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Tannage

Le tannage est un procédé chimique consistant à établir des liaisons entre les fibres de collagÚne de peaux pour les transformer en cuir, ce qui confÚre à ce dernier une résistance à l'eau, à la chaleur et à l'abrasion, ainsi qu'une plus ou moins grande souplesse ou fermeté selon le type de cuir recherché. Cette opération se fait dans des tanneries. L'artisan qui pratique le tannage s'appelle un tanneur.

Tannerie Ă  FĂšs (Maroc).
Machine de tannage en 1873.

Le tannage dĂ©signe aussi la sclĂ©rotinisation, un processus naturel d'induration qui rigidifie le tĂ©gument des Arthropodes (appelĂ© cuticule) grĂące Ă  la formation de liaisons entre des tannins (polyphĂ©nols) et des protĂ©ines cuticulaires (matrice protĂ©ique d'arthropodines (de) associĂ©e aux fibrilles de chitine), rendant hydrophobe l'enveloppe externe des insectes, ce qui limite leurs pertes en eau et contribue Ă  faire d'eux les premiers animaux Ă  ĂȘtre sortis des eaux, alors que la fine cuticule branchiale des crustacĂ©s joue un rĂŽle dans l'osmorĂ©gulation[1]. Le tannage grĂące Ă  des tannins exogĂšnes et endogĂšnes (autotannage) fait notamment intervenir des polyphĂ©nol-oxydases (en) (oxydation des phĂ©nols en quinones qui relient la matrice de chitine Ă  une protĂ©ine tannĂ©e, la sclĂ©rotine), enzymes responsables du brunissement de la cuticule par la prĂ©sence de cette sclĂ©rotine dont la couleur brune provient notamment de la polymĂ©risation oxydative en mĂ©lanine des quinones en excĂšs[2].

Histoire du tannage

L'Homme a trĂšs rapidement dĂ» se rendre compte de l'utilitĂ© qu’offraient les animaux qu'il tuait ; en effet, il ne chassait pas seulement pour se nourrir mais Ă©galement pour se vĂȘtir afin de pouvoir se protĂ©ger des diverses intempĂ©ries.

Les premiĂšres traces d’utilisation du tannage se retrouvent chez l'homme de NĂ©andertal, c’est-Ă -dire il y a environ 50 000 ans : il utilisa la peau des animaux pour se couvrir mais Ă©galement construire des habitats ou de quoi se chausser par exemple. Les outils et mĂ©thodes utilisĂ©s Ă©taient encore assez archaĂŻques et seul le fumage permettait de conserver la matiĂšre au maximum. MalgrĂ© les nombreuses contraintes, le tannage est de plus en plus utilisĂ©.

C’est lors de l'apparition du tannage Ă  huile que les procĂ©dĂ©s vont s'amĂ©liorer, il y a environ 9 000 ans. Le fait d'utiliser des matiĂšres dites « grasses » donnait un cuir plus souple et davantage rĂ©sistant Ă  l'eau. On retrouve dĂ©jĂ  Ă  cette Ă©poque des objets comme des chaussures ou des ceintures mais Ă©galement des jarretiĂšres. Il est Ă  prĂ©ciser qu'aujourd'hui encore, on utilise cette technique (avec certes d'autres types de matiĂšre grasse, mais cela dĂ©montre l'importance de cette technique qui a su perdurer Ă  travers les Ăąges).

Par la suite, l'apport de diffĂ©rentes civilisations va contribuer Ă  l'essor du tannage. En premier lieu, les Égyptiens qui utilisĂšrent le tannage dans la construction de tombeaux, par exemple pour le tombeau de ToutĂąnkhamon, mais Ă©galement un ensemble d'objets que l'on glissait Ă  l'intĂ©rieur de la tombe (carquois ou siĂšge par exemple). Par la suite, c'est en MĂ©sopotamie que l'on va assister Ă  l'apparition des premiĂšres armures de cuir, soit vers 3 000 av. J.-C. A cette mĂȘme pĂ©riode, les Mehrgarh au Pakistan utilisent le travail du cuir pour « l'appliquer » Ă  leurs bateaux. Les SumĂ©riens trouvent une autre utilisation militaire du cuir en l'appliquant sur les roues des chars. Enfin les Grecs et les Romains contribuent au dĂ©veloppement du tannage et cette fois-ci de maniĂšre plus industrielle avec notamment l'utilisation de grandes cuves pour travailler le cuir, ce qui accroĂźt le dĂ©veloppement du tannage.

