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RĂ©seau de chaleur

Un réseau de chaleur (également appelé réseau de chauffage urbain, réseau de chauffage à distance) est une installation distribuant à plusieurs utilisateurs clients de la chaleur produite par une ou plusieurs chaufferies, via un ensemble de canalisations de transport de chaleur (en polyéthylÚne ou en acier). La chaleur ainsi distribuée est principalement utilisée pour le chauffage des bùtiments et de l'eau chaude sanitaire ; certains réseaux fournissent également de la chaleur à usage industriel.

Quatre générations de réseaux de chaleur.

Le réseau de chaleur est un systÚme de chauffage à l'échelle urbaine (par opposition au chauffage à l'échelle des bùtiments, dans lequel la chaleur est produite in situ, au niveau du bùtiment utilisateur ou à proximité immédiate).

Au niveau mondial en 2020, les réseaux de chaleur couvraient 5,2 % de la consommation finale d'énergie du secteur industriel, 5,3 % dans le secteur résidentiel et 4,9 % dans le secteur tertiaire. La production de chaleur pour l'alimentation de ces réseaux était tirée à 88,2 % des combustibles fossiles : charbon 45 %, pétrole 3,4 %, gaz naturel 39,8 % ; les énergies renouvelables couvraient 5,6 %, dont 4,3 % de biomasse et 1,0 % de déchets renouvelables. La Chine et la Russie assuraient, à elles deux, 70,7 % de la production mondiale de chaleur pour le chauffage urbain : 38 % et 32,7 % respectivement.

Principe technique

Description d'ensemble

 Schéma de principe du réseau de chaleur
Schéma de principe du réseau de chaleur

Un réseau de chaleur classique se compose de trois éléments :

  • la chaufferie (il peut y en avoir plusieurs sur un mĂȘme rĂ©seau, mais elles restent en nombre limitĂ©) : c'est le lieu oĂč est produite la chaleur qui circule dans le rĂ©seau ;
  • les canalisations de transport et distribution : ce sont des conduites qui transportent la chaleur Ă  l'aide d'un fluide caloporteur, trĂšs gĂ©nĂ©ralement de l'eau sous forme liquide, parfois sous forme de vapeur ;
  • les sous-stations : il s'agit des points de livraison de la chaleur. Elles matĂ©rialisent l'interface entre le rĂ©seau de chaleur et le bĂątiment. En aval des sous-stations peuvent exister des rĂ©seaux de distribution dits « secondaires » ; ils font gĂ©nĂ©ralement partie des installations des bĂątiments, et non des installations du rĂ©seau de chaleur.

Chaufferies

De nombreux types de chaufferies sont en fonctionnement, qui peuvent varier par leur puissance et par les Ă©nergies qu'elles exploitent.

Certaines chaufferies de réseaux de chaleur produisent de la chaleur et de l'électricité par cogénération, permettant d'améliorer le rendement global du systÚme par rapport à des productions séparées. Par exemple, le rendement de cogénération du réseau de chaleur de Bellevue, à Nantes, était de 70,6 % à 74,5 % en 2009-2010[1]. Elle permet par ailleurs de contribuer au renforcement et à la décentralisation des capacités de production électrique.

Énergies utilisĂ©es

La chaleur peut ĂȘtre produite Ă  partir de nombreuses sources. Les Ă©nergies suivantes sont les plus frĂ©quemment utilisĂ©es par les rĂ©seaux de chaleur :

La part des sources d'origine fossile a tendance Ă  diminuer, au profit des Ă©nergies renouvelables et de rĂ©cupĂ©ration. Le mix Ă©nergĂ©tique dĂ©pend toutefois de chaque rĂ©seau, et les situations peuvent Ă©galement ĂȘtre trĂšs diffĂ©rentes d'un pays Ă  un autre.

Description

Une chaufferie au bois.

Une chaufferie se prĂ©sente gĂ©nĂ©ralement sous la forme d'un bĂątiment (mais il existe des chaufferies intĂ©grĂ©es Ă  des bĂątiments dont la fonction principale est diffĂ©rente, par exemple dans les centrales Ă©lectriques). À l'intĂ©rieur de ce bĂątiment, dont les caractĂ©ristiques techniques et architecturales (cheminĂ©es, stockage de combustible, accessibilitĂ© par les rĂ©seaux de gaz ou la voirie
) peuvent varier selon les Ă©nergies utilisĂ©es, se trouvent une ou plusieurs chaudiĂšres.

La chaudiĂšre est l'unitĂ© technique qui produit la chaleur. Il peut s'agir d'une chaudiĂšre Ă  combustible (gaz, charbon, fioul, bois
). Par abus de langage, on dĂ©signe Ă©galement parfois par « chaudiĂšre » les unitĂ©s de production de chaleur par captation/rĂ©cupĂ©ration, soit depuis un forage gĂ©othermique, soit via un Ă©changeur pour la valorisation de chaleur fatale.

Les installations produisant des fumĂ©es sont Ă©quipĂ©es de systĂšmes de traitement perfectionnĂ©s et contrĂŽlĂ©s, ce qui permet de rĂ©duire fortement leur impact sur la qualitĂ© de l’air par rapport Ă  des systĂšmes individuels pour lesquels ce genre de traitement est trop coĂ»teux.

GĂ©nĂ©ralement, un rĂ©seau comporte une chaudiĂšre principale qui fonctionne en continu et une chaudiĂšre d’appoint utilisĂ©e en renfort pendant les heures de pointe, ou en remplacement lorsque cela est nĂ©cessaire. D'autres combinaisons sont possibles, selon les Ă©nergies utilisĂ©es, les caractĂ©ristiques des besoins, etc.

Canalisations

Canalisations en cours de pose dans une tranchée.

Les canalisations transportent et distribuent la chaleur par un fluide caloporteur (eau chaude ou vapeur)[6]. Il s'agit de conduites le plus souvent en polyĂ©thylĂšne rĂ©ticulĂ© ou en acier entourĂ© d'une couche d'isolant (mousse en polyĂ©thylĂšne rĂ©ticulĂ©e ou en polyurĂ©thane), elle-mĂȘme revĂȘtue d'une gaine en polyĂ©thylĂšne haute densitĂ© (annelĂ©e ou non). Il existe Ă©galement des conduites en plastique, moins isolĂ©es mais d'installation plus aisĂ©e grĂące Ă  leur flexibilitĂ© et Ă  l'absence de soudures Ă  rĂ©aliser sur les chantiers.

Dans le cas gĂ©nĂ©ral, un circuit aller transporte le fluide chaud issu de la chaufferie, et un circuit retour ramĂšne le fluide, qui s’est dĂ©lestĂ© de ses calories au niveau de la sous-station d’échange. Le fluide est alors Ă  nouveau chauffĂ© par la chaufferie, puis renvoyĂ© dans le circuit. Des tuyaux parallĂšles sont donc installĂ©s dans les tranchĂ©es.

Certains réseaux ont des organisations différentes : circuit ouvert (pas de sens retour), boucles multiples permettant de desservir plusieurs types de quartiers avec des régimes de température différents, etc.

