d'agglomĂ©rats charbonneux plus ou moins malodorant (« char ») composĂ© de noir de carbone (« carbon black char ») et des restes dâadditifs ajoutĂ©s au caoutchouc lors de la fabrication du pneu, dont des mĂ©taux et des minĂ©raux. Ce char peut ĂȘtre Ă©liminĂ© sous forme de cendres solides, mais ses producteurs cherchent Ă valoriser, par exemple comme amendement du sol (pour des sols manquant de zinc[51]), comme carburant carbonĂ© (mais de qualitĂ© trĂšs mĂ©diocre), comme source de noir de carbone ou comme pigment pour produire des encres ou peintures noires ou foncĂ©es ; ou encore comme adsorbant :
Ce dĂ©chet a des propriĂ©tĂ©s absorbantes s'approchant de celle dâun charbon activĂ©[52], il a Ă©tĂ© proposĂ© et testĂ©s pour des applications de contrĂŽle de la qualitĂ© de l'air et la production d'adsorbants Ă faible coĂ»t. Des charbons actifs dĂ©rivĂ©s de pneus (ou TDAC pour « Tire-derived activated carbons » sont gĂ©nĂ©ralement mĂ©soporeux, avec des surfaces spĂ©cifiques N2-BET allant de 239 Ă 1 031 m2/g ; de qualitĂ© souvent mĂ©diocre, mais peu couteux en tant que dĂ©chets ; dĂšs les annĂ©es 1990 ils ont Ă©tĂ© testĂ©s pour l'adsorption de composĂ©s organiques et de plusieurs polluants mercuriels Ă partir de flux de gaz. Les TDAC ont une capacitĂ© comparable Ă celle du Calgon BPL (adsorbant Ă charbon actif du commerce) ; ils adsorbent moins bien l'acĂ©tone qu'eux mais parfois mieux le mercure[53]. Il peut adsorber le cadmium[54].
Une pyrolyse industrielle parfaitement conduite produit peu dâĂ©missions toxiques (le four est habituellement associĂ© Ă un systĂšme de nettoyage des gaz), mais des prĂ©occupations concernant la pollution de l'air due Ă une « combustion » incomplĂšte ainsi quâaux toxiques contenus dans les rĂ©sidus charbonneux se posent[55] (comme dans le cas des incendies de pneus qui libĂšrent de nombreux composĂ©s trĂšs toxiques).
La nature et les propriĂ©tĂ©s (y compris toxicologiques) des gaz, liquides et solides issus des pneus pyrolysĂ©s sont Ă la fois dĂ©terminĂ©es par le type de pneu, de caoutchouc [ex. : poly-isoprene rubber (IR) ou styrene butadiene rubber (SBR)] et les conditions de tempĂ©rature, de pression et de durĂ©e du traitement (qui peut ĂȘtre continu dans un four rotatif pouvant fonctionner 24h/24 ou discontinu (avec phase de chargement/dĂ©chargement)[56]). Les pneus entiers contiennent encore des fibres (viscose[57] - [58]) et de l'acier recouvert de laiton et beaucoup de zinc et dâĂ©lĂ©ments textiles qui vont interagir avec le processus de pyrolyse (discontinu ou continu selon le type de rĂ©acteur).
Deux variantes en cours dâexpĂ©rimentation sont :
- La carbonisation hydrothermale (la termolyse est effectuĂ©e sous haute pression et tempĂ©rature dans de lâeau) ;
- La « vapothermolyse » testĂ©e en France depuis dĂ©but 2016 par Alpha Recyclage qui cherche Ă produire de lâĂ©nergie et du noir de carbone de meilleure qualitĂ© que celui habituellement obtenu par simple thermolyse de caoutchouc Ă partir de broyats de pneumatiques usagĂ©s.
Autres réutilisations (avec ou sans transformation)
De vieux pneus usagés ont souvent été transformés (voir aussi les illustrations de l'article) :
- en éléments de jeux pour enfants (balançoire par exemple)[55] ;
- en équipement d'exercice pour des programmes sportifs tels que le football américain[59]. Le « Tire Run » (course dans les pneus) de vitesse et d'agilité : les joueurs courent en placant les pieds dans une rangée de pneus organisés en zigzag, ce qui oblige à lever les pieds plus haut que la normale[60] ;
- comme matĂ©riau de construction (alternatif et abordables) dans des habitations autoconstruites oĂč les murs Ă©pais font masse thermique[61], lors de programmes Ă lâĂ©poque prĂ©sentĂ©s comme soutenables car utilisant des dĂ©chets et des matĂ©riaux bon marchĂ©[62] Dans ces cas les pneus sont gĂ©nĂ©ralement emplis de terre battue ou de sol local ;
- comme barriÚre et éléments de protection (murs de sécurité) de circuits de course automobile ou de rallye ; comme tampon pour absorber une partie de l'énergie cinétique du véhicule en cas de collision, offrant une barriÚre plus souple et surtout moins couteuses que d'autres matériaux.
