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Zapatisme

Le zapatisme ou nĂ©ozapatisme est un mouvement social mexicain impulsĂ© par l'ArmĂ©e zapatiste de libĂ©ration nationale (EZLN) Ă  partir de 1994 pour dĂ©fendre l’autonomie des peuples indigĂšnes. Son nom renvoie Ă  la lutte d'Emiliano Zapata et de l'EjĂ©rcito Libertador del Sur (es), dans les annĂ©es 1910.

Le zapatisme n'est pas une idĂ©ologie, un dogme, ni un modĂšle[1], il s’agit d’une expĂ©rience de transformation sociale et politique radicale. Il englobe la construction de l'autonomie dans les territoires du Chiapas oĂč est implantĂ©e l'EZLN, des perspectives Ă  l'Ă©chelle du Mexique et une dimension internationale.

Plusieurs auteurs soulignent l'importance, nationale et internationale du mouvement[2]. « Des penseurs comme Noam Chomsky, Immanuel Wallerstein ou Pablo Gonzalez Casanova (es) continuent de soutenir que le zapatisme est l'initiative politique la plus radicale du monde, et probablement la plus importante. Des millions de personnes trouvent auprĂšs des zapatistes inspiration et espĂ©rance au milieu d'une crise profonde[3]. »

Chronologie

RĂ©volte au Chiapas (1994–1996)

Le , l’EZLN occupe quelques bĂątiments publics de plusieurs villes du Chiapas, dont San CristĂłbal de Las Casas et publie la premiĂšre version de son texte fondateur, la DĂ©claration de la Selva Lacandona. Quelques jours plus tard, le , l’EZLN accepte le cessez-le-feu dĂ©crĂ©tĂ© par le prĂ©sident Carlos Salinas de Gortari. Entre le et le , avec l’aide de l’évĂȘque de San CristĂłbal Samuel Ruiz comme mĂ©diateur, des nĂ©gociations ont lieu dans la cathĂ©drale de San CristĂłbal entre le sous-commandant Marcos, dix-huit commandants indigĂšnes et le commissaire pour la paix du gouvernement fĂ©dĂ©ral, Manuel Camacho SolĂ­s.

Du au , 6 000 reprĂ©sentants d’organisations populaires du Mexique se rĂ©unissent dans la Selva Lacandona, Ă  Guadalupe Tepeyac, pour prendre part Ă  la Convention nationale dĂ©mocratique.

Le , le gouvernement rĂ©vĂšle l’identitĂ© supposĂ©e du sous-commandant Marcos et ordonne l’arrestation des dirigeants zapatistes ; mais l’offensive de l'armĂ©e fĂ©dĂ©rale Ă©choue. Le , le Parlement approuve la Loi pour le Dialogue, la Conciliation et la Paix Digne au Chiapas et crĂ©e la Commission pour la concorde et la pacification (COCOPA), composĂ©e de lĂ©gislateurs de tous les partis, afin de faciliter le dialogue entre l'EZLN et le gouvernement.

Au mois d’, les nĂ©gociations reprennent entre l'EZLN et le gouvernement fĂ©dĂ©ral, Ă  San AndrĂ©s Sakam'chen de los Pobres, avec la participation de nombreux conseillers et invitĂ©s des deux parties.

L’EZLN lance une consultation nationale et internationale du au : un million de personnes y prennent part, appuyant majoritairement la conversion de l’EZLN en une force politique civile.

Le , la quatriĂšme DĂ©claration de la Selva lacandona annonce la crĂ©ation du Front zapatiste de libĂ©ration nationale (FZLN), force politique civile non-Ă©lectorale. Du au , le Forum national indigĂšne, convoquĂ© par l’EZLN, rĂ©unit les reprĂ©sentants de 35 peuples indiens du Mexique et dĂ©cide de former le CongrĂšs national indigĂšne (CNI).

Le , le gouvernement et l’EZLN signent Ă  San AndrĂ©s des Accords concluant le premier volet des discussions et portant sur les « Droits et culture indigĂšnes ».

Du au se dĂ©roule la Rencontre intercontinentale pour l’humanitĂ© et contre le nĂ©olibĂ©ralisme qui rĂ©unit 5 000 personnes de 42 pays, dans les cinq « Aguascalientes » zapatistes.

Le , la COCOPA prĂ©sente aux deux parties le projet de rĂ©forme constitutionnelle qu'elle a rĂ©digĂ© sur la base des Accords de San AndrĂ©s. En , l’EZLN l'accepte mais le prĂ©sident Zedillo le rĂ©cuse.

Reprise du conflit (1997–1999)

En , 1 111 dĂ©lĂ©guĂ©s zapatistes se rendent Ă  Mexico et assistent au second CongrĂšs national indigĂšne. Le des paramilitaires massacrent 45 indigĂšnes dans le campement d'Acteal (commune de ChenalhĂł). Les victimes appartiennent Ă  l'organisation Las Abejas.

D’ Ă  , des opĂ©rations policiĂšres et militaires dĂ©mantĂšlent plusieurs communes autonomes (Ricardo Flores MagĂłn, Tierra y Libertad, San Juan de la Libertad).

Au mois de , 5 000 dĂ©lĂ©guĂ©s zapatistes (2 500 hommes et 2 500 femmes) se rendent dans toutes les communes du Mexique pour promouvoir la Consultation nationale pour la reconnaissance des peuples indigĂšnes et la fin de la guerre d’extermination. Le , deux millions et demi de personnes y prennent part, demandant Ă  une trĂšs large majoritĂ© le respect des Accords de San AndrĂšs.