C’est en 1160 que l'on va voir arriver les corporations du cuir, c’est-Ă -dire des corps de mĂ©tiers dĂ©finis autour du tannage. On retrouvera mĂȘme des quartiers dĂ©limitĂ©s dans certaines ville, oĂč ils pourront travailler le cuir. Ces corporations vont permettre ainsi le dĂ©veloppement du cuir Ă  plus grande Ă©chelle et aujourd'hui encore, on retrouve cet hĂ©ritage dans de nombreuses villes oĂč des rues portent le nom de « rue des tanneurs » (par exemple : quai des Tanneurs Ă  Dole). Ces quartiers dĂ©limitĂ©s Ă©taient souvent Ă  l’écart de la ville car les anciennes mĂ©thodes Ă©taient considĂ©rĂ©es comme trop nocives et toxiques pour l’homme, entre les utilisations d'excrĂ©ments et de graisse qui, par les diffĂ©rents canaux, Ă©taient considĂ©rĂ©s comme « odorants » ou « nausĂ©abonds ». Le tannage Ă©tait ainsi relĂ©guĂ© dans les faubourgs ou aux alentours de la ville[3] - [4], en aval des cours d'eau qui traversaient celle-ci afin que les rejets de tanneries ne soient pas charriĂ©s par l'eau dans la ville.

Le XIXe siĂšcle marque un tournant pour le tannage : la dĂ©couverte par des scientifiques de la solution de chrome (Cr III) en 1840 va permettre le tannage au chrome qui est plus rapide, plus efficace et moins coĂ»teux. La premiĂšre application du tannage au chrome arrivera au dĂ©but XXe siĂšcle mais 1840 marque le dĂ©but d'une nouvelle Ăšre avec le premier brevet liĂ© Ă  une technique de tannage ; il faut aussi l'apparition de nouveaux outils en cuir qui vont ĂȘtre adoptĂ©s rapidement par l’industrie. Avec cet apport, le dĂ©veloppement de l’industrie va permettre l’expansion de ces usines dans lesquelles des milliers d'ouvriers français vont travailler dans la deuxiĂšme partie du XIXe siĂšcle.

Au début du XXe siÚcle dans les tanneries, le développement de l'utilisation du chrome appliqué au tannage et la démocratisation de l'industrie vont créer une nouvelle dynamique. On va assister à l'essor des grandes industries de tannage et indirectement, à la disparition de la quasi-totalité des petites entreprises de tannage (« ateliers-familiaux »)[5] - [6].

Les diverses méthodes de tannage

Les différentes méthodes de tannage sont :

  • Tannage vĂ©gĂ©tal utilisĂ© pour les cuirs en semelle, bourrelleries, selleries, maroquineries, chaussures, etc.
  • Tannage Ă  l'aldĂ©hyde
  • Tannage Ă  l'alun
  • Tannage Ă  l'Ă©corce de chĂȘne ou de saule
  • Tannage Ă  l'extrait
  • Tannage Ă  l'huile
  • Tannage Ă  la fumĂ©e
  • Tannage Ă  la quinone
  • Tannage Ă  la silice
  • Tannage Ă  sec
  • Tannage adouci
  • Tannage au chrome
  • Tannage au fer
  • Tannage au formaldĂ©hyde
  • Tannage au soufre
  • Tannage au sulfochlorure
  • Tannage au syntan
  • Tannage au zirconium
  • Tannage aux alcools gras sulfatĂ©s
  • Tannage aux phospholipides
  • Tannage aux polyacides
  • Tannage aux polyphosphates
  • Tannage aux rĂ©sines
  • Tannage combinĂ© utilisĂ© pour certaines peaux, surtout celles destinĂ©es Ă  l'Ă©quipement et l'ameublement
  • Tannage en fosse
  • Tannage en milieu solvant
  • Tannage en sac
  • Tannage gonflant
  • Tannage mĂ©gi
  • Tannage minĂ©ral
  • Tannage mort
  • Tannage par condensation
  • Tannage par Ă©lectro-osmose
  • Tannage par polymĂ©risation
  • Tannage rapide
  • Tannage semi-chrome
  • Tannage vĂ©gĂ©tal mixte

Le tannage au chrome

Le tannage au chrome a Ă©tĂ© appliquĂ© industriellement Ă  partir du XXe siĂšcle. Ce type de tannage a dĂ©passĂ© les autres mĂ©thodes de transformation de peau principalement celle du tannage vĂ©gĂ©tal. L’avantage de ce procĂ©dĂ© consiste essentiellement dans la rapiditĂ© de son exĂ©cution. En effet, en utilisant cette mĂ©thode, la transformation de la peau dure au maximum 24 heures.

