Néolibéralisme
Le terme de néolibéralisme désigne aujourd'hui un ensemble d'analyses ou de doctrines inspirées du libéralisme économique aux définitions multiples et concurrentes[1].
Des années 1930 à la fin des années 1960, il est plutôt utilisé pour se référer à l'école de pensée de la Société du Mont-Pèlerin et au Colloque Walter Lippmann. Les analyses de cette pensée économique soulignent le caractère souvent très interventionniste des politiques néolibérales et le projet de créer une société compétitive basée sur une nouvelle vision de l'individu-entreprise, axée sur la compétitivité et l’individualisme[2].
Depuis les années 1970, le néolibéralisme correspond aux idées favorisant le secteur privé et le désengagement de l'État. Le néolibéralisme est associé aux travaux des économistes Friedrich Hayek, Milton Friedman, Ludwig von Mises ou James M. Buchanan,[2] ainsi qu'à des personnalités politiques tels que Margaret Thatcher, Ronald Reagan et Alan Greenspan[1]. Le néolibéralisme est critiqué, notamment par les altermondialistes. Cependant, le terme est flou et des courants économiques différents peuvent être qualifiés de néolibéraux.
Néolibéralisme français (1938-années 1960)
À la suite de la Grande dépression, le libéralisme est remis en cause. Pour les totalitarismes ou pour le New Deal, il est dépassé[3]. Des économistes libéraux lancent alors un mouvement qui vise à remettre en avant le libéralisme et à le refonder[4]. À la fin des années 1930, des économistes français comme Auguste Detœuf ou Louis Marlio utilisent ce terme pour désigner une forme de libéralisme qui n’est pas forcément synonyme de laissez-faire (pour lequel on parle de libéralisme manchestérien). Ils soulignent seulement le fait, qu'à condition de le rénover ou de le reconstruire, ce régime peut — aussi bien sur un plan économique et social — être supérieur au dirigisme et au planisme alors en vogue (pensée contemporaine de l'ordolibéralisme allemand par certains côtés comparables). Dans cette lignée (entre les années 1950 et jusqu'à la fin des années 1970), le mot peut qualifier des économistes tendant vers le social-libéralisme. Donald Moggridge présente ainsi John Maynard Keynes comme l'un des plus importants néolibéraux à défaut de meilleur terme pour le qualifier[5].
Le courant néolibéral est actif en France durant une période assez brève, comprise entre le colloque Walter Lippmann[6] de 1938 et la fin des années 1960. La consistance de sa volonté est de réagir à la domination des idées planistes et dirigistes de la fin des années 1930 et de montrer que le réel affrontement des problèmes de l’heure passe par une réforme et une reconstruction du Libéralisme. Par ailleurs, comme le montrent la liste des participants aux colloques et la teneur des débats, la volonté de faire face aux totalitarismes dans un contexte international de rivalité Est-Ouest a permis de réunir et de faire dialoguer au sein de ce courant des tendances assez diverses.
Néolibéralisme et colloque Walter Lippmann
Vont se rencontrer au colloque Lippmann des libéraux français, des membres influents de l’école autrichienne : Friedrich von Hayek et Ludwig von Mises, des hommes qui feront l’ordolibéralisme allemand après-guerre : Wilhelm Röpke, Alexander Rüstow (Walter Eucken, le grand théoricien de ce mouvement, n’avait pas reçu l’autorisation de quitter l’Allemagne[7]), ainsi que des participants de divers autres pays.
Le colloque révèle une grande hétérogénéité de la pensée libérale[8]. Leur point commun est cependant de rejeter le collectivisme et de refuser le libéralisme manchestérien[9].
Auteurs du néolibéralisme français
François Bilger[10] compte parmi les principaux auteurs Jacques Rueff, un disciple de Clément Colson, Maurice Allais, Louis Baudin et Daniel Villey. En marge de ce courant, Jacques Cros — à la différence de François Bilger — pense que le libéralisme doit désormais incorporer l’apport de la théorie keynésienne[11].
Résistance et réformes de structures
Pour Kuisel[12], durant la Résistance des débats ont eu lieu entre les planistes minoritaires du Parti socialiste (André Philip, Georges Boris, Jules Moch, Pierre Mendès France) et les néolibéraux (Étienne Hirsch, René Courtin, Maxime Blocq-Mascart et René Pleven) : les premiers veulent introduire des structures socialistes et se méfient des États-Unis et de la Grande-Bretagne ; les seconds entendent que le marché et l'initiative privée restent au cœur de l'économie et, sur le plan international, sont en faveur d'une amitié euro-atlantique. Toutefois, dans l'après-guerre, dans la réalisation des réformes, pour Kuisel[13], ce n'est pas ce débat qui a été central mais plutôt l'influence du Parti communiste et de Charles de Gaulle.
