AccueilđŸ‡«đŸ‡·Chercher

Blocus autochtone anti-gazoduc de 2020 au Canada

Les blocus et manifestations anti-gazoduc de 2020 au Canada constituent une série de protestations contre le projet de construction du gazoduc Coastal GasLink sur les territoires du peuple Wet'suwet'en dans la province de la Colombie-Britannique.

Blocus autochtone anti-gazoduc
Informations
Date -
Localisation Drapeau du Canada Canada
Caractéristiques
Organisateurs Aucun (mouvement sans structuration hiérarchique)
Participants
  • Bureau des chefs hĂ©rĂ©ditaires des WetÊŒsuwetÊŒen
  • Union des chefs indiens de la Colombie-Britannique
  • Micmacs, Mohawks
Revendications Abandon du projet de gazoduc Coastal GasLink
Issue Retrait des blocus, le gazoduc demeure en projet

Le projet et ses contestations

Le gazoduc Coastal GasLink (CGL) a pour objectif d’acheminer du gaz provenant de Dawson Creek, au nord-est de la Colombie-Britannique jusqu’à Kitimat, situĂ©e au nord-ouest de la province. Il s'agit d'un gazoduc long d’environ 670 km[1], dont le trajet passe par les territoires ancestraux des peuples autochtones Wet'suwet'en. Parmi l’ensemble des gazoducs construits au Canada, il est celui dont le coĂ»t est le plus Ă©levĂ© : de 6,2 Ă  6,6 milliards de dollars canadiens, selon les sources[2] - [3].

Voir ici pour une représentation du passage du gazoduc en territoire Wet'suwet'en.

Depuis plusieurs annĂ©es, ce projet fait l'objet de vives critiques[4], non seulement au sein des Wet'suwet'en, mais plus largement au Canada et dans le reste du monde, oĂč de nombreuses actions de protestation sont menĂ©es par des groupes autochtones ainsi que des militants et des experts, autochtones et allochtones. Les protestations prennent plusieurs formes, notamment des blocages, des campements, des occupations et des marches.

Les acteurs du projet et de la contestation

Les Wet'suwet'en

Les Wet’suwet’en constituent un peuple autochtone que les mĂ©canismes de gouvernance divisent en deux groupes : les Wet’suwet’en Nations et les Wet’suwet’en First Nations.

Les Wet’suwet’en First Nations sont formĂ©s, en tant que groupe, Ă  la suite de la Loi sur les Indiens de 1876. Ils ont Ă  leur tĂȘte des chefs de bande Ă©lus, qui soutiennent tous la construction du gazoduc.

Les Wet’suwet’en Nations, quant Ă  eux, sont composĂ©s de cinq clans, rĂ©partis sur une superficie d’environ 22 000 km2[5]. Dans chaque clan, il y a deux ou trois maisons. C’est au niveau de la maison qu’est nommĂ© un chef hĂ©rĂ©ditaire, selon un processus traditionnel. Au total, il y a 13 maisons, dont quatre siĂšges de chefs hĂ©rĂ©ditaires vacants. Neuf maisons ont donc un chef hĂ©rĂ©ditaire Ă  leur tĂȘte, et huit de ces chefs ont dĂ©sapprouvĂ© le projet de gazoduc. Seul Samooh (Herb Naziel), chef hĂ©rĂ©ditaire des Kayex (Birchbark house) est demeurĂ© neutre[6].

Au sein des Wet’suwet’en Nations, des divergences de points de vue font Ă©merger la formation d’une coalition matrilinĂ©aire menĂ©e par trois femmes, Gloria George, Darlene Glaim et Theresa Tait-Day[6]. Ces femmes qui, se sont vues privĂ©es de leur titre de chef hĂ©rĂ©ditaire Ă  la crĂ©ation de leur coalition, dĂ©sapprouvent le processus de prise de dĂ©cision des Wet'suwet'en Nations : elles rĂ©clament une plus grande ouverture Ă  la discussion de la part des chefs hĂ©rĂ©ditaires, et dĂ©plorent la domination masculine en leur sein. Ces femmes sont favorables Ă  la rĂ©alisation de projets sur le territoire Wet’suwet’en[6]. Elles sont toutefois contestĂ©es par d’autres femmes, qui soutiennent les chefs hĂ©rĂ©ditaires dans le projet de gazoduc[3].

Les principales institutions publiques et politiques canadiennes impliquées dans le projet

Le gouvernement de la Colombie-Britannique est impliqué dans la controverse actuelle car le tracé du gazoduc se trouve entiÚrement dans sa province. De plus, les manifestations contre le projet ont débuté en Colombie-Britannique, bien avant de s'élargir dans le reste du pays[7].

Le gouvernement fĂ©dĂ©ral canadien est concernĂ© par la controverse actuelle en raison de la dimension fĂ©dĂ©rale et internationale prise par la protestation, ainsi que des engagements du premier ministre Justin Trudeau en faveur de la RĂ©conciliation avec les peuples autochtones du Canada : il est attendu du gouvernement fĂ©dĂ©ral qu’il se prononce et aide Ă  une sortie de crise[5].

La Gendarmerie royale du Canada (GRC) est une actrice majeure dans la crise actuelle. Elle est intervenue à plusieurs reprises pour déloger les blocages et occupations des manifestants. Ses interventions armées sont par ailleurs fortement critiquées[1].

Les cours suprĂȘmes de Colombie-Britannique et du Canada ont rendu plusieurs jugements, de portĂ©e contradictoire, sur la poursuite du projet CGL[8] - [9].

TC Énergie et les investisseurs dans le projet CGL

TC Énergie (anciennement sociĂ©tĂ© TransCanada) est la compagnie chargĂ©e de la mise en Ɠuvre du projet CGL. Elle est fondĂ©e en 1951 afin de construire le gazoduc de TransCanada, qui transporte du gaz provenant des provinces de l’Ouest vers l’Est du Canada. Au fil du temps, la compagnie s’est diversifiĂ©e (pipelines, pĂ©trole, production d'Ă©lectricitĂ©) tout en demeurant dans le secteur de l'Ă©nergie[10]. En 2019, TC Énergie se dĂ©fait de la majoritĂ© de ses parts dans le projet de gazoduc[11] - [5]; plusieurs investisseurs se sont par consĂ©quent impliquĂ©s, notamment Shell Canada, Aimco, et LMG[1].

ÉvĂ©nements

Chronologie

La chronologie suivante rĂ©sume les principaux Ă©vĂ©nements depuis la dĂ©livrance de l’injonction judiciaire de la Cour suprĂȘme faite Ă  l’entreprise TC Énergie, de mener Ă  terme le projet Coastal Gaslink[12] - [13] :

  • : la Cour suprĂȘme de Colombie-Britannique dĂ©livre une injonction judiciaire provisoire Ă  Coastal GasLink. Les protestataires sont sommĂ©s de libĂ©rer le passage pour la compagnie CGL
  • : la GRC dĂ©mantĂšle les barrages de protestation en territoire Wet'suwet'en et procĂšde Ă  l'arrestation de 14 personnes autochtones
  • : la Cour suprĂȘme de Colombie-Britannique dĂ©livre une seconde injonction judiciaire interdisant aux Wet'suwet'en d'approcher le pĂ©rimĂštre du chantier de construction
  • : les nĂ©gociations entre le gouvernement de Colombie-Britannique et les chefs hĂ©rĂ©ditaires dĂ©bouchent sur une impasse
  • : les Wet'suwet'en en appellent Ă  un mouvement de protestation solidaire Ă  travers le Canada
  • : les barrages ferroviaires se mettent en place Ă  travers le Canada
  • : la GRC procĂšde au dĂ©mantĂšlement de barrages et Ă  l'arrestation de 47 protestataires
  • : le premier ministre canadien Justin Trudeau demande l'arrĂȘt des blocages et l'application des injonctions judiciaires de Colombie-Britannique
  • 22- : nouvelles vagues de protestation Ă  travers le Canada
  • : nouvelles nĂ©gociations entre les chefs hĂ©rĂ©ditaires et le gouvernement fĂ©dĂ©ral; les activitĂ©s de CGL sont suspendues.
  • : l'annonce d'un possible accord par un chef hĂ©rĂ©ditaire dĂ©clenche une nouvelle vague de protestations.
  • Depuis mi- : les protestations sont suspendues en raison de la pandĂ©mie de Covid-19. La construction du gazoduc considĂ©rĂ©e comme une activitĂ© essentielle, se poursuit.