Années 2000

  • : L'EZLN demande au nouveau prĂ©sident, Vicente Fox, dont la victoire met fin au long « rĂšgne » du PRI, trois signes pour reprendre le dialogue : approbation du projet de loi de la COCOPA, libĂ©ration de tous les prisonniers politiques zapatistes, fermeture de sept campements militaires.
  • - : 23 commandant(e)s et le sous-commandant Marcos entreprennent la Marche de la Couleur de la Terre. Reçus avec enthousiasme dans 12 États du Mexique, ils sont accueillis finalement par la foule qui remplit la place centrale de Mexico.
  • : La dĂ©lĂ©gation zapatiste est reçue au CongrĂšs de l'Union (le Parlement du Mexique) et plaide pour la reconnaissance des Accords de San AndrĂ©s.
  • : Le SĂ©nat approuve une rĂ©forme constitutionnelle en matiĂšre indigĂšne, radicalement distincte du texte de la COCOPA. Le , la Chambre des dĂ©putĂ©s en fait de mĂȘme. L'EZLN rejette cette rĂ©forme, qui trahit les Accords de San AndrĂ©s. La possibilitĂ© du dialogue avec le gouvernement se referme.
  • 8- : L’EZLN annonce la crĂ©ation de cinq Conseils de bon gouvernement, pour conforter l’autonomie prĂ©vue dans les Accords de San AndrĂ©s.
  • juin- : La SixiĂšme DĂ©claration de la Selva lacandona propose d'allier la lutte indigĂšne Ă  un vaste mouvement national, rassemblant toutes les organisations, collectifs et individus dĂ©sireux d'Ă©laborer un plan national de lutte, « en bas et Ă  gauche », et d'aboutir Ă  une nouvelle Constituante.
  • : Le sous-commandant Marcos entame la premiĂšre tournĂ©e de « l'Autre Campagne » Ă  travers le Mexique.
  • 3-: Dans l'État de Mexico, une intervention de la police contre des vendeurs de fleurs ambulants, qui reçoivent le soutien du Front des Peuples en DĂ©fense de la Terre d'Atenco dĂ©gĂ©nĂšre. Le bilan est de deux morts, 200 arrestations et une vingtaine de viols commis par les policiers. Le sous-commandant Marcos suspend sa tournĂ©e nationale et dĂ©cide de rester Ă  Mexico jusqu’à ce que toutes les personnes arrĂȘtĂ©es soient libĂ©rĂ©es.
  • - : Seconde Ă©tape de la tournĂ©e du sous-commandant Marcos, qui parcourt onze États.
  • - : PremiĂšre Rencontre des Peuples zapatistes avec les Peuples du Monde, dans le Caracol[4] d'Oventik.
  • 21- : Seconde Rencontre des Peuples Zapatistes avec les Peuples du Monde, dans trois des cinq Caracoles.
  • : l'EZLN dĂ©nonce une nouvelle offensive du gouvernement contre les communautĂ©s zapatistes et suspend la tournĂ©e des commandants dans le sud et le centre du pays.
  • 11- : La Rencontre des Peuples Autochtones d’AmĂ©rique a lieu dans la communautĂ© Yaqui de VĂ­cam (Sonora), avec des dĂ©lĂ©guĂ©s reprĂ©sentant 66 peuples de 12 pays.
  • 13- : À l'initiative de l'EZLN, Premier colloque international In memoriam AndrĂ©s Aubry «...PlanĂšte Terre : mouvements antisystĂ©miques... ».
  • - : TroisiĂšme Rencontre des Peuples Zapatistes avec les Peuples du Monde (rencontre des femmes zapatistes avec les femmes des peuples du monde), dans le Caracol de La Garrucha.
  • - : Premier Festival Mondial de la Rage Digne, Ă  Mexico, dans le Caracol d'Oventik et Ă  San Cristobal de Las Casas.
  • : 40.000 zapatiste occupent pacifiquement et en silence cinq villes du Chiapas (presque les mĂȘmes qu'en 1994).
  • fĂ©vrier- : La sĂ©rie de communiquĂ©s intitulĂ©s Eux et nous annonce une nouvelle Ă©tape de la lutte zapatiste, la fin de « l'Autre Campagne » et la mise en place d'un rĂ©seau planĂ©taire de luttes, « la Sexta ».
  • : 10e anniversaire de la crĂ©ation des Conseils de bon gouvernement.
  • 12- : PremiĂšre session de « l'Escuelita zapatista », qui permet Ă  prĂšs de 1500 personnes de partager la vie des familles zapatistes et de dĂ©couvrir le fonctionnement de l'autonomie.
  • : 30e anniversaire de la fondation de l'EZLN.
  • : CĂ©lĂ©bration du 20e anniversaire du soulĂšvement zapatiste.
  • 25- et 3- : DeuxiĂšme et troisiĂšme sessions de « l'Escuelita zapatista » (4500 participants).
  • : embuscade durant laquelle Galeano, maestro de « l'Escuelita zapatista », est assassinĂ© par des paramilitaires, membres de l'organisation paysanne CIOAC, Ă  La Realidad.
  • : Hommage Ă  Galeano Ă  La Realidad. Le sous-commandant Marcos annonce la mort du personnage qu'il a incarnĂ© depuis 1994, avant de « ressusciter » sous le nom de sous-commandant Galeano. Le sous-commandant MoisĂ©s est dĂ©sormais le principal chef militaire et porte-parole de l'EZLN.
  • : les zapatistes, et notamment le sous-commandant MoisĂ©s, accueillent, Ă  Oventik, la caravane des familles des Ă©tudiants disparus d'Ayotzinapa.
  • – : Festival Mondial des RĂ©sistances et des RĂ©bellions, organisĂ© avec le CNI et qui se dĂ©roule dans plusieurs communautĂ©s de cinq Ă©tats du Mexique.
  • 2- : Hommage Ă  Galeano et au philosophe Luis Villoro ; sĂ©minaire international « La pensĂ©e critique face Ă  l'hydre capitaliste », avec des interventions de la « Commission Sexta » de l'EZLN et d'une cinquantaine d'invitĂ©s.
  • AoĂ»t- : deuxiĂšme niveau de « l'Escuelita zapatista » (par internet).
  • - : Festival consacrĂ© aux arts « CompArte por la humanidad », Ă  l'UniversitĂ© de la Terre (San Cristobal de Las Casas) et dans les cinq caracoles.
  • 9- : CinquiĂšme CongrĂšs national indigĂšne, pour cĂ©lĂ©brer les 20 ans de la crĂ©ation du CNI. Y est dĂ©battue la proposition de prĂ©senter une candidate indigĂšne aux Ă©lections prĂ©sidentielles de 2018 – proposition ensuite soumise Ă  consultation dans l'ensemble des communautĂ©s du CNI.
  • – : Festival consacrĂ© aux sciences « L@s zapatistas y las conCiencias por la humanidad ».
  • – : deuxiĂšme Ă©tape du CinquiĂšme CongrĂšs national indigĂšne : rĂ©sultat de la consultation et approbation de la formation d'un Conseil IndigĂšne de Gouvernement au niveau national, dont la porte-parole prĂ©sentera sa candidature Ă  l'Ă©lection prĂ©sidentielle de 2018.
  • 26- : convocation Ă  une cession du CNI afin de procĂ©der Ă  l'installation du Conseil IndigĂšne de Gouvernement pour le Mexique et de nommer sa porte-parole.
  • - : Celle-ci, MarĂ­a de JesĂșs Patricio MartĂ­nez, dite Marichuy, et les rĂ©seaux d'appui qui soutiennent l'initiative du CNI et de l'EZLN s'emploient Ă  rĂ©unir les signatures nĂ©cessaires Ă  la prĂ©sentation d'une candidature indĂ©pendante Ă  l'Ă©lection prĂ©sidentielle (900.000 environ). Le fait que ces signatures doivent ĂȘtre enregistrĂ©es via des tĂ©lĂ©phones portables haut de gamme est dĂ©noncĂ© comme discriminatoire Ă  l'Ă©gard d'une candidature soutenue principalement par des communautĂ©s indigĂšnes pauvres ; le nombre de signatures requises n'est pas atteint, rendant la candidature de Marichuy impossible, mais le Conseil IndigĂšne de Gouvernement poursuit son existence.
  • 26- : Second Festival « ConCiencias por la Humanidad ».
  • 8- : PremiĂšre Rencontre internationale des femmes qui luttent, dans le caracol de Morelia, Ă©vĂ©nement non mixte organisĂ© par les femmes zapatistes et qui rĂ©unit 7000 participantes de 38 pays.
  • 1- : Premier Festival de cinĂ©ma « Puy Ta Cuxlejaltic », dans le caracol d'Oventic.
  • - : la cĂ©lĂ©bration des 25 ans du soulĂšvement zapatiste est marquĂ©e par un dĂ©filĂ© des miliciens zapatistes et par un discours d'avertissement lancĂ© au nouveau prĂ©sident AndrĂ©s Manuel LĂłpez Obrador, tout juste entrĂ© en fonction : les zapatistes ne permettront pas le dĂ©ploiement des mĂ©ga-projets lancĂ©s par celui-ci, en particulier le mal nommĂ© « Train Maya » qui doit relier le Chiapas aux sites touristiques du YucatĂĄn ; ils se dĂ©clarent prĂȘts Ă  s'opposer par tous les moyens Ă  des projets destructeurs de l'environnement et des modes de vie des communautĂ©s indiennes.
  • : les journĂ©es de lutte « Zapata vive, Samir Vive, la lucha sigue » sont organisĂ©es par l'EZLN et le CNI, Ă  la fois pour marquer le centenaire de la mort d'Emiliano Zapata et pour protester contre l'assassinat de Samir Flores, membre du Front des Peuples en DĂ©fense de l'Eau et de la Terre des États de Morelos, Puebla et Tlaxcala, en lutte contre un projet de centrale thermo-Ă©lectrique qui implique de les dĂ©possĂ©der de l'eau qui irrigue leurs champs.
  • : par un communiquĂ© intitulĂ© « Nous avons brisĂ© l'encerclement », l'EZLN annonce la formation de 4 nouvelles communes autonomes et de 7 nouveaux caracoles, avec leurs conseils de bon gouvernement respectifs.
  • : de multiples activitĂ©s, intitulĂ©es « Combo pour la vie », rassemblent un second Festival de cinĂ©ma « Puy Ta Cuxlejaltic » et un Festival CompArte de danse dans le nouveau caracol de Tulan Kaw, ainsi qu'un Forum en dĂ©fense du territoire et de la Terre-mĂšre, co-organisĂ© avec le CNI (nouveau caracol Jacinto Canek) et une seconde Rencontre internationale des femmes qui luttent (caracol de Morelia, 27-).
  • : face Ă  la pandĂ©mie de Covid-19, l'EZLN se dĂ©clare en alerte rouge et annonce la fermeture de tous les caracoles. En contraste avec l'inaction et l'indolence du gouvernement mexicain, les zapatistes appellent Ă  prendre conscience de la gravitĂ© de l'Ă©pidĂ©mie, Ă  organiser de maniĂšre autonome des mesures de prĂ©vention et de contention, sans pour autant abandonner les luttes en cours.
  • : par un communiquĂ© intitulĂ© « Une montagne en haute mer », l'EZLN annonce qu'une ample dĂ©lĂ©gation zapatiste visitera les cinq continents, Ă  commencer par l'Europe en 2021.
  • : une « DĂ©claration pour la vie », co-signĂ©e par l'EZLN et par des centaines d'organisations, collectifs et personnes, appelle Ă  lutter pour la vie et confirme ce voyage intercontinental. La dĂ©lĂ©gation zapatiste, composĂ©e de plus de cent personnes, en grande majoritĂ© des femmes, sillonnera l'Europe de juillet Ă  .
  • 2 mai 2021: le "Voyage pour la vie" commence avec le dĂ©part depuis Isla Mujeres du bateau "La Montaña", avec Ă  son bord les sept premiers membres de la dĂ©lĂ©gation zapatiste, "l'Escadron 421" (4 femmes, 2 hommes, 1 personne non-binaire).