Société du Mont-Pèlerin
En 1947, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la tendance est favorable au keynésianisme. Les libéraux se réunissent au Mont-Pèlerin[14]. On y trouve notamment Hayek ou Mises, qui auront une importante influence ultérieurement.
Fin du néolibéralisme français (années 1960)
Plusieurs raisons[15] expliquent la disparition du néolibéralisme français à la fin des années 1960 concomitant avec le déclin de l'ordolibéralisme :
- L’évolution des faits et des situations alors que disparaît la génération des fondateurs.
- Une volonté des libéraux français de rompre avec les néolibéraux français du XXe siècle et de reconstruire un libéralisme français sur des bases autrichiennes et américaines ainsi que sur des auteurs français du XIXe siècle comme Bastiat[15].
- Une séparation forte entre grandes écoles et universités[15]. Le néolibéralisme en France reposait à la fois sur des hommes issus de Polytechnique, (Ernest Mercier, Louis Marlio et Auguste Detœuf pour la première génération, Jacques Rueff et Maurice Allais pour la seconde) et sur des universitaires Louis Baudin, René Courtin, Daniel Villey notamment.
- On pourrait ajouter que d’une certaine façon le néolibéralisme avait atteint l’essentiel de ces objectifs. Par ailleurs on peut se demander si les auteurs français avaient un réel sentiment d'appartenance à une école économique.
Analyses ultérieures : comparaison avec l'ordolibéralisme allemand
Dans une communication à un colloque tenu en 2000 dont les actes ont été publiés en 2003, François Bilger établit un comparatif entre néolibéralisme français et ordolibéralisme allemand en pointant les points de convergence et de divergence. Certains points de divergence semblent encore susceptibles de rendre compte des différences d'approche entre les deux pays.
Convergences
- Croyance en la liberté de la production et de l’échange, en la libre concurrence, au libre fonctionnement du mécanisme des prix et à la stabilité monétaire.
- Le « libéralisme de laissez-faire » est susceptible d’aboutir à sa propre destruction. L’instauration d’une économie de marché efficace et stable exige donc une législation très précise de la propriété, des contrats, de la faillite, des brevets, de la concurrence, de l’émission monétaire et du crédit, du système fiscal, du travail, de la solidarité sociale ainsi qu'une définition soigneuse des modalités d’intervention économique et sociale de l’État compatibles avec le bon fonctionnement du système[7].
Divergence théorique
- « Depuis le XIXe siècle, la science économique française s'est caractérisée essentiellement par une approche abstraite et déductive à partir de modèles mathématiques de la réalité économique fondamentale. » Ont illustré cette approche Arsène Dupuit, Augustin Cournot, Léon Walras, Clément Colson. Parmi les néolibéraux, Jacques Rueff et Maurice Allais poursuivent « cette tradition d'élaboration d'une physique sociale »[16].
- Les Allemands au contraire pratiquent une démarche inductive et concrète des réalités et des tendances historiques dans la tradition de Wilhelm Roscher, Bruno Hildebrand, de Karl Knies de Gustav von Schmoller ou de Max Weber. Pour Bilger[17], ces auteurs marquent Walter Eucken qui « a eu pour ambition de dépasser synthétiquement la fameuse querelle des méthodes entre les historistes allemands et les théoriciens allemands ».
Options philosophiques et éthiques différentes
- En France chez Louis Baudin et Daniel Villey, l'accent est mis sur l'indivisibilité de la liberté, la méfiance à l'égard des empiétements de l'État sur la liberté individuelle et la souveraineté des individus[17].
- Pour les ordolibéraux, les notions d'ordre et d'harmonie sociale concurrencent l'idée de liberté individuelle. « Avec Kant, ils prônent la liberté dans le respect de la loi morale, autrement dit la seule liberté de bien faire et non la liberté absolue »[15].
Conception différente de l’action publique
- Les néolibéraux français sont très sensibles aux perturbations liées à des interventions intempestives des pouvoirs publics dans le domaine monétaire et fiscal. Par contre, ils ne s’opposent pas au maintien d'un secteur public important s'il respecte une gestion au coût marginal. Ils ne sont pas non plus systématiquement opposés à la formation de cartels et d'oligopoles.