Évolutions rĂ©centes

Le , la ministre fĂ©dĂ©rale des Relations Couronne-Autochtones Carolyn Bennett, et le ministre des Relations autochtones et de la RĂ©conciliation de la Colombie-Britannique Scott Fraser entament des nĂ©gociations avec les chefs hĂ©rĂ©ditaires Wet’suwet’en. Ces nĂ©gociations permettent un apaisement du conflit : la GRC Ă©vacue le chemin menant au chantier du gazoduc Coastal GasLink, les activitĂ©s de construction sont interrompues[14] et les chefs hĂ©rĂ©ditaires s'engagent Ă  lever les barricades sur leurs territoires, « pour que leurs invitĂ©s puissent passer »[14], tout en encourageant les manifestants soutenant leur cause Ă  lever leurs barricades Ă©galement. Toutefois, des appels Ă  protester sont formulĂ©s par certains acteurs insatisfaits[12] - [13].

Toutefois, alors que les mobilisations contre le projet de gazoduc sont interrompues en raison de l’arrivĂ©e de la pandĂ©mie de Covid-19 au Canada, la construction du gazoduc reprend[15]. Alors que CGL annonce le prendre des mesures de protection de leurs Ă©quipes et des communautĂ©s environnantes[16], les manifestants envisagent de poursuivre leur mobilisation en ligne[17].

Protestations par province

Les protestations contre le projet s'étendent à plusieurs endroits au pays. Ci-dessous sont détaillées les plus importantes par province.

Drapeau de la Colombie-Britannique Colombie-Britannique

Drapeau de l'Ontario Ontario

Drapeau du Québec Québec

  • Kahnawake : des Mohawks bloquent la voie ferrĂ©e du Canadien Pacifique Ă  partir du . Le blocage entraĂźne l'arrĂȘt de la ligne de train de banlieue Exo 4 - Candiac[26]. L'entreprise ferroviaire obtient une injonction judiciaire pour lever la barricade le [27]. Les manifestants refusent de dĂ©manteler et la barricade est renforcĂ©e[28]. Le blocage est levĂ© par les manifestants le [29].
  • Saint-Lambert : À partir du , un blocage est maintenu pendant plus de trois jours sur la voie ferrĂ©e du Canadien National au croisement de la rue Saint-Georges (45° 30â€Č 12″ N, 73° 29â€Č 37″ O) [32]. La circulation sur la ligne de train de banlieue Exo 3 - Mont-Saint-Hilaire ainsi que des trains commerciaux est interrompue. Le campement est abandonnĂ© aprĂšs des pressions policiĂšres menaçant d'appliquer par la force une injonction judiciaire[33]. Dans leur dĂ©claration de dĂ©part, les occupants appellent Ă  « bloquer par tous les moyens : ports, ponts, routes et rails. Maintenant. Partout. »[34].

Aux racines du rejet du projet CGL

La mobilisation autochtone contre le projet de gazoduc s’inscrit dans une histoire de rĂ©sistance Ă  la dĂ©possession des terres, de rejet d’une objectification de la nature conduisant Ă  des projets extractivistes, et de la construction d’alliances entre peuples autochtones du monde entier.

Colonialisme de peuplement et dépossession des terres

La rĂ©sistance au projet de gazoduc prend appui sur la souverainetĂ© des chefs hĂ©rĂ©ditaires Wet’suwet’en sur leurs terres, reconnue par un ensemble de textes juridiques[35] - [36]. Ces textes juridiques rĂ©cents s’inscrivent en contradiction avec le colonialisme de peuplement, qui est constitutif du Canada: le Canada s’est construit, Ă  partir la doctrine coloniale terra nullius, sur la dĂ©possession des terres des PremiĂšres Nations, par la dĂ©portation et l’éviction[37]. L’extractivisme relĂšve d’une seconde vague de dĂ©possession des terres, par l’accaparement des ressources naturelles[37] - [38].

Le rejet autochtone d’une objectification de la nature

La protestation contre le projet de gazoduc s’inscrit de plus dans un mouvement de rĂ©sistance, autochtone et international, au modĂšle occidental d’appropriation de la nature[3] - [39] - [40], qui se dĂ©cline dans des projets extractivistes, et dont la domination est attribuĂ©e Ă  une logique coloniale, impĂ©rialiste et capitaliste[39]. Les mouvements autochtones dĂ©noncent une ontologie occidentale mortifĂšre qui construit l’extĂ©rioritĂ© de l’homme face Ă  l’environnement, et la nature comme objet[39] - [40] - [41]. Julia SuĂĄrez Krabbe dĂ©nonce ainsi le « projet de mort » qui repose sur l’ensemble des « moyens systĂ©miques par lesquels le colonialisme impose la guerre, le gĂ©nocide, l'Ă©pistĂ©micide, les attaques continues contre la nature, et la marchandisation et le brevetage de la vie (comme dans l'eau ou les semences) »[39]. Ce qui est en jeu dans la rĂ©sistance des Wet’suwet’en, c’est la prĂ©servation d’un mode de vie renvoyant Ă  une ontologie autochtone menacĂ©e par un projet extractiviste[3].

Les alliances autochtones internationales

La protestation contre le projet de gazoduc repose sur la construction d’alliances autochtones en rĂ©sistance contre une expĂ©rience partagĂ©e d’oppression[1]. Au Canada, cette protestation fait Ă©cho Ă  d’autres mouvements rĂ©cents, opposant des PremiĂšres Nations Ă  des projets de construction et d’extraction sur leurs terres, comme la crise d’Oka en 1990, la crise d'Ipperwash de 1995, les manifestations des Algonquins de Lac BarriĂšre contre l'entreprise miniĂšre Copper One des annĂ©es 2010, et les manifestations de la communautĂ© Elsipogtog contre l'entreprise gaziĂšre SWN Resources impliquĂ©e dans les gaz de schiste[42]. Au-delĂ  du Canada, la protestation Wet’suwet’en fait Ă©cho Ă  d’autres mouvements, comme celui de la communautĂ© Wixarika, de l'ouest de la Sierra Madre au Mexique, manifestant en 2014 contre une rĂ©forme agraire et rĂ©clamant, depuis des dĂ©cennies, le respect de la souverainetĂ© sur leurs terres[43].

Ces derniĂšres dĂ©cennies, les peuples autochtones du Canada ont participĂ© Ă  la construction d’alliances internationales de peuples autochtones (on compte prĂšs de 370 millions d'autochtones rĂ©partis dans 90 pays et sur tous les continents[39]) : diffĂ©rents groupes et organisations travaillent Ă  faire valoir les intĂ©rĂȘts communs des peuples autochtones, comme l'Instance permanente des Nations unies sur les questions autochtones[44] (UNPFII), l'alliance Survival International, et le RĂ©seau environnemental autochtone. À travers une sĂ©rie de dĂ©clarations, ces groupes et organisations exigent notamment le respect de leur souverainetĂ© sur leurs territoires et s’opposent Ă  un systĂšme Ă©conomique capitaliste et extractiviste[45]. La protestation Wet’suwet’en est aussi une protestation solidaire des autres peuples autochtones[1].

Le CGL, la GRC et les chemins de fer comme emblùmes de l’histoire coloniale canadienne

Le projet de gazoduc peut-ĂȘtre considĂ©rĂ© comme emblĂ©matique du capitalisme et du colonialisme canadiens. Le conflit autour du gazoduc s’inscrit dans une histoire coloniale longue, façonnĂ©e par des « hardware » (qui reposent sur l’usage de la force) et des « software » (qui facilitent et accompagnent l’usage de la force) du colonialisme[38], tels que, respectivement, la GRC et les chemins de fer.

Le CGL et l'Ă©conomie politique canadienne

L'Ă©conomie politique est historiquement axĂ©e sur l’exploitation de ressources naturelles, notamment l’extraction d’hydrocarbures sur les territoires de peuples autochtones[46]. En particulier, la Colombie-Britannique, Ă  la fois une des provinces les plus riches du pays en termes de PIB par habitant[47] et celle liĂ©e au projet de gazoduc CGL a jouĂ© un rĂŽle clĂ© Ă  la fois dans l’essor Ă©conomique du Canada Ă  partir de l’exploitation de ressources naturelles, et dans la colonisation des PremiĂšres Nations[48]. Bien que rentable, ce rĂ©gime d'exploitation des ressources favorise « les acteurs extractivistes au dĂ©triment des acteurs tiers » c'est-Ă -dire, dans l'histoire canadienne, les peuples autochtones, qui ont Ă©tĂ© Ă©vincĂ©s des terres leur appartenant[46].