Construction de l'autonomie au Chiapas

L'EZLN est implantée dans plusieurs régions du Chiapas : la « Selva lacandona » et les vallées au sud d'Ocosingo; la zone Nord (proche de Palenque); « Los Altos de Chiapas » (autour de San Cristobal de Las Casas). Elle est également présente, de maniÚre moins dense, dans la zone zoque, la région-frontiÚre avec le Guatemala et la Sierra Madre.

Seule une petite minoritĂ© des membres de l'EZLN sont des militaires (« insurgentes » : troupe permanente, ou « milicianos »: rĂ©servistes). La trĂšs grande majoritĂ© d'entre eux sont des civils (dĂ©nommĂ©s « bases de apoyo »). Parfois, des villages entiers peuvent ĂȘtre constituĂ©s de « bases de apoyo ». Dans d'autre cas, les plus nombreux, cohabitent dans un mĂȘme village des « bases de apoyo » zapatistes et des non zapatistes (adhĂ©rents du PRI, du PRD, de Morena ou autres partis, ou sans parti).

Histoire de la construction de l'autonomie

Le , l'EZLN annonce la crĂ©ation de 38 « municipalitĂ©s autonomes rebelles zapatistes » (MAREZ : municipio autĂłnomo rebelde zapatista)[5]. Celles-ci se mettent en place progressivement, en fonction des possibilitĂ©s de chaque rĂ©gion. L'une des premiĂšres communes Ă  Ă©lire effectivement ses autoritĂ©s autonomes a Ă©tĂ© celle de San AndrĂ©s Sakamch'en de los Pobres (qui partage le mĂȘme territoire que la commune officielle de San AndrĂ©s Larrainzar). En , l'EZLN confirme l'existence de 27 communes autonomes[6].

Le , la nĂ©gociation engagĂ©e entre l'EZLN et le gouvernement fĂ©dĂ©ral aboutit Ă  la signature des Accords de San AndrĂ©s (es) sur « Droits et Culture indigĂšnes ». La reconnaissance du droit Ă  l'autonomie (fondĂ© sur les documents internationaux comme la Convention 169 de l'OIT) est au cƓur de ces accords. Il en rĂ©sulte des droits prĂ©cis, notamment en ce qui concerne l'organisation du gouvernement communal selon les traditions indiennes, ainsi que le contrĂŽle du territoire et de ses ressources naturelles.

Toutefois, le projet de rĂ©forme constitutionnelle Ă©laborĂ© par la commission parlementaire (COCOPA) pour transcrire ces accords est rĂ©cusĂ© par le PrĂ©sident Zedillo, en , puis, en , par le parlement lui-mĂȘme, aprĂšs l'alternance ayant mis fin au pouvoir du Partido Revolucionario Institucional. L'EZLN en conclut que le dialogue avec les pouvoirs instituĂ©s est vain[7].

En consĂ©quence, l'EZLN annonce, en , la crĂ©ation de cinq "Conseils de bon gouvernement" (Juntas de buen gobierno), siĂ©geant dans chacun de ses 5 centres rĂ©gionaux baptisĂ©s Caracoles (escargot)[8]. Il s'agit de rĂ©aliser dans les faits ce qui n'a pas Ă©tĂ© reconnu dans la Constitution (mais Ă©tait prĂ©vu par les Accords de San AndrĂ©s). L'objectif est de mieux coordonner les communes dĂ©jĂ  existantes et d'approfondir la mise en Ɠuvre de l'autonomie. Il est clairement soulignĂ© que les organes de gouvernement autonome sont indĂ©pendants de la structure politico-militaire de l'EZLN: ceux qui occupent des responsabilitĂ©s au sein de celle-ci ne peuvent ĂȘtre membres des conseils autonomes[9].

À partir de cette date, la construction de l'autonomie devient l'un des axes essentiels du mouvement zapatiste. En , à l'occasion du dixiùme anniversaire des Juntas de buen gobierno (es), l'EZLN organise l'Escuelita zapatista, qui permet à prùs de 1500 personnes de se rendre dans les villages zapatistes pour partager la vie de ses familles et observer le fonctionnement de l'autonomie. Deux autres sessions de l'Escuelita zapatista ont eu lieu en et . C'est là une sorte de bilan public de prùs de vingt ans de construction de l'autonomie[10].

En , une nouvelle avancĂ©e de l'autonomie est annoncĂ©e[11]. Quatre nouvelles communes autonomes s'ajoutent aux 27 alors en fonctionnement et sept nouveaux caracoles, avec leurs conseils de bon gouvernement respectifs, s'ajoutent aux cinq dĂ©jĂ  crĂ©Ă©s en 2003. Dans les zones oĂč l'autonomie zapatiste est implantĂ©e depuis longtemps, les nouveaux caracoles visent Ă  en reconfigurer et en amĂ©liorer l'organisation. Dans d'autres cas, l'autonomie s'affirme lĂ  oĂč, jusqu'Ă  prĂ©sent, elle n'Ă©tait pas explicitement prĂ©sente, par exemple avec deux nouvelles communes autonomes assez Ă©loignĂ©es des principales zones d'influence zapatistes : Ă  Motozintla, prĂšs de la frontiĂšre guatĂ©maltĂšque, et Ă  Chicomuselo, rĂ©gion secouĂ©e par la rĂ©sistance face Ă  l'exploitation miniĂšre. Ailleurs, comme Ă  Amatenango del Valle, de nouveaux centres se forment lĂ  oĂč les communautĂ©s zapatistes Ă©taient bien implantĂ©es, mais sans avoir jusqu'Ă  prĂ©sent formĂ© de communes autonomes. Enfin, certaines localisations suggĂšrent une volontĂ© de favoriser une plus grande interaction entre zapatistes et non-zapatistes dans la construction de l'autonomie, par exemple avec le caracol de Tila, petite ville qui s'est dĂ©clarĂ©e autonome il y a trois ans, sous l'Ă©gide du CongrĂšs National Indien.

Au niveau de la communauté

Chaque village indien a son mode d'organisation communautaire, avec l'assemblĂ©e qui est le lieu oĂč sont dĂ©battues les questions d'intĂ©rĂȘt commun et prises les dĂ©cisions nĂ©cessaires, notamment celles qui concernent l'usage des terres communautaires, le travail collectif pour l'entretien des biens communs et les fĂȘtes et rituels qui ponctuent le cycle de l'annĂ©e. Un agent communautaire Ă©lu veille Ă  l'application des dĂ©cisions de l'assemblĂ©e, la convoque en cas d'urgence et fait le lien avec les instances municipales.

Au niveau municipal

Dans chaque commune autonome, ceux qui occupent des fonctions municipales sont Ă©lus par leurs communautĂ©s pour des mandats de deux ou trois ans, rĂ©vocables Ă  tout moment et conçus comme des « charges » (cargos), services rendus ne faisant l’objet d’aucune rĂ©munĂ©ration ni ne donnant lieu Ă  aucun avantage matĂ©riel. Cela crĂ©e un contraste flagrant avec le fonctionnement des institutions constitutionnelles mexicaines, dans lequel le caractĂšre fortement rĂ©munĂ©rateur des fonctions Ă©lectives est l'un des ressorts des luttes d'intĂ©rĂȘt qui caractĂ©risent la vie politique nationale[12]. Cette conception des charges comme services rendus Ă  la communautĂ© s'inscrit dans une tradition amĂ©rindienne largement diffusĂ©e Ă  l'Ă©chelle du continent.

Au niveau de la zone (Conseil de bon gouvernement)

Chaque commune dĂ©lĂšgue des reprĂ©sentants (entre deux et quatre) au Conseil de bon gouvernement de la zone correspondante. Les dĂ©lĂ©guĂ©s au Conseil se relaient par courtes pĂ©riodes (entre une et deux semaines selon les zones), ce qui leur permet de revenir ensuite dans leurs villages, pour continuer Ă  s’occuper de leurs familles et de leurs terres.