Tout d’abord, la peau en tripe est acidifiĂ©e dans un volume de 8 Ă  10 % de sel marin ; il faut rajouter ensuite de l’acide sulfurique. L’étape de l’acidification permet aux sels de chrome de pĂ©nĂ©trer dans toute la peau. À la suite de cette Ă©tape, le sulfate de chrome basique (en) est ajoutĂ© sous forme liquide ou bien sous forme de poudre. AprĂšs une Ă  deux heures d’agitation, on ajoute du carbonate de sodium afin de neutraliser l’aciditĂ©. La neutralisation se fait progressivement car une addition brutale de carbonate peut causer une altĂ©ration du produit final.

La durée du tannage dépend du type de la peau. En effet, elle est de 7 à 8 heures pour les peaux de moutons, chÚvres et veaux et est de 14 à 18 heures pour les bovidés[7].

Le tannage au chrome est parmi les plus répandus actuellement car plus rapide. Cependant, il convient de préciser que cet élément métallique est toxique et source de pollution si les déchets de production ne sont pas retraités convenablement. En outre, il peut provoquer des réactions allergiques de plus en plus dénoncées par les associations de consommateurs. Cette production au Bangladesh, polluante, est décriée[8].

Le tannage végétal

Cuir pleine fleur au tannage végétal de la tannerie Radermecker en Belgique.

Le tannage vĂ©gĂ©tal fut le premier moyen utilisĂ© par l’Homme dans le but de rendre la peau imputrescible, rĂ©sistante Ă  l’eau chaude et souple. Ce type de tannage utilise des tanins vĂ©gĂ©taux issus des plantes. Ces tanins vĂ©gĂ©taux, grĂące Ă  leur richesse en groupements ions hydroxyde (OH), se lient facilement Ă  la peau animale et la rendent ainsi moins soluble dans l’eau, plus rĂ©sistante et plus flexible. Les tanins vĂ©gĂ©taux sont sĂ©parĂ©s en deux familles : tanins pyrogalliques et tanins condensĂ©s[7]. Ces tanins vĂ©gĂ©taux incorporĂ©s au cuir se prĂ©sentent sous la forme d'une poudre d'extraits vĂ©gĂ©taux (chĂątaignier, mimosa)[9].

Procédés alternatifs

À cause du fort impact de l'usage du chrome sur l'environnement, de nouveaux procĂ©dĂ©s de tannage sont recherchĂ©s. Une premiĂšre solution pourrait ĂȘtre de rĂ©duire la quantitĂ© de chrome employĂ© soit en augmentant son absorption Ă  partir d'agents tannants spĂ©cifiques, soit en le rĂ©cupĂ©rant et le recyclant[10] - [11]. Le traitement des eaux effluentes issues du procĂ©dĂ© de tannage au chrome est une autre piste[12]. D'un autre cĂŽtĂ©, on pourrait remplacer le chrome par un autre sel mĂ©tallique comme le titane[13], le zirconium, le cuivre ou la silice. Des systĂšmes mixtes de tannage peuvent ĂȘtre aussi employĂ©s avec l'aluminium, notamment le tannage vĂ©gĂ©tal-aluminium, aluminium-zinc, et aluminium-silice[14].

Les Ă©tapes du tannage

Tri

Une premiĂšre Ă©tape Ă  la rĂ©ception des peaux consiste Ă  trier en fonction de plusieurs critĂšres qui peuvent ĂȘtre le sexe des animaux, la taille, le poids ou la qualitĂ©[15].

Rognage

Souvent réalisé pendant le tri, le rognage consiste à éliminer certaines parties des peaux brutes comme les pattes, les mamelles etc. Cette étape est réalisée en abattoir ou en tannerie[15].