- Les ordolibéraux sont plus stricts sur la nécessité de respecter les règles d'une concurrence loyale fondée sur l'interdiction des cartels. Ils considèrent également qu'il convient « de compléter l'instauration de cette économie concurrentielle en mettant en œuvre une politique sociale et même sociétale très active, non seulement pour corriger ses conséquences humaines éventuellement défavorables, mais aussi pour créer des conditions sociales favorables à son bon fonctionnement et au développement d'une société libre et juste »[18].
Néo-libéralisme depuis les années 1970
À partir des années 1970, avec la montée en puissance des pensées de Milton Friedman et de Friedrich Hayek le mot néolibéralisme prend un autre sens. Selon Michel Foucault, le néolibéralisme est présenté comme une technique de gouvernement, une politique économique et sociale étendant l'emprise des mécanismes du marché à l'ensemble de la vie, ce qui est contesté par les disciples de Friedrich Hayek qui voient le libéralisme comme une priorité donnée à l'action libre des individus contre toute « emprise », et jugent absurde toute « technique de gouvernement » voulant intervenir dans le marché, fût-ce pour en étendre l'influence. Friedman et Hayek sont désignés en France comme en étant les principaux inspirateurs, bien qu'ils ne se soient jamais revendiqués du néolibéralisme, mais seulement du libéralisme. Leur libéralisme est anti-keynésien, et limite voire supprime l'intervention étatique. Le fonctionnement de l'ordre économique, de même que celui de l'ordre social, sont expliqués en termes darwinistes (voir Darwinisme social): ordre spontané, adaptation, sélection, loi du plus fort[19].
L'usage du terme se mondialise après la révolution zapatiste des Chiapas lorsqu'il est alors repris par le mouvement altermondialiste[20].
Depuis la fin des années 1970 dans le monde anglo-saxon — et depuis les années 1990 en Europe —, le terme « néolibéralisme » (aussi dénommé « ultralibéralisme » ou même « hyperlibéralisme »[21]) fait référence à des politiques libérales sur le plan économique, en réaction aux idées keynésiennes et d'une façon plus générale contre l'intervention de l'État.
Cette doctrine inspire Margaret Thatcher au Royaume-Uni, Ronald Reagan aux États-Unis dans les années 1980. Certains opposants au libéralisme mondialisé — notamment les altermondialistes[22] — soulignent aussi le rôle de laboratoire qu'a pu jouer le Chili de Pinochet, ainsi que le rôle de nombreuses institutions internationales de premier plan telles que le FMI, l'OMC ou encore la Banque mondiale.
Pour ses partisans, il s'agit de promouvoir un libéralisme renouvelé dans sa pensée et pour l'action, reposant sur deux piliers majeurs : le monétarisme et l'économie de l'offre.
Pour ceux qui le dénoncent — le terme est souvent employé à gauche, mais fait aussi partie du vocabulaire de la droite conservatrice — le « néolibéralisme » accroît les inégalités sociales, réduit la souveraineté des États[23] et nuit à la croissance des pays en développement.
Politiques « néolibérales »
Ces politiques prônent la protection des libertés individuelles face à l’État, et développent une critique radicale des idées alors dominantes, fortement imprégnées par les thèses keynésiennes et le fort niveau d'intervention de l'État dans la plupart des économies. Elles visent au contraire à réduire l'emprise du secteur public sur l'économie, au profit du secteur privé[24], sous l'influence de l'idée qu'il en résulterait une administration plus efficace et une économie plus forte.
Anne-Laure Delatte, dans le livre L’État droit dans le mur, voit trois caractéristiques de la mise en place du néolibéralisme en France. La première est le passage d'une politique macroéconomique de la demande centrée sur les ménages à une politique de l'offre centrée sur les entreprises. La deuxième est le passage d'un financement par la Banque de France et la « planche à billets » à un financement par la dette. La troisième est la maîtrise des dépenses sociales qui nuit à l'État-providence[25].