Les Conseils de bon gouvernement assument une fonction d'information en recevant les visiteurs qui souhaitent mieux connaĂźtre cette expĂ©rience. Ils Ă©mettent des communiquĂ©s, notamment pour dĂ©noncer les agressions contre les bases d'appui zapatistes[13]. Ils veillent, dans la mesure du possible, aux bonnes relations avec les non zapatistes et avec les autoritĂ©s municipales officielles qui partagent le mĂȘme territoire. Enfin, les Conseils de bon gouvernement veillent, en interaction Ă©troite avec les conseils municipaux, au bon fonctionnement du systĂšme de santĂ© (avec ses cliniques de zone, ses microcliniques et ses agents communautaires[14]) et de l'Ă©ducation autonome.

Mécanismes de prise de décision

Sauf pour les dĂ©cisions trĂšs ponctuelles ou urgentes, le Conseil de bon gouvernement consulte l'AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale de zone (composĂ©e de toutes les autoritĂ©s municipales, des reprĂ©sentants de chaque communautĂ© et des responsables des diffĂ©rents secteurs de travail)[15]. Parfois, cette AssemblĂ©e peut d’elle-mĂȘme indiquer au Conseil la dĂ©cision Ă  prendre. S’il s’agit de projets plus amples ou si aucun accord clair ne se dĂ©gage, il est nĂ©cessaire de consulter l’ensemble des communautĂ©s. Les reprĂ©sentants de chaque communautĂ© doivent mener la consultation dans leurs villages respectifs et faire part Ă  l’assemblĂ©e suivante soit d’un accord, soit d’un refus, soit d’amendements. Ces derniers sont discutĂ©s et l’assemblĂ©e Ă©labore une proposition rectifiĂ©e, qui est Ă  nouveau soumise aux communautĂ©s. Plusieurs allers et retours entre Conseils, AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale de zone et communautĂ©s peuvent ĂȘtre nĂ©cessaires pour qu'une proposition soit acceptĂ©e.

Ressources

Les Conseils de bon gouvernement veillent à l'équilibre des ressources entre les différentes communes de la zone, notamment celles qui proviennent de la solidarité nationale et internationale. Un des traits qui définit de maniÚre particuliÚrement visible le choix de l'autonomie est le refus de toute aide des gouvernements chiapanÚque et mexicain.

L'essentiel des ressources de l'autonomie zapatiste sont auto-financées, grùce à la participation collective des membres de l'EZLN et aux projets productifs collectifs qu'ils développent au niveau des communes ou des zones dans différents domaines (matériaux de construction, ferronnerie, charpenterie, cordonnerie et travail du cuir, textiles traditionnels, entrepÎts et boutiques communautaires, élevage, etc.). Les principales rentrées d'argent proviennent des coopératives artisanales et de la vente de café à travers les réseaux solidaires, nationaux et internationaux.

Une autre source de financement est la perception d'un « impÎt » de 10% lorsque des entreprises de travaux publics réalisent des infrastructures (des routes essentiellement) dans les territoires zapatistes. Il est cependant évident que la base matérielle de l'autonomie reste fragile, malgré l'importance des terres récupérées aprÚs le soulÚvement de 1994 (en particulier dans certaines zones, comme celle de Morelia) et malgré les efforts pour multiplier les projets productifs collectifs[16].

Exercice de la justice

La rĂ©solution des conflits et l’exercice de la justice, qui relĂšvent principalement des autoritĂ©s municipales, peuvent remonter jusqu’aux Conseils de bon gouvernement. Compte tenu des coĂ»ts Ă©levĂ©s qu'implique le recours aux organes de justice de l'État, sans parler de leur profonde corruption, il n'est pas rare que des non zapatistes fassent appel aux Conseils de bon gouvernement et que ceux-ci parviennent Ă  rĂ©soudre des cas difficiles, laissĂ©s de longue date en suspens par les autoritĂ©s constitutionnelles[17]. La conception mĂȘme de la justice est trĂšs diffĂ©rente et clairement ancrĂ©e dans les pratiques traditionnelles indiennes : il s’agit moins d'infliger une punition qui, selon les autoritĂ©s autonomes, ajouterait de nouvelles difficultĂ©s sans rien rĂ©soudre, que de permettre une rĂ©conciliation nĂ©gociĂ©e entre les parties, grĂące Ă  des formes de rĂ©paration au bĂ©nĂ©fice des victimes ou de leur famille, ainsi qu'Ă  des travaux d’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral[18].

Éducation autonome

L'éducation autonome fait l'objet d'une mobilisation particuliÚrement intense. On estime que, dans les cinq zones zapatistes, 500 écoles primaires environ fonctionnaient en 2008, dans lesquelles 1300 enseignants (dénommés « promotores de educacion ») accueillaient quelque 16 000 élÚves[19]. Ces chiffres ont encore augmentés ensuite, et dans la seule zone de Los Altos, on comptait en 2013 158 écoles, 496 enseignants pour 4900 élÚves[20]. Les enseignants ne perçoivent pas de rémunération et leur activité est assimilée à une « charge » (cargo)[21]. Elle implique un engagement en temps si fort que la communauté doit, en contrepartie, couvrir les nécessités matérielles des "promotores", soit en leur remettant les produits alimentaires de base dont ils ont besoin, soit en assurant le travail nécessaire sur leurs parcelles lorsqu'ils en ont.

Autonomie et lutte des femmes

Le rĂŽle des femmes dans la lutte zapatiste est trĂšs important et la transformation de leur mode de vie et des relations de genre est une dimension essentielle de l'autonomie zapatiste. La lutte des femmes zapatistes n'a pas commencĂ© avec l'approfondissement de l'autonomie Ă  partir de 2003 ; elle est mĂȘme antĂ©rieure au soulĂšvement armĂ©. C'est en effet au cours de l'annĂ©e 1993 qu'a Ă©tĂ© approuvĂ©e la Loi rĂ©volutionnaire des femmes, rĂ©sultat d'un travail de nombreuses annĂ©es au cours desquelles les premiĂšres dirigeantes de l'EZLN, dont la commandante Ramona, ont rassemblĂ© la parole des femmes zapatistes quant Ă  leur situation d'oppression et Ă  leurs revendications. Parmi les dix points de la Loi rĂ©volutionnaire des femmes, figurent notamment le droit de choisir librement son conjoint tout comme le nombre d'enfants Ă  avoir, l'interdiction de toute forme de violence conjugale, le droit Ă  l'Ă©ducation ou encore une Ă©gale participation aux charges communautaires ainsi qu'aux instances politiques de l'organisation.

La participation des femmes a commencé dans les rangs de l'armée zapatiste. Certaines ont accédé à des responsabilités importantes : ainsi, c'est la Major Ana Maria qui commandait la prise de San Cristobal de Las Casas, le . Le rÎle de premier plan de ces femmes, mais aussi la détermination quotidienne de trÚs nombreuses insurgées, ont été un facteur important pour transformer le statut des femmes au sein de l'expérience zapatiste. Certaines sont aussi devenues commandantes, membres de l'instance de direction politique de l'EZLN, le CCRI, comme la commandante Esther qui a porté le message principal de l'EZLN à la tribune du parlement fédéral, lors de la Marche de la couleur de la terre, en 2001.

Plus dĂ©cisive encore est la participation des femmes au sein des instances d'auto-gouvernement et dans l'ensemble des domaines d'activitĂ© de l'autonomie. Les obstacles sont importants, qui tiennent Ă  l'attitude de certains hommes mais aussi, bien souvent, aux rĂ©ticences des femmes elles-mĂȘmes. Cependant, les pratiques se modifient rapidement et l'Ă©ducation autonome transmet aux jeunes gĂ©nĂ©rations une conception des relations de genre bien diffĂ©rente de celle de la tradition. Surtout, les responsabilitĂ©s assumĂ©es par les femmes dans tous les domaines de l'autonomie (coopĂ©ratives, santĂ©, Ă©ducation, mĂ©dias, conseils de gouvernement, etc.) transforment les rapports au sein des familles – les femmes s'absentant souvent de leur maison et laissant au mari tĂąches domestiques et soin des enfants. Ainsi, la lutte des femmes zapatistes a grandement contribuĂ© Ă  transformer la vie au sein de l'autonomie, en induisant un attachement critique Ă  la tradition, capable de distinguer les bonnes coutumes et celles dont on veut se dĂ©barrasser[22].

