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Tréhalose

Le tréhalose (α-D-glucopyranosyl-α-D-glucopyranoside ou alpha,alpha-tréhalose, ou α-D-glucopyranosyl-α-D-glucopyranoside, dihydrate) est un sucre, et plus précisément un diholoside (ou disaccharide) non-réducteur.

Tréhalose
Image illustrative de l’article TrĂ©halose
Image illustrative de l’article TrĂ©halose
Identification
Nom UICPA 2-(hydroxyméthyl)-6-[3,4,5-
trihydroxy-6-(hydroxyméthyl)
tétrahydropyran-2-yl]oxy-
tétrahydropyran-3,4,5-triol
Synonymes

α-D-glucopyranosyl;
α-D-glucopyranoside;
(α,α‐trĂ©halose)

No CAS 99-20-7 (anhydre)
No ECHA 100.002.490
PubChem 162349
Apparence poudre blanche cristalline
Propriétés chimiques
Formule C12H22O11 [IsomĂšres]
Masse molaire[1] 342,296 5 ± 0,014 4 g/mol
C 42,11 %, H 6,48 %, O 51,42 %,
Propriétés physiques
T° fusion 203 °C[2]
T° ébullition Se décompose[2]
Solubilité 68,9g/100g eau à 20 °C[2]

Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.

À la diffĂ©rence du saccharose composĂ© d'une molĂ©cule de glucose liĂ©e Ă  une molĂ©cule de fructose, le trĂ©halose est composĂ© de deux molĂ©cules de glucose liĂ©es par une liaison α,α-1,1 (ou «1,1-α-glycosidique ») particuliĂšrement stable.

Description et usages

C'est un sucre, quasiment inodore, composé de cristaux blancs ou presque blancs, au goût sucré mais au pouvoir sucrant environ moitié de celui du sucre ordinaire, le saccharose.

Il prĂ©sente des propriĂ©tĂ©s physico-chimiques diffĂ©rentes des autres sucres, qui le font utiliser par l’industrie agroalimentaire, mais aussi pharmaceutique et cosmĂ©tique ainsi que dans les boissons ou aliments « Ă©nergĂ©tiques » pour les sportifs, comme additif agent protecteur de levures boulangĂšres, ou comme agent antirouille. Il pourrait dans un proche avenir ĂȘtre utilisĂ© comme agent conservateur de vaccins et cryoprotecteur pour des organes en attente de transplantation[3] (avec un usage limitĂ© par le fait qu'en l’absence d'un transporteur spĂ©cifique, il ne peut thĂ©oriquement pĂ©nĂ©trer ni franchir les membranes cellulaires ; mais, en laboratoire on a pu protĂ©ger des cellules de pancrĂ©as ou de fƓtus humain lors d'une congĂ©lation. Dans ce dernier cas lors de la phase de congĂ©lation, juste avant le changement de phase, les membranes deviennent moins impermĂ©ables, permettant au trĂ©halose de pĂ©nĂ©trer dans la cellule et de la protĂ©ger[4]). Ce sucre pourrait aussi contribuer Ă  de nouvelles pistes thĂ©rapeutiques[5] - [6].

Source

On le trouve naturellement dans certaines plantes, champignons (dont levures) et aussi dans l'hĂ©molymphe de beaucoup d'insectes ou dans les fluides corporels de nĂ©matodes, ce qui explique qu'il puisse ĂȘtre trouvĂ© en faible quantitĂ© dans divers aliments commercialisĂ©s tels que le pain, la biĂšre et le vin, le miel, divers champignons, etc.[7].

Avant 1995 ses coûts élevés de synthÚse industrielle ne permettaient pas son utilisation dans l'industrie alimentaire, puis des innovations technologiques ont réduit ses coûts d'un facteur 100 environ, et il est alors devenu un additif alimentaire trÚs utilisé.

SynthĂšse

Le transfert du glucose à partir de l'uridine diphosphate glucose vers le glucose-6-phosphate forme le tréhalose-9-phosphate, qui sous l'action d'une phosphatase, libÚre le phosphate pour donner le tréhalose[8].

RĂŽle dans la nature

On pense que cette molécule serait impliquée dans la capacité qu'auraient certaines plantes ainsi que certains animaux à résister à des périodes prolongées de dessiccation[9] (état de cryptobiose) comme chez certaines bryophytes et chez les tardigrades.

On pense que ce sucre forme une phase de gel pendant que les cellules se dĂ©shydratent, ce qui empĂȘche la rupture des organites de la cellule. La rĂ©hydratation permet alors une reprise de l'activitĂ© cellulaire normale, en effet les dommages qui suivent normalement un cycle de dĂ©shydratation/rĂ©hydratation, sont gĂ©nĂ©ralement mortels pour la cellule.