Promotion de l'économie de l'offre
L'économie de l'offre correspond à un courant de pensée apparu aux États-Unis, sous Ronald Reagan, alors qu'il est successivement gouverneur de Californie puis chef de l'État fédéral. Pour ses partisans, la stimulation de l'offre — au contraire de la stimulation keynésienne de la demande effective — est présentée comme le facteur clé de succès pour l'encouragement — et si nécessaire la relance — de l'économie générale : des auteurs comme Arthur Laffer préconisent la dérégulation et la levée de toutes les « contraintes » — en particulier fiscales — qui pèsent sur les agents économiques porteurs de l'initiative privée : privatisations, allègements fiscaux, flexibilité du marché du travail, suppression de l'État-providence, diminution des cotisations sociales, réduction des dépenses publiques, retour à l'équilibre du budget de l'État, encouragement à l'épargne…
Consensus de Washington
Le consensus de Washington[N 1] selon John Williamson[26] résume en 10 points les propositions qu'on qualifie de « néolibérales » :
- Politique budgétaire : les déficits n'ont d'effets positifs qu'à court terme sur l'activité et le chômage, alors qu'ils seront à la charge des générations futures. À long terme, ils produisent inflation, baisse de productivité et d'activité. Il faut donc les proscrire, et n'y recourir qu'exceptionnellement lorsqu'une stabilisation l'exige ;
- Les dépenses publiques doivent se limiter à des actions d'ampleur sur des éléments clefs pour la croissance et le soutien aux plus pauvres : éducation, santé publique, infrastructures… Les autres subventions (spécialement celles dans une logique de guichet) sont nuisibles ;
- Politique fiscale : les impôts doivent avoir une assiette large et des taux marginaux faibles de manière à ne pas pénaliser l'innovation et l'efficacité ;
- Politique monétaire : les taux d'intérêt doivent être fixés par le marché ; ils doivent être positifs mais modérés ;
- Pas de taux de change fixe entre les monnaies ; a contrario, les changes flottants, selon cette théorie, sont censés apporter moins de réserves de changes, des ajustements plus progressifs entre les monnaies, moins de volatilité et une meilleure allocation du capital mondial.
- Promotion de la libéralisation du commerce national et international : cela encourage la compétition et la croissance à long terme. Il faut supprimer les quotas d'import ou export, abaisser et uniformiser les droits de douane…
- Libre circulation des capitaux pour favoriser l'investissement ;
- Privatisation des entreprises publiques, démantèlement des monopoles publics pour améliorer l'efficacité du marché et les possibilités de choix offertes aux agents économiques ;
- Déréglementation ; à l'exception des règles de sécurité, de protection de l'environnement, de protection du consommateur ou de l'investisseur, toutes les règles qui entravent la concurrence et empêchent les nouveaux compétiteurs d'entrer sur un marché doivent être éliminées ;
- La propriété doit être légalement sécurisée ;
- Financiarisation.
Critiques
Pour Michel Santi, le néolibéralisme est un capitalisme oligarchique depuis les années 1980, qu'il qualifie de « nouvelle théologie », dans laquelle il faut dépenser et où le slogan est « je dépense donc je suis »[27].
Dans un article publié en 2016, trois économistes du Fonds monétaire international remettent en cause le néolibéralisme mis en avant par le Fonds, notamment les politiques d'austérité et de privatisations, en raison de la baisse de production qui en est souvent la conséquence, et l'ouverture des marchés de capitaux lorsqu'ils sont incontrôlés et deviennent la cause de crises financières[28].
Selon Joseph E. Stiglitz, le néolibéralisme est un « fondamentalisme de marché » que la réalité a réfutée, le laissez-faire sur les marchés n'est ni efficient ni stable, citant en exemple la crise financière de 2008, les poussées de chômage, les inégalités massives, « tous ces problèmes seraient bien pires s'il n'y avait pas une intervention à grande échelle de l'État »[29].
Pour Noam Chomsky, « Le régime « néolibéral » sape les fondements de la souveraineté populaire en transférant le pouvoir de décision des gouvernements nationaux à un « parlement virtuel » d'investisseurs et de prêteurs, préalablement organisés dans de grandes entreprises. Ce parlement virtuel peut exercer un « droit de veto » contre les projets gouvernementaux au moyen de fuites de capitaux et d'attaque contre les monnaies »[30]
Pour Pierre Bourdieu
Le sociologue Pierre Bourdieu, dans un article du Monde diplomatique daté de , voit « l’essence du néolibéralisme » dans ce qu’il appelle le « mythe walrassien de la « théorie pure ». Selon Bourdieu, le programme néolibéral « tend globalement à favoriser la coupure entre l’économie et les réalités sociales ». C'est « un programme de destruction méthodique des collectifs », c'est-à-dire de « […] toutes les structures collectives capables de faire obstacle à la logique du marché pur : nation, dont la marge de manœuvre ne cesse de décroître ; groupes de travail, avec, par exemple, l’individualisation des salaires et des carrières en fonction des compétences individuelles et l’atomisation des travailleurs qui en résulte ; collectifs de défense des droits des travailleurs, syndicats, associations, coopératives ; famille même, qui, à travers la constitution de marchés par classes d’âge, perd une part de son contrôle sur la consommation »[31].