Principes de l'autonomie

On peut considĂ©rer l'autonomie zapatiste comme une forme d'autogouvernement permettant l'exercice d'une dĂ©mocratie radicale (ou tout simplement, d'une dĂ©mocratie au sens plein du terme, dans laquelle le peuple exerce lui-mĂȘme les tĂąches de gouvernement). Il ne s'agit donc en aucun cas d'une autonomie entendu au sens d'une simple dĂ©centralisation des pouvoirs d’État, comme c'est souvent le cas dans les pays europĂ©ens. Il s'agit de la construction d'une autre rĂ©alitĂ© sociale et politique, dans une perspective antisystĂ©mique. Comme dit l'un des membres d'un Conseil de bon gouvernement, « l'autonomie est la construction d'une nouvelle vie »[23].

L'autogouvernement implique que, peu Ă  peu et de maniĂšre rotative, l'ensemble de la population participe aux tĂąches d'organisation de la vie collective. La politique cesse alors d'apparaĂźtre comme une activitĂ© de « spĂ©cialistes »[24] ; elle est, littĂ©ralement, la chose de tous. L'un des principes auxquels se rĂ©fĂšrent les zapatistes est le mandar obedeciendo (gouverner en obĂ©issant). Cet Ă©noncĂ© paradoxal Ă©loigne de la conception habituelle du pouvoir : celui qui exerce une charge de gouvernement doit le faire en obĂ©issant Ă  ceux qu'il doit « diriger ». Pourtant, le mandar obedeciendo n'implique pas une conception strictement horizontale de l'organisation collective (qui supposerait que les assemblĂ©es puissent ĂȘtre consultĂ©es en permanence et constituent la seule source d'initiative collective). Au contraire, ceux Ă  qui l'on confie des charges Ă©minentes au sein des Conseils de bon gouvernement, s'ils doivent consulter les assemblĂ©es autant que possible, jouent nĂ©anmoins un rĂŽle particulier, parce qu'ils doivent parfois prendre des dĂ©cisions urgentes et parce qu'ils ont le devoir de proposer des initiatives pour amĂ©liorer en permanence l'organisation de la vie collective. Enfin, lorsque les dĂ©cisions ont Ă©tĂ© prises, Ă  travers le mĂ©canisme complexe de consultation dĂ©jĂ  indiquĂ©, les autoritĂ©s ont aussi le devoir de faire respecter ce qui a Ă©tĂ© collectivement dĂ©cidĂ© : « l'autoritĂ© commande sans donner d'ordre parce qu'elle le fait en obĂ©issant aux citoyens... Celui qui commande doit obĂ©ir, mais les citoyens doivent aussi obĂ©ir Ă  ce que dit l'autoritĂ© », explique un membre des Conseils[25].

Le « mandar obedeciendo » se décline en plusieurs principes dont le respect contribue à lutter contre la dissociation des gouvernants d'avec le monde des gouvernés (notamment « servir et non se servir », « convaincre et non vaincre », « proposer et non imposer »).

Comme l'expliquent les zapatistes, l'autonomie consiste Ă  « dĂ©couvrir que nous sommes capables de nous gouverner nous-mĂȘmes »[26]. Ce principe va rigoureusement Ă  l'encontre de la sĂ©paration entre gouvernants et gouvernĂ©s, qui est au fondement de l’État moderne. En ce sens, l'expĂ©rience zapatiste suggĂšre la possibilitĂ© d'instaurer des formes non Ă©tatiques de gouvernement.

Le zapatisme comme lutte nationale

Une lutte de tous les peuples indigĂšnes du Mexique

Comme l'indique le nom mĂȘme de l'EZLN, sa lutte est avant tout nationale. L'autonomie ne concerne pas seulement les Mayas du Chiapas. La nĂ©gociation de San AndrĂ©s avait une portĂ©e nationale et les Accords du mĂȘme nom Ă©noncent des droits qui concernent l'ensemble des peuples indigĂšnes du Mexique. Ces Accords auraient dĂ» donner lieu, si le projet prĂ©parĂ© par la commission parlementaire (COCOPA) avait abouti, Ă  une modification de la Constitution mexicaine.

En 1996, l'EZLN a grandement contribuĂ© Ă  la crĂ©ation du CongrĂšs National IndigĂšne, qui rassemble des organisations et des communautĂ©s de presque toutes les ethnies indigĂšnes du pays (plus de cinquante au total). Le CNI se rĂ©unit rĂ©guliĂšrement, au niveau rĂ©gional ou national. Sa plus rĂ©cente rĂ©union nationale s'est tenue Ă  San Cristobal de Las Casas, les 17 et ; elle a pris le nom de « Chaire tata Juan Chavez », en l'honneur de l'un des fondateurs du CNI, dĂ©cĂ©dĂ© un an auparavant (il appartenait Ă  l'ethnie purĂ©pecha, dans l'État du MichoacĂĄn).

De multiples initiatives nationales

La lutte de l'EZLN n'a jamais prétendu s'enfermer dans une dimension chiapanÚque. La PremiÚre Déclaration de la Selva lacandona, le , était une déclaration de guerre lancée au gouvernement fédéral et appelait à destituer le président Salinas de Gortari[27]. Ensuite, les initiatives nationales n'ont cessé de s'enchaßner. On ne mentionne ici que les principales.

En , l'EZLN convoque la Convention Nationale DĂ©mocratique, qui a lieu dans la Selva lacandona, Ă  Guadalupe Tepeyac. 6000 dĂ©lĂ©guĂ©s d’organisations reprĂ©sentant tous les secteurs de la gauche mexicaine y prennent part.

Le , la QuatriÚme Déclaration de la Selva Lacandona invite à créer le Frente Zapatista de Liberación Nacional (Front Zapatiste de Libération Nationale)[28]. Celui-ci est conçu comme une force politique civile non électorale. Divers secteurs de la gauche convergent dans ce mouvement et plusieurs organisations politiques (notamment trotskistes) décident de s'y intégrer. En raison de problÚmes d'organisation, le FZLN se dissout en 2005.

Il laisse place Ă  l'Autre Campagne, lancĂ©e en 2005. La SixiĂšme DĂ©claration de la Selva Lacandona propose en effet de crĂ©er un rĂ©seau de lutte, rassemblant organisations, collectifs et individus de tout le Mexique, sur la base de deux principes : une posture clairement anticapitaliste et un refus de la politique d'en-haut (celle qui est centrĂ©e sur l'État et le jeu des partis)[29]. Durant l'Ă©tĂ© 2005, sept rencontres ont lieu dans la Selva lacandona afin de constituer ce rĂ©seau: elles rassemblent des membres de partis non-Ă©lectoraux, de syndicats, d'ONG, d'organisations paysannes, de collectifs urbains, de groupes libertaires, fĂ©ministes, etc. Durant l'annĂ©e 2006, le sous-commandant Marcos parcourt une bonne partie du Mexique, afin d'Ă©couter et d'apprendre des luttes en cours, dans toute la gĂ©ographie du pays. Sur ce pĂ©riple et les liens nouĂ©s alors, on peut voir le trĂšs Ă©clairant documentaire du rĂ©alisateur français Nicolas DefossĂ©, Viva MĂ©xico!

En , et , « l'Escuelita zapatista » a permis Ă  des milliers de personnes de vivre durant une semaine dans les villages zapatistes et de dĂ©couvrir directement en quoi consiste la construction de l'autonomie. Elle Ă©tait ouverte Ă  tous les mexicains et non mexicains intĂ©ressĂ©s et dĂ©sireux d'observer et d'apprendre[30] - [31]. Mais l'intention est claire : il s'agit de suggĂ©rer Ă  tous qu'il est possible de s'inspirer de cette expĂ©rience, de s'organiser et de commencer Ă  construire, ailleurs, une autre rĂ©alitĂ© sociale. Les zapatistes posent Ă  tous les mexicains (et non mexicains) venus Ă  l'Escuelita la question suivante : « et vous, vous sentez-vous libres ? »[32]. Eux, se sentent libres, expliquent-ils, car ils dĂ©cident eux-mĂȘmes de leur forme d'organisation collective et la mettent en Ɠuvre.