Tunnel de chauffage urbain, sous le Rhin Ă  Cologne.

La pose des canalisations peut se faire en caniveau enterrĂ©, ce qui permet une protection mĂ©canique et minimise les effets de l’humiditĂ© par ventilation de ces caniveaux. Dans certaines villes, les canalisations sont placĂ©es dans des galeries souterraines multi-rĂ©seaux. Mais dans le cas gĂ©nĂ©ral, la pose se fait en tranchĂ©e, solution nĂ©cessitant que les gaines soient entourĂ©es d’un film protecteur contre l’humiditĂ© et quelles soient installĂ©es Ă  une profondeur suffisante afin d’absorber les efforts de la surface. Plus rarement, les canalisations sont fixĂ©es en extĂ©rieur, sur des bĂątiments ou des ouvrages (technique utilisĂ©e notamment pour le franchissement de cours d'eau). Le coĂ»t de pose d’un mĂštre de rĂ©seau est de l’ordre de 1 000 Ă  2 000 â‚Ź. Il dĂ©pend de nombreux facteurs liĂ©s au projet.

On distingue différents régimes de température pour le fluide qui circule dans les canalisations ; les principaux sont[6] :

  • le rĂ©seau eau chaude, Ă  une tempĂ©rature comprise de 60 Ă  110 °C (ordre de grandeur). Il est gĂ©nĂ©ralement prĂ©vu pour les groupes d’immeubles d’habitation ou de bureaux, ou encore les hĂŽpitaux et Ă©tablissements industriels qui ne consomment pas de vapeur ;
  • le rĂ©seau eau surchauffĂ©e, Ă  une tempĂ©rature comprise de 110 Ă  180 °C (ordre de grandeur). Il est principalement utilisĂ© dans les rĂ©seaux de grande envergure qui alimentent des bĂątiments nĂ©cessitant des tempĂ©ratures Ă©levĂ©es (laveries, abattoirs, industries textiles
) ;
  • le rĂ©seau vapeur, Ă  une tempĂ©rature autour de 200 Ă  300 °C. Son utilisation est de plus en plus limitĂ©e. Il est prĂ©sent essentiellement pour la fourniture de chaleur industrielle.

Sous-stations

Sous-station de réseau de chaleur.

SituĂ©es en pied d’immeuble, les sous-stations permettent le transfert de chaleur par le biais d’un Ă©changeur entre le rĂ©seau de chaleur et le rĂ©seau de distribution interne de l'immeuble ou du petit groupe d’immeubles. Elles n'accueillent gĂ©nĂ©ralement pas de combustion (sauf sous-station servant Ă©galement d'unitĂ© d'appoint pour la production de chaleur), ce qui Ă©limine toutes les nuisances liĂ©es (bruit, impact sur la qualitĂ© de l'air, risques explosifs
). Elles sont en gĂ©nĂ©ral Ă©quipĂ©es d'un compteur de chaleur, permettant de connaĂźtre la consommation d'Ă©nergie du bĂątiment qui lui est rattachĂ©, donnĂ©e nĂ©cessaire Ă  la facturation.

Histoire et innovations

Les réseaux de chaleur existent depuis l'Antiquité, mais les réseaux modernes, correspondant au fonctionnement actuel, datent du vingtiÚme siÚcle.

Époque antique et mĂ©diĂ©vale

Dans l'Antiquité, on pouvait utiliser des sources d'eau chaude pour alimenter des thermes ou apporter de la chaleur dans un ensemble de logements. Le principe technique du réseau de chaleur, assez rudimentaire, existait donc déjà.

En France, on considÚre que le premier réseau de chaleur date du XIVe siÚcle : dans le village de Chaudes-Aigues, un ensemble de maisons était chauffé à l'aide d'un réseau de chaleur géothermique[7].

Époque moderne

Les réseaux de chaleur de grande ampleur tels qu'on les connaßt aujourd'hui se sont développés à la fin du XIXe siÚcle et au début du XXe siÚcle. Le premier réseau de chaleur moderne, encore en service aujourd'hui, est celui de la ville de New York, mis en service en 1882 par la New York Steam Company, depuis intégrée à Consolidated Edison.

Le dĂ©veloppement des rĂ©seaux de chaleur en Europe a suivi les dĂ©veloppements aux États-Unis. Dans la plupart des pays europĂ©en oĂč les rĂ©seaux se sont dĂ©veloppĂ©s, on retrouve quatre grandes pĂ©riodes : au dĂ©but du XXe siĂšcle, des rĂ©seaux de chaleur sont mis en place dans les villes les plus importantes, Ă  la fois par leur population et leurs besoins de chauffage. AprĂšs la deuxiĂšme guerre mondiale, la reconstruction s'accompagne de grands programmes urbains, qui intĂšgrent parfois des rĂ©seaux de chaleur. La troisiĂšme pĂ©riode est une rĂ©ponse aux chocs pĂ©troliers, dans les annĂ©es 1980, avec la volontĂ© de rĂ©duire la dĂ©pendance aux Ă©nergies fossiles pour des raisons Ă©conomiques. Et enfin la pĂ©riode actuelle, qui a commencĂ© plus ou moins tĂŽt selon les pays, s'inscrit dans les politiques de lutte contre le changement climatique et dĂ©veloppement des Ă©nergies renouvelables.

Les réseaux de chaleur se sont également fortement développés sous le régime soviétique en URSS. Ainsi, les pays de l'ex-URSS rassemblent aujourd'hui à eux seuls plus de la moitié de la puissance installée au niveau mondial. Les installations sont toutefois souvent vétustes, avec d'importants problÚmes d'efficacité énergétique.

Une place plus importante dans le paysage énergétique

Les rĂ©seaux de chaleur sont considĂ©rĂ©s par plusieurs pays comme un outil permettant de dĂ©velopper l'utilisation des Ă©nergies renouvelables et de rĂ©cupĂ©ration dans le chauffage des bĂątiments. À titre d'illustration, l'Europe leur confie un rĂŽle important dans sa politique Ă©nergĂ©tique et climatique.

Leur place dans le paysage énergétique de ces pays est donc amenée à se renforcer. En France par exemple, ils représentaient environ 6 % du chauffage en 2007, pour 2 millions d'équivalents-logements[8]. L'objectif à 2020 fixé dans le cadre du Grenelle de l'environnement est de multiplier par 3 cette quantité d'équivalents-logements, tout en augmentant significativement la part des énergies renouvelables.

Des réseaux optimisés pour l'efficacité énergétique

Afin de limiter les pertes de chaleur, les réseaux évoluent. Leurs régimes de température diminuent (réseaux basse température à 60-80 °C dans le sens aller, contre 90-110 °C pour les réseaux à eau chaude classiques). Ceci permet par ailleurs d'améliorer la compatibilité des réseaux de chaleur avec les quartiers neufs, dont les besoins de chaleur sont plus faibles.