Il serait protecteur contre le stress oxydatif[10].

Digestion

Selon le producteur, l'enzyme trĂ©halase casse dans l'intestin grĂȘle (par hydrolyse) le trĂ©halose en deux molĂ©cules de glucose qui seront normalement absorbĂ©es et mĂ©tabolisĂ©es comme l'est le maltose.

Application alimentaire

Son pouvoir sucrant (sucrositĂ© relative) est de 40 Ă  45 % de celui du saccharose[2] - [11]. Il prĂ©sente un avantage technologique et industriel : il est trĂšs peu hygroscopique et plus stable chimiquement et thermiquement, ce qui devrait lui permettre d'allonger la durĂ©e de conservation d’aliments pulvĂ©rulents tels que laits en poudre, soupe sĂšche, ou certaines confiseries ou pĂątisseries (glaçages
).

Selon les résultats toxicologiques disponibles pour l'homme, la tolérance au tréhalose semble bonne, et ne pose pas de problÚme au niveau de la consommation attendue dans l'alimentation. Certaines études ont été évaluées par la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture) et par un Comité mixte d'experts des additifs alimentaires de l'OMS (Organisation mondiale de la santé) ; (JECFA, 2001), qui n'ont pas jugé nécessaire de proposer une valeur d'apport quotidien admissible (AQA) pour le tréhalose[12].

Au vu de ces donnĂ©es, la Direction des aliments de SantĂ© Canada a en conclu Ă  l'innocuitĂ© nutritionnelle du trĂ©halose, mais demande Ă  Hayashibara International Inc. et Cargill, Inc. de rĂ©diger et mettre en Ɠuvre, de maniĂšre volontaire, un plan d'Ă©ducation et de communication visant Ă  informer les diabĂ©tiques, les Ă©ducateurs en diabĂšte ou autres professionnels de santĂ© du fait que ce produit est un vrai sucre. Ce plan devra ĂȘtre discutĂ© avec SantĂ© Canada et le MinistĂšre devra ĂȘtre informĂ© des progrĂšs dans sa mise en Ɠuvre par ces deux entreprises.

Il est autorisĂ© sur le marchĂ© europĂ©en depuis 2001[13]. La commission europĂ©enne en a demandĂ© une Ă©valuation en tant qu'« aliments et ingrĂ©dients auxquels a Ă©tĂ© appliquĂ© un procĂ©dĂ© de production qui n’est pas couramment utilisĂ©[14] ». Comme tous les glucides, il fait l’objet en Europe de conditions particuliĂšres d’emploi[15] ; la dĂ©nomination « trĂ©halose » doit obligatoirement figurer sur l’étiquette ou dans la liste des ingrĂ©dients, et une mention obligatoire doit prĂ©ciser sur l’étiquetage la prĂ©sence du trĂ©halose vendu tel quel, ou des aliments en contenant, que « le trĂ©halose est une source de glucose ». « Cette mention doit ĂȘtre indiquĂ©e dans une note de bas de page bien visible, Ă  laquelle renvoie un astĂ©risque (*) placĂ© Ă  cĂŽtĂ© de la dĂ©nomination «trĂ©halose». Cette mention apparaĂźt dans une police de caractĂšres ayant au moins la mĂȘme taille que celle utilisĂ©e pour la liste des ingrĂ©dients mĂȘme ».

Production

Le trĂ©halose a d'abord Ă©tĂ© extrait d'une levure (production approuvĂ©e en 1991 au Royaume-Uni — hors aliments pour bĂ©bĂ©), mais la production est restĂ©e faible. Puis, un procĂ©dĂ© de fabrication Ă  partir d’amidon liquĂ©fiĂ©, par un procĂ©dĂ© enzymatique en plusieurs Ă©tapes, a Ă©tĂ© brevetĂ© par la sociĂ©tĂ© japonaise Hayashibara de Okayama, au Japon.

Santé

Certains individus ne produisent pas l'enzyme trĂ©halase normalement prĂ©sente dans les intestins et les reins chez l'homme, ou son activitĂ© peut ĂȘtre inhibĂ©e. Dans ces cas, une malabsorption peut produire des symptĂŽmes comparables Ă  ceux produits par l'absorption de lactose chez les intolĂ©rants au lactose, ou aux alcools de sucre chez la plupart des individus. Le dĂ©tenteur du brevet estime qu'il y a moins de personnes dĂ©ficientes en trĂ©halase que de personnes dĂ©ficientes en lactase.