Écoles économiques parfois qualifiées de « néolibérales »
Plusieurs courants économiques peuvent être qualifiés de néolibéraux[32] :
Notion dénoncée
Le journaliste Ed Conway (en) de Sky News note que, contrairement à d'autres idéologies, presque personne ne se revendique « néolibéral », et explique que pour lui ce terme est devenu une insulte. Une analyse publiée en 2009 des publications scientifiques utilisant le terme néolibéralisme constate que les trois quarts d'entre elles ne le définissent pas. Parmi les auteurs qui le définissent, le terme est pour les uns synonyme de désengagement total de l'État, pour les autres signifie que l'État doit jouer un rôle actif dans l'économie[34] - [35].
Pour le sociologue Christian Laval et le philosophe Pierre Dardot, la confusion entre libéralisme, néolibéralisme et ultralibéralisme est largement répandue[36]. L'économiste Dani Rodrik voit dans le néolibéralisme un terme « fourre-tout », qui rassemble ce qui a trait aux libéralisations, privatisations, ou aux politiques d'austérité, voire tout ce qui provoque la pauvreté ou les inégalités[37].
Dans son livre Néo-libéralisme(s). Une archéologie intellectuelle, le philosophe Serge Audier trouve de nombreuses formes du néolibéralisme : École autrichienne, École de Chicago, ordolibéralisme ou anarcho-capitalisme, au contraire d'une vision caricaturale qu'on peut trouver chez certains antilibéraux[32].
Pour l'historien des idées Pierre-André Taguieff, les islamistes anti-occidentaux rejoignent les « nouveaux gauchistes » opposés à la mondialisation en dénonçant le néolibéralisme des démocraties libérales[38].
En France
Le journaliste Dominique Seux constate que les dépenses publiques, les impôts et le déficit public sont en France parmi les plus élevés de l'OCDE et de l'Union européenne, pourtant une partie de la population considère que ce pays est néolibéral. Son explication est qu'après la chute du Mur de Berlin, il n'est plus possible de dénoncer le libéralisme devant l'échec du collectivisme, le néolibéralisme prend donc le relais. Il déplore que le néolibéralisme est un concept vague et « à côté de la plaque », et que s'il y a lieu de critiquer la mauvaise gestion des entreprises privées au sein du libéralisme, il ne faut pas « tout mélanger dans une sorte de gloubi-boulga »[39].
Pour l'économiste du CNRS Elie Cohen, les arguments qui pointent une mise en place du néolibéralisme en France sont faux. L'État n'a pas renoncé aux politiques de la demande, les dépenses sociales ont fortement augmenté et la discipline budgétaire est nécessaire pour l'utilisation de l'euro. Il explique la popularité de cette thèse par la hausse des demandes de services éducatifs, sanitaires et personnels pour une population vieillissante à un État-providence qui a un coût croissant[25].
Pour le maître de conférences en économie Guillaume Bazot, auteur de L'épouvantail néolibéral, un mal très français, le terme néolibéralisme est régulièrement utilisé dans un but polémique comme un épouvantail rhétorique, alors que la France n'a pas connu de hausse de la pauvreté, des inégalités ou de baisse de la démocratie[40] - [41].
Notes et références
Notes
- parce que partagées par les organisations économiques basées dans cette ville (le FMI, la Banque mondiale…)
Références
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- Audier 2013.
- Serge Audieur, Tiphaine de Rocquigny et alii, « Épisode 1/3 : Aux origines du néolibéralisme », sur radiofrance.fr, .
- Diemer 2014, p. 1.
- « For Keynes was, for want of a better word, a “neoliberal”, perhaps the earliest. By his own admission, Keynes lay at the “liberal socialist” end of the broad spectrum of political and social thought that runs to Ludwig von Mises, Hayek and successors such as Milton Friedman at the other » in Moggridge, Keynes, Fontana books, 1976, p. 42.
- En général les écrits universitaires fixent le début du néo-libéralisme au colloque Lippmann. Denord, 2001, p. 10 ; Bilger 2003, p. 6.