Les rĂ©seaux peuvent s'Ă©quiper de systĂšmes d'ajustement dynamique, capable de moduler la tempĂ©rature de dĂ©part du fluide caloporteur en fonction des conditions mĂ©tĂ©orologiques rĂ©elles. D’autres paramĂštres, comme les appels de puissance des usagers mesurĂ©s en temps rĂ©el, ou anticipĂ©s Ă  partir de mesures passĂ©es, peuvent aussi ĂȘtre intĂ©grĂ©s pour moduler plus finement la tempĂ©rature.

Les rĂ©seaux de chaleur fonctionnent la majoritĂ© du temps Ă  dĂ©bit variable alors que les pompes qui les alimentent sont la plupart du temps entraĂźnĂ©es par des moteurs Ă  vitesse constante. On peut diminuer de prĂšs de 50 % les consommations Ă©lectriques en couplant aux moteurs un variateur Ă©lectronique. Celui-ci permet d’abaisser la vitesse des pompes Ă  pression constante. Le point de fonctionnement de la pompe est donc optimisĂ©.

Stockage thermique

 Stockage de chaleur sur le réseau de Chemnitz
Stockage de chaleur sur le réseau de Chemnitz

Le stockage d'énergie sous forme de chaleur exploite des technologies mûres et maßtrisées. Il est donc possible de coupler les réseaux de chaleur à des systÚmes de stockage.

Certaines sources de chaleur produisent toute l’annĂ©e, sans qu’il soit possible d’arrĂȘter la production ou sans que cela prĂ©sente un intĂ©rĂȘt Ă©conomique ou environnemental. C’est par exemple le cas de la chaleur de rĂ©cupĂ©ration des incinĂ©rateurs de dĂ©chets ou des centres de donnĂ©es, ou de l’énergie produite par les panneaux solaires thermiques.

L’excĂ©dent de chaleur produit en Ă©tĂ© peut ĂȘtre stockĂ© puis utilisĂ© en pĂ©riode hivernale. Inversement, on peut emmagasiner du froid en hiver pour rafraĂźchir des bĂątiments en Ă©tĂ©. Le stockage peut se faire dans des silos d’eau, dans le sous-sol, dans de la glace
 Il peut ĂȘtre journalier (effacement des pics horaires), hebdomadaire (Ă©quilibrage entre les diffĂ©rents jours de la semaine), ou inter-saisonnier (stockage d'Ă©nergie en Ă©tĂ© pour la consommer en hiver).

Le stockage sur réseau de chaleur est déjà développé dans certains pays d'Europe tels le Danemark, l'Allemagne ou la SuÚde.

Nouvelles sources d'Ă©nergie

Une des particularitĂ©s des rĂ©seaux de chaleur (et en particulier du rĂ©seau de chaleur intelligent) est leur capacitĂ© Ă  exploiter une large gamme de sources Ă©nergĂ©tiques. Au-delĂ  des Ă©nergies fossiles classiques et des Ă©nergies renouvelables et de rĂ©cupĂ©ration aujourd'hui dominantes (bois, gĂ©othermie, chaleur fatale d'incinĂ©rateurs), d'autres gisements peuvent ĂȘtre mobilisĂ©s. Par exemple :

  • l'Ă©nergie solaire, captĂ©e par des panneaux solaires thermiques ; cette Ă©nergie est dĂ©jĂ  exploitĂ©e par les rĂ©seaux de chaleur dans quelques pays comme le Danemark ou en Italie, dont Ă  VarĂšse (reprenant une technologie danoise)[9], ou sous forme d'un RĂ©seau de « chaleur et de froid renouvelables » en Catalogne[9], mais elle l'est beaucoup moins dans d'autres pays tels que la France (un seul rĂ©seau utilise cette Ă©nergie en 2014, et un projet associe un rĂ©seau et son stockage gĂ©othermique (Ă  Vojens) mais plusieurs Ă©tudes de cas sont produites en 2015[9], dont Ă  Balma et Juvignac, avec des aides possibles de l'Ademe[9] et un Guide de conception des rĂ©seaux de chaleur solaires adaptĂ©s aux Ă©coquartiers[10] (qui sont invitĂ©s, comme pour lâ€˜Ă©coquartier du Triangle du Sud Ă  MontmĂ©lian Ă  penser trĂšs en amont l'intĂ©gration du solaire dans les rĂ©seaux [9] ;
  • les petits rĂ©acteurs nuclĂ©aires modulaires : la compagnie publique chinoise China National Nuclear Corporation promeut un rĂ©acteur de chauffage urbain baptisĂ© « Yalong Â» ou « DHR-400 Â» dont chaque unitĂ© de 400 MW pourrait alimenter en chauffage 200 000 mĂ©nages[11] ; plusieurs villes finlandaises, dont Helsinki, ont lancĂ© en 2018 des Ă©tudes pour dĂ©terminer la possibilitĂ© de remplacer l'alimentation du chauffage urbain, assurĂ©e aujourd’hui par du gaz et du charbon, par de petits rĂ©acteurs nuclĂ©aires modulaires (SMR) ; cela pourrait permettre de rĂ©duire considĂ©rablement les Ă©missions de gaz Ă  effet de serre liĂ©es au chauffage en Finlande[12] ;
  • la chaleur des Ă©gouts ou « cloacothermie » : les eaux usĂ©es prĂ©sentent gĂ©nĂ©ralement une tempĂ©rature comprise entre 12 et 20 °C[13] ; la captation de cette chaleur par des pompes Ă  chaleur permet d'Ă©conomiser jusqu'Ă  60 % des consommations d'Ă©nergie dans le cas de l'installation mise en service en 2016 Ă  Vancouver (quartier de Southeast False Creek) ; des installations analogues existent Ă  Oslo depuis 2001 et Ă  Tokyo depuis 2010 ; des projets similaires sont Ă  l'Ă©tude en Allemagne, Suisse et Autriche[14] ;
  • la gĂ©othermie superficielle, avec utilisation de pompe Ă  chaleur ;
  • la gĂ©othermie profonde ;
  • la chaleur ou le froid des ocĂ©ans, mers, lacs et cours d'eau ;
  • la chaleur issue de la climatisation des centres de donnĂ©es ;
  • la chaleur rejetĂ©e par les centrales nuclĂ©aires (voir cogĂ©nĂ©ration nuclĂ©aire) ;
  • la chaleur produite par des bĂątiments Ă  Ă©nergie positive ou rĂ©cupĂ©rĂ©e dans les rĂ©seaux d'assainissement.

De façon plus anecdotique, mais illustrant la capacité d'adaptation des réseaux de chaleur, quelques réseaux en SuÚde et en Suisse récupÚrent la chaleur issue de crématoriums.

RĂ©seau intelligent thermique

Si le concept de réseau intelligent est souvent associé au réseau électrique, il s'applique également aux réseaux de chaleur.