Dans le projet de gazoduc CGL les acteurs tiers sont les peuples Wet'suwet'en. Les arguments avancĂ©s par les Wet'suwet'en opposĂ©s au projet et les Canadiens ralliĂ©s Ă  leur cause sont que le projet de gazoduc de CGL contribuerait Ă  dĂ©possĂ©der davantage les communautĂ©s autochtones de leur environnement par l'extraction de ressources naturelles. En d'autres termes, il s'agirait d'un projet extractiviste qui participe d’un Ă©cocide, menaçant la survie des Wet'suwet'en en tant que peuple[48].

La GRC actrice de l'oppression coloniale

Le conflit autour du projet de gazoduc met en premier plan la GRC. Les opposants au projet de gazoduc reprochent Ă  la GRC l’emploi de la force vis-Ă -vis de protestataires souverains sur leurs terres[49]. Le 6 fĂ©vrier 2020, la GRC est ainsi intervenue, en application d’une injonction de la Cour suprĂȘme de Colombie-Britannique, pour permettre l’accĂšs au chantier du pipeline. Les gendarmes ont dĂ©mantelĂ© les barricades des manifestants et procĂ©dĂ© Ă  l’arrestation de militants[50]. Les forces policiĂšres ont Ă©galement crĂ©Ă© une zone d’exclusion de 27 kilomĂštres autour du site de protestation du clan Gidimt’en sur le territoire Wet’suwet’en en plus du contrĂŽle des 60 kilomĂštres de la route de service Morice River Forest qui longe le chantier[50]. Enfin, cette mĂȘme journĂ©e, 60 policiers armĂ©s de la GRC accompagnĂ©s de chiens ont perquisitionnĂ© le camp du clan Gidimt’en Ă©galement opposĂ© au projet. Depuis cette date, la prĂ©sence de la GRC sur le territoire Wet’suwet’en a Ă©tĂ© maintenue[50].

La GRC est une institution majeure de l’histoire coloniale du Canada et de la dĂ©possession des terres des PremiĂšres Nations. ReprĂ©sentĂ©e par l’icĂŽne d’une police montĂ©e avec un uniforme rouge et bleu marin, elle fut crĂ©Ă©e en 1920 par une loi fusionnant la Police Ă  cheval du Nord-Ouest (P.C.N.-O.) et la Police du Dominion dont le quartier gĂ©nĂ©ral s’installe Ă  Ottawa[51]. Or, ces forces policiĂšres ont jouĂ© un rĂŽlĂ© clĂ© dans le dĂ©placement et l’oppression des PremiĂšres Nations depuis le 19e siĂšcle. Freda Huson, fondatrice du centre de soin Unist’ot’en situĂ© Ă  proximitĂ© du camp de protestation, explique : « Selon notre expĂ©rience, la GRC a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e par le gouvernement fĂ©dĂ©ral pour dĂ©possĂ©der les peuples autochtones de leurs terres »[52]. RĂ©cemment, l’inaction des forces policiĂšres a Ă©tĂ© pointĂ©e du doigt dans les disparitions et assassinats de femmes autochtones, qui sont par ailleurs sont aggravĂ©es par les projets de construction de pipelines[50].

Les interventions de la GRC face au conflit avec le peuple Wet’suwet’en sont enfin critiquĂ©es pour ce qu’elles signifient de l’exercice du pouvoir politique. L’intervention armĂ©e contredit le discours de RĂ©conciliation du gouvernement fĂ©dĂ©ral. Cette intervention signale Ă©galement les contradictions des dĂ©cisions juridiques canadiennes : les injonctions de la Cour suprĂȘme de la Colombie-Britannique[53] en faveur du projet contredisent la dĂ©cision Delgamuukw c. Colombie Britannique de la Cour suprĂȘme canadienne qui reconnaĂźt aux chefs hĂ©rĂ©ditaires Wet’suwet’en de pouvoir disposer de leurs terres.

La symbolique des barrages ferroviaires

En solidaritĂ© avec les militants Wet’suwet’en, des barrages ferroviaires se sont multipliĂ©s au Canada. Les barrages ferroviaires sont d’ailleurs un leitmotiv des pratiques contestataires autochtones; ils ont par exemple Ă©tĂ© mis en Ɠuvre lors de la crise d’Oka en 1990[54].

La cible du rĂ©seau ferroviaire s’explique par son rĂŽle symbolique au Canada. EmblĂšme de la construction du pays, les chemins de fer canadiens ont jouĂ© un rĂŽle important dans la colonisation du Canada et la dĂ©possession des terres des PremiĂšres Nations. Le tracĂ© de ces chemins de fer, Ă  travers plusieurs territoires autochtones, a conduit Ă  dĂ©placer de force – et avec l’appui de la GRC – des communautĂ©s autochtones et a perturbĂ© les Ă©cosystĂšmes locaux[55].

Les chemins de fer ont ensuite encouragĂ© l’établissement d’immigrants europĂ©ens dans ces territoires nouvellement accessibles, menaçant davantage le mode de vie des communautĂ©s autochtones locales et dĂ©truisant leur environnement. Le chemin de fer a Ă©galement jouĂ© un rĂŽle dans le dĂ©placement rapide des effectifs de la GRC en vue de rĂ©pondre aux rĂ©bellions autochtones, comme lors de la RĂ©bellion de la riviĂšre Rouge des MĂ©tis en 1869-1870[55].

Les fondements juridiques de l'opposition au gazoduc

Les opposants au projet de gazoduc rejettent celui-ci sur des bases juridiques. La crise actuelle est de plus liée à un ensemble de questions juridiques en suspens.

La reconnaissance juridique de la souverainetĂ© des Wet’suwet’en sur leurs terres

La souveraineté des peuples Wet'suwet'en sur leurs terres est en effet reconnue par trois textes :

  • La Loi constitutionnelle de 1982 : dĂšs le rapatriement de la Constitution du Canada en 1982, les droits des autochtones sont reconnus juridiquement : l’article 35(1) de la constitution de 1982 confirme les droits existants – ancestraux ou issus de traitĂ©s de peuples autochtones du Canada.
  • L'arrĂȘt Delgamuukw contre Colombie-Britannique : c'est une dĂ©cision judiciaire rendue en 1997 par la Cour suprĂȘme du Canada, qui avait Ă©tĂ© appelĂ©e Ă  statuer par les Wet’suwet’en. Cette dĂ©cision Ă©tablit que :
    • Le gouvernement provincial n’a pas le droit d’éteindre les droits de propriĂ©tĂ© des peuples autochtones sur leurs territoires ancestraux
    • Le titre autochtone garantit le droit exclusif des peuples autochtones sur leur territoire; la reconnaissance du titre autochtone est affirmĂ©e en tant que « droit autochtone existant » en vertu de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Ces droits sont toutefois assortis de conditions : afin de continuer Ă  dĂ©tenir un titre ancestral sur un territoire[9], la nation autochtone doit avoir occupĂ© ce territoire avant la dĂ©claration de la confĂ©dĂ©ration canadienne et jusqu'Ă  aujourd’hui, ou bien pouvoir faire la dĂ©monstration d’un lien substantiel avec ce territoire au fil des ans ; de plus, la nation ne peut rĂ©clamer la souverainetĂ© sur un territoire pour en faire un usage contraire Ă  l’attachement revendiquĂ© par le groupe sur ces terres.
  • La DĂ©claration des Nations unies sur les peuples autochtones : les articles 9, 18, 19 de la dĂ©claration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, entĂ©rinĂ©e par le Canada en 2007[42], confirment le droit des autochtones d'appartenir Ă  une communautĂ© autochtone ; le droit de participer Ă  la prise de dĂ©cisions sur des questions qui peuvent concerner leurs droits, par l’intermĂ©diaire de reprĂ©sentants qu’ils ont eux-mĂȘmes choisis conformĂ©ment Ă  leurs propres procĂ©dures ; le droit de conserver et de dĂ©velopper leurs propres institutions dĂ©cisionnelles ; ainsi que le droit Ă  une consultation lĂ©gitime entre les institutions reprĂ©sentatives traditionnelles des peuples autochtones et les États[42].

Selon les lois canadiennes et internationales, les peuples Wet’suwet’en jouissent donc d’un droit exclusif sur leur territoire. C’est en rĂ©fĂ©rence Ă  ces textes que sont dĂ©noncĂ©es les interventions de la GRC et l’appui du gouvernement de la Colombie-Britannique Ă  la mise en Ɠuvre du projet de gazoduc.

Les questions juridiques en suspens

La crise actuelle est le résultat de contradictions juridiques et de questions non résolues.