Stockage provisoire et mise en décharge
Mise en décharge
Les machines Ă broyer les pneus n'acceptent pas les trĂšs gros pneus et gĂšrent mal les pneus de vĂ©los. Ces deux catĂ©gories sont donc encore acceptĂ©es en dĂ©charge. Sinon les pneus ne sont pas souhaitĂ©s dans les dĂ©charges car ils les encombrent en raison de leurs grands volumes (75 % d'espace vide lorsquâils sont empilĂ©s)[63] mais aussi parce qu'ils peuvent piĂ©ger du mĂ©thane et de lâeau (source de moustiques, surtout quand elle chauffe au soleil), etc.[29]. De plus, pour des raisons d'acceptabilitĂ© de la part des riverains, il est de plus en plus difficile, long et couteux d'ouvrir de nouvelles dĂ©charges.
Ils pourraient ĂȘtre dĂ©chiquetĂ©s avant dâĂȘtre mis en dĂ©charge, mais cette opĂ©ration est coĂ»teuse et favorise une libĂ©ration accĂ©lĂ©rĂ©e de HAP et COV.
En AmĂ©rique du nord puis en Europe, des pneus (Ă©ventuellement dĂ©chiquetĂ©s in situ) ont Ă©tĂ© utilisĂ©s dans des sites d'enfouissement, pour y remplacer d'autres matĂ©riaux, par exemple pour le remblai drainant de tranchĂ©es de systĂšmes d'Ă©vacuation ou de rĂ©cupĂ©ration des gaz, ou le remblai de tranchĂ©es de collecte dâeaux de ruissellement ou de rĂ©cupĂ©ration de lixiviats de dĂ©charge⊠ou pour des revĂȘtements. Le dĂ©chet de pneu broyĂ© est en France de plus en plus utilisĂ© comme matĂ©riau drainant de couverture ou drainage de dĂ©charges lĂ©gales d'enfouissement de dĂ©chets, de mĂȘme qu'aux Ătats-Unis[64].
Aires de stockage
Des aires de stockage provisoire (stocks tampon) sont nĂ©cessaires pour la filiĂšre. Ils sont parfois source de risque Ă©coĂ©pidĂ©miologique (refuge pour des rats, souris et larves de moustiques vectrices de maladies) et de risque Ă©cologique car le matĂ©riau du pneu en se dĂ©gradant est susceptible de contaminer lâeau, lâair et les sols, tout particuliĂšrement en cas de feu (les incendies de pneus survenus dans de grands dĂ©pĂŽts ont parfois Ă©tĂ© incontrĂŽlables durant des mois, crĂ©ant une pollution majeure de lâair et laissant dâimportantes sĂ©quelles pour les sols locaux).
Stocks et dépÎts illégaux
Les fréquents abandons illégaux de pneus usés dans les terrains vagues, propriétés privées ou dans la nature dégradent les paysages et polluent notamment les ravins, les bois, les déserts et zones humides (lacs, mares, riviÚres, marais) et in fine l'océan mondial ad vitam Êternam.
La valorisation Ă©nergĂ©tique des pneus et leur recyclage ont dâabord Ă©tĂ© mis en place pour limiter ces dĂ©pĂŽts sauvages ou lĂ©gaux et les risques de feux de pneus, redoutĂ©s des pompiers quand le nombre de pneus est important. Ils ont conduit de nombreux Ătats Ă adopter des rĂšgles fermes sur la gestion des pneus usagĂ©s.
De lourdes amendes peuvent concerner lâabandon de pneus dans la nature, dans les aires protĂ©gĂ©es notamment. Inversement, des opĂ©rations incitatives (ex. : « journĂ©e d'amnistie pour les pneus ») peuvent inviter le public, les agriculteurs Ă venir gratuitement se dĂ©barrasser dâun nombre (limitĂ©) de pneus usagĂ©s.
Le stockage et le recyclage des pneus sont parfois liés à des activités illégales, aggravées par un manque de sensibilisation à l'environnement[65].
Préoccupations environnementales
Elles concernent potentiellement l'eau, l'air, le sol, la santĂ© et les Ă©cosystĂšmes car sans ĂȘtre classĂ©s « dĂ©chets dangereux », les pneus usagĂ©s ne sont pas anodins : En cas d'incendie ou d'Ă©rosion du caoutchouc ils peuvent libĂ©rer dans l'environnement des mĂ©taux lourds et des polluants organiques prĂ©occupants (COV, HAP et perturbateurs endocriniens notamment).