En , l'EZLN a lancĂ© une nouvelle dynamique en lien avec le CongrĂšs National IndigĂšne, afin de constituer un Conseil IndigĂšne de Gouvernement, au niveau national. Celui-ci a Ă©tĂ© formĂ© en mai de la mĂȘme annĂ©e, Ă  l'issue d'un processus d'Ă©lection de dĂ©lĂ©guĂ©s dans toutes les rĂ©gions du Mexique[33]. Il a choisi MarĂ­a de JesĂșs Patricio MartĂ­nez, plus connue sous le nom de Marichuy, comme porte-parole, afin qu'elle tente de prĂ©senter sa candidature Ă  l'Ă©lection prĂ©sidentielle de 2018. Cette proposition a suscitĂ© de nombreuses polĂ©miques et a parfois Ă©tĂ© interprĂ©tĂ©e comme un revirement de l'EZLN, jusque-lĂ  trĂšs Ă©loignĂ© des stratĂ©gies Ă©lectorales. Mais cette candidature ne devait pas ĂȘtre comprise comme un ralliement Ă  la voie institutionnelle mais plutĂŽt comme un moyen de renforcer la lutte des peuples indigĂšnes pour la dĂ©fense de leurs territoires et de faire Ă©merger plus fortement la pertinence de la voie politique de l'autonomie. Il ne s'agissait nullement de chercher Ă  « prendre le pouvoir », mais au contraire de « dĂ©monter d'en bas le pouvoir d'en haut ».

Ne pas séparer indigÚnes et non-indigÚnes

Le soulĂšvement zapatiste de 1994 a suscitĂ© de trĂšs amples sympathies et a eu un impact considĂ©rable sur la sociĂ©tĂ© mexicaine. Il a contribuĂ© Ă  la faire Ă©voluer, notamment en ce qui concerne la question autochtone. L'insurrection a fait voler en Ă©clats l'image rassurante d'une nation mĂ©tis qui aurait su donner sa juste place aux peuples originaires; elle a montrĂ© au contraire la situation de marginalitĂ©, et plus encore le racisme interne, dont Ă©taient victimes les peuples autochtones[34]. Elle a rendu aux Autochtones, mĂȘme non zapatistes, un vif sentiment de dignitĂ© et a rendu le racisme Ă  leur encontre plus honteux (Ă  dĂ©faut d'avoir pu l'Ă©radiquer entiĂšrement). La Marche de la dignitĂ© indigĂšne, en fĂ©vrier-, a certainement constituĂ© le moment le plus fort de l'impact national du zapatisme, aprĂšs quoi l'Ă©chec de la revendication d'une reconnaissance constitutionnelle des droits indigĂšnes et l'abandon de nombreux secteurs ayant jusque-lĂ  soutenu la lutte zapatiste ont contraint l'EZLN Ă  se replier momentanĂ©ment vers la construction de l'autonomie dans les territoires contrĂŽlĂ©s par elle, avant de reprendre d'autres initiatives nationales. Il importe de souligner que les zapatistes se sont toujours dissociĂ©s d'une perspective strictement ethniciste. Ils manifestent le souci de ne pas Ă©riger de sĂ©paration Ă©tanche entre indigĂšnes et non indigĂšnes. Par exemple, dans une lettre Ă  une organisation indigĂšne du Guerrero, l'EZLN dĂ©livre son message « en notre nom, en votre nom, au nom de tous les indigĂšnes du Mexique, au nom de tous les indigĂšnes et non-indigĂšnes mexicains, au nom de tous les hommes bons et de bon chemin »[35]. Et si la Marche de 2001 Ă©tait celle de la « dignitĂ© indigĂšne », elle a Ă©tĂ© en mĂȘme temps dĂ©finie comme « la marche des indigĂšnes et des non indigĂšnes », « couleur avec toutes les couleurs qui revĂȘtent la terre », « toutes les couleurs qu’en-bas nous sommes »[36]. L’EZLN est donc un mouvement indigĂšne qui refuse de s’enfermer dans une perspective strictement ethnique[37], rejetant toute idĂ©alisation ou essentialisation d’une supposĂ©e « identitĂ© » indigĂšne, afin de promouvoir une conception ouverte de l’ethnicitĂ©, articulĂ©e Ă  la dimension sociale et englobĂ©e dans une perspective politique plus vaste qui associe indigĂšnes et non indigĂšnes[38].

Zapatisme international, lutte pour l'humanité, pour la planÚte Terre et pour la vie

La Rencontre intercontinentale de 1996

Tout en exprimant sa volonté de sauver la nation de la destruction néolibérale[39] et en manifestant une adhésion fervente au sentiment nationaliste si puissant au Mexique, l'EZLN se caractérise aussi par une perspective nettement internationaliste.

OrganisĂ©e au Chiapas en juillet-, la Rencontre Intercontinentale pour l’HumanitĂ© et contre le NĂ©olibĂ©ralisme (dite, avec humour, « Rencontre Intergalactique »), a rĂ©uni prĂšs de 5 000 personnes venues de 42 pays[40]. À cette occasion, les zapatistes ont lancĂ© une invitation Ă  « construire l’internationale de l’espĂ©rance... par-dessus les frontiĂšres, les langues, les couleurs, les cultures, les sexes », tout en soulignant que « la dignitĂ© est cette patrie sans nationalitĂ©, cet arc-en-ciel qui est aussi un pont, ce murmure du cƓur qui ne se soucie pas du sang qui le vit, cette irrĂ©vĂ©rence rebelle qui se moque des frontiĂšres, des douanes et des guerres »[41].

On peut affirmer que cette rencontre, ainsi que les rencontres continentales qui avaient contribué à sa préparation (à Berlin, pour l'Europe), a marqué un réveil de l'activité anti-systémique internationale, aprÚs plusieurs décennies d'assoupissement. Elle est souvent considérée comme un antécédent et une source d'inspiration pour les mouvements altermondialistes qui ont pris leur essor à partir des mobilisations de Seattle, en 1999. Nombreux sont les participants de cette mouvance qui soulignent l'importance de ce précédent[42].

Autres rencontres internationales

Une seconde Rencontre Intercontinentale pour l'Humanité et contre le Néolibéralisme a été organisée en Catalogne durant l'été 1997. Son écho a été moins important. Entre le et le , l'EZLN a organisé au Chiapas trois Rencontres des peuples zapatistes avec les peuples du monde. En -, l'EZLN a organisé le Festival mondial de la digne rage (México-Oventik-San Cristobal de Las Casas) et, en -, le Festival mondial des résistances et des rébellions.

Les réseaux internationaux de solidarité

À partir de 1994-1996, des comitĂ©s de solidaritĂ© avec la lutte zapatiste se sont crĂ©Ă©s dans de nombreux pays, principalement en Europe, ainsi que du nord au sud du continent amĂ©ricain. Ce mouvement a Ă©tĂ© particuliĂšrement fort dans l'État espagnol, en Italie et en Argentine, entre autres[43]. Ces comitĂ©s et collectifs solidaires ont contribuĂ© Ă  faire connaĂźtre la lutte zapatiste, Ă  diriger vers le Chiapas des appuis solidaires et Ă  organiser des campagnes internationales pour dĂ©noncer les attaques et agressions contre les communautĂ©s rebelles ou rĂ©clamer la libĂ©ration de prisonniers politiques. Ils ont Ă©galement contribuĂ© Ă  orienter des volontaires pour participer aux « campements civils d'observation », mis en place dans les villages zapatistes aprĂšs l'intervention militaire fĂ©dĂ©rale de . Certains d'entre eux ont Ă©galement dĂ©veloppĂ© des formes de distribution solidaire des produits zapatistes, comme le cafĂ© ou l'artisanat. On a pu parler Ă  propos de ces rĂ©seaux d'un « zapatisme international »[44].

Au-delà de ces réseaux organisés, l'influence du zapatisme s'étend loin. La référence au zapatisme est souvent apparu dans le mouvement des indignés espagnol ou lors du mouvement Occupy Wall Street. Pour donner un exemple plus lointain encore, l'ouvrage en quatre volumes coordonné par l'indienne Corinne Kumar, fondatrice du Tribunal mondial des femmes, et consacré au Sud comme nouvel imaginaire politique a pour titre Asking we walk (une traduction du principe zapatiste « caminar preguntando ») et fait une large place à l'expérience zapatiste[45].

« La Sexta », aujourd'hui

La SixiÚme Déclaration de la Selva lacandona, en 2005, avait donné lieu à la création d'un maillage de lutte au Mexique, l'Autre Campagne. Les adhérents non-mexicains à cette Déclaration étaient, quant à eux, rassemblés au sein de la « Zezta Internazional » (dénomination ironique, par la conscience affichée de ne pas respecter la numération des Internationales dûment répertoriées par l'Histoire).