Les textes juridiques susmentionnĂ©s n’ont pas Ă©tĂ© reconnus par les institutions de Colombie-Britannique. La Cour suprĂȘme provinciale a ainsi Ă©mis une injonction permettant Ă  la compagnie TC Énergie de poursuivre les travaux d’implantation d’un gazoduc sur le territoire des Wet'suwet'en, en dĂ©pit de l’opposition des chefs hĂ©rĂ©ditaires dĂ©tenteurs des titres ancestraux Ă  ce projet. Ceux-ci ont adressĂ©, en vertu de leurs droits exclusifs sur leur territoire, une lettre d’éviction Ă  TC Énergie, qui n’a pas Ă©tĂ© suivie d’effets[56] - [3].

Face Ă  cette crise, les deux ordres de gouvernements fĂ©dĂ©ral et provincial ne se sont pas entendus sur la question de savoir qui a l’autoritĂ© d’agir, alors qu’il n’existe pas de cadre de rĂ©solution des conflits liĂ©s aux questions autochtones. Cette absence de cadre est critiquĂ©e, en ce qu'elle permettrait aux diffĂ©rents paliers gouvernementaux de se dĂ©fausser de leurs responsabilitĂ©s, ouvrant dans le mĂȘme temps une brĂšche Ă  l’entreprise TC Énergie pour la conduite de son projet de gazoduc[5].

Enfin, le conflit actuel est le rĂ©sultat d’une dualitĂ© des dispositifs de gouvernance et des mĂ©canismes de reprĂ©sentation des Wet’suwet’en, abordĂ© dans la section suivante.

Le blocus autochtone et la mise en lumiÚre des défaillances des dispositifs de gouvernance

L'opposition au projet CGL met en lumiÚre les défaillances des dispositifs de gouvernance impliquant différentes parties prenantes.

La dualitĂ© des modes de gouvernement du territoire Wet’suwet’en

La crise actuelle est notamment le rĂ©sultat de la dualitĂ© des modes de gouvernement du territoire Wet’suwet’en : les conseils de bande en faveur du projet et reprĂ©sentant les PremiĂšres Nations Wet’suwet’en d’une part, et les chefs hĂ©rĂ©ditaires opposĂ©s au projet et reprĂ©sentant le peuple Wet’suwet’en d’autre part.

Les conseils de bande et les chefs hĂ©rĂ©ditaires tiennent leur pouvoir de textes juridiques concurrents. La Loi sur les Indiens, de 1876, fournit le cadre lĂ©gal dĂ©finissant d’une part les relations entre le gouvernement et les PremiĂšres Nations, et d’autre part le gouvernement des rĂ©serves. Cette loi dispose que les rĂ©serves indiennes doivent ĂȘtre administrĂ©es par un chef et un conseil de bande Ă©lus au suffrage universel, payĂ©s par le MinistĂšre des Affaires indiennes[1]. Quant aux chefs hĂ©rĂ©ditaires, ceux-ci dĂ©tiennent les droits d’utilisation de leurs territoires de la Loi constitutionnelle de 1982, la DĂ©claration des Nations unies sur les peuples autochtones et l'arrĂȘt Delgamuukw c. Colombie-Britannique. Les chefs hĂ©rĂ©ditaires sont enfin investis de l’autoritĂ© ultime en tant que dĂ©positaires lĂ©gaux par des textes de PremiĂšres Nations[57].

La Loi sur les Indiens est rejetĂ©e par les chefs hĂ©rĂ©ditaires et leurs alliĂ©s pour ĂȘtre coloniale et contraire au droit constitutionnel Ă  l’auto-gouvernance[42], et en tant qu’elle impose une structure politique et un mode de propriĂ©tĂ© des terres en rupture avec les souverainetĂ©s ancestrales et les cultures des PremiĂšres Nations[56]. Les chefs hĂ©rĂ©ditaires et leurs alliĂ©s dĂ©noncent un dispositif mis en place pour faciliter la dĂ©possession des territoires des PremiĂšres Nations et diviser celles-ci[56]. De fait, les conseils de bande sont gĂ©nĂ©ralement favorables aux projets des industries extractives : parmi les 634 PremiĂšres Nations du Canada, environ 400 dĂ©sireraient travailler en collaboration avec les industries de ressources naturelles[58]. Des alliances ont Ă©tĂ© crĂ©Ă©es afin de militer activement pour le dĂ©veloppement des ressources pĂ©troliĂšres et gaziĂšres dans les communautĂ©s, notamment en vue de crĂ©er des emplois pour vaincre la pauvretĂ© dans les rĂ©serves[58]. Ces alliances sont par exemple la National Coalition of Chiefs, une communautĂ© de chefs des PremiĂšres nations et de chefs mĂ©tis pro-dĂ©veloppement, la Wet’suwet’en Matrilineal Coalition (WMC)[6] et le First Nation LNG Alliance qui soutiennent le dĂ©veloppement du gaz naturel liquĂ©fiĂ© en Colombie-Britannique. De leur cĂŽtĂ©, les conseils de bande dĂ©noncent l’absence d’assise lĂ©gale de l’autoritĂ© des chefs hĂ©rĂ©ditaires[59].

Les nĂ©gociations mises en place par le gouvernement provincial et TC Énergie pour la construction du projet de gazoduc ont exclu les chefs hĂ©rĂ©ditaires[60]. TC Énergie a obtenu une permission pour la construction du gazoduc, auprĂšs d’une vingtaine de conseils de bande Wet’suwet’en, sous la forme d’ententes signĂ©es[61].  Or, ces nĂ©gociations ont provoquĂ© une vĂ©ritable crise entre chefs de bandes et chef hĂ©rĂ©ditaires[42] - [61]. Les chefs hĂ©rĂ©ditaires remettent en cause ces nĂ©gociations: ces derniĂšres, qui entrent en contradiction avec la dĂ©cision Delgamuukw c. Colombie-Britannique dĂ©livrĂ© par la Cour suprĂȘme du Canada, compromettent l’exercice de la souverainetĂ© sur leurs territoires non cĂ©dĂ©s par les chefs hĂ©rĂ©ditaires et s’inscrivent dans la continuitĂ© d’une histoire de dĂ©possession des terres – le philosophe Michel Seymour parle Ă  ce sujet de « recolonisation »[60]. Des voix s’élĂšvent aujourd’hui pour la mise en place d’un systĂšme de gouvernance qui reconnaisse les deux instances[42].

L’asymĂ©trie des ententes signĂ©es

Les ententes signĂ©es entre le conseil de bande et TC Énergie sont elles-mĂȘmes controversĂ©es. Ces ententes signĂ©es seraient tout d’abord peu transparentes, car rĂ©digĂ©es dans un langage ardu et peu accessible[61]. De plus, ces ententes contiendraient des clauses dĂ©favorables aux PremiĂšres Nations. En particulier, il aurait Ă©tĂ© exigĂ© des conseils de bande de dissuader les Wet’suwet’en de faire tout ce qui pourrait « entraver, gĂȘner, frustrer, retarder, arrĂȘter ou interfĂ©rer avec le projet, les entrepreneurs du projet, les autorisations ou tout processus d'approbation »[61]. Cette clause empĂȘcherait ainsi les communautĂ©s autochtones de prendre part Ă  toute campagne mĂ©diatique ou sociale. Des Ă©lus des conseils de bande ont dĂ©plorĂ© la dĂ©shumanisation que signifieraient ces clauses : « Pour moi, cela dĂ©montre qu’ils ne pensent pas vraiment que nous sommes entiĂšrement des ĂȘtres humains, » affirme par exemple l’élue d’un conseil de bande, Nicholette Prince[61]. Enfin, les compensations monĂ©taires promises par la compagnie auprĂšs des Wet’suwet’en provenant de fonds publics, le soutien apportĂ© par TC Énergie aux Wet’suwet’en est remis en cause. Ces critiques des ententes signĂ©es entre des compagnies du secteur de l’énergie et des PremiĂšres Nations sont par ailleurs frĂ©quentes, et mettent en Ă©vidence l’asymĂ©trie des rapports de force entre ces deux groupes[61].  

La remise en cause de l'action publique canadienne

Les effets génocidaires de long terme des politiques canadiennes

Le soutien apporté au projet de gazoduc s'inscrit dans un ensemble de politiques publiques canadiennes, qui est selon certains de ses opposants aux effets génocidaires pour les PremiÚres Nations[38].