Conservation des peaux et stockage

Afin d’éviter la dĂ©gradation des peaux entre leur dĂ©pouillage et l’atelier de riviĂšre, un traitement de conservation est appliquĂ©.

Le traitement pour une conservation de long terme (six mois) consiste en divers procĂ©dĂ©s : salage, saumurage, sĂ©chage et sĂ©chage au sel. Pour une conservation de court terme (deux Ă  cinq jours), les procĂ©dĂ©s de traitement sont principalement la rĂ©frigĂ©ration par entreposage frigorifique ou avec de la glace pilĂ©e. Ces traitements peuvent ĂȘtre rĂ©alisĂ©s dans une entreprise de collecte des peaux ou dans une tannerie[16] - [15].

Reverdissage ou travail de riviĂšre

Cette Ă©tape communĂ©ment appelĂ©e la trempe consiste Ă  nettoyer les peaux, les dessaler et les rĂ©hydrater. Les peaux vont tremper dans un volume d’eau d’environ 5 fois leur poids, auquel s’ajoute un antiseptique. Ces bains permettent d’éviter la putrĂ©faction et la dĂ©gradation de la fleur et des fibres de la peau dans la cuve. Traditionnellement, les peaux sont laissĂ©es Ă  tremper dans l’eau, directement dans le lit de la riviĂšre ou bien dans de grandes cuves oĂč l’eau est renouvelĂ©e rĂ©guliĂšrement[16].

Épilage et pelanage

Le but de cette Ă©tape est d’éliminer les poils. Le dĂ©pilage est rĂ©alisĂ© par produits chimiques qui dĂ©truisent l’épiderme de surface et la kĂ©ratine. Le pelanage dĂ©grade lĂ©gĂšrement les fibres afin de rendre les peaux plus rĂ©ceptives aux futurs traitements du tannage[15] - [16].

Écharnage

L’écharnage est une Ă©tape qui consiste Ă  Ă©liminer tous les tissus sous-cutanĂ©s Ă  l’aide d’une machine appelĂ©e Ă©charneuse[16].

DĂ©chaulage

Cette Ă©tape a pour objectif de rĂ©duire le pH des peaux. Les peaux sont trempĂ©es dans des cuves remplies d’eau et d'un produit chimique de dĂ©chaulage[15].

Confitage et picklage

Le confitage dĂ©grade partiellement les protĂ©ines non-collagĂ©niques au moyen d’enzymes afin de dĂ©tendre la structure de la peau.

Le picklage a pour objectif de réduire le pH des peaux avant un tannage minéral et certains tannages organiques (tannage au chrome, tannage végétal)[16] - [15].

Tannage

Le tannage est l’étape-clĂ© qui consiste Ă  dĂ©shydrater les peaux putrescibles et Ă  y fixer des agents chimiques ou agents tannants afin de rendre les peaux imputrescibles et rĂ©sistantes. Les agents tannants utilisĂ©s peuvent ĂȘtre classĂ© en 3 catĂ©gories :

  • minĂ©rale
  • vĂ©gĂ©tale
  • autres agents tannants,

sachant que les agents tannants majoritairement utilisés sont les agents tannants au chrome ou végétal[16] - [15].

La mĂ©thode traditionnelle de tannage consiste Ă  mettre Ă  tremper les peaux dans plusieurs cuves successives contenant un tanin comme le jus d’écorce de plus en plus concentrĂ© : c’est l’étape de la brasserie. Par la suite, les peaux sont Ă  nouveau immergĂ©es dans des cuves enterrĂ©es, en alternant les couches de tan frais. Enfin, la quantitĂ© de tan est encore augmentĂ©e avec la phase de sĂ©jour en fosse pendant une durĂ©e de 8 Ă  12 mois. Une fois sĂ©chĂ©es Ă  l’air libre, les peaux sont aplaties avec des outils[17].

Égouttage, essorage et mise au vent

AprĂšs l’étape de tannage, les cuirs sont Ă©gouttĂ©s et rincĂ©s. Les cuirs sont ensuite essorĂ©s ou mis Ă  plat sur un chevalet ou de grandes vitres pendant plusieurs heures. La mise au vent permet d’étirer le cuir Ă  l’aide d’une machine[18] - [15].

