Premières Nations
Les Premières Nations[2] (en anglais : First Nations) sont les peuples autochtones du Canada inscrits et non-inscrits en vertu de la Loi sur les Indiens, à l'exception des Inuits et des Métis. L'expression s'est répandue dans les années 1970 afin de remplacer le terme « Indiens », jugé offensant[3] - [4]. Nombre de collectivités autochtones ont adopté l’expression « Première Nation » pour remplacer l'expression « bande indienne »[5], le cas échéant, l'expression s'emploie plutôt pour désigner précisément le groupe d'autochtones en question.
Population totale | 1 673 785 (2016)[1] |
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Langues | Langues des Premières Nations |
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Sur plus d'un million de personnes qui se définissent comme autochtones au Canada, 64 % font partie des Premières Nations. Ils se répartissent en 50 nations ou groupes linguistiques et 617 communautés. La majorité (54 %) des membres des Premières Nations vivent en milieu urbain et non plus en réserve[6].
Terminologie
Ensemble, les Premières Nations, les Inuits et les Métis forment les peuples autochtones canadiens.
L'expression « Premières Nations » s'est répandue à partir des années 1980 en remplacement du terme « Indiens »[7] considéré comme péjoratif et surtout inexact (l'Indien étant l'habitant de l'Inde).
Une confusion peut exister entre l'utilisation de l'expression « Premières Nations » au pluriel et « Première Nation » au singulier. Certains peuples autochtones utilisent le terme « Première Nation » à la place de « bande » pour désigner leur communauté[8]. Dans ce dernier cas, l'expression ne désigne pas l'ensemble des Premières Nations du Canada, mais réfère plutôt au groupe d'autochtones (la « bande ») visé. Il est par ailleurs, dans ce cas, plus souvent employé au singulier[5] (par exemple : la Première Nation de Long Point) et désigne la bande uniquement, et non l'entité territoriale sur laquelle vit la Première Nation (qui elle demeure une réserve).
Le mot « Indien » reste le terme légal même si son usage est en déclin[9] - [10]. Le terme « Native Americans » s'appliquent aux peuples autochtones des États-Unis[11] et son équivalent « Native Canadians » est peu utilisé au Canada. La Proclamation royale de 1763 se référait aux Autochtones de l'Amérique du Nord britannique comme « tribus » ou « nations »[12].
Histoire
Histoire ancienne
Les ancêtres des Premières Nations viennent d'Asie et particulièrement de la Sibérie. Ils franchissent le détroit de Béring, alors à sec, et parviennent en Alaska. Tandis que certains longent la côte jusqu'à l'endroit maintenant partie des États-Unis, les autres attendent 13 000 ans pour qu'un passage se forme entre les deux glaciers et qu'ils descendent vers le sud. Ces deux groupes sont à l'origine des actuels Amérindiens[13].
Assimilation des Premières Nations
Ces conflits trouvent leur origine dans l'expansion des treize premières colonies américaines qui se traduisit aussi par la conquête de l'Ouest. Ces conflits feront l'objet de représailles de la part des deux camps, tels que des massacres et des pillages, mais qui restèrent limités au continent dit « américain » ; jamais les membres des Premières Nations ne firent de tentative de conquête de l'Europe, ni n'y commirent des massacres et des pillages.
XIXe siècle
Dès 1876, une loi interdit aux autochtones de devenir propriétaires ; « l’article 70 de l’Acte des Sauvages, 1876, interdisait aux Indiens d’exercer tout droit d’établissement dans les Prairies »[14]. Le premier Premier ministre du Canada, John A. Macdonald, organise une politique qualifiée d'« ethnocide » envers les autochtones des plaines du centre du pays afin de s'approprier leurs terres, provoquant intentionnellement des famines, des exécutions arbitraires et l'assimilation forcée des enfants dans des pensionnats spécialement construits à cet effet. Les autochtones chassés de leurs terres sont conduits dans des réserves où ils sont dépourvus de tout droit et de toute liberté ; ils ne pourront sortir de ces réserves qu'à partir des années 1950[15]. Encore aujourd'hui, « une réserve est régie par la loi sur les Indiens et est définie comme étant une "parcelle de terrains dont Sa Majesté est propriétaire et qu’elle a mise de côté pour l’usage et au profit d’une bande indienne" » ; ils sont ainsi privés de droit de propriété[16].
XXe siècle
Quelque 150 000 enfants amérindiens ont été envoyés de force dans des pensionnats subventionnés par le gouvernement. Cette pratique s'est poursuivie jusqu'en 1996. Entre 3 000 et 6 000 enfants sont morts dans ces pensionnats, de causes diverses : environ la moitié sont morts de la tuberculose et d’autres maladies infectieuses, d’autres dans les incendies qui ont ravagé ces établissements souvent vétustes, certains par suicide ou en tentant de fuir. Quelques établissements ont planifié la malnutrition de certains enfants à des fins d'expérimentations médicales. Entre 1942 et 1952, des enfants autochtones ont été délibérément affamés afin élargir les connaissances médicales sur l’apport d’éléments nutritionnels[17].
C'est en 1961 que l'article 112, traitant de l'émancipation obligatoire des Premières Nations fut aboli. Jusque là , le statut d’Indien était perdu dès qu'un autochtone recevait un « diplôme universitaire, qu’il devient ministre d’un culte chrétien ou qu’il obtient un titre professionnel de médecin ou d’avocat »[18]. Il leur était interdit même de danser ou de faire des rassemblements ou des potlachs ; « pendant près d’un siècle, les membres des Premières Nations enfreignent la loi s’ils manifestent leur identité de manière traditionnelle, et il leur est impossible d’interagir vraiment avec la société non autochtone sans perdre leur statut »[18]. En 1951, une nouvelle version de la loi paraît, mais elle reste fondamentalement discriminatoire : par exemple, une femme autochtone qui se marie à un non autochtone perd de fait son statut d'Indienne[18]. À ce sujet, « une Indienne qui épouse un Indien devient membre de la bande de son mari et perd du même coup toute appartenance à sa bande d’origine. De plus, elle perd complètement son statut d’Indienne si son mari meurt ou l’abandonne »[18]. « En , le gouvernement fédéral s’engage à éliminer le sexisme énoncé dans la Loi »[18].
Pour ce qui est des langues maternelles, elles ne jouissent d'aucune reconnaissance officielle dans la Constitution canadienne (ni même celle de 1982)[19]. Mais depuis 2002, en vertu de la Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut[20], les Inuits ont le droit d'utiliser leur langue maternelle, l'inuktitut[21]. « Les séquelles de ces politiques assimilatrices persistent encore aujourd’hui. En effet, le Recensement du Canada de 2011 révèle que la plupart des 60 langues autochtones recensées sont menacées de disparition »[22].
Excuses du gouvernement en 2008
Le , le premier ministre Stephen Harper présente les excuses des autorités canadiennes aux 150 000 enfants autochtones qui subirent une tentative d'assimilation dans des pensionnats chrétiens financés par le gouvernement[23]. Harper déclare : « Le gouvernement du Canada est sincèrement désolé, et demande pardon aux populations autochtones de ce pays, pour avoir si profondément failli à leur égard. Nous sommes désolés »[24].
Ces excuses font écho à celles présentées quatre mois plus tôt par le premier ministre australien Kevin Rudd aux Générations volées aborigènes.
Culture
Langues
Au Canada, les ethnolinguistes estiment le nombre de langues des Premières Nations, mortes et toujours existantes confondues, à 1 321. Bien que certaines comportent des différences majeures par rapport à d'autres les spécialistes ont pu cependant les regrouper en « familles » n'ayant parfois connu aucun contact.
Les langues européennes ont nommé, en utilisant leurs propres vocabulaires, des éléments des cultures autochtones, ce qui introduit des confusions.
Sans écriture, les Premières Nations ont laissé peu de traces anciennes. Néanmoins, les cultures des Premières Nations ont influencé les toponymes : plusieurs provinces portent un nom d'origine autochtone (Manitoba, Saskatchewan, Ontario, Québec, etc.). De nombreux fleuves (Athabasca, Assiniboine, etc.) et éléments de géographie physique ont été puisés dans les langues des Premières Nations.