Il est donc apparu important de mieux connaitre les qualitĂ©s et contenus des pneus dĂ©chiquetĂ©s. Aliapur s'y est rĂ©cemment (publication 2015) employĂ© avec l'aide du BRGM, SGS, CTTM, BETA et LRCCP. Ils ont Ă cette occasion « montrĂ© qu'il n'Ă©tait pas toujours possible dâanalyser les pneus usagĂ©s en employant les mĂ©thodes Ă©laborĂ©es pour d'autres combustibles solides de rĂ©cupĂ©ration »[38].
Les paramÚtres aujourd'hui retenus pour caractériser les broyats de pneu sont généralement :
- la taille et l'Ă©paisseur des fragments ;
- le taux de ferraille et de fibre textile encore présentes dans le broyat ;
- le « pouvoir calorifique infĂ©rieur » (PCI, mesurĂ© par bombe calorimĂ©trique) ainsi que le taux de carbone (mesurĂ© en % du poids de matiĂšre, variant de plus de 60 % Ă 70 % pour les pneus VL, ce qui est comparable au charbon[38] ; il dĂ©termine le facteur d'Ă©mission dans la contribution de cette incinĂ©ration aux Ă©missions de gaz Ă effet de serre, en tenant compte de la « fraction biomasse » du pneu (correspondant pour lâessentiel Ă sa part de latex naturel et pouvant ĂȘtre Ă©valuĂ©e par une mĂ©thode basĂ©e sur le carbone 14[38]). En Europe, « selon le niveau dâĂ©missions du site et du statut des pneus parmi les autres combustibles (flux majeur, mineur ou marginal) », les industriels doivent utiliser soit des valeurs par dĂ©faut, soit des valeurs spĂ©cifiques (issues en France dâanalyses faites par un laboratoire accrĂ©ditĂ© ISO 17025:2005, tout en respectant les exigences en matiĂšre de mĂ©thode dâĂ©chantillonnage et frĂ©quence dâanalyse imposĂ©e par la rĂ©glementation gĂ©nĂ©rale[66] et dâĂ©ventuels arrĂȘtĂ©s locaux ;
- le taux de cendres du caoutchouc de pneu ; hors textile et carcasse métallique, il est généralement de 9 à 10 %[38] ; celui du textile du pneu est de 1,93 % et celui du broyat entier varie en France en 2014-2015 de 20,26 à 24,55 %, pour la catégorie A et de 20 à 29 % pour la catégorie B selon Aliapur[38] ;
- la teneur du caoutchouc en hydrogÚne, oxygÚne et en azote (moins de 1 % du pneu en masse%)[38], mais facteur qui jouera sur la qualité des gaz de combustions, teneur en NO2 et NOx notamment ;
- le taux de soufre, chlore, fluor et brome, qui â en tant qu'acidifiants â peuvent dĂ©grader les installations de combustion ou acidifier les gaz de combustions et l'environnement[38] ;
- le taux de dix autres Ă©lĂ©ments quantitativement majeurs (plus de 1 % de la masse du pneu) : Ca, Cu, Fe, K, Mg, Na, P, Si, Ti, et Zn)[38]. Les analyses sont faites aprĂšs « digestion » (minĂ©ralisation et solubilisation du minĂ©ralisat) sans acide nitrique : digestion par micro-ondes avec un mĂ©lange dâacide fluorhydrique et chlorhydrique, puis dosage des Ă©lĂ©ments par plasma Ă couplage inductif-spectromĂ©trie de masse (ICP-MS) conformĂ©ment aux normes CEN/TS 15410 et NF EN 13656 selon Aliapur (2015) ;
- le taux en seize Ă©lĂ©ments quantitativement mineurs qui constituent moins de 1 % de la masse du pneu mais sont pour certains hautement toxiques et Ă©cotoxiques s'ils sont libĂ©rĂ©s dans lâenvironnement : Al, As, Ba, Be, Cd, Co, Cr, Hg, Mo, Mn, Ni, Pb, Sb, Se, Tl, V)[38] ; selon Aliapur, les Ă©lĂ©ments traces (<0,06 %) sont : aluminium, arsenic, baryum, brome, chlore, chrome, cobalt, cuivre, magnĂ©sium, molybdĂšne, nickel (0,002 Ă 0,003 %), phosphore, plomb, potassium, sodium, titane, manganĂšse. Ă des doses infĂ©rieures Ă 0,002 %, ce sont : fluor, cadmium, thallium, et Ă moins de 0,001 % figurent le sĂ©lĂ©nium, antimoine, bĂ©ryllium, vanadium, mercure.