Le gazoduc relĂšve d'un projet extractiviste d'exploitation des ressources naturelles. Ce projet extractiviste a, selon ses opposants, des effets Ă©cocidaires, c'est-Ă -dire de destruction irrĂ©versible de l’environnement. Le projet de gazoduc participe en outre d'un gĂ©nocide reproductif, c’est-Ă -dire qu’il menace la perpĂ©tuation des Wet'suwet'en en tant que peuple, en raison d'une insĂ©curitĂ© alimentaire accrue ainsi que d’un rĂ©trĂ©cissement des terres disponibles et de la pollution et de l’épuisement de celles-ci[3] - [38]. Dans l’histoire canadienne rĂ©cente, d'autres projets extractivistes ont contribuĂ© Ă  restreindre les ressources disponibles aux PremiĂšres Nations canadiennes. Dans les annĂ©es 1970, le barrage de la Baie-James construit par Hydro-QuĂ©bec, a ainsi dĂ©truit des Ă©cosystĂšmes et une vie marine indispensable aux populations autochtones locales, forcĂ©es de migrer[38]. À la mĂȘme Ă©poque, la nation ojibwĂ©e a vu son activitĂ© de pĂȘche dĂ©truite Ă  la suite des dĂ©versements d’une compagnie miniĂšre financĂ©e par le gouvernement ontarien[38]. Les Wet’suwet’en opposĂ©s Ă  la construction du gazoduc mettent ainsi en avant les menaces que celui-ci reprĂ©sente pour la prĂ©servation de leur mode de vie et de leur environnement et plus largement, pour les PremiĂšres Nations du Canada dans leur ensemble[1] - [3].

Enfin, le troisiĂšme gĂ©nocide impliquĂ© est celui des femmes autochtones, dont les disparitions et assassinats, reconnus comme gĂ©nocide par la Commission nationale d’enquĂȘte sur ce sujet, se sont accrus ces derniĂšres annĂ©es Ă  proximitĂ© de sites extractivistes[50]. Le rapport de cette commission Ă©tablit en effet que « les camps de travail, ou "camps d'hommes", associĂ©s Ă  l'industrie d'extraction des ressources sont impliquĂ©s dans des taux plus Ă©levĂ©s de violence contre les femmes autochtones dans les camps et dans les communautĂ©s voisines »[62]. Dans le cas du gazoduc de Coastal Gaslink, le risque de disparition et d’assassinat est associĂ© Ă  la construction d’un campement de travailleurs qui devrait abriter 400 personnes – principalement des hommes[50]. Ce campement serait situĂ© non loin de la route 16, connue sous le nom de « Route des larmes ». Cette route, qui relie Prince Rupert Ă  Prince George, a Ă©tĂ© le site d’une douzaine de fĂ©minicides et de disparitions restĂ©es irrĂ©solues[63].  Les opposants au projet de gazoduc craignent donc pour la vie des femmes vivant sur le territoire wet’suwet’en[3].

La mise Ă  l’épreuve de la RĂ©conciliation

La construction du gazoduc et l’opposition que celle-ci suscite mettent Ă  l’épreuve la politique de RĂ©conciliation canadienne.

Dans son budget de 2016, le Canada a allouĂ© 8,4 milliards de dollars sur cinq ans pour la mise en Ɠuvre du programme de RĂ©conciliation[64].Celui-ci devait inaugurer une nouvelle Ăšre de relations avec les populations autochtones. Le premier ministre Justin Trudeau avait commencĂ© son premier mandat par des excuses, et la reconnaissance du traumatisme que le gouvernement canadien avait infligĂ© aux populations autochtones dans le passĂ©, notamment via les pensionnats autochtones. Le gouvernement canadien avait affirmĂ© vouloir maintenir une politique de transparence et Ă©tablir une relation fondĂ©e sur la reconnaissance des droits, le respect, la collaboration et le partenariat[65].

Or, les opposants Ă  la construction du gazoduc mettent en avant l’absence de transformation des relations entre le gouvernement canadien et les PremiĂšres Nations. La GRC a fortement rĂ©primĂ© la protestation au projet et protĂ©gĂ© les intĂ©rĂȘts de CGL sur le territoire Wet’suwet’en. Fin 2019, des documents de la GRC indiquent que la direction de celle-ci approuve l’usage de la force lĂ©tale contre les protestataires[61]. Assurant la mise en Ɠuvre de l’injonction de la Cour suprĂȘme de la Colombie-Britannique, la GRC a ensuite interdit d’approcher de moins de 10 mĂštres toute personne ou vĂ©hicule rattachĂ©s au pipeline CGL sur le territoire Wet’suwet’en. La GRC a enfin « mis en place une zone d’exclusion qui empĂȘche l’accĂšs au territoire selon des critĂšres flous et variables aux journalistes, habitants, avocats, et aux personnes venues en soutien »[56].

Le passage en force de construction signale donc un dĂ©couplage des pratiques et des discours politiques : d’un cĂŽtĂ©, le premier ministre Trudeau recourt au discours de rĂ©conciliation et en appelle au dialogue ; d’un autre cĂŽtĂ©, l’exercice de la violence policiĂšre est autorisĂ© contre un peuple pourtant reconnu comme souverain sur son territoire – et face auquel le premier ministre reste inactif[5]. En rĂ©action Ă  la rĂ©pression policiĂšre, des opposants ont ainsi lancĂ© le hashtag #reconciliationisdead[66].

Plus largement, de nombreux opposants au projet CGL dĂ©noncent la poursuite de la colonisation des PremiĂšres Nations par la dĂ©possession de leurs terres et la destruction de leur environnement. Ces opposants questionnent les fondements mĂȘme de la RĂ©conciliation : cette derniĂšre suppose que la colonisation est un Ă©vĂ©nement dĂ©limitĂ© dans le temps, que l’on peut clore par une dĂ©cision politique. Au contraire, les opposants dĂ©noncent cette colonisation comme Ă©tant un processus aux effets structurants de long terme, produisant des sociĂ©tĂ©s racialisĂ©es et coloniales, dans lesquelles les peuples colonisĂ©s sont opprimĂ©s[48]. Le racisme est ainsi enracinĂ© dans les institutions, et reproduit par les dĂ©cisions administratives et politiques.

Impacts et réactions

Opinion publique

Selon les résultats d'un sondage publié par Ipsos le , 63 % des Canadiens supportent une intervention policiÚre pour mettre fin aux blocages, tandis que 26 % s'y opposent. De plus, 60 % des Canadiens sont en opposition à ces blocages[67].

Les résistances contre le projet du gazoduc

Les alliances contre le projet du gazoduc

Les protestations contre le projet pipelinier de CGL sur les terres traditionnelles Wet’suwet’en ont mis en lumiĂšre l’existence d’alliances entre groupes autochtones. Les Gitxsans, nation voisine des Wet'suwet'en, sont un alliĂ© historique de ces derniers. Le 24 fĂ©vrier 2020 sur un site de protestation au gazoduc prĂšs de New Hazelton, la GRC a arrĂȘtĂ© 14 personnes, dont trois chefs hĂ©rĂ©ditaires gitxsans. Les partisans de la protestation prĂšs de New Hazelton, composĂ© des Wet’suwet’en et des Gitxsan, ainsi que des non-autochtones, ont bloquĂ© la circulation sur la route 16 pendant huit heures pour exiger la libĂ©ration des chefs[68]. En solidaritĂ© avec les Wet’suwet’en opposĂ©s au gazoduc, d’autres alliances se sont constituĂ©es. En Colombie-Britannique, l’Union des chefs autochtones de la province[69], soutenue par l’association des libertĂ©s civiles de la Colombie-Britannique (BCCLA), a critiquĂ© l’occupation de la GRC sur le territoire Wet’suwet’en. À travers le Canada, d’autres alliances ont pris parti contre le projet de gazoduc, comme la rĂ©serve indienne des Six Nations composĂ©es des Mohawks, des Cayugas, des Onondagas, des Onneiouts, des Senecas et des Tuscaroras ; la communautĂ© de Listuguj, en collaboration avec le gouvernement Listuguj Miꞌgmaq[69] ; et l’Indigenous Cultural Alliance[69]. Enfin, des peuples autochtones ont protestĂ© en solidaritĂ© avec les Wet'suwet'en opposĂ©s au projet pipelinier comme les Mohawks du territoire de Kahnawake, qui ont conduit des barrages ferroviaires[70].