Depuis la marche du , une nouvelle phase de la lutte zapatiste s'est ouverte. Comme il a été annoncé dans la série de communiqués intitulés Eux et nous, il est mis fin à la séparation, établie depuis 2005 entre « l'Autre campagne » et la « Zezta Internacional »[46]. Cette distinction entre la dimension nationale et la dimension internationale est écartée, pour faire place à un seul ensemble, « La Sexta », définie comme un réseau planétaire de luttes anticapitalistes. « La Sexta » se donne un seul terrain d'action : la planÚte Terre.

Une lutte pour l'humanité

La perspective internationale de la lutte zapatiste et son refus de tout enfermement dans le cadre national sont patents. C'est au vieil Antonio, Ă  qui le sous-commandant Marcos attribue le mĂ©rite de l'avoir introduit dans l'univers culturel indien, que ce dernier confie le soin de dĂ©noncer avec le plus de force l'arbitraire des frontiĂšres et la relativitĂ© des appartenances nationales : « Au lieu de se passionner pour la xĂ©nophobie, le vieil Antonio prenait du monde entier tout ce qui lui paraissait bon, sans qu’importe la terre qui l’avait fait naĂźtre. Lorsqu’il se rĂ©fĂ©rait aux personnes bonnes d’autres nations, le vieil Antonio utilisait le mot « les internationaux » ; et le terme « les Ă©trangers », il l’utilisait seulement pour les Ă©trangers au cƓur, sans qu’importe qu’ils fussent de la mĂȘme couleur, langue et race que lui. « Parfois, jusque dans le mĂȘme sang, il y a des Ă©trangers », disait le vieil Antonio pour m’expliquer l’absurde bĂȘtise des passeports »[47].

L'appel Ă  constituer un maillage planĂ©taire de luttes repose sur le constat que tous les peuples affrontent un ennemi commun, le nĂ©olibĂ©ralisme, qui n'est rien d'autre que le nom de la forme actuelle du capitalisme. Selon le sous-commandant Marcos, l'offensive du nĂ©olibĂ©ralisme contre tous les peuples du monde peut ĂȘtre qualifiĂ©e de « quatriĂšme guerre mondiale »[48]. Le zapatisme se dĂ©finit bien comme une lutte « pour l'humanitĂ© », mais aussi pour la dĂ©fense de la Terre-mĂšre.

La lutte des femmes

La lutte pour l'humanitĂ© ne serait pas complĂšte si elle n'Ă©tait en mĂȘme temps une lutte contre les oppressions sĂ©culaires, spĂ©cifiquement subies par les femmes. PrĂ©sente dĂšs les dĂ©buts du soulĂšvement (voir plus haut), cette dimension n'a cessĂ© de prendre une importance croissante dans l'expĂ©rience zapatiste. Ainsi, en , dans le caracol de Morelia, une Rencontre internationale des femmes qui luttent a rassemblĂ© 7000 femmes de 38 pays[49]. Au-delĂ  du fait que les hommes ne pouvaient y assister, il est notable que son organisation ait Ă©tĂ© entiĂšrement assumĂ©e par les femmes zapatistes, ce qui a constituĂ© un moment majeur d'affirmation collective. Une seconde rencontre, avec des caractĂ©ristiques similaires, a Ă©tĂ© organisĂ©e en . Et on peut relever que la dĂ©lĂ©gation zapatiste qui doit se rendre en Europe en 2021 sera composĂ©e aux trois-quarts de femmes.

Voyage vers les cinq continents et « Déclaration pour la vie »

En , par un communiquĂ© intitulĂ© « Une montagne en haute mer », les zapatistes ont annoncĂ© qu'ils allaient entreprendre un voyage vers les cinq continents, en commençant par l'Europe[50]. Le , ils ont confirmĂ© ce pĂ©riple en rendant publique une « DĂ©claration pour la vie », co-signĂ©e par l'EZLN et par des centaines de collectifs, organisations et personnes du continent europĂ©en, du Mexique et d'autres pays encore[51]. AccompagnĂ©e par une dĂ©lĂ©gation du CongrĂšs national indigĂšne, ainsi que du Front des Peuples en DĂ©fense de l'Eau et de la Terre des États de Morelos, Puebla et Tlaxcala, actuellement en lutte contre un mĂ©ga-projet de centrale thermo-Ă©lectrique, la dĂ©lĂ©gation zapatiste sera formĂ©e de plus d'une centaine de membres. Elle parcourra l'Europe de juillet Ă  Ă  la rencontre des rĂ©sistances et des rĂ©bellions du continent, afin de poursuivre et d'amplifier les liens d'interconnaissance nouĂ©es jusque-lĂ  Ă  travers les nombreux visiteurs qui avaient pu se rendre au Chiapas. C'est par ces Ă©changes et ces rencontres que peut se tisser le rĂ©seau planĂ©taire de luttes auquel les zapatistes en appellent de longue date, afin de dĂ©fendre la vie.

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  • JĂ©rĂŽme Baschet, La RĂ©bellion zapatiste. Insurrection indienne et rĂ©sistance planĂ©taire, Paris, Champs-Flammarion, nouvelle Ă©dition mise Ă  jour avec une postface inĂ©dite, 2019.
  • Benjamin Ferron, "A Heretical Accumulation of International Capital. The Zapatista Activists' Media Network." In: A. C. Pertierra & J. F. Salazar (eds.). //Media cultures in Latin America: key concepts and new debates//. New York, NY : Routledge, Taylor & Francis Group.