Selon les Ă©tudes disponibles, le lessivage de composants mĂ©talliques ou organique est trĂšs faible tant que le pneu est entier, de mĂȘme selon Aliapur pour des Ă©lĂ©ments lacĂ©rĂ©s placĂ©s dans des cuves soumises Ă des cycles de stagnation et remplissage/vidange dâeau du robinet. Mais il pourrait ĂȘtre plus significatif quand le matĂ©riau a Ă©tĂ© transformĂ© en poudrette ou pellets (produits de plus en plus utilisĂ©s comme matĂ©riau de remplissage voire de drainage).
Des prĂ©cautions (ou interdictions, dans les aires protĂ©gĂ©es par exemple, comme pour tous types de dĂ©chets) sont parfois imposĂ©es pour l'utilisation de ces matĂ©riaux. Chaque site doit ĂȘtre Ă©valuĂ© individuellement pour dĂ©terminer le niveau de risque[63].
Concernant le climat.
Dans le cadre de l'Ă©valuation des impacts de la filiĂšre sur le climat, la « fraction biomasse » (c'est-Ă -dire de latex naturel et de fibre dâorigine naturelle) prend de l'importance. Les indications techniques inscrites sur le pneu ne donnent pas le taux prĂ©cis de latex naturel dâhĂ©vĂ©a utilisĂ©. Ce taux ne figure pas non plus sur lâĂ©tiquetage dit « environnemental ». Mais le MEEDDAT a en 2008 en France â sur la base dâanalyses apportĂ©es par Aliapur en 2007 â retenu le taux moyen de 14,6 % de latex naturel (variant de 25 Ă 28 %) dans les pneus utilisĂ©s en France[38].
La part d'Ă©lastomĂšre du pneu provenant d'hĂ©vĂ©a naturel Ă©tant actuellement considĂ©rĂ©e comme dâorigine biomasse « renouvelable » (issu de la culture de lâHĂ©vĂ©a et plus rarement dâhĂ©vĂ©as sauvages). Cette partie carbonĂ©e des Ă©missions de gaz Ă effet de serre est jugĂ©e « neutre » vis-Ă -vis de lâeffet de serre conformĂ©ment aux recommandations du GIEC et Ă lâannexe IV de la directive ETS 2003/87/CE). Comme pour le palmier Ă huile, les cultures dâhĂ©vĂ©as, encore en plein dĂ©veloppement se font cependant au dĂ©triment de la forĂȘt tropicale[67] - [68]
La récupération et la gestion des pneus sont aussi la source d'un trafic routier supplémentaire : il faut environ quarante poids lourds pour transporter mille tonnes de pneus sur route. Une alternative est le transport fluvial mais elle semble peu utilisée (Aliapur citait en 2007 en exemple le transport de 1 100 t par péniche de mer du RhÎne au Maroc[69]).
Aliapur a fait rĂ©aliser une « analyse de cycle de vie du pneu usagĂ© » par son dĂ©partement Recherche & DĂ©veloppement et le cabinet PricewaterhouseCoopers, pour ensuite crĂ©er un « calculateur dâĂ©conomies environnementales »[70] qui Ă©value les Ă©conomies dâeau et dâĂ©nergies (diesel et kWh) correspondante. Ceci lui permet de dĂ©livrer des « certificats dâĂ©conomies environnementales » aux professionnels qui lui ont livrĂ© leurs pneus collectĂ©s.
Voir aussi
Articles connexes
- Aliapur
- Pneumatique (véhicule)
- Caoutchouc (matériau)
- Caoutchouc synthétique
- Genan (entreprise)
- Gestion des déchets
- Asphalte
- Pelouse artificielle
- Noir de carbone
- Oxyde de zinc
- Ăconomie circulaire
- DĂ©vulcanisation
- Poudrette de caoutchouc
- Technoflex
Bibliographie
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Notes et références
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- Actualité environnement (2016) Déchets pneumatiques : Aliapur a connu une année 2016 mouvementée
- Directive no 99/31/CE du 26 avril 1999.
- Décret du 24 décembre 2002 relatif à l'élimination des pneumatiques usagés, qui sera abrogé et remplacé en 2007 (décret no 2007-1467 du 12 octobre 2007)
- Art. R. 543-144.-I. du code de lâenvironnement.
- Article R. 543-145 du Code de lâenvironnement
- Point 3 de Art. R. 543-144-2 du Code de lâenvironnement.
- Art. R. 543-144-1. du Code de lâenvironnement
- Légifrance, Décret no 2015-1003 du 18 août 2015 relatif à la gestion des déchets de pneumatiques, entrant en vigueur le 1er octobre 2015
- En application du décret no 2015-1003 du 18 août 2015.
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- Aliapur, Le certificat dâĂ©conomies environnementales, comment ça marche ?