La combinaison d'un grand nombre de sources d'Ă©nergie, fonctionnant avec des rĂ©gimes temporels diffĂ©rents, des puissances diffĂ©rentes, un caractĂšre de plus en plus diffus sur les villes (augmentation du nombre de points de production/captation de chaleur) renforce le besoin pour le rĂ©seau d'ĂȘtre capable d'adapter son fonctionnement en temps rĂ©el. Pour cela, les rĂ©seaux s'Ă©quipent de capteurs communicants, de sous-stations intelligentes, de rĂ©gulateurs, le tout Ă©tant interconnectĂ© avec les bĂątiments (eux-mĂȘmes de plus en plus intelligents), les capteurs mĂ©tĂ©orologiques, les unitĂ©s de stockage d'Ă©nergie, et les autres rĂ©seaux d'Ă©nergie (Ă©lectricitĂ©, gaz). Le « smart grid » thermique permet ainsi d'augmenter son efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique globale et d'optimiser la part des Ă©nergies les plus vertueuses (locales, renouvelables, Ă©conomiques) dans son mix Ă©nergĂ©tique.

En SuÚde, à Kalmar, NODA et l'opérateur Kalmar Energi travaillent sur un réseau de chaleur intelligent à travers un concept baptisé Smart Heat Grid. L'analyse en temps réel de la chaleur déjà présente dans les bùtiments permet de réguler la production de chaleur et d'éviter les pics de production.

Optimisation énergétique grùce aux données

La complexification des réseaux de chaleur, ajoutée aux impératifs économiques, environnementaux et sociétaux, requiert un mode d'exploitation de plus en plus optimisé tout en assurant la livraison de chaleur.

La premiĂšre Ă©tape consiste Ă  mettre en place un plan de comptage, tant au niveau de la production que de la distribution. La loi Grenelle 2 a notamment introduit l’obligation pour tous les rĂ©seaux de chaleur d’ĂȘtre Ă©quipĂ©s de systĂšmes de comptage de la chaleur livrĂ©e au niveau des sous-stations en .

La seconde étape consiste généralement à se doter d'outil simples permettant le suivi d'indicateurs du réseau.

La troisiĂšme Ă©tape, qui se dĂ©veloppe grĂące Ă  l'acquisition de l'ensemble des donnĂ©es du rĂ©seau, est celle de l'ajout d'une brique d'optimisation. L’objectif est ainsi de mieux ajuster la production Ă  la demande, d’anticiper davantage les pĂ©riodes de pointe de chauffage et de rĂ©duire les pertes en Ă©nergie.

Aujourd'hui, les réseaux de chaleur se tournent notamment vers des solutions d'intelligence artificielle. En se basant sur des modÚles physiques en plus des données du réseau, ces solutions permettent de prédire finement la demande du réseau, de détecter des anomalies au niveau des sous-stations et de calculer des arbitrages sur le mix énergétique, l'ordonnancement des chaudiÚres ou le réglage des différents équipements.

La France connaĂźt un essor important dans l'intelligence artificielle appliquĂ©e Ă  l'Ă©nergie, comme l'indique le rapport du MinistĂšre de l’Économie publiĂ© en . Des sociĂ©tĂ©s proposent ainsi des solutions d'optimisation Ă©nergĂ©tique exploitant des donnĂ©es.

Avantages et inconvénients des réseaux de chaleur

Le rendement est comparable à celui d'une chaudiÚre individuelle. Par exemple, celui du réseau de chaleur de Bellevue, à Nantes, était de 86-87 % en 2009-2010[1].

La Cour des comptes regrette que, dans le cadre de la transition énergétique, les réseaux de chaleurs restent insuffisamment exploités[15].

Avantages

Les réseaux de chaleur présentent des avantages importants par rapport à des solutions de production de chaleur décentralisées, notamment en matiÚre d'efficacité énergétique, de mobilisation des énergies renouvelables et locales, et de diminution des émissions de gaz à effet de serre :

  • centralisation de la production de chaleur Ă  l'Ă©chelle urbaine, dans des chaufferies industrielles performantes, entretenues, surveillĂ©es ;
  • centralisation des nuisances liĂ©es Ă  cette production de chaleur, permettant de les traiter plus facilement que lorsqu'elles sont diffuses sur la ville, Ă  l'Ă©chelle de chaque bĂątiment ;
  • mobilisation de gisements d'Ă©nergie renouvelable difficiles Ă  exploiter en zone urbaine Ă  l'Ă©chelle des bĂątiments : gĂ©othermie, bois, chaleur fatale de l'industrie ou des usines d'incinĂ©ration des dĂ©chets

  • fonctionnement en cogĂ©nĂ©ration. C'est notamment le cas le plus frĂ©quent pour la production de chaleur dans les pays scandinaves et d'Europe centrale ;
  • meilleure qualitĂ© de l'air car les rejets sont mieux contrĂŽlĂ©s ;
  • la stabilitĂ© des prix : utilisation des Ă©nergies locales pour chauffer les bĂątiments collectifs.

Les réseaux de chaleur permettent également de réduire les risques encourus par les territoires qu'ils desservent face à l'évolution du paysage énergétique mondial. D'une part, ils facilitent la mobilisation de ressources énergétiques locales, d'autre part, ils réduisent la part variable des factures, ces derniÚres étant dominées par l'amortissement des installations (part fixe, non sujette à la volatilité du prix des énergies).

Inconvénients

Les réseaux de chaleur sont des installations lourds qui représentent un investissement initial important, plus que les autres réseaux d'énergie. Le risque économique est donc à considérer sur une longue période.

Pour cette raison, les rĂ©seaux de chaleur ne peuvent ĂȘtre dĂ©ployĂ©s partout : les besoins de chaleur, rapportĂ©s au mĂštre de rĂ©seau installĂ© (canalisations) et au watt de puissance installĂ©e (chaufferie), doivent ĂȘtre suffisants pour garantir que les revenus tirĂ©s des ventes de chaleur et des abonnements couvriront les coĂ»ts, sur la pĂ©riode d'amortissement. Les zones les plus propices sont donc celles qui prĂ©sentent une certaine densitĂ© thermique (quantitĂ© de chaleur consommĂ©e par mĂštre de canalisation dĂ©ployĂ©). Pour identifier ces zones, des Ă©tudes de cartographie territoriale de chaleur peuvent ĂȘtre menĂ©es ; la directive europĂ©enne relative Ă  l'efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique[16] (2012) l'impose Ă  tous les États-membres de l'Union europĂ©enne[17]. En France, l'ADEME subventionne jusqu'Ă  60 % les projets de plus de 1,5 MWh/mĂštre linĂ©aire/an de tranchĂ©e[18]

Les rĂ©seaux de chaleur sont par ailleurs des systĂšmes locaux Ă  adapter Ă  chaque territoire. C'est un atout dans le sens oĂč cela leur permet d'intĂ©grer les spĂ©cificitĂ©s locales, mais Ă©galement un inconvĂ©nient dans la mesure oĂč cela rend l'initiative et la rĂ©alisation des projets plus complexes par rapport aux autres rĂ©seaux d'Ă©nergie dont les modĂšles sont davantage uniformisĂ©s au sein d'un pays[19].