Voir aussi

Articles connexes

Notes et références

  1. « Le zapatisme n'est pas une nouvelle idéologie politique, ni un réchauffé de vieilles idéologies... le zapatisme n'appartient à personne, et pour cela, il est à tout le monde », Sous-commandant Marcos, Invitation à la Rencontre intercontinentale pour l'humanité et contre le néolibéralisme, mai 1996 (version espagnole EZLN. Documentos y comunicados, México, Era, vol. 3, p. 258).
  2. Un bilan informatif a été réalisé, à l'occasion du vingtiÚme anniversaire du soulÚvement zapatiste par la célÚbre journaliste mexicaine Carmen Aristegui : http://aristeguinoticias.com/ezln-20-anos-de-alzamiento-en-chiapas/. En français, voir le dossier « Les 20 ans de la rébellion zapatiste », du mensuel Demain le monde, no 23, janvier-février 2014, http://www.cncd.be/dlm-Demain-le-monde-no23.
  3. (es) Gustavo Esteva, « 20 años despuĂ©s. El alzamiento zapatista », Proceso, no 43,‎ , p. 38. On trouve dans ce numĂ©ro de nombreuses analyses, notamment de chercheurs spĂ©cialistes du Chiapas et de l'AmĂ©rique latine, comme Yvon Le Bot ou Neil Harvey. (es) Pablo Gonzalez Casanova, « GonzĂĄlez Casanova: las comunidades originarias estĂĄn redefiniendo el mundo », La Jornada,‎ (lire en ligne). (es) RaĂșl Zibechi, « El Ya Basta! en AmĂ©rica latina », La Jornada,‎ (lire en ligne).
  4. Les zapatistes dĂ©nomment Caracoles (escargot) les cinq centres politico-culturels servant de lieux de rĂ©union et oĂč se trouvent le siĂšge de chaque Conseil de bon gouvernement.
  5. « Ruptura del cerco », EZLN. Documentos y comunicados, Mexico, Era, 1994-2001, vol. 2, p. 179-182.
  6. « Escuelita zapatista », Cideci-Unitierra, août 2013 : explications des « maestros » zapatistes.
  7. « Devant la farce des parlementaires mexicains, l’EZLN cesse le dialogue avec le gouvernement de Fox », ComitĂ© de solidaritĂ© avec les peuples du Chiapas en lutte,‎ (lire en ligne)
  8. Chiapas, la treiziĂšme stelle, consultable en ligne http://cspcl.ouvaton.org/article.php3?id_article=56.
  9. Ibidem.
  10. A cette occasion, 4 fascicules de prÚs de 80 pages chacun ont été publiés: Gobierno autónomo I, Gobierno autónomo II, Resistencia autónoma et Participación de las mujeres en el gobierno autónomo.
  11. EZLN, « Et nous avons brisé l'encerclement »
  12. Voir Paulina FernĂĄndez, « Gobierno autĂłnomo zapatista. CaracterĂ­sticas antisistema polĂ­tico mexicano », communication lors du I Seminario Internacional de reflexiĂłn In memoriam AndrĂ©s Aubry « 
 Planeta Tierra : movimientos antisistĂ©micos... », Universidad de la Tierra, San CristĂłbal de Las Casas, 30 dĂ©cembre 2009-2 janvier 2010 et « El Compa Jolil, o las motivaciones de los autoridades autĂłnomos zapatistas », communication lors du II Seminario Internacional de reflexiĂłn In memoriam AndrĂ©s Aubry « 
 Planeta Tierra : movimientos antisistĂ©micos... », Universidad de la Tierra, San CristĂłbal de Las Casas, 30 dĂ©cembre 2011-2 janvier 2012.
  13. Ces communiqués sont diffusés sur la page « Enlace zapatista » : .
  14. Voir les articles rassemblés dans la partie IV de l'ouvrage collectif : Bruno Baronnet, Mariana Mora Bayo et Richard Stahler-Sholk (coord.), Luchas « muy otras ». Zapatismo y autonomía en las comunidades indígenas de Chiapas, Mexico-San Cristóbal de Las Casas, UAM-CIESAS-UNACH, 2011.
  15. Le mécanisme de prise de décision est exposé dans Gobierno autonomo I.
  16. Pour un bilan de l'autonomie en matiÚre productive, voir Richard Stahler-Sholk, « Autonomía y economía política de resistencia en Las Cañadas de Ocosingo », dans Luchas muy otras, op. cit., p. 409-445.
  17. Sur la justice autonome, voir Paulina FernĂĄndez, Justicia AutĂłnoma Zapatista. Zona Selva Tzeltal, MĂ©xico, Ediciones autĂłnom@s, 2014.
  18. Gobierno autonomo II, op. cit., p. 6-7 et 38-39.
  19. Bruno Baronnet, AutonomĂ­a y educaciĂłn indĂ­gena. Las escuelas zapatistas de la Selva Lacandona en Chiapas, MĂ©xico, Quito, Abya-Yala, (lire en ligne)
  20. Gobierno autonomo I, op. cit., p. 26.
  21. Bruno Baronnet, « Entre el cargo comunitario y el compromiso zapatista. Les promotores de educación autónoma en la zona Selva Tseltal », dans Luchas muy otras, op. cit., p. 195-235.
  22. « Nous savons quelles coutumes sont bonnes et lesquelles sont mauvaises », commandante Esther à la tribune du parlement fédéral, le 28 mars 2001, http://enlacezapatista.ezln.org.mx/2001/03/28/discurso-de-la-comandanta-esther-en-la-tribuna-del-congreso-de-la-union/.
  23. Cité par Mariana Mora Bayo, Decolonizing Politics: Zapatista Indigenous Autonomy in an Era of Neoliberal Governance and Low Intensity Warfare, Ph.D. University of Texas, Austin, 2008.
  24. Sous-commandant Marcos: « nous voulons en finir avec l'idée que gouverner est une affaire de spécialistes » (Corte de Caja. Entrevista al subcomandante Marcos, Mexico, Bunker, 2008, p. 42).
  25. Cité dans Mariana Mora, Decolonizing Politics, op. cit.
  26. Explications des maestros zapatistes, durant l'Escuelita (Cideci-Universidad de la Tierra, août 2013).
  27. « PremiĂšre dĂ©claration de la forĂȘt Lacandone », ComitĂ© de solidaritĂ© avec les peuples du Chiapas en lutte,‎ (lire en ligne)
  28. « QuatriĂšme dĂ©claration de la forĂȘt Lacandone », ComitĂ© de solidaritĂ© avec les peuples du Chiapas en lutte,‎ (lire en ligne)
  29. « SixiĂšme dĂ©claration de la forĂȘt Lacandone », ComitĂ© de solidaritĂ© avec les peuples du Chiapas en lutte,‎ (lire en ligne)
  30. « À la recherche d’un vieil Antonio Ou l’apprentissage du « nous » », sur lavoiedujaguar.net,
  31. « Los zapatistas, el arte de construir un mundo nuevo: RaĂșl Zibechi », sur desinformemonos.org,
  32. Maestros de l'Escuelita zapatista (Cideci-Universidad de la Tierra, août 2013). Voir aussi, Jean Robert, En el espejo de la Escuelita zapatista. Por un sentido comun controversial, San Cristobal de Las Casas, Cideci-Unitierra, 2013.
  33. CNI, « Conseil indigÚne de gouvernement »
  34. La notion de « colonialisme interne » a été forgée par le sociologue Pablo Gonzalez Casanova, dans Sociologia de la explotación, México, Grijalbo, 1969.
  35. Communiqué du 1er février 1994, EZLN. Documentos y comunicados, op. cit., vol. 1, p. 119.
  36. Intervention du sous-commandant Marcos à Puebla, 27 février 2001, ibid., vol. 5, p. 143 et Intervention sur la place centrale de Mexico, 11 mars 2001, ibid., p. 224-225. Voir également La Fragile Armada. La marche des zapatistes, Paris, Métailié, 2001.
  37. Sur ce trait, partagé par de nombreux mouvements indiens du continent, voir Yvon Le Bot, La grande révolte indienne, Paris, Robert Laffont, 2009.
  38. Pour une mise en dĂ©bat des approches contrastĂ©es du zapatisme, voir JĂ©rĂŽme Baschet, « Les zapatistes : ‘ventriloquie indienne’ ou interactions crĂ©atives? » et Pedro Pitarch, « Ventriloquie confuse », dans ProblĂšmes d’AmĂ©rique latine, 61-62, 2006.
  39. Notamment dans la SixiĂšme DĂ©claration de la Selva lacandona
  40. Chroniques intergalactiques. PremiÚre Rencontre Intercontinentale pour l'Humanité et contre le Néolibéralisme, Paris, Aviva Presse, 1997.
  41. PremiÚre Déclaration de La Realidad pour l'humanité et contre le néolibéralisme, EZLN. Documentos y comunicados, op. cit., vol. 3, p. 126. En français: .
  42. Sur ce point, voir Guiomar Rovira, Zapatistas sin fronteras. Las redes de solidaridad con Chiapas y el altermundialismo, Mexico, Era, 2009.
  43. Pour la France, voir notamment le site du Comité de Solidarité avec les Peuples du Chiapas en Lutte, .
  44. Sur les réseaux internationaux du zapatisme, voir le livre de Guiomar Rovira, Zapatistas sin fronteras, op. cit., ainsi que T. Olesen, International zapatism, Londres, Zed Books 2005 ; B. Ferron, La communication internationale du zapatisme (1994-2006), Rennes, Presses Universitaires de Rennes, Res Publica, 2015, B. Ferron, "A Heretical Accumulation of International Capital. The Zapatista Activists' Media Network." In: A. C. Pertierra & J. F. Salazar (eds.). Media cultures in Latin America: key concepts and new debates. New York, NY : Routledge, Taylor & Francis Group.; Xochitl Leyva Solano, « Nuevos procesos sociales y políticos en América Latina », dans Raphael Hoetmer (coord.), Repensar la Política desde América Latina: Política, Cultura, Democracia Radical y Movimientos Sociales, Lima, 2008 et « Entrevista de Ana Esther Ceceña con Adelina Bottero, Luciano Salza, Friederike Habermann, Marc Tomsin, Massimo de Angelis y Ulrich Brand », Chiapas (UNAM), 4, 1997 (Traduction partielle disponible sur le site de « La voie du jaguar » : .
  45. Corinne Kumar (coord.), Asking we walk. The South as new political imaginary, Bangalore (Inde), 2007, 4 volumes; voir en particulier dans le volume 2, Claudia von Werlhof, « Questions to Ramona », p. 249-268 et Gustavo Esteva, « Celebration of Zapatismo », p. 387-413.
  46. Sous-commandants Marcos et Moisés, Eux et nous, Paris, Editions de l'escargot, 2013.
  47. Cité dans JérÎme Baschet, La rébellion zapatiste. Insurrection indienne et résistance planétaire, Paris, Champs-Flammarion, 2019, p. 266.
  48. Sous-commandant Marcos, « La quatriÚme guerre mondiale a commencé », Le Monde diplomatique, août 1997.
  49. EZLN, « Paroles de clÎture de la Rencontre internationale des femmes qui luttent »
  50. EZLN, « SixiÚme partie: Une montagne en haute mer »
  51. EZLN et nombreux collectifs, organisations et individus, « Déclaration pour la vie »
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