La rĂ©sistance canadienne au gazoduc est aussi non autochtone. Les groupes environnementalistes sont particuliĂšrement actifs[69].Dans une dĂ©monstration de solidaritĂ© Ă  MontrĂ©al, des militants d’Extinction RĂ©bellion QuĂ©bec ont ainsi dĂ©clarĂ© avoir occupĂ© les bureaux des ministres fĂ©dĂ©raux MĂ©lanie Joly, Marc Garneau, Marc Miller et David Lametti le lundi 10 fĂ©vrier 2020 afin de demander de mettre un terme au projet de Coastal GasLink. Le 18 fĂ©vrier, environ 200 personnes ont dĂ©filĂ© au centre-ville de Winnipeg afin d’offrir leur soutien aux chefs hĂ©rĂ©ditaires Wet'suwet'en opposĂ© au projet du gazoduc en Colombie-Britannique. Le groupe environnementaliste The Wilderness Committee Ă©tait l’un des principaux organisateurs de la marche.

Parmi les Canadiens mobilisĂ©s, les jeunes Ă©taient trĂšs reprĂ©sentĂ©s et ont fait l’objet d’une importante attention mĂ©diatique. Des rassemblements dirigĂ©s par les jeunes tels que Indigenous Youth and Allies for Wet'suwet'en ont apportĂ© leur soutien. Les Ă©coles secondaires et les instituts d’enseignement postsecondaires reprĂ©sentent Ă©galement des espaces clĂ©s de mobilisation, avec plusieurs groupes Ă©tudiants participants Ă  des dĂ©brayages pour montrer leur solidaritĂ©[70].

RĂ©sistances internationales

En janvier 2019, une intervention armĂ©e de la GRC sur le site Unist’ot’en, placĂ© en territoire Wet’suwet’en et le long du tracĂ© du gazoduc, dĂ©clenche une vague d’indignation nationale. Lors de cette intervention qui visait Ă  faciliter la construction du projet de pipeline CGL, une vingtaine de Wet’suwet’en sont arrĂȘtĂ©s, un feu sacrĂ© est Ă©touffĂ© et Ă©crasĂ©, des robes rouges reprĂ©sentant l’EnquĂȘte nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinĂ©es sont souillĂ©es. La GRC formule Ă  cette occasion l’interdiction des mĂ©dias de pĂ©nĂ©trer Ă  proximitĂ© du chantier de construction[71].

À la suite de ces Ă©vĂ©nements, les chefs hĂ©rĂ©ditaires ont lancĂ© un appel Ă  la solidaritĂ© internationale, du 7 au 12 janvier, dans 70 villes du monde[71]. Le chef hĂ©rĂ©ditaire Na'moks et Freda Huson, porte-parole et rĂ©sidente du campement Unist'ot'en, sont intervenus lors d’une rĂ©union de l’Instance permanente des Nations-Unies Ă  New York: ils ont avancĂ© que leurs droits humains se sont trouvĂ©s violĂ©s, notamment par la construction de GCL au sein de leur territoire[72]. Dans ce contexte, le ComitĂ© pour l’élimination de la discrimination raciale de l’Organisation des Nations unies a fermement demandĂ© au gouvernement fĂ©dĂ©ral de retirer ses forces armĂ©es, de sorte Ă  libĂ©rer les terres occupĂ©es. Selon ce comitĂ©, le droit Ă  un consentement libre et Ă©clairĂ© au sujet des projets de ressources, qui fait partie intĂ©grante de la DĂ©claration des Nations Unies sur le droit des Peuples autochtones (DNUDPA), n’a pas Ă©tĂ© respectĂ©. Le Canada et la Colombie-Britannique ont ratifiĂ© cette dĂ©claration – sans toutefois l’incorporer Ă  un texte de loi[73].

Le soutien international Ă  la rĂ©sistance wet’suwet’en a pour corollaire une rĂ©pression sans prĂ©cĂ©dent du mouvement, d’aprĂšs les Wet’suwet’en qui ont pourtant rĂ©sistĂ© Ă  plusieurs projets de pipeline dans le passĂ©: ceux-ci se plaignent d’un harcĂšlement et d’une surveillance constante de la GRC, alors que TransCanada a procĂ©dĂ© Ă  la destruction d’une aire de territoire, notamment pour la construction de logements pour 400 travailleurs recrutĂ©s pour CGL[71].

Modes de résistance principaux du mouvement

À la suite d’une intervention de la GRC au point d’accĂšs de Gidimt’en le 7 janvier 2020, les chefs hĂ©rĂ©ditaires wet’suwet’en ont invitĂ© leurs sympathisant.es Ă  participer Ă  une journĂ©e internationale de solidaritĂ© le lendemain. L’appel Ă  fermer le Canada (« #ShutDownCanada ») a Ă©tĂ© accueilli par des mobilisations dans plus de 60 villes Ă  travers le Canada et les États-Unis[74]. Depuis lors et jusqu’au mois de mars 2020, la solidaritĂ© s’est renforcĂ©e et les rassemblements en soutien des Wet’suwet’en ont continuĂ©. Les actions de rĂ©sistance ont Ă©tĂ© diverses.

Modes de résistance matériels

Blocus d'infrastructure : À travers le Canada, des communautĂ©s de PremiĂšres Nations ont dĂ©montrĂ© leur solidaritĂ© avec les chefs hĂ©rĂ©ditaires wet’suwet’en en instaurant des campements tout au long du chemin de fer nationaux du Canada (CN), menant Ă  la suspension de la plupart des services CN entre le 13 fĂ©vrier et le 3 mars 2020[75]. Les blocus initiaux sur la ligne de QuĂ©bec Ă  Windsor Ă©taient organisĂ©s par les communautĂ©s Mohawk de Tyendinaga en Ontario et de Kahnawake au QuĂ©bec[76]. Le trafic portuaire maritime a aussi Ă©tĂ© affectĂ© lorsque des manifestations ont bloquĂ© l’accĂšs aux terminaux Ă  Halifax, MontrĂ©al et Vancouver.

Occupations : Les organisations comme Indigenous Youth and Allies for Wet’suwet’en ont organisĂ© des longs sit-ins au sein les lieux politiques importants, incluant le bureau du ministre de la Justice David Lametti, le bureau du premier ministre Justin Trudeau et l'AssemblĂ©e lĂ©gislative de la Colombie-Britannique.

Modes de résistance en ligne

Site web : Le cƓur du mouvement sur internet se trouve sur le site web www.unistoten.camp. Les organisateurs du mouvement y ont mis une boite Ă  outils Ă  disposition de leurs alliĂ©.es ainsi qu’un formulaire d’inscription pour les gens souhaitant rendre visite sur le territoire Unist’ot’en, parmi d’autres ressources.

RĂ©seaux sociaux : Le rĂ©seau social Facebook est un outil de mobilisation important pour le mouvement. La page Wet'suwet'en Access Point on Gidimt'en Territory (comptant plus de 43 000 mentions « J’aime » au dĂ©but du mois d’avril 2020) est utilisĂ© pour partager des messages en direct des chefs hĂ©rĂ©ditaires wet’suwet’en et le rĂ©seau d’alliĂ©.es sous forme de vidĂ©os, diffusions en direct et d’autres mĂ©dias. Cette page mĂȘme a utilisĂ© la fonctionnalitĂ© Ă©vĂšnement pour lancer son appel initial de solidaritĂ©. D’autres groupes Facebook ont Ă©tĂ© crĂ©Ă©s pour partager les nouvelles relatives au mouvement, tels que le groupe We Support the Unist'ot'en and the Wet'suwet'en Grassroots Movement avec plus de 20 000 membres. Sur d’autres rĂ©seaux comme Twitter et Instagram, les hashtags #WetsuwetenStrong, #IStandWithWetsuweten suivaient des tendances importantes.

Mixtes

Art : L’art a contribuĂ© au renforcement du mouvement Wet’suwet’en Strong. Le court-mĂ©trage INVASION[77] par les cinĂ©astes canadiens Michael Toledano, Sam Vinal et Franklin Lopez a Ă©tĂ© visionnĂ© plus de 56 000 fois sur YouTube et apparaĂźt sur le site web des Unis’to’ten. Le film a Ă©tĂ© projetĂ© lors d'Ă©vĂ©nements Ă  travers le Canada et a contribuĂ© Ă  la propagation du mouvement. En plus de leur rĂŽle dans le partage d’informations, les artistes se sont mobilisĂ©s pour apporter du soutien financier au mouvement. À MontrĂ©al, un spectacle mettant en vedette des artistes tels que Élisapie et Jeremy Dutcher (en) a eu lieu pour rĂ©colter des fonds[78]. Des artistes visuels ont aussi contribuĂ© en crĂ©ant des graphiques informatiques et symboliques pour le mouvement (voir le Onaman Collective). Tout comme dans d’autres mouvements autochtones, les personnes LGBT, bi-spirituelles, autochtones et transgenres reprĂ©sentent des militants de premiĂšre ligne, participant Ă  la dĂ©fense de la souverainetĂ© et protection de la terre Ă  travers leur art[79].