L'ajout apparemment anodin de trĂ©halose comme additif alimentaire Ă  divers aliments a favorisĂ© la virulence Ă©pidĂ©mique de souches Ă©pidĂ©miques spĂ©cifiques de Clostridium difficile apparues en AmĂ©rique du nord (États-Unis puis Canada) et dans plusieurs pays europĂ©ens depuis 2001[16] (453000 cas d'infections aux États-Unis, dont 29000 dĂ©cĂšs dans les 30 jours aprĂšs le diagnostic)[17] - [18]. La mortalitĂ© constatĂ©e dans plusieurs centres hospitaliers amĂ©ricains semble ĂȘtre comprise entre 4.2 Ă  6.9%[19] et la surveillance instaurĂ©e au QuĂ©bec indique mĂȘme des pourcentages de 12 % en 2018-2019[20], voir beaucoup plus pour les patients ĂągĂ©s dans une Ă©tude au CHU de Nice[21]. Presque toutes ces souches hautement pathogĂšnes (RT027 et RT078 notamment) viennent d'une mĂȘme lignĂ©e de C. difficile [ribotype 027 (RT0272)] qui a gagnĂ© une grande partie du monde[22] et certaines sont capables d'utiliser de faibles doses de trĂ©halose comme source unique de carbone pour leur mĂ©tabolisme[23]. Les chercheurs en font donc un facteur clĂ© dans le franchissement d'un seuil Ă©pidĂ©mique pour ces bactĂ©ries, connues depuis les annĂ©es 80[24].

Il a été montré en 2018 que le Tréhalose sanguin pouvait limiter le développement du diabÚte de type 2 chez la souris via l'activation d'un gÚne augmentent la sensibilité de l'insuline (comme le ferait les thiazolidinediones)[25]. Cependant, dans les faits, il serait potentiellement dégradé en glucose avant de parvenir au foie.

MĂ©trologie

Il est nécessaire de pouvoir doser ce « nouveau » sucre dans l'alimentation en raison de l'existence de personnes intolérantes à ce produit.

Les trois premiĂšres mĂ©thodes de dosage (dans l'organisme ou dans un aliment ou une boisson) Ă©taient lourdes et coĂ»teuses, parfois peu sĂ©lectives, et impropres aux analyses Ă  haut-dĂ©bit d’échantillons de petits volumes.

Une mĂ©thode brevetĂ©e en 2006[26] utilise un OGM (une bactĂ©rie Pseudomonas fluorescens gĂ©nĂ©tiquement modifiĂ©e) comme biosenseur. Un gĂšne de cette bactĂ©rie est activĂ© par le contact avec ce sucre, et active un autre gĂšne qui synthĂ©tise une enzyme capable de transformer un substrat en un produit dĂ©tectable par colorimĂ©trie ou chimiluminescence. Un spectrophotomĂštre ou un luminomĂštre, ou l'Ɠil mesure alors une intensitĂ© de couleur ou lumiĂšre qui correspond Ă  la dose dans l’échantillon. Cette mĂ©thode permet de dĂ©tecter des doses faibles de trĂ©halose (jusqu’à 10−4 M) et ne nĂ©cessite que de trĂšs petit volume (10 ”l suffisent).