Entretien et rénovation

À la suite de leur fort dĂ©veloppement depuis plusieurs dĂ©cennies, un nombre croissant de rĂ©seaux (anciens et/ou dĂ©fectueux) doivent ĂȘtre rĂ©novĂ©s. En France, AMORCE et le CEREMA ont conduit avec l'aide de l'ADEME une enquĂȘte Ă  ce sujet auprĂšs de collectivitĂ©s et opĂ©rateurs de rĂ©seaux de chaleur anciens et/ou dĂ©fectueux, afin d'en tirer des retours d'expĂ©rience techniques, juridiques, Ă©conomiques et environnementaux (phasage de travaux, ordre de grandeur des coĂ»ts, mĂ©thodes, techniques et technologies, etc.)[20].

Statistiques mondiales

Les rĂ©seaux de chaleur couvraient 3,2 % de la consommation finale d'Ă©nergie au niveau mondial en 2020 : 12 942 PJ sur 400 819 PJ ; cette part Ă©tait de 5,2 % dans le secteur industriel, 5,3 % dans le secteur rĂ©sidentiel et 4,9 % dans le secteur tertiaire[21].

Production de chaleur par pays (PJ)
Source 1990 2000 2010 2015 2020 % 2020 var.
2020/1990
Drapeau de la RĂ©publique populaire de Chine Chine6261 4613 0224 0165 95438,0 %+851 %
Drapeau de la Russie Russie9 3986 4876 0165 2075 11432,7 %-46 %
Drapeau des États-Unis États-Unis1013245084184572,9 %+352 %
Drapeau de l'Allemagne Allemagne4483165154584272,7 %-5 %
Drapeau de l'Ukraine Ukraine1 7197476223783882,5 %-77 %
Drapeau du Kazakhstan Kazakhstan5272844024083822,4 %-28 %
Drapeau de la Pologne Pologne7403413362812861,8 %-61 %
Drapeau de la Biélorussie Biélorussie4262792782422441,6 %-43 %
Drapeau de la Corée du Sud Corée du Sud01401922052381,5 %ns
Drapeau de l'Italie Italie002052172291,5 %ns
Drapeau de la SuĂšde SuĂšde781582241831931,2 %+147 %
Drapeau de la Finlande Finlande871502091781721,1 %+98 %
Drapeau de la France France201351611631651,1 %+725 %
Drapeau du Danemark Danemark921191521311280,8 %+39 %
Drapeau de l'Ouzbékistan Ouzbékistan1251131261221180,8 %-6 %
Drapeau de la Tchéquie Tchéquie1551391301211130,7 %-27 %
Drapeau des Pays-Bas Pays-Bas481721601391070,7 %+123 %
Total mondial15 90412 25414 25813 78015 655100 %-1,6 %
Source des données : Agence internationale de l'énergie[22].

La production mondiale des chaufferies de rĂ©seau de chaleur a chutĂ© de 23 % entre 1990 et 2000 (-31 % en Russie, -57 % en Ukraine, -46 % au Kazakhstan, -54 % en Pologne), aprĂšs la chute des rĂ©gimes communistes en Europe, qui a Ă©tĂ© suivie d'investissements massifs dans l'efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique pour les pays concernĂ©s. Elle a ensuite progressĂ© de 28 % en 20 ans grĂące aux dĂ©veloppements en Chine, aux États-Unis, dans les pays scandinaves et certains pays d'Europe occidentale (France, Italie) et en CorĂ©e du Sud.

Production mondiale de chaleur par source (PJ)
Source 1990 % 2000 % 2010 % 2015 2020 % 2020 var.
2020/1990
Charbon4 83330,4 %4 33135,3 %5 36737,6 %5 7747 04045,0 %+46 %
PĂ©trole2 55616,1 %1 1609,5 %8455,9 %5935363,4 %-79 %
Gaz naturel8 10350,9 %6 24050,9 %6 77647,5 %5 8946 23739,8 %-23 %
Total fossiles15 49297,4 %11 73195,7 %12 98991,1 %12 26113 81288,2 %-11 %
Nucléaire440,3 %190,2 %270,2 %26250,2 %-43 %
Biomasse1741,1 %2141,7 %4443,1 %5476764,3 %+289 %
DĂ©chets renouv.420,3 %640,5 %1100,8 %1381511,0 %+260 %
GĂ©othermie150,1 %180,15 %300,2 %38490,3 %+216 %
Solaire thermique0,006Δ0,024Δ0,20,0011,02,80,02 %x469
Total EnR2311,5 %2962,4 %5844,1 %7248785,6 %+280 %
DĂ©chets non renouv.440,3 %1361,1 %2231,6 %2643772,4 %+759 %
Autres sources930,6 %710,6 %4353,0 %5015613,6 %+502 %
Total mondial15 904100 %12 254100 %14 258100 %13 78015 655100 %-2 %
Source des données : Agence internationale de l'énergie[22].
Énergies renouvelables : biomasse, dĂ©chets renouvelables, gĂ©othermie et solaire thermique[n 1].

La prĂ©dominance massive des combustibles fossiles est surtout le fait de la Chine (99,2 % dont charbon : 83,8 %, gaz naturel : 11,6 %), de la Russie (89,1 % rĂ©partis en charbon : 17,5 %, pĂ©trole : 2,9 %, gaz naturel : 68,7 %), et des États-Unis (87,9 % dont gaz naturel : 77,8 %, pĂ©trole : 6,5 %, charbon : 3,6 %) ; Ă  l'inverse, les pays europĂ©ens utilisent plus la biomasse (en SuĂšde : 48 %, en Finlande : 40 %, surtout bois), les dĂ©chets (en SuĂšde : 28 %) et les dispositifs de rĂ©cupĂ©ration de la chaleur ambiante ou de chaleur rĂ©siduelle (en SuĂšde : 20 %) ; la France occupe une position intermĂ©diaire avec 43,6 % d'Ă©nergies fossiles (surtout gaz : 40,6 %) et 53 % d'Ă©nergies renouvelables (biomasse : 30,2 %, dĂ©chets : 18,9 %, gĂ©othermie : 4,1 %).

Acteurs des réseaux de chaleur

À l'Ă©chelle d'un rĂ©seau

Les rĂ©seaux de chaleur sont, Ă  l'inverse des rĂ©seaux Ă©lectriques ou gaziers, des rĂ©seaux d'Ă©nergie fortement dĂ©centralisĂ©s. La chaleur n'Ă©tant pas transportable sur de trĂšs longues distances, les rĂ©seaux de chaleur n'ont en effet jamais Ă©tĂ© rassemblĂ©s dans des rĂ©seaux nationaux, comme ont pu l'ĂȘtre les rĂ©seaux de gaz et d'Ă©lectricitĂ©. Il en rĂ©sulte une organisation des acteurs diffĂ©rente.

Dans la plupart des pays, les rĂ©seaux de chaleur sont le rĂ©sultat d'initiatives des villes, ou d'entitĂ©s dĂ©pendant des villes (agences locales, entreprises publiques locales, « utilities » anglo-saxonnes
). La rĂ©alisation et l'exploitation du rĂ©seau peuvent ĂȘtre rĂ©alisĂ©es par la ville elle-mĂȘme, ou bien par une entreprise qui agit pour son compte, dans le cadre d'une mission de service public. Le cadre dĂ©pend Ă  la fois du contexte lĂ©gal de chaque pays et des choix rĂ©alisĂ©s au niveau local par chaque collectivitĂ©.