Refendage et dérayage

Le refendage a pour objectif d’obtenir l’épaisseur voulue, en divisant le cuir en plusieurs Ă©paisseurs. Le dĂ©rayage survient aprĂšs ; il permet d’égaliser l’épaisseur du cuir en Ă©liminant des copeaux de chair[19] - [15] - [20]

Corroyage et finissage

Afin de rendre le cuir utilisable pour la fabrication d’objets divers, il faut passer par une sĂ©rie d’opĂ©rations avant et aprĂšs le sĂ©chage. Cette phase est appelĂ©e le corroyage et le finissage

Le corroyage et le finissage ont pour but de transformer le cuir en cuir fini. Il existe de nombreuses opĂ©rations, lesquelles peuvent ĂȘtre classĂ©es en trois familles :

  • les opĂ©rations mĂ©caniques
  • les opĂ©rations chimiques
  • le sĂ©chage
sur le cuir humide

L’essorage : cette opĂ©ration permet d’éliminer une grande proportion d’eau dans le cuir. L’essorage peut se faire soit Ă  l’aide d’une presse soit Ă  l’aide des machines Ă  cylindres de feutre.

Le refendage : lors de cette opĂ©ration, on sĂ©pare le cuir en deux feuilles, l’une portant sur le cĂŽtĂ© fleur d’épaisseur uniforme et l’autre partie correspond au cĂŽtĂ© chair (appelĂ©e Ă©galement croĂ»te). Cette opĂ©ration permet ainsi d’égaliser le cuir en Ă©paisseur.

Le dĂ©rayage : le dĂ©rayage permet d’éliminer les excĂšs du cuir appelĂ©s dĂ©rayures.

La mise au vent : consiste Ă  Ă©tirer le cuir afin de lui donner une surface plane.

Le retenage : il s’agit d’une deuxiĂšme mise au vent exĂ©cutĂ©e sur le cuir Ă  demi sec. Cette opĂ©ration concerne principalement le cuir issu du tannage vĂ©gĂ©tal.

sur le cuir aprÚs séchage

Le battage et le cylindrage : ces opérations permettent de donner au cuir plus au moins de fermeté. Pour le battage, on utilise une machine « marteau » afin de donner des cuirs fermes. Le cylindrage exécuté avec un « cylindre » permet de donner des cuirs plus flexibles.

Ces opérations concernent les cuirs à semelles.

  • le palissonnage : cette opĂ©ration est pratiquĂ©e Ă  l’aide d’un « palisson ». Elle consiste Ă  Ă©tirer le cuir afin de l’assouplir.
  • le meulage ou le ponçage : il permet de modifier l’aspect des surfaces du cuir.
  • le lissage-repassage-satinage : ces opĂ©rations sont effectuĂ©es sur le cĂŽtĂ© chair du cuir. Elles permettent de rendre cette surface lisse et brillante.
  • le liĂ©geage : cette opĂ©ration consiste Ă  faire rouler le cuir sur un pli afin de le rendre plus souple. :
  • l’impression : elle permet d’imprimer des grains artificiels au moyen d’une plaque gravĂ©e.

Opération chimique

La teinture : il s’agit de colorer le cuir en utilisant des colorants chimiques.

La nourriture : consiste à faire absorber au cuir des quantités de matiÚres grasses afin de conserver la souplesse du cuir.

Le finissage : cette opĂ©ration permet de donner Ă  la surface du cuir un aspect brillant et de lui assurer une bonne rĂ©sistance Ă  l’eau. Le finissage a pour but d’uniformiser les cuirs issus de la production[21].

Dans une tannerie du XIXe siĂšcle

Les peaux apportĂ©es fraĂźches ou en vert, ou prĂ©alablement salĂ©es et sĂ©chĂ©es dans les Ă©tablissements de tannerie, sont immĂ©diatement soumises soit Ă  un traitement par la chaux, soit Ă  l'action de la vapeur ou d'un courant d'eau chaude soit, enfin, Ă  l'action de l'eau courante ; aprĂšs quoi les poils sont enlevĂ©s facilement par le grattage. Cette premiĂšre partie des opĂ©rations, que facilite le voisinage d'un cours d'eau, est dĂ©signĂ©e sous le nom de travail de riviĂšre et explique la localisation de la plupart des tanneries. Il peut cependant se faire sans difficultĂ© dans l'intĂ©rieur d'Ă©tablissements. Le cuir ainsi prĂ©parĂ© est soumis au tannage soit par la mise en couches des peaux et du tan ou Ă©corce de chĂȘne broyĂ©, soit par l'action de l'alun. À ces opĂ©rations longues et prolongĂ©es succĂšdent le sĂ©chage et le graissage Ă  l'aide de suif fondu ou d'huile de dĂ©gras. Les manipulations du corroyeur et des maroquiniers qui mettent les peaux plus ou moins finement prĂ©parĂ©es en Ă©tat d'ĂȘtre travaillĂ©es sont moins compliquĂ©es et consistent surtout dans l'humectation, le battage, le graissage et la teinture des cuirs[22].