Notes et références

  1. Masse molaire calculĂ©e d’aprĂšs « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  2. (en) T Higashiyama, « Novel functions and applications of trehalose. », Pure Appl. Chem., vol. 74, no 7,‎ , p. 1263-1269 (lire en ligne) [PDF]
  3. Pascale Borensztein Inserm U. 474 médecine/sciences 2000 ; 16 : 1265 Le tréhalose : un cryoprotecteur trÚs efficace ? (médecine/sciences 2000 ; 16 : 1265)
  4. Beattie GM, Crowe JH, Lopez AD, Cirulli V, Ricordi C, Hayek A. Trehalose: a cryoprotectant that enhances recovery and preserves function of human pancreatic islets after long-term storage. Diabetes 1997 ; 46 : 519-23.
  5. page INRA sur la quantification rapide du tréhalose
  6. Eroglu A, Russo MJ, Bieganski R, et al. Intracellular trehalose improves the survival of cryopreserved mammalian cells. Nat Biotechnol 2000 ; 18 :163-7.
  7. Document canadien (Informations sur les aliments nouveaux) de Santé Canada
  8. Chen Q, Haddad GG, Role of trehalose phosphate synthase and trehalose during hypoxia: from flies to mammals, J Exp Biol, 2004;207:3125–3129
  9. Tapia H, Young L, Fox D, Bertozzi CR, Koshland D, Increasing intracellular trehalose is sufficient to confer desiccation tolerance to Saccharomyces cerevisiae, Proc Natl Acad Sci U S A, 2015;112:6122–6127
  10. Benaroudj N, Lee DH, Goldberg AL, Trehalose accumulation during cellular stress protects cells and cellular proteins from damage by oxygen radicals, J Biol Chem, 2001;276:24261–24267
  11. (en) Tsuneyuki Oku & Sadako Nakamura, « Digestion, absorption, fermentation, and metabolism of functional sugar substitutes and their available energy. », Pure Appl. Chem., vol. 74, no 7,‎ , p. 1253–1261 (lire en ligne) [PDF]
  12. Food and Nutrition Paper 5 Rev.2 — Guide to specifications for general notices, general analytical techniques, identification tests, test solutions andother reference materials (CMEAA)1991, 322 pp., (en).
  13. Décision de la Commission du 25 septembre 2001 relative à l'autorisation de mise sur le marché du tréhalose en tant que nouvel aliment ou nouvel ingrédient alimentaire, en application du rÚglement (CE) no 258/97 du Parlement européen et du Conseil [notifiée sous le numéro C(2001) 2687
  14. Article 1.2.f du rÚglement (CE) n°258/97
  15. Note du Syndicat national des producteurs d'additifs et d'ingrédients de la chaßne alimentaire relative à l'autorisation européenne d'utilisation]
  16. (en) J. Collins, C. Robinson, H. Danhof et C. W. Knetsch, « Dietary trehalose enhances virulence of epidemic Clostridium difficile », Nature,‎ (DOI 10.1038/nature25178).
  17. M Butler, A Olson, D Drekonja, A Shaukat, N Schwehr, N Shippee et TJ Wilt, « Early Diagnosis, Prevention, and Treatment of Clostridium difficile: Update », AHRQ Comparative Effectiveness Reviews.,‎ , vi,1 (PMID 27148613)
  18. Fernanda C. Lessa, Yi Mu, Wendy M. Bamberg, Zintars G. Beldavs, Ghinwa K. Dumyati, John R. Dunn, Monica M. Farley, Stacy M. Holzbauer, James I. Meek, Erin C. Phipps, Lucy E. Wilson, Lisa G. Winston, Jessica A. Cohen, Brandi M. Limbago, Scott K. Fridkin, Dale N. Gerding et L. Clifford McDonald, « Burden of Infection in the United States », New England Journal of Medicine, vol. 372, no 9,‎ , p. 825–834 (PMID 25714160, DOI 10.1056/NEJMoa1408913)
  19. « Clostridioides (Clostridium) Difficile Colitis: Practice Essentials, Background, Pathophysiology », sur Medscape, (consulté le )
  20. « Diarrhées associées au Clostridium difficile : résultats de surveillance 2018-2019 », sur INSPQ (consulté le )
  21. Claire Chennesseau, DĂ©terminer les facteurs de risque de mortalitĂ© Ă  3 mois des patients ĂągĂ©s de plus de 75 ans atteints d’une infection Ă  Clostridium Difficile, hospitalisĂ©s au Centre Hospitalier Universitaire de Nice, , 59 p. (lire en ligne)
  22. He, M. et al. Emergence and global spread of epidemic healthcare-associated Clostridium difficile |Nature Genet. 45, 109–113 (2013). |rĂ©sumĂ©
  23. Ballard Jd (2018) Pathogens boosted by food additive ; Epidemic strains of the bacterium Clostridium difficile have now been found to grow on unusually low levels of the food additive trehalose, providing a possible explanation for C. difficile outbreaks since 2001 (Le tréhalose alimentaire accroßt la virulence de l'épidémie de Clostridium difficile)| News and views | Nature| 03 Janvier 2018
  24. (en) « Dietary sugar linked to increasing bacterial epidemics », sur EurekAlert! (consulté le )
  25. (en-US) « Natural sugar defends against metabolic syndrome, in mice | The Source | Washington University in St. Louis », The Source,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  26. MĂ©thode Ă©laborĂ©e par l'INRA (de Rennes et Nancy) avec l’universitĂ© flamande de Bruxelles, dĂ©posĂ© en Europe par Pascale Frey-Klett et A. Sarniguet sous le titre Genetically engineered Pseudomonas fluorescens strains as biosensor for trehalose detection and quantification in a sample (brevet n°06290811.6 dĂ©posĂ© le 18 mai 2006)

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • (en) Avis de la Food Standard Agency du
  • (fr) Avis de l’Agence française de sĂ©curitĂ© sanitaire des aliments du
  • (fr) Avis de l’Agence française de sĂ©curitĂ© sanitaire des aliments du
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