Il existe également des réseaux d'initiative privée, qui peuvent émaner d'un opérateur, ou bien d'usagers regroupés à travers une association ou une coopérative.

Acteurs nationaux et supra-nationaux

On distingue différentes catégories d'acteurs nationaux ou supra-nationaux :

  • les pouvoirs publics Ă©tatiques ou fĂ©dĂ©raux, qui fixent les orientations des pays en matiĂšre de dĂ©veloppement des rĂ©seaux de chaleur, et dĂ©terminent le cadre lĂ©gal ou de soutien financier pour la mise en Ɠuvre de la politique ;
  • les grands groupes Ă©nergĂ©ticiens, qui possĂšdent des filiales spĂ©cialisĂ©s dans les rĂ©seaux de chaleur ;
  • les associations qui regroupent diffĂ©rents types d'acteurs : associations de collectivitĂ©s AMORCE en France), associations d'entreprises de la filiĂšre SNCU : Via SĂšva en France, Euroheat & Power en Europe, International District Energy Association aux États-Unis, associations multi-acteurs Danish Board of District Heating au Danemark).

Réseaux de chaleur dans différents pays

Danemark

Les réseaux de chaleur se sont fortement développés au Danemark, depuis les prémisses au XIXe siÚcle et le premier réseau moderne du pays en 1903[23]. DÚs les années 1980, ils ont été intégrés à la planification énergétique locale, avec la possibilité pour les collectivités de définir un zonage de leur territoire fixant les modes de desserte énergétique.

Les réseaux de chaleur danois fournissent aujourd'hui plus de 60 % des besoins de chauffage du pays, et sont alimentés à plus de 50 % par des énergies renouvelables et de récupération. Le Danemark est aujourd'hui un des pays les plus en pointe en matiÚre de réseaux de chaleur, que ce soit pour les innovations technologiques ou leur intégration dans les politiques d'aménagement et d'énergie.

États-Unis

Alors mĂȘme que le chauffage urbain moderne est nĂ© aux États-Unis, les rĂ©seaux de chaleur ne couvrent aujourd’hui que 4 % des besoins de chauffage du pays. Ils ont Ă©tĂ© conçus par les fournisseurs d'Ă©lectricitĂ© amĂ©ricains Ă  la fin du XIXe siĂšcle comme des moyens d’utiliser la chaleur fatale perdue lors de la production d’électricitĂ©[24].

Le secteur commercial ainsi que les campus universitaires sont les principaux utilisateurs des réseaux de chaleur américains.

Alors que les initiatives publiques sont majoritaires en Europe, aux États-Unis, la propriĂ©tĂ© et la responsabilitĂ© incombent plus largement aux entreprises privĂ©es. Cependant, un nombre croissant de villes, seules Ă  avoir une vision de long terme, sont impliquĂ©es dans les nouveaux projets de rĂ©seaux fortement capitalistiques. Certaines politiques fĂ©dĂ©rales ou Ă©tatiques peuvent soutenir indirectement les rĂ©seaux via le soutien de la cogĂ©nĂ©ration, Ă  laquelle ils sont trĂšs souvent associĂ©s. Le soutien direct aux rĂ©seaux de chaleur en revanche est peu dĂ©veloppĂ©. L’International District Energy Association milite pour obtenir davantage de politiques de soutien fĂ©dĂ©rales pour les rĂ©seaux de chaleur en mettant en avant la capacitĂ© des rĂ©seaux Ă  mobiliser massivement les Ă©nergies renouvelables et de rĂ©cupĂ©ration, se rapprochant ainsi de la pratique europĂ©enne.

France

Les rĂ©seaux de chaleur s'y sont essentiellement dĂ©veloppĂ©s aprĂšs 1950, mĂȘme si les deux plus importants (Paris et Grenoble) sont plus anciens.

En 2012, 480 rĂ©seaux de chaleur (et de froid) desservaient 2,3 millions d’équivalents-logements (soit deux millions de tonnes Ă©quivalent pĂ©trole), dont les deux tiers dans le secteur rĂ©sidentiel. Surtout prĂ©sentes en zones urbaines denses, ils sont alimentĂ©s Ă  38 % par des Ă©nergies renouvelables et de rĂ©cupĂ©ration.

Le rĂ©seau de Paris est le plus gros de France. CrĂ©Ă© en 1927 et exploitĂ© par la Compagnie Parisienne du Chauffage Urbain (CPCU), il alimente l'agglomĂ©ration parisienne en chauffage et en eau chaude. DĂ©tenu par la Mairie de Paris (33 %) et par Engie (66 %), il chauffe l'Ă©quivalent de 500 000 logements, soit environ un tiers des logements collectifs parisiens. En 2016 son mix Ă©nergĂ©tique comprenant plus de 50 % d'Ă©nergies renouvelables et de rĂ©cupĂ©ration, grĂące Ă  une plateforme logistique biomasse sur son principal site de production (Saint-Ouen-sur-Seine) permettant d'accueillir 1 300 tonnes par jour de granulĂ©s de bois fournissant 10 % de sa production annuelle de chaleur ; avec les 41 % de la valorisation thermique des dĂ©chets issus de trois centres parisiens du Syctom, le syndicat intercommunal de collecte et de traitement des ordures mĂ©nagĂšres, plus 10 % de biomasse, 2 % de biocombustible, et 1 % de gĂ©othermie, la part des Ă©nergies renouvelables atteint 54 %, complĂ©tĂ©e par 30 % de gaz et 16 % de charbon[25] - [26]. D'autres rĂ©seaux majeurs sont celui de Metz, alimentĂ© par l'usine d'Ă©lectricitĂ© de Metz, celui de Grenoble ou celui de Toulouse, alimentĂ© par l'incinĂ©rateur de dĂ©chets (en cours d'extension, celui-ci valorisera aussi la chaleur d'un groupe de supercalculateurs[27]. ES Services ÉnergĂ©tiques (filiale d'ÉlectricitĂ© de Strasbourg) issue de la fusion d'Ecotral et de Dalkia Bas-Rhin, gĂšre des rĂ©seaux de chaleur notamment de Strasbourg, grĂące Ă  trois grandes installations reprĂ©sentant un total de 400 GWh et alimentant 40 000 logements[28].

En 2018, malgrĂ© ce dĂ©veloppement, la cour des comptes alertait sur « un dĂ©calage persistant au regard des objectifs affichĂ©s » par la France en matiĂšre d’énergies renouvelables (objectif 2020 : 23 % d’énergies renouvelables dans le mix Ă©nergĂ©tique français contre seulement 15,7 % en 2016), alors que le gouvernement poursuivait les dĂ©marches de simplifications administratives. Ces dĂ©marches avaient en dĂ©jĂ  concernĂ© l'Ă©olien, le photovoltaĂŻque et la mĂ©thanisation, devant alimenter un plan de « libĂ©ration des Ă©nergies renouvelables ». La filiĂšre rĂ©seau de chaleur, trĂšs sollicitĂ©e par la programmation pluriannuelle de l'Ă©nergie (PPE) est alors demandeuse de simplifications et se juge insuffisamment aidĂ©e alors que le pays consomme beaucoup plus de chaleur que l’électricitĂ©[29].