Le tannage des voiles

À bord des navires, voiles et cordages Ă©taient Ă©galement tannĂ©s afin de lutter contre la pourriture des textiles, qu'il s'agisse de lin, de chanvre ou de coton. En France, cette opĂ©ration fut longtemps effectuĂ©e Ă  base de tan, Ă©corce de chĂȘne moulue et longuement bouillie. Dans le Golfe du Morbihan, connu pour ses voiles rouges, on utilisait de l'Ă©corce de pin pilĂ©e. À partir de la fin du XIXe siĂšcle, le tan Ă  base d'Ă©corces locales est remplacĂ© par le cachou, qui provient de l'Areca catechu, un bois exotique, ce qui donna aux voiles leur couleur rouge brun longtemps si caractĂ©ristique. À Douarnenez, par exemple, les marins en utilisaient une dose plus forte que dans les autres ports, ce qui expliquait la couleur plus sombre des voiles des bateaux de ce port. Des tannages mixtes Ă  base, par exemple, de tan et d'ocre mĂȘlĂ©s ou utilisant divers produits locaux, selon les endroits, Ă©taient aussi pratiquĂ©s.

Les petites voiles Ă©taient tannĂ©es directement dans de grandes cuves qui appartenaient gĂ©nĂ©ralement au bistrot oĂč l'Ă©quipage faisait escale. Les plus grandes voiles Ă©taient enduites au balai sur le quai ou sur les dunes. Progressivement, aprĂšs la PremiĂšre Guerre mondiale, le cachou fut remplacĂ© par de la poudre d'ocre additionnĂ©e parfois d'huile de lin, ce qui donna aux voiles une couleur brique intense et un aspect veloutĂ©[23].

Impact du tannage

Aspect Ă©conomique

Aujourd’hui, le tannage au chrome est le procĂ©dĂ© permettant une rentabilitĂ© plus Ă©levĂ©e ainsi qu’un gain de temps.

Ces derniĂšres annĂ©es, les usines de tanneries ont de plus en plus dĂ©localisĂ© leurs sites de fabrication afin de minimiser leurs coĂ»ts de production et d’éviter les contraintes environnementales qui sont moins strictes dans les pays en dĂ©veloppement[24].

Aspect environnemental

Les tanneries relĂšvent de plusieurs prĂ©occupations environnementales telles que les eaux rĂ©siduelles, les dĂ©chets solides, la pollution de l’air, la protection des sols et les aspects relatifs Ă  la santĂ© et Ă  la sĂ©curitĂ©. Les substances rejetĂ©es par les tanneries peuvent ĂȘtre des substances toxiques, persistantes ou nocives selon le processus de tannages choisi[15].

Parmi les diffĂ©rents moyens de production, le processus de tannage au chrome est le plus polluant. Par exemple, Ă  Kanpur en Inde, environ 80 % de l’eau utilisĂ©e n’est pas traitĂ©e et est directement rejetĂ©e dans la principale source d’eau de la ville. Cela entraĂźne une pollution des terres agricoles d’eau bleue, de chrome III (trivalent), de plomb ou bien d’arsenic. Cela affecte aussi les Ă©levages et la population locale qui accĂšdent Ă  cette eau[25].

Aspect social

Lors de son usage dans le processus de tannage, le chrome III (trivalent) peut sous certaines contraintes se transformer en chrome VI (hexavalent). Cette composante devient alors cancĂ©rogĂšne et donc dangereuse pour l’homme.

Selon son mode d’exposition, le chrome hexavalent peut causer diffĂ©rentes maladies.

Exposition par voie respiratoire :

  • Irritation de la muqueuse nasale ;
  • Asthme ;
  • Toