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Ariel (lune)

Ariel, également connu sous le nom d'Uranus I, est un satellite naturel d'Uranus. Découvert le par William Lassell, il est nommé d'après un esprit de l'air apparaissant dans le poème La Boucle de cheveux enlevée d'Alexander Pope et la pièce de théâtre La Tempête de William Shakespeare. Il n'a été survolé que par une seule sonde spatiale, Voyager 2, en 1986, et seulement 35 % de la surface de l'astre a pu être photographiée à cette occasion.

Ariel
Uranus I
Image illustrative de l’article Ariel (lune)
Ariel, photographiée le 24 janvier 1986
Ă  une distance d'environ 130 000 km.
Type Satellite naturel d'Uranus
Caractéristiques orbitales
(Époque J2000.0)
Demi-grand axe 190 900 km
PĂ©riapside 190 670 km
Apoapside 191 130 km
ExcentricitĂ© 0,001 2
PĂ©riode de rĂ©volution 2,520 d
Inclinaison 0,041°
Caractéristiques physiques
Dimensions 1162 Ă— 1156 Ă— 1155 km
Masse 1,4 Ă— 1021 kg
Masse volumique moyenne 1,66 Ă— 103 kg/m3
GravitĂ© Ă  la surface 0,27 m/s2
PĂ©riode de rotation 2,520 d
(Synchrone)
Magnitude apparente 14,4
(Ă  l'opposition)
Albédo moyen 0,39
TempĂ©rature de surface ~80 K
Caractéristiques de l'atmosphère
Pression atmosphérique Pas d'atmosphère
DĂ©couverte
DĂ©couvreur William Lassell
Date de la découverte 24 octobre 1851
DĂ©signation(s)
Désignation(s) provisoire(s) —

Ariel est la plus brillante des lunes en orbite autour d'Uranus, ainsi que la troisième plus massive et la quatrième plus grande. Elle est principalement composée, à parts égales, de glaces et de roches. À l'instar des autres lunes d'Uranus, son orbite est inscrite dans un plan perpendiculaire à l'orbite de la planète autour du Soleil, ce qui provoque des variations saisonnières extrêmes en surface. En cela, elle suit la rotation atypique de la planète qui tourne selon un axe quasiment parallèle au plan de son orbite autour du Soleil. Pour cette raison, Ariel, comme les autres lunes d'Uranus, s'est très probablement formée à partir d'un disque d'accrétion qui entourait la planète peu de temps après sa formation. Sa structure interne s'est différenciée pour former un noyau de roche et un manteau de glace. Ariel a une surface complexe comprenant de vastes terrains marqués par des cratères d'impact et traversés par un réseau de failles escarpées, de canyons et de crêtes. Cette surface montre des signes d'une activité géologique plus récente que les autres lunes d'Uranus, résultant des importantes forces de marées exercées par la planète. L'énergie ainsi accumulée a été dissipée sous forme de chaleur dans le manteau de l'astre.

DĂ©couverte et Ă©tymologie

Ariel est découvert par William Lassell le , en même temps qu'Umbriel, une autre lune d'Uranus[1] - [2]. William Herschel, le découvreur des deux premières lunes d'Uranus, Titania et Obéron, affirmait avoir vu quatre autres satellites autour de la planète, mais ses observations n'ont pas pu être confirmées[3] - [4].

L'appellation « Ariel » vient du génie aérien bienfaisant au service de Prospero dans la pièce La Tempête de William Shakespeare[5]. Les formations géologiques remarquables portent les noms de bons esprits et ceux de la lumière dans les différentes mythologies : Rima, Yangoor, Domovoy, Agape, Mélusine, Finvara, Berylune, etc. Les quatre autres lunes connues à cette époque portent également le nom de différents personnages de Shakespeare ou d'Alexander Pope, tous suggérés par John Herschel en 1852 à la demande de William Lassell[6]. Par ailleurs, cette lune est pareillement désignée sous l'appellation « Uranus »[7].

Orbite

Ariel, Uranus et les autres lunes photographiées par l'Observatoire du Cerro Paranal.

Après Miranda, Ariel est la deuxième lune la plus proche d'Uranus parmi les cinq lunes majeures[note 1]. Son orbite est distante d'approximativement 190 000 km avec une faible excentricitĂ© orbitale et une inclinaison minime avec le plan Ă©quatorial d'Uranus[8] - [9]. Sa pĂ©riode orbitale est d'approximativement de 2,5 journĂ©es terrestres et coĂŻncide avec sa pĂ©riode de rotation. Ainsi, Ariel montre toujours la mĂŞme face Ă  la planète Uranus. Elle possède aussi un « hĂ©misphère avant » (parfois notĂ© apex orbital) qui fait face au mouvement orbital et un « hĂ©misphère arrière » (ou antapex orbital) qui lui est opposĂ©. Cette configuration est connue sous le nom de rotation synchrone. Elle est la consĂ©quence des forces de marĂ©es produites par Uranus sur sa lune. Ces forces de marĂ©es ont engendrĂ© des frottements qui ont progressivement freinĂ© la rotation d'Ariel sur elle-mĂŞme. Ce phĂ©nomène s'est interrompu lorsque la rĂ©volution de l'astre autour d'Uranus coĂŻncida avec sa rotation[10]. L'orbite d'Ariel est complètement inscrite dans la magnĂ©tosphère d'Uranus[11]. De ce fait, son hĂ©misphère arrière est influencĂ© par le plasma magnĂ©tosphĂ©rique qui est en rotation avec la planète[12]. Ce bombardement pourrait entraĂ®ner l'assombrissement des hĂ©misphères arrières de l'ensemble des satellites majeurs uraniens, Ă  l'exception d'ObĂ©ron[11]. Ariel capture en effet les particules magnĂ©tosphĂ©riques chargĂ©es. En 1986, la sonde Voyager 2 permit d'observer une baisse prononcĂ©e du nombre de particules Ă©nergĂ©tiques Ă  proximitĂ© de l'orbite des lunes uraniennes[13].

Ă€ l'instar des autres satellites connus d'Uranus, Ariel orbite dans le plan Ă©quatorial de la planète. Cependant l'axe de rotation d'Uranus est quasiment inscrit dans son plan orbital. Ainsi, les pĂ´les gĂ©ographiques de la lune sont continuellement Ă©clairĂ©s pendant 42 ans, puis plongĂ©s dans la nuit pour une mĂŞme durĂ©e. De ce fait, Ariel est sujette Ă  des cycles saisonniers extrĂŞmes, tels qu'ils sont observĂ©s sur Terre depuis les pĂ´les (voir Nuit polaire ou Jour polaire) autour des solstices[11]. Son survol par Voyager 2 coĂŻncida avec le solstice d'Ă©tĂ© de l'hĂ©misphère sud de 1986, alors que la quasi-totalitĂ© de l'hĂ©misphère nord Ă©tait dans l'obscuritĂ©. Une fois tous les 42 ans, lorsqu'Uranus connaĂ®t un Ă©quinoxe et que la Terre s'inscrit dans son plan Ă©quatorial, les lunes d'Uranus peuvent s'occulter les unes les autres. Un certain nombre de ces Ă©vĂ©nements ont eu lieu en 2007–2008, incluant une occultation d'Ariel par Umbriel le [14].

Actuellement, Ariel n'est en résonance orbitale avec aucun autre satellite uranien. Dans le passé, cette lune pourrait avoir été en résonance 5:3 avec Miranda. Ce faisant, Ariel aurait été partiellement responsable d'une importante élévation de température observée sur Miranda (bien que la chaleur produite par une ancienne résonance 1:3 d'Umbriel avec Miranda était probablement environ trois fois plus importante)[15]. L'orbite d'Ariel pourrait aussi avoir été verrouillée par une résonance 4:1 avec Titania, qui s'est ensuite échappée[16]. Échapper à un mouvement de résonance est plus facile pour les lunes d'Uranus que pour les lunes de Jupiter ou de Saturne, en raison du degré moindre d'aplatissement de la planète[16]. Cette résonance, qui aurait eu lieu il y a environ 3,8 milliards d'années, aurait augmenté l'excentricité orbitale d'Ariel. Cette excentricité est à son tour responsable de forces de marées uraniennes, variant avec la position de l'astre sur son orbite. Les forces de marées génèrent d'importantes frictions au sein de la lune, et pourraient avoir causé un échauffement des structures internes d'Ariel d'au moins 20 K[16].

Composition et structure internes

Cette lune est la quatrième plus grande lune d'Uranus et elle pourrait être la troisième plus massive[note 2] - [17]. La densité de ce satellite naturel est de 1,66 g/cm3[18]. Au regard de sa densité et de ses dimensions, le modèle interne des lunes de taille moyenne proposé par H. Hussmanna et al.[19] établit une composition en quantités approximativement égales de glace et d'autres matériaux[19]. Ces derniers pourraient être constitués de roches et de matériaux carbonacés incluant des composés organiques lourds nommés tholins[10]. La présence de glace d'eau sous forme essentiellement cristalline a été révélée par les observations spectroscopiques infrarouges, à la surface de la lune[11]. Cette glace ne serait pas seulement formée d'eau mais aussi de méthane[20]. Les bandes d'absorption de la glace d'eau sont plus fortes sur son hémisphère avant, celui qui est perpétuellement face au mouvement de l'astre autour d'Uranus, que sur son hémisphère arrière[11]. Cette asymétrie pourrait trouver son origine dans le bombardement de particules chargées en provenance de la magnétosphère d'Uranus, qui est plus important dans l'hémisphère arrière (induit par le plasma en co-rotation)[11]. Ces particules énergétiques provoquent une pulvérisation cathodique de la glace d'eau. Cette pulvérisation décompose le méthane capturé par la glace en hydrate de méthane, clathrates et autres composés organiques sombres. Ce sont ces résidus chimiques qui recouvriraient la surface sombre[20] et riche en carbone qui a été observée[11].

Le seul autre composé chimique identifié par spectroscopie infrarouge à la surface d'Ariel est le dioxyde de carbone (CO2), qui est principalement concentré sur l'hémisphère arrière. Ariel est le satellite uranien où la présence de CO2 est la mieux établie[11] ; c'est aussi là qu'il fut découvert en premier lieu[11]. Ce CO2 pourrait être produit sur place à partir des carbonates ou des matériaux organiques, sous l'influence des particules chargées de la magnétosphère d'Uranus ou des rayonnements ultraviolets du Soleil. Cette hypothèse pourrait expliquer l'asymétrie dans sa distribution, puisque l'hémisphère arrière est sujette à une influence magnétosphérique plus importante que l'hémisphère avant. Une autre source possible de ce CO2 pourrait être le produit du dégazage de nucléides primordiaux capturés par la glace d'eau, dans le cœur d'Ariel. La fuite de CO2 depuis l'intérieur de la lune pourrait être associée à une activité géologique passée[11].

ConformĂ©ment Ă  sa taille, Ă  sa composition faite de roche et de glace, et Ă  la prĂ©sence possible de sel ou d'ammoniac en solution qui aurait abaissĂ© la tempĂ©rature de gel de l'eau, Ariel pourrait avoir connu une diffĂ©renciation planĂ©taire. Cette diffĂ©renciation pourrait avoir entraĂ®nĂ© la formation d'un noyau rocheux surmontĂ© d'un manteau de glace[19]. Le rayon de ce noyau, de 372 km, reprĂ©senterait environ 64 % du rayon total de la lune, et sa masse serait approximativement 56 % de la masse totale. La pression en son centre serait d'environ 0,3 GPa[19]. L'Ă©tat actuel du manteau n'est pas clairement Ă©tabli, mais la prĂ©sence d'un ocĂ©an liquide dans le sous-sol d'Ariel est improbable[19].

GĂ©ologie

Albédo et couleur

l'hémisphère bas d'Ariel est montré, rougeâtre et sombre, avec des fissures et des cratères en bordure.
L'image d'Ariel de plus haute résolution prise par Voyager 2. Les canyons couverts par des plaines lisses y sont visibles dans le coin inférieur droit.

Parmi les lunes d'Uranus, Ariel est le satellite le plus brillant[21]. Sa surface montre un important effet d'opposition : la réflexivité décroît de 53 % pour un angle de phase de 0° (albédo géométrique) à 35 % pour un angle de 1°. Son albédo de Bond, d'environ 23 %, est le plus élevé parmi les satellites d'Uranus[21]. La surface d'Ariel est généralement de couleur neutre[22]. Il peut y avoir une asymétrie entre l'hémisphère avant (qui fait face au mouvement orbital) et l'hémisphère arrière[23]. Ce dernier apparaît 2 % plus rouge que le premier[note 3]. La surface d'Ariel ne présente généralement aucune corrélation entre géologie et albedo ni couleur. Ses canyons ont par exemple la même couleur que ses cratères. Des dépôts d'impacts brillants autour de certains cratères récents sont néanmoins légèrement bleutés, rapprochant ainsi parfois couleur et structure géologique[22] - [23]. Il y a aussi quelques points légèrement bleutés qui ne correspondent à aucune structure géologique connue[23].

GĂ©ographie

La surface d'Ariel présente trois types de zones géologiques distinctes : des cratères, des plaines et des crêtes[24]. Les principales structures géologiques observées sont les cratères d'impact, les canyons, les escarpements de faille, les crêtes et les dépressions[25].

structures géographiques sombres et angulaires, coupées par des ravines lisses en forme de triangles, mis en contraste par les lumières du soleil
Graben à la surface d'Ariel. Le sol est couvert d'un matériau lisse probablement extrudé depuis le sous-sol

Le pĂ´le sud d'Ariel prĂ©sente la plus grande Ă©tendue gĂ©ographique connue de cette lune. Il s'agit d'une vaste surface ondulĂ©e marquĂ©e de nombreux cratères d'impacts. De ce fait, cette zone est considĂ©rĂ©e comme la plus ancienne qui ait Ă©tĂ© observĂ©e sur Ariel[24] - [10]. Elle est recoupĂ©e par un rĂ©seau de canyons (appelĂ©s graben) et de crĂŞtes escarpĂ©es qui se manifestent principalement sous les tropiques, dans les latitudes moyennes de l'hĂ©misphère sud d'Ariel[24] - [26]. Ces canyons, connus sous le nom de chasmata[27], sont très probablement des grabens formĂ©s par l'Ă©cartement de l'Ă©corce durcie de l'astre. Cet Ă©cartement rĂ©sulterait d'une tension globale exercĂ©e par le gel progressif de l'eau (ou de l'ammoniaque) situĂ©e plus en profondeur[10] - [24] - [26]. Les chasmata mesurent entre 15 et 50 km de large et sont essentiellement orientĂ©s en direction de l'est ou du nord-est[24]. Le sol de nombreux canyons est convexe, se surĂ©levant d'un Ă  deux kilomètres[27]. Parfois, les sols sont sĂ©parĂ©s des parois des canyons par des gorges (sortes de fossĂ©s) d'environ un kilomètre de large[27]. Le plus grand graben a des gorges qui courent le long des crĂŞtes de son fond convexe, ce sont les valles[10]. Le plus long canyon est Kachina Chasma, d'une longueur totale de 620 km[25].

La seconde Ă©tendue gĂ©ographique la plus notable est un terrain de type striĂ© par des bandes de crĂŞtes et de creux, sur des Ă©tendues de plusieurs centaines de kilomètres. Elle est bordĂ©e par un terrain piquĂ© de cratères et dĂ©coupĂ© en polygones. Chaque bande, qui peut mesurer de 25 Ă  70 km de large, est parcourue d'arĂŞtes (crĂŞtes) et de fossĂ©s mesurant jusqu'Ă  200 km de long, sĂ©parĂ©s les uns des autres par des distances de 10 Ă  35 km. Ces bandes de terrains sont frĂ©quemment formĂ©es en continuation de canyons. Ceci suggère qu'elles peuvent ĂŞtre une forme modifiĂ©e des grabens ou le rĂ©sultat d'une rĂ©action diffĂ©rente de l'Ă©corce au mĂŞme Ă©cartement rĂ©sultant d'un gel progressif des profondeurs[24].

Un assemblage des surfaces observées en couleur bleu clair, posées sur un disque vierge représentant le diamètre complet de la lune.
Image en fausse couleur d'Ariel. Le cratère légèrement au-dessous et à gauche du centre est Yangoor. Une partie de celui-ci a été effacée par un relief strié.

Les terrains les plus récents à la surface d'Ariel sont les plaines : des surfaces lisses et relativement basses qui doivent s'être formées sur une longue période de temps. La durée de cette période est établie en dénombrant les cratères d'impact observés en ces lieux[24]. Les plaines se trouvent au fond des canyons et dans quelques dépressions irrégulières au milieu de cratères[10]. Dans ce dernier cas, elles sont séparées du reste de la surface du cratère par des frontières nettes, parfois en forme de lobes[24]. L'origine la plus probable de ces plaines est un processus volcanique. La géométrie linéaire de leurs évents ressemble à celle des volcans boucliers. Les différentes lisières topographiques suggèrent que les liquides éjectés étaient très visqueux, peut-être une solution d'eau/ammoniac surfondue, ou encore un volcanisme de glaces solides[27]. L'épaisseur de ces flux de cryolaves hypothétiques est estimée entre 1 et km[27]. Les canyons doivent donc s'être formés à une époque où le resurfaçage endogène était d'actualité sur Ariel[24].

Ariel semble ĂŞtre assez uniformĂ©ment recouverte de cratères par rapport aux autres lunes d'Uranus[10]. La raretĂ© relative des grands cratères[note 4] suggère que la formation de sa surface soit postĂ©rieure Ă  la formation du Système solaire. Cela indique qu'Ariel ait Ă©tĂ© complètement remodelĂ©e lors d'un Ă©pisode de son histoire gĂ©ologique[24]. L'activitĂ© gĂ©ologique passĂ©e d'Ariel est supposĂ©e avoir Ă©tĂ© engendrĂ©e par les forces de marĂ©e et par la chaleur qui en rĂ©sultait, alors que son orbite Ă©tait plus excentrique qu'aujourd'hui[16]. Le plus grand cratère observĂ© sur Ariel, dĂ©nommĂ© Yangoor, a un diamètre de 78 km[25], et montre des signes de dĂ©formations subsĂ©quentes. Tous les grands cratères (observĂ©s) ont un fond plat et des crĂŞtes centrales, et peu sont entourĂ©s par des dĂ©pĂ´ts d'Ă©jectas brillants. De nombreux cratères sont polygonaux, indiquant que leur apparition a Ă©tĂ© influencĂ©e par la structure prĂ©existante de la croĂ»te. Dans les plaines piquĂ©es de cratères, il n'y a que peu de larges (100 km) taches de lumière qui puissent ĂŞtre des cratères d'impacts dĂ©gradĂ©s. Si tel est le cas, ils seraient semblables aux palimpsestes de la lune galilĂ©enne Ganymède de Jupiter[24]. Il a Ă©tĂ© suggĂ©rĂ© que la dĂ©pression circulaire de 245 km de diamètre localisĂ©e Ă  10°S 30°E soit une grande structure d'impact fortement dĂ©gradĂ©e[29].

Origine et formation

Il existe plusieurs hypothèses quant à l'origine d'Ariel. L'une d'elles postule qu'elle résulterait de l'accrétion d'un disque de gaz et de poussières appelé « sous-nébuleuse ». Cette sous-nébuleuse, soit a existé autour d'Uranus quelque temps après sa formation, soit a été créée à la suite d'un impact cosmique qui aurait donné sa grande obliquité à l'axe de rotation d'Uranus[30]. Bien que la composition précise de cette sous-nébuleuse ne soit pas connue, la densité plus grande des lunes d'Uranus, comparées à celles de Saturne, indique que la sous-nébuleuse était relativement pauvre en eau[note 5] - [10]. Des quantités significatives d'azote et de carbone peuvent avoir été présentes sous la forme de monoxyde de carbone (CO) et de diazote (N2) au lieu d'ammoniac et de méthane[30]. Les lunes qui se sont formées dans une telle sous-nébuleuse contiendraient moins de glace (avec CO et N2 sous forme de clathrate) et plus de roche, ce qui expliquerait leurs hautes densités[10].

Le processus d'accrĂ©tion a probablement durĂ© plusieurs milliers d'annĂ©es avant qu'Ariel soit complètement formĂ©e[30]. Les modèles suggèrent que les impacts de formation aient provoquĂ© le rĂ©chauffement de la couche extĂ©rieure de la lune atteignant une tempĂ©rature maximale autour de 195 K sur une profondeur de 31 km[31]. Depuis la fin de sa formation, la couche sous la surface d'Ariel s'est refroidie, alors que l'intĂ©rieur d'Ariel s'est rĂ©chauffĂ© en raison de la prĂ©sence d'Ă©lĂ©ments radioactifs dans ses roches[10]. La couche de surface en se refroidissant s'est contractĂ©e, alors que l'intĂ©rieur a subi une expansion. Ceci a provoquĂ© de fortes tensions internes dans la croĂ»te de la lune atteignant 30 MPa et auraient causĂ© des fissures[32]. Quelques prĂ©cipices et canyons pourraient ĂŞtre le rĂ©sultat de ce processus[24], qui a durĂ© Ă  peu près 200 millions d'annĂ©es[32].

L'accrétion initiale, couplée à la désintégration des éléments radioactifs et probablement aussi la dissipation de chaleur résultant des frictions du manteau induites par les forces de marées, ont pu provoquer la fonte de la glace. Cette fonte n'a cependant pu avoir lieu qu'à la condition d'existence d'un antigel comme de l'ammoniac (sous forme de hydrate) ou de sel en moindre quantité[31]. Cette fonte aurait pu causer la différenciation planétaire de la glace et des rochers aboutissant à la formation d'un noyau rocheux entouré d'un manteau glacé[19]. Une couche d'eau liquide (océan) riche en ammoniac dissous a alors pu s'être formée à la frontière entre le noyau et le manteau. La température eutectique de ce mélange est de 176 K[19]. Toutefois, cet océan souterrain a probablement gelé il y a longtemps. Le gel de l'eau a pu causer la dilatation de l'intérieur de l'astre, ce qui aurait été responsable de la formation des canyons et de l'ensevelissement des surfaces préexistantes[24] - [26]. De plus, les liquides provenant de l'océan situé en profondeur ont pu atteindre la surface sous forme d'éruptions cryovolcaniques, inondant canyons et cratères d'impacts[31].

La modélisation thermique de Dioné, une des lunes de Saturne, qui a une taille, une densité et une température de surface similaires à Ariel, suggère que la convection de l'état solide a pu durer à l'intérieur d'Ariel pendant des milliards d'années. Cette modélisation suggère également que ces températures dépassant 173 K (le point de fusion de l'ammoniac aqueux) ont pu persister près de sa surface pendant des centaines de millions d'années après la formation et près de son noyau pendant un milliard d'années[24].

Observation et exploration

La planète Uranus vue par le télescope Hubble, son atmosphère forme des bandes bleues électrique et vertes. Ariel apparaît comme un point blanc flottant au-dessus et jette un voile sombre au-dessous.
Passage d'Ariel devant Uranus photographié par le télescope spatial Hubble. L'ombre du satellite est visible à droite de ce dernier.

La magnitude apparente d'Ariel est de 14,4[33], similaire Ă  celle de Pluton Ă  l'approche de sa pĂ©rihĂ©lie. Cependant, alors que Pluton peut ĂŞtre vue par l'intermĂ©diaire d'un tĂ©lescope de 30 cm d'ouverture[34], Ariel, au regard de sa proximitĂ© Ă  l'Ă©clat d'Uranus, n'est pas observable, mĂŞme Ă  travers un tĂ©lescope de 40 cm d'ouverture[35].

Les seules images en gros plan d'Ariel ont Ă©tĂ© prises par la sonde spatiale Voyager 2, qui a photographiĂ© la lune durant son survol d'Uranus en . La plus proche distance entre Voyager 2 et Ariel fut de 127 000 km, significativement moins que la distance de la sonde Ă  toutes les autres lunes uraniennes Ă  l'exception de Miranda[36]. Les meilleures images d'Ariel ont une rĂ©solution spatiale de km[24] et couvrent environ 40 % de sa surface, mais seulement 35 % ont Ă©tĂ© photographiĂ©s avec une qualitĂ© requise pour pouvoir en dresser une cartographie gĂ©ologique et en dĂ©nombrer les cratères[24]. Au moment du survol, l'hĂ©misphère sud d'Ariel (comme celui des autres lunes) Ă©tait pointĂ© vers le Soleil, de sorte que l'hĂ©misphère nord (plongĂ© dans la pĂ©nombre) n'a pas pu ĂŞtre Ă©tudiĂ©[10] - [26]. Aucun autre engin spatial n'a jamais visitĂ© Uranus (et Ariel). Le programme Uranus orbiter and probe, dont le lancement pourrait ĂŞtre programmĂ© pour les annĂ©es 2020 Ă  2023, devrait apporter des prĂ©cisions sur la connaissance des satellites d'Uranus et notamment sur Ariel[37].

Transits

Le 26 juillet 2006, le télescope spatial Hubble a photographié l'un des transits d'Ariel sur la face d'Uranus, au cours duquel le satellite a jeté une ombre qui pouvait être vue sur le sommet des nuages d'Uranus. De tels événements sont rares et n'ont lieu qu'autour des équinoxes, car le plan orbital des lunes d'Uranus est alors incliné de 98° par rapport au plan orbital d'Uranus autour du Soleil[38]. Un autre transit fut enregistré en 2008 par l'Observatoire européen austral[39].

Notes et références

Notes

  1. Les cinq lunes majeures d'Uranus sont Miranda, Ariel, Umbriel, Titania et Oberon.
  2. En raison des erreurs de mesure, il n'est pas Ă©tabli avec certitude qu'Ariel soit plus massive qu'Umbriel[17].
  3. La couleur est dĂ©terminĂ©e par la ratio des albedos vus Ă  travers les filtres verts (0,52–0,59 ÎĽm) et violet (0,38–0,45 ÎĽm) de Voyager 2[22] - [23].
  4. La densitĂ© de surface des cratères de plus de 30 km de diamètre varie de 20 Ă  70 par million de kilomètres carrĂ©s sur Ariel, alors qu'elle est de 1 800 pour Oberon ou Umbriel[28].
  5. Par exemple, TĂ©thys, une des lunes de Saturne, a une densitĂ© Ă©gale Ă  0,97 g/cm3, ce qui veut dire qu'elle est constituĂ©e de l'eau Ă  plus de 90 %[11].

Références

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Annexes

Bibliographie

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  • Catherine Delprat et al., Larousse du Ciel : Comprendre l'astronomie du XXIe siècle, Ă©ditions Larousse, coll. « Regards sur la science », (ISBN 2-03-560434-6)
  • ThĂ©rèse Encrenaz, Les Planètes gĂ©antes, Ă©ditions Belin, coll. « Regards sur la science », (ISBN 2-7011-2186-8)
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Articles connexes

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