En 2019, la Programmation pluriannuelle de l'Ă©nergie (PPE) considĂšre qu'ils peuvent massivement valoriser les calories antĂ©rieurement perdues par les incinĂ©rateurs, des Ă©nergies renouvelables comme la biomasse et la gĂ©othermie notamment) au service de la transition Ă©nergĂ©tique et qu'ils doivent donc ĂȘtre fortement dĂ©veloppĂ©s (tant pour la quantitĂ© d'usagers raccordĂ©s que pour la part des Ă©nergies renouvelables et de rĂ©cupĂ©ration les alimentant[30]). Ils sont soutenus depuis plusieurs dĂ©cennies par l’État, l'Ademe et les rĂ©gions (via le Fonds Chaleur. Une simplification du cadre juridique est aussi en cours[31].

En Emmanuelle Wargon (secrĂ©taire d’État Ă  la Transition Ă©cologique et solidaire) a lancĂ© un groupe de travail sur la filiĂšre chaleur et froid renouvelables, ciblant la distribution de chaleur et de froid. RĂ©unissant des administrations, des collectivitĂ©s et des fĂ©dĂ©rations professionnelles, il doit travailler sur les thĂšmes : crĂ©er et dĂ©velopper les rĂ©seaux de chaleur et de froid compĂ©titifs et plus attractifs ; verdissement du mix Ă©nergĂ©tique (incluant Ă©nergies de rĂ©cupĂ©ration) ; outils d'aide Ă  la conception et pilotage. Ses propositions sont attendues avant la fin [32]. Le gouvernement souhaite que 3,4 millions de foyers soient raccordĂ©s en 2023, et que la part des renouvelables soit portĂ©e de 40 % Ă  59 %, avec une montĂ©e en puissance du biogaz qui devra atteindre 10 % des consommations de gaz, si ses coĂ»ts diminuent car il est encore plus cher de 40 % qu'un gaz fossile. Le Fonds chaleur passera de 315 M€ en 2019 Ă  350 M€ en 2020 et 2021, et son utilisation sera simplifiĂ©e (avances remboursables remplacĂ©es par des subventions). Les rĂ©seaux de chaleur et de froid se jugent « oubliĂ©s des aides d’État »[32].

Selon Pascal Roger (président de la Fedene, Fédération des Services Energie Environnement)[33] fin 2018 : ces réseaux devraient contribuer aux deux tiers des économies demandées par la premiÚre PPE (2016-2018), avec un verdissement demandé deux fois et demi plus important que l'électricité renouvelable[32].

Selon Thierry Franck de PrĂ©aumont, prĂ©sident du SNCU (Syndicat national du chauffage urbain et de la climatisation urbaine[34]), en 2017, 761 rĂ©seaux de chaleur et de froids dĂ©livraient en France 25 TWh de chaleur (dĂ©jĂ  en partie dĂ©carbonĂ©s) et TWh de froid, via plus de 5 600 km de rĂ©seau, avec un bouquet Ă©nergĂ©tique contenant environ 56 % d'Ă©nergies vertes ou de rĂ©cupĂ©ration, dont 25 % provenant d'unitĂ©s de valorisation Ă©nergĂ©tique et 22 % de biomasse. Le contenu carbone du kilowatt-heure de rĂ©seau de chaleur est d’environ 116 gCO2/kWh[32].

Le rythme d'installation de nouveaux rĂ©seaux de chaleur a ralenti en France en 2019. Le Fonds chaleur Ă©tait calculĂ© pour une certaine trajectoire de fiscalitĂ© carbone ; le niveau des aides n'a pas Ă©tĂ© ajustĂ© aprĂšs l'interruption de cette trajectoire, mĂȘme si la compĂ©titivitĂ© des rĂ©seaux de chaleur par rapport au gaz est en baisse[35].

En 2021, on dĂ©nombre en France 898 rĂ©seaux de chaleur, qui ont fourni 29,8 TWh de chaleur. La part des Ă©nergies renouvelables et de rĂ©cupĂ©ration dans leur mix Ă©nergĂ©tique atteint 62,6 %, contre 60,5 % en 2020, dont 26,9 % d'Ă©nergie de rĂ©cupĂ©ration d'usines de valorisation Ă©nergĂ©tiques, 23,9 % de biomasse, 5,5 % de gĂ©othermie et 6,3 % d'autres EnR ; le gaz naturel assure une part de 34,5 %[36].

Le service en ligne France chaleur urbaine, mis en ligne par le ministĂšre de la Transition Ă©nergĂ©tique en 2021, permet aux copropriĂ©taires et gestionnaires de bĂątiments de connaĂźtre la distance entre un bĂątiment et le rĂ©seau de chaleur le plus proche, et d'ĂȘtre mis en relation avec le gestionnaire de ce rĂ©seau. Ce service permet aussi d’identifier les rĂ©seaux de chaleur concernĂ©s par le classement automatique et de prendre connaissance des zones oĂč s’appliquent des obligations de raccordement (pĂ©rimĂštres de dĂ©veloppement prioritaire)[37].

L'annĂ©e 2022 est marquĂ©e par plusieurs initiatives ou changements de rĂ©glementation visant Ă  dĂ©velopper les rĂ©seaux de chaleur : le classement des rĂ©seaux de chaleur par l'arrĂȘtĂ© du facilitant le raccordement de bĂątiments neufs ou dont l'installation de chauffage est renouvelĂ©e (au dessus d'une certaine puissance et dans des zones de dĂ©veloppement prioritaires dĂ©finies par les collectivitĂ©s) ; le « coup de pouce raccordement » de l'État, une valorisation des certificats d'Ă©conomie d'Ă©nergie incitative laissant un reste Ă  charge faible dans le cadre d'un raccordement ; l'appel Ă  projets « Une ville, un rĂ©seau » lancĂ© par l'Ademe, qui vise Ă  financer 90 % d'une Ă©tude de faisabilitĂ© de crĂ©ation d'un rĂ©seau de chaleur ou de son extension ; enfin un Fonds chaleur de l'Ademe, dotĂ© de 520 millions d'euros.

Le , la Caisse des dépÎts et Vauban Infrastructures Partners rachÚtent le groupe Coriance, le quatriÚme acteur du secteur en France, au gestionnaire d'actifs Igneo Infrastructure Partners (contrÎlé par l'australien First Sentier Investors). Coriance exploite prÚs de 40 réseaux de chaleur (à Auxerre, Cergy-Pontoise, etc.), pour un chiffres d'affaires de 325 millions d'euros et 7 % de parts de marché en France, derriÚre les géants du secteur : Engie, Dalkia (groupe EDF) et le challenger Idex[38].

SuĂšde

Avec une part de 50 % dans le bouquet Ă©nergĂ©tique national (2011), la SuĂšde est trĂšs en avance sur le dĂ©veloppement des Ă©nergies renouvelables et de rĂ©cupĂ©ration par rapport aux autres pays d'Europe. Les rĂ©seaux de chaleur y sont Ă©galement beaucoup plus dĂ©veloppĂ©s que dans la plupart des pays. C’est le principal mode de chauffage dans 240 des 290 communes en SuĂšde (toutes les communes de plus de 10 000 habitants sont Ă©quipĂ©es d'un rĂ©seau de chaleur).