HĂ©ritage et enseignements Ă  tirer du mouvement Idle No More

Les stratĂ©gies du mouvement Wet’suwet’en Strong se distinguent des autres grands mouvements autochtones du passĂ©, notamment Idle No More, en atteignant des niveaux de solidaritĂ© et de perturbation nationale sans prĂ©cĂ©dent.

Selon The Tyee (en), le succĂšs relatif du mouvement est dĂ» Ă  des efforts dĂ©libĂ©rĂ©s d’inclure des alliĂ©.es non autochtones via des formes d’action dĂ©vastatrices sur le plan Ă©conomique[80]. Il est fort possible qu’un grand nombre de ces alliĂ©s avaient appuyĂ© le mouvement national Idle No More quelques annĂ©es auparavant, qui Ă©tait aussi considĂ©rĂ© comme un mouvement inclusif. Cependant, une diffĂ©rence majeure entre ces deux mouvements est le recours immĂ©diat des chefs hĂ©rĂ©ditaires wet’suwet’en aux formes d’action visant la perturbation Ă©conomique. Ceci a Ă©tĂ© principalement atteint par les barrages ferroviaires, entraĂźnant la suspension de la circulation des personnes et des marchandises.

La prĂ©sence virtuelle du mouvement a aussi contribuĂ© Ă  leur Ă©lan. En effectuant des recherches pour leur ouvrage Policing Indigenous Movements, les professeurs Andrew Crosby et Jeffrey Monaghan de l’UniversitĂ© Carleton ont dĂ©couvert un rapport du Centre des opĂ©rations du gouvernement (COG) qui identifiait un des chefs unist’ot’en comme un(e) « extrĂ©miste autochtone » (traduction libre) et anticipait l’effet de ricochet que pourrait avoir les manifestations des Wet’suwet’en[81]. Ces chercheurs ont dĂ©clarĂ© Ă  APTN News qu’il Ă©tait fort probable que le COG essaierait de contrĂŽler le discours public concernant le mouvement afin de discrĂ©diter celui-ci. En accĂ©dant aux mĂ©dias sociaux pour communiquer avec leurs alliĂ©s directement, les chefs hĂ©rĂ©ditaires wet’suwet’en ont pu maintenir l’intĂ©gritĂ© et la cohĂ©sion de leur mouvement alors que celui-ci grandit et bĂ©nĂ©ficiĂ© d’un soutien important auprĂšs de la population. Les sondages effectuĂ©s par la firme de recherche Ipsos ont ainsi montrĂ© que le niveau d’opposition au mouvement Wet’suwet’en est moins fort qu’était l’opposition Ă  Idle No More[82].

Un autre facteur dans la croissance et persistance du mouvement est l’accent sur la solidaritĂ©. L’appel initial de solidaritĂ© par le camp Unist’ot’en a encouragĂ© des manifestations Ă  travers le Canada. MalgrĂ© cette propagation, le mouvement a retenu son agenda original. Le mouvement a largement Ă©vitĂ© la “convergence des luttes” critiquĂ©e notamment par les auteur.es français.es Assa TraorĂ© et Geoffroy de Lasagnerie[83]. En dĂ©veloppant des alliances plutĂŽt qu’en cherchant une convergence, le mouvement a attirĂ© l’attention du public sur les enjeux auxquels les populations autochtones font face, tels que la crise des femmes et filles autochtones disparues et assassinĂ©es.