Spiritualité
On regroupe le plus souvent les cultures des Premières Nations en grands ensembles géographiques : Nord-Est, Nord-Ouest (région subarctique, Nord-Ouest), Grandes Plaines, Sud-Est, Sud-Ouest, forêts de l'Est. Les conditions de vie étaient donc très différentes selon le milieu de vie des Premières Nations. La diversité des peuples s'exprime également dans le domaine des croyances. On peut néanmoins dégager quelques points communs aux nombreuses tribus :
- Un Dieu créateur et unique appelé « Le Grand Esprit » auquel les membres des Premières Nations donnent le nom de Wacondah.
- Des dieux secondaires ou « Esprits Auxiliaires » (par exemple : les esprits du vent, du feu, du tonnerre, ou wakantanka le dieu de la chasse).
- Des dieux démoniaques ou créatures maléfiques tel le Wendigo.
- Les Premières Nations étaient animistes. Offrandes à la terre-mère.
- Le chamanisme : lecture des signes au moyen d'enthéogènes ou d'artifices.
- Le symbolisme : chaque animal et élément sacré doit être représenté sous forme de totem ou de signes (cercle, croix, triangle).
Les Premières Nations partageaient également des rites communs :
- Rites de purification avant les prières et les cérémonies : utilisation du tabac et de la sauge des devins.
- Prières et transes en cercles
- Les pow-wow
- La Danse des Esprits (The Ghost Dance) : les participants répètent des couplets au son des tambours. Les incantations peuvent mener à la transe.
- La Danse du Soleil (The Sun Dance) dans les Grandes Plaines pour vénérer le soleil, pendant la période du solstice d'été. Elle était accompagnée de mutilations corporelles volontaires destinées à montrer son courage et à entrer en transe.
Notes et références
- « Profil du recensement, Recensement de 2016 - Canada [Pays] et Canada [Pays] », sur www12.statcan.gc.ca (consulté le ).
- Il est d’usage d’écrire Premières Nations avec deux majuscules initiales. Le terme Premières Nations est toujours utilisé en tant que nom propre.
- « Premières Nations. L'Assemblée Premières Nations a définitivement choisi son nom en 1982. Elle portait le nom Canadian Broderhood of Indians.9 », sur www.thecanadianencyclopedia.ca (consulté le ).
- « Première Nation, Autochtone ou Indigène? Il n’y a pas de réponse parfaite | NATIONAL », sur www.national.ca (consulté le )
- Union des municipalités du Québec, Guide terminologique autochtone, Montréal, Direction des communications et du marketing de l'UMQ, , 39 p. (lire en ligne), p. 8
- « Premières Nations », sur aadnc-aandc.gc.ca (consulté le ).
- (en) Gordon Gibson, A New Look at Canadian Indian Policy : Respect the Collective – Promote the Individual, , 268 p. (ISBN 978-0-88975-243-6, lire en ligne)
- « Terminology », sur aadnc-aandc.gc.ca, .
- (en) « Words First An Evolving Terminology Relating to Aboriginal Peoples in Canada » [archive du ], sur Communications Branch of Indian and Northern Affairs Canada, (consulté le ).
- (en) « Terminology of First Nations, Native, Aboriginal and Métis » [PDF], sur Aboriginal Infant Development Programs of BC, (consulté le ).
- (en) Liz Hill, « National Museum of the American Indian », sur Smithsonian Institution, (consulté le ).
- (en) W.R. Wilson, « The Royal Proclamation of 1763 », (consulté le ).
- (en) Carl Zimmer, « Crossing From Asia, the First Americans Rushed Into the Unknown », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le ).
- « LES AUTOCHTONES : HISTORIQUE DES LOIS DISCRIMINATOIRES À LEUR ENDROIT », sur publications.gc.ca (consulté le ).
- « John A. Macdonald, « un personnage complexe », dit l'historien James Daschuk », sur ici.radio-canada.ca, .
- « Chronique juridique : les réserves indiennes, ces terres de « Sa Majesté » », sur Radio-Canada.ca (consulté le ).
- « Samir Shaheen-Hussain : « Au Canada, le colonialisme a tué les enfants autochtones » », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne)
- « Loi sur les Indiens | l'Encyclopédie Canadienne », sur www.thecanadianencyclopedia.ca (consulté le ).
- « Les droits linguistiques des autochtones », sur www.axl.cefan.ulaval.ca (consulté le ).
- « Loi sur les eaux du Nunavut et le Tribunal des droits de surface du Nunavut », sur laws-lois.justice.gc.ca, .
- « Droits linguistiques des autochtones au Canada », sur www.axl.cefan.ulaval.ca (consulté le ).
- « Les langues autochtones dans l’édification d’un pacte de réconciliation », sur Notes de la Colline, (consulté le ).
- Débats de la Chambre des communes : Compte rendu officiel (Hansard) - 11 juin 2008
- (en) Canada apology for native schools - BBC News, 11 juin 2008
Voir aussi
Filmographie
- Le Peuple invisible, documentaire de 2007 sur les Premières Nations du Canada, histoire du peuple algonquin, de Richard Desjardins et Robert Monderie.
- Kanehsatake 270 ans de résistance Documentaire sur la Crise d'Oka -1993, par Alanis Obomsawin.
Bibliographie
- Paul Coze, Wakanda, Paris, Alexis Redier,
- Florence Delay et Jacques Roubaud, Partition rouge. Poèmes et chants des Indiens d'Amérique du Nord, Paris, Seuil, , 231 p. (ISBN 2-02-023690-7)
- Renée Dupuis, Quel Canada pour les Autochtones? La fin de l'exclusion, Montréal, Boréal, , 174 p.
- M. Edmonds et E.-E. Clark, Légendes indiennes, t. 1 Les voix du vent, Éditions du Rocher, (ISBN 2-268-02636-1)
- Gilbert Legay, Dictionnaire des Indiens d'Amérique du Nord, Bruxelles/Paris, Casterman, , 237 p. (ISBN 2-203-13135-7)
- Michel Piquemal, Les Indiens des plaines d'Amérique, Paris, Sorbier, , 45 p. (ISBN 2-7320-3699-4)
- René Thévenin, Mœurs et histoire des indiens d'Amérique du Nord, Paris, Payot, , 387 p. (ISBN 2-228-89858-9)
- Claude Fohlen, Les Indiens d'Amérique du Nord, PUF, coll. « Que sais-je? », (ISBN 2-13-044214-5)
- Larry-J. Zimmerman (trad. de l'anglais), Les Indiens d'Amérique du Nord : [les Premières Nations], Paris, Librairie Gründ, , 144 p. (ISBN 2-7000-3114-8)
- David W. Penney (trad. de l'anglais), Arts des Indiens d'Amérique du Nord, Paris, Pierre Terrail, , 206 p. (ISBN 2-87939-118-0)
- Jack Weatherford, Ce que nous devons aux Indiens d'Amérique, Paris, Albin Michel,
- M. Harner, Chamane. Les secrets d'un sorcier d'Amérique du Nord, Paris, Albin Michel,
- Olive-Patricia Dickason, Les Premières Nations du Canada : Depuis les temps les plus lointains jusqu'à nos jours., Septentrion, , 511 p. (ISBN 978-2-89448-052-6, lire en ligne)
Articles connexes
Notions
Peuples autochtones canadiens
Histoire
Droit international
- Traités signés entre les Premières Nations et le gouvernement canadien, Revendication globale
- Anthropologie juridique, Savoirs traditionnels, Coutume
- Droit des peuples autochtones (Déclaration des droits des peuples autochtones)
- Terra nullius, Doctrine de la découverte, Colonialisme, Colonisation, Décolonisation, Droit des peuples à disposer d'eux-mêmes
- Conseil circumpolaire inuit, Conseil de l'Arctique, Conseil nordique
Études théoriques
Liens externes
- La collection ethnographique du musée McCord d'histoire canadienne
- Les négociations entre l'État et les Premières Nations au Canada - Essai historique illustré par de nombreuses photographies, gravures et dessins
- (en) La tradition « deux-esprits »
- Les premiers américains
- Exploration et colonisation de l'Amérique du Nord
- Qui étaient les premiers habitants de l'Amérique ? - Site personnel de Patrick Couture sur le Québec
- La Nation Autochtone du Québec