Les Ă©nergies renouvelables et de rĂ©cupĂ©ration reprĂ©sentent 75 % du mix Ă©nergĂ©tique des rĂ©seaux de chaleur suĂ©dois, qui ont distribuĂ© en 2012 environ 50 TWh soit 4,5 MTep. Si l’on rapporte en moyenne au nombre d’habitants, les rĂ©seaux de chaleur distribuent 0,45 tep/hab en SuĂšde, contre 0,03 tep/hab en France. Les rĂ©seaux de chaleur en SuĂšde desservent 60 % de logements, 30 % pour le secteur des services et 10 % d’industries[39].

Les réseaux de chaleur suédois sont détenus et exploités par des organismes entiÚrement publics (liés aux villes).

Ukraine

Un important acteur en Ukraine est Kyivteploenergo Ă  Kyiv[40].

Notes et références

Notes

  1. une partie des "autres sources" peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©es renouvelables

Références

  1. « Réseau de chaleur Bellevue - suivi d'exploitation » [PDF], Nantes Métropole,
  2. MinistÚre de l'environnement (2016), volet 1 : SynthÚse de la PPE [PDF], 25 pages, volet 2 : « Volet relatif à l'offre d'énergie » [PDF], 83 pages ; et volet 3 : « Stratégie de développement de la mobilité propre », [PDF], 125 pages.
  3. « La cloacothermie ou l’énergie renouvelable des eaux usĂ©es » [PDF], sur École normale supĂ©rieure Paris-Saclay, .
  4. « À Paris, un immeuble chauffĂ© grĂące Ă  la chaleur de la ligne 11 du mĂ©tro », sur RATP.
  5. (en) « Waste heat from the Tube to warm more than 1,350 homes in Islington » [« La chaleur perdue du mĂ©tro permettra de chauffer plus de 1 350 logements Ă  Islington »], sur energylivenews.com, .
  6. Cerema, « Constitution d'un réseau de chaleur », sur Réseaux de chaleur & Territoires, (consulté le )
  7. BRGM, « Les usages de la géothermie », sur Géothermie Perspectives (consulté le )
  8. SNCU/MEDDE, « EnquĂȘte nationale 2007 sur les rĂ©seaux de chaleur et de froid (France) », (consultĂ© le )
  9. Programme de la 3e Conférence Internationale réseaux de chaleur solaire 17-18 juin 2015, Toulouse, incluant un "Séminaire national français Solaire thermique et réseaux de chaleur"
  10. Guide qui sera présenté par Romain Genet, Chef de projet, INDDIGO la journée "réseaux de chaleur : de nouvelles opportunités pour nos territoires et nos entreprises" du 17 juin 2015
  11. (en) China looks to nuclear option to ease winter heating woes, Reuters, 10 décembre 2017.
  12. Des villes finlandaises Ă©tudient le potentiel des SMR pour le chauffage urbain, SFEN, 26 janvier 2018.
  13. « Pompe à chaleur géothermique sur eaux usées », sur geothermies.fr.
  14. Vancouver, premiÚre ville d'Amérique du Nord à se chauffer grùce aux égouts, La Tribune, 12 août 2016.
  15. « Transition énergétique : la Cour des comptes appelle à mieux exploiter le chauffage urbain », sur connaissancedesenergies.org,
  16. DSirective européenne relative à l'efficacité énergétique (2012)
  17. Cerema, « ÉlĂ©ments concernant les rĂ©seaux de chaleur dans la directive europĂ©enne sur l’efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique (2012/27/UE) », sur RĂ©seaux de chaleur & Territoires, (consultĂ© le ).
  18. ADEME, FONDS CHALEUR 2016 - SECTEUR RÉSEAUX DE CHALEUR, , 24 p. (lire en ligne)
  19. Cerema, « RĂ©seaux de distribution d’énergie : diffĂ©rentes Ă©chelles, diffĂ©rents jeux d’acteurs », sur RĂ©seaux de chaleur & Territoires, (consultĂ© le )
  20. « Rénovation des réseaux de chaleur anciens - défectueux », La lettre d'Amorce, n°56, page 12/100.
  21. (en) Energy Statistics Data Browser : World - Balances 2020, Agence internationale de l'énergie, 2 décembre 2022.
  22. (en) Energy Statistics Data Browser : World : Electricity 2020, Agence internationale de l'énergie, 2 décembre 2022.
  23. (en) DBDH, « Danish district heating history », sur DBDH (consulté le ).
  24. « Analyse comparative de la situation des rĂ©seaux de chaleur et de froid en France et aux États-Unis », sur RĂ©seaux de chaleur & Territoires, (consultĂ© le ).
  25. Dix pour cent du rĂ©seau de chaleur parisien est dĂ©sormais alimentĂ© au bois, Les Échos, 23 mars 2017.
  26. CPCU en quelques chiffres « L'entreprise CPCU », sur CPCU (consulté le ).
  27. Toulouse Ă©tend son rĂ©seau de chaleur (en valorisant les calories du refroidissement des supercalculateurs de l'espace de recherche ClĂ©ment Ader), Les Échos, 13 janvier 2016.
  28. ElectricitĂ© de Strasbourg fusionne ses activitĂ©s de services avec Dalkia, Les Échos, 16 fĂ©vrier 2016.
  29. Grégoire Noble, Les réseaux de chaleur et de froid sont les grands oubliés des aides d'Etat, le .
  30. MinistÚre du Développement Durable, « Réseaux de chaleur - Présentation et enjeux », sur MEDDE, (consulté le )
  31. « Politiques publiques : chronologie des principaux textes concernant les réseaux de chaleur (France) », sur Réseaux de chaleur & Territoires, Cerema, (consulté le ).
  32. G Noble (2019 « Un groupe de travail sur les réseaux de chaleur et de froid », batiactu.com, .
  33. « Fedene – FĂ©dĂ©ration des Services Energie Environnement » (consultĂ© le )
  34. « SNCU – Fedene » (consultĂ© le ).
  35. RĂ©seaux de chaleur : la France souffle le chaud et le froid, Les Échos, 22 novembre 2019.
  36. EnquĂȘte des rĂ©seaux de chaleur et de froid - Édition 2022 [PDF], FĂ©dĂ©ration des services Ă©nergie-environnement (FEDENE - SNCU), novembre 2022.
  37. « RĂ©seaux de chaleur », sur ministĂšres de l'Écologie et de l'Énergie des territoires (consultĂ© le ).
  38. RĂ©seau de chaleur : la Caisse des dĂ©pĂŽts et Vauban Infrastructures Partners s'emparent de Coriance, Les Échos, 2 mai 2023.
  39. Cerema, « Expérience suédoise sur les réseaux de chaleur », sur Réseaux de chaleur & Territoires, (consulté le ).
  40. (uk) Kyivteploenergo

Annexes

Articles connexes

Liens externes

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