Notes et références

  1. (en) Amy Goodman, « The Wet’suwet’en Fight Against New Pipeline Spreads Across Canada with Blockades & Occupations », sur Democracy Now!, (consultĂ© le )
  2. (en) Angus Reid Institute, « Coastal Gaslink Chaos: Two-in-five support protesters in natural gas project dispute; half support pipeline », sur Angus Reid Institute, (consulté le )
  3. (en) Unist'ot'en Camp Site, « Invasion », sur UNIST’OT’EN, Heal the People, Heal the Land, (consultĂ© le )
  4. (en) Geoffrey Morgan, « B.C.’s Supreme court rules for $6.6-billion Coastal GasLink pipeline, against Indigenous law », sur Financial Post, Financial Post, (consultĂ© le )
  5. Madeleine Blais-Morin, « Manifestations autochtones: oĂč est le fĂ©dĂ©ral? », sur Radio Canada, (consultĂ© le )
  6. (en) Rafferty Baker, « A who's who of the Wet'suwet'en pipeline conflict », sur CBC News, (consulté le )
  7. (en) The Canadian Press, « Timeline of Wet’suwet’en solidarity protests and the dispute that sparked them », sur Global News, (consultĂ© le )
  8. (en) Geoffrey Morgan, « B.C.’s Supreme court rules for $6.6-billion Coastal GasLink pipeline, against Indigenous law », sur Financial Post, (consultĂ© le )
  9. Gérald A. Beaudoin, « Affaire Delgamuukw », sur L'Encyclopédie Canadienne, (consulté le )
  10. TC Énergie, « TC Énergie »
  11. Radio Canada, « Une sociĂ©tĂ© de la Couronne albertaine s’achĂšte un pipeline en Colombie-Britannique », sur Radio Canada, (consultĂ© le )
  12. (en) Star Staff, « Key moments in the Coastal GasLink and Wet’suwet’en conflict: a timeline », sur The Star, (consultĂ© le )
  13. (en) The Canadian Press, « Timeline of Wet’suwet’en solidarity protests and the dispute that sparked them », sur Global News, (consultĂ© le )
  14. Radio-Canada, « PremiĂšre journĂ©e de nĂ©gociations avec les Wet'suwet'en "productive",  selon les ministres », sur Radio-Canada, (consultĂ© le )
  15. (en) Gord Macdonald et Jon Azpiri, « B.C First Nation chiefs demand halt to Coastal GasLink pipeline work amid COVID-19 », Global News, (consulté le )
  16. (en) Coastal GasLink, « Statement — Measures to manage COVID-19 on the Coastal GasLink project », sur www.coastalgaslink.com, (consultĂ© le )
  17. (en) Stephanie Wood, « Coronavirus forces Wet’suwet’en to explore online talks on rights and title agreement », sur the narwhal.ca, (consultĂ© le )
  18. « PrĂšs de 50 opposants au projet Coastal GasLink arrĂȘtĂ©s dans le Grand Vancouver », sur Radio-Canada, (consultĂ© le )
  19. « Intervention policiĂšre au port de Vancouver », Radio-Canada,‎ (lire en ligne)
  20. « Discours du TrĂŽne sur fond de tensions en C.-B. », Radio-Canada,‎ (lire en ligne)
  21. « Multiples manifestations en C.-B. en « rĂ©ponse aux arrestations » Ă  Tyendinaga », Radio-Canada,‎ (lire en ligne)
  22. « De jeunes Autochtones rĂ©itĂšrent leur soutien aux Wet’suwet’en », Radio-Canada,‎ (lire en ligne)
  23. « Que rĂ©clament les manifestants qui bloquent la voie aux trains de VIA Rail? », Radio-Canada,‎ (lire en ligne)
  24. « Un premier train passe par Tyendinaga aprĂšs l’intervention policiĂšre », Radio-Canada,‎ (lire en ligne)
  25. « Tyendinaga : des trains du CN passent malgrĂ© la pression des manifestants », Radio-Canada,‎ (lire en ligne)
  26. « Le service sur la ligne exo 4 Candiac est interrompu par des manifestants », Radio-Canada,‎ (lire en ligne)
  27. « Le CP obtient une injonction pour lever le blocage Ă  Kahnawake », Radio-Canada,‎ (lire en ligne)
  28. « La barricade des Mohawks de Kahnawake a Ă©tĂ© renforcĂ©e », Journal de MontrĂ©al,‎ (lire en ligne)
  29. Émilie Bilodeau, « LevĂ©e de la barricade ferroviaire Ă  Kahnawake », sur la presse, (consultĂ© le )
  30. « La route 344 rouverte partiellement Ă  Kanesatake », TVA Nouvelles,‎ (lire en ligne)
  31. « QuĂ©bec obtient une injonction pour dĂ©faire le barrage Ă  Listuguj », La Presse,‎ (lire en ligne)
  32. « Une deuxiĂšme voie ferrĂ©e bloquĂ©e dans la rĂ©gion de MontrĂ©al », Radio-Canada,‎ (lire en ligne)
  33. « Saint-Lambert : les manifestants quittent les lieux », Radio-Canada,‎ (lire en ligne)
  34. « Déclaration du Blocage de Saint-Lambert », sur contrepoints-media, (consulté le )
  35. (en) Palmater, P., Guerin, F., Palmater, P., Dafnos, T., Fidler, R., Phillip, S., & Simon, S., « RCMP invasion of Wet'suwet'en Nation territory breaches Canada's 'rule of law' », sur Canadiandimension.com
  36. Guilbault, J.-P., « La difficile nĂ©gociation des titres ancestraux au cƓur du conflit Wet'suwet'en. », sur Radio-canada.ca,
  37. (en) Robert Davis et Mark Zannis, The Genocide Machine in Canada : The Pacification of the North, Black Rose Books, , 222 p.
  38. (en) Dean Neu, « Accounting and accountability relations: colonization, genocide and Canada’s first nations », sur Accounting, Auditing and Accountability Journal,
  39. (en) Tom, M. N., Sumida Huaman, E., & McCarty, T. L., « Indigenous knowledges as vital contributions to sustainability. », International Review of Education, 65(1), 1–18.,
  40. Nastassja Martin, Les Ăąmes sauvages, Paris, La DĂ©couverte, , 326 p.
  41. (en) Manuel Arthur, Unsettling Canada : A National Wake-Up Call, Toronto, Between the Lines, , 320 p. (ISBN 978-1-77113-176-6)
  42. Ahmed Kouaou, « Crise autochtone : le politique a-t-il fait défaut? », sur Radio-Canada.ca, (consulté le )
  43. Tele Sur, « Mexico: 1000, Wixarika Indigineous People Reclaim Ancestral Land. Tiré de », sur Tele Sur, (consulté le )
  44. l'Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones
  45. (en) Martin Mowforth, « Indigenous people and the crisis over land and resources », The Guardian,
  46. Fournis, Y. & Fortin, M.-J., « Les régimes de ressources au Canada : les trois crises de l'extractivisme », sur VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement,
  47. Statistique Canada, « Croissance du revenu par habitant dans les provinces depuis 1950. », sur Gouvernement du Canada,
  48. St. John, Michelle, « Colonization Road [Film] »,
  49. Emma McIntosh, « RCMP arrest 11 more pipeline opponents on third day of Wet’suwet’en raid », sur Canada’s National Observer, (consultĂ© le )
  50. (en) Gauri Gandbhir, « Canada : Wet’suwet’en land and sovereignty », sur Green left,
  51. R.C. MacLeod, « Gendarmerie royale du Canada (GRC) », sur L'Encyclopédie canadienne, (consulté le )
  52. Agence QMI, « La GRC Ă©tait prĂȘte Ă  tirer sur des manifestants autochtones », sur TVA Nouvelles, (consultĂ© le )
  53. injonctions de la Cour suprĂȘme de la Colombie-Britannique
  54. Samba, M. & Lasalle, G, « Le chemin de fer, un outil symbolique et tactique avéré pour les PremiÚres Nations. », sur Radio-Canada - ICI Colombie-Britannique-Yukon.,
  55. (en) Tania Willard, Red flags red skin : a series of story illustrations about native working-class history. Our Times.,
  56. Lundi Matin, « D’un ocĂ©an Ă  l’autre », sur Lundi Matin, (consultĂ© le )
  57. Amanda Robinson, « Chef », sur L'Encyclopédie Canadienne,
  58. Kathleen Martens, « Wet’suwet’en chief wants Nation to come up with own solution in pipeline dispute », sur APTN News,
  59. Samuel Desbiens, « « L’ignorance » de la population canadienne Ă  propos des rĂ©alitĂ©s autochtones critiquĂ©e », sur Radio-Canada, (consultĂ© le )
  60. Michel Seymour, « Avec les Wet'suwet'en, il ne s'agit plus de réconciliation mais de recolonisation », sur The Conversation,
  61. Chantelle Bellrichard, « Benefits agreement asks First Nation to discourage members from hindering B.C. pipeline project », sur CBC News,
  62. Carol Innitt, « B.C. failed to consider links between ‘man camps,’ violence against Indigenous women, Wet’suwet’en argue », sur The Narwhal.ca, (consultĂ© le )
  63. Dan Levin, « Dozens of Women Vanish on Canada’s Highway of Tears, and Most Cases Are Unsolved », sur The New York Times,
  64. Laurence Niosi, « Budget fédéral : 4,5 milliards pour la réconciliation », sur Radio-Canada, (consulté le )
  65. Gouvernement du Canada, « L’équitĂ© pour les Autochtones dans le systĂšme judiciaire », sur Gouvernement du Canada, (consultĂ© le )
  66. Alex Ballinghall, « ‘Reconciliation Is Dead and We Will Shut down Canada,’ Wet’suwet’en Supporters Say », sur The Star,
  67. Darrell Bricker, « Growing Proportion of Canadians Have Unfavourable (60%, +11) View of Blockades », sur ipsos.com, (consulté le )
  68. Follett Hosgood, Amanda (3 mars 2020) “ We Have to Stand Together’: A Tale of Two Nations” The Tyee. Retrieved March 29, 2020.
  69. McKeen A., Chiu J., “Inside a protest movement: How climate activists are taking Wet’suwet’en fight from B.C. to Yonge Street”, The Star, 11 fĂ©vrier 2020, https://www.thestar.com/news/canada/2020/02/11/wetsuweten-shutcanadadown-supporters-vow-to-block-bc-throne-speech.html
  70. CBC News, “B.C. students join nationwide school walkout in support of Wet'suwet'en hereditary chiefs”, 4 mars 2020, https://www.cbc.ca/news/canada/british-columbia/b-c-students-join-nationwide-school-walkout-in-support-of-wet-suwet-en-hereditary-chiefs-1.5485663
  71. Dorval G., “RĂ©sistance Ă  un projet de pipeline: soutenons la lutte des autochtones”, La Presse, 8 janvier 2020, https://www.lapresse.ca/debats/opinions/202001/07/01-5255987-resistance-a-un-projet-de-pipeline-soutenons-la-lutte-des-autochtones.php
  72. Bellerichard, Chantelle (26 avril 2019) ‘’Wet'suwet'en hereditary leaders level human rights complaint during speeches at United Nations forum.’’ CBC. ConsultĂ© le 8 avril 2020.
  73. Radio Canada, Le Canada doit stopper trois projets, dont Trans Mountain, exhorte un comité de l'ONU, Radio Canada, https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1460295/nations-unies-arret-construction-trans-mountain-tmx
  74. "#ShutDownCanada: Solidarity With Wetsuwet'en." It's Going Down, 9 janvier 2020,  itsgoingdown.org/shutdowncanada-solidarity-with-wetsuweten/. Accessed 29 mars 2020.
  75. Forrester, Brett, et al. "Sit ins and demonstrations continue in support of Wet'suwet'en hereditary chiefs." APTN National News, 10 février 2020, aptnnews.ca/2020/02/10/ sit-ins-and-demonstrations-continue-in-support-of-wet'suwet'en-hereditary-chiefs.Accessed 29 mars 2020.
  76. "Reprise de la plupart des trajets des trains de VIA Rail au pays." Radio-Canada, 3 mars 2020, https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1646014/transport-trains-blocages-manifestations-tyendinaga. Accessed 29 mars 2020.
  77. INVASION
  78. "S'unir pour les Wet'suwet'en Ă  travers l'art." Radio-Canada, 10 mars 2020,  https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1657747/concert-benefice-wetsuweten-elisapie-montreal. Accessed 29 mars 2020.
  79. Dixon, Lindsay. "Wet'suwet'en Strong." Canadian Art, 19 fĂ©vrier 2020,   https://canadianart.ca/features/wetsuweten-strong/.
  80. Lukacs, Martin. "The Long Road to This Winter of Protests." The Tyee, 27 mars 2020. https://thetyee.ca/Analysis/2020/03/27/The-Long-Road-This-Winter-Protests/. Accessed 29 mars 2020.
  81. Brake, Justin. "Researchers say RCMP action against Wet'suwet'en would place corporate interests over Indigenous rights." APTN News, 6 janvier 2019, https://aptnnews.ca/2019/01/06/researchers-say-rcmp-action-against-wetsuweten-would-place-corporate-interests-over-indigenous-rights/. Accessed 29 mars 2020.
  82. Heidenreich, Phil. "61% of Canadians oppose Wet'suwet'en solidarity blockades, 75% back action to help Indigenous people: poll." Global News, 19 février 2020. Accessed 29 mars 2020.
  83. Traoré, A., & de Lagasnerie, G. (2019). Le combat adama [PDF].
Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplĂ©mentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimĂ©dias.