- Bilger 2003, p. 6.
- Diemer 2014, p. 5.
- Diemer 2014, p. 11.
- Bilger 2003, p. 3.
- Jacques Cros (1922 - 1976), Le Néo-libéralisme : étude positive et critique (1951) p. 338 et suivantes
- Kuisel 1984, p. 273-274.
- Kuisel 1984, p. 274.
- Sylvie ARSEVER, « Quand le renouveau libéral se préparait au Mont-Pèlerin », sur Le Temps, (consulté le ).
- Bilger 2003, p. 9.
- Bilger 2003, p. 7-8.
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- Bilger 2003, p. 8.
- Philippe Léger, « Critique de la justice sociale selon Hayek », sur Revue Projet, .
- ESTRADA SAAVEDRA Marco, Une lutte sans durée limitée : bilan historique du zapatisme (1969-2021), Amérique latine, 2022/1 (N° 1) (lire en ligne), « Le mouvement pro-zapatiste », p. 109-141 :
« Sa contribution majeure est d’avoir été un pionnier de l’altermondialisme et d’être parvenu à réactiver les luttes post-communistes contre la globalisation néolibérale. »
- Vittorio De Filippis et Pierre Larrouturou, « L’hyperlibéralisme nous conduit dans le mur », Libération,
- « Altermondialistes tout terrain » de Jacques Nikonoff dans Le Monde diplomatique de
- « Le régime « néolibéral » sape les fondements de la souveraineté populaire en transférant le pouvoir de décision des gouvernements nationaux à un « parlement virtuel » d'investisseurs et de prêteurs, préalablement organisés dans de grandes entreprises. Ce parlement virtuel peut exercer un « droit de veto » contre les projets gouvernementaux au moyen de fuites de capitaux et d'attaque contre les monnaies » écrivait notamment Noam Chomsky en 1999, Raison & liberté. Sur la nature humaine, l'éducation & le rôle des intellectuels, Agone, coll. « Banc d'essais », 2010, p. 235).
- (en) Cohen, Joseph Nathan (2007), The Impact of Neoliberalism, Political Institutions and Financial Autonomy on Economic Development, 1980–2003, Dissertation, Department of Sociology, Princeton University. 2007
- Elie Cohen, « Le mythe du tournant néo-libéral », sur Telos, .
- (en) Williamson, John (1990), « What Washington Means by Policy Reform » in John Williamson, ed. Latin American Adjustment: How Much Has Happened? (Washington : Institute for International Economics
- Michel Santi, « Ainsi soit le néolibéralisme », sur latribune.fr, (consulté le ).
- Romaric Godin, « Quand le FMI critique le néolibéralisme... », sur La Tribune, (consulté le ).
- Joseph E. Stiglitz, Peuple, Pouvoir&Profits, le capitalisme à l'heure de l'exaspération sociale, Les liens qui libèrent, , p. 188
- Noam Chomsky en 1999, Raison & liberté. Sur la nature humaine, l'éducation & le rôle des intellectuels, Agone, coll. « Banc d'essais », 2010, p. 235).
- Pierre Bourdieu, « L'essence du néolibéralisme », Le Monde diplomatique, (consulté le ), p. 3.
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- Pierre-André Taguieff : L’émergence d’une judéophobie planétaire, in Outre-terre, Revue française de géopolitique, , lire en ligne.
- Dominique Seux, « France, pays néo-libéral : la preuve ? », sur franceinter.fr, (consulté le ).
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- Guillaume Bazot, « Macron, ce néolibéral », sur letemps.ch, .
Voir aussi
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Ouvrages
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- Steve Keen, L'imposture économique (Debunking Economics), éditions de l’Atelier, 2014
- Richard F. Kuisel, Le Capitalisme et l'État en France, Gallimard,
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Articles
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- François Denord, « Aux Origines du néo-libéralisme en France : Louis Rougier et le Colloque Walter Lippmann de 1938 », Le Mouvement social, no 195, 2001, p. 9-34.
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- Jean Piel, « Le virage néolibéral planétaire depuis 25 ans : la nouveauté proclamée ou le dernier avatar du capitalisme toujours tel qu’en lui-même ? », Nuevo Mundo Mundos Nuevos, Debates, 2007. [lire en ligne]
- Suresh Naidu, Dani Rodrik et Gabriel Zucman, « L'économie après le néolibéralisme », sur Le Grand Continent, (consulté le )
Articles connexes
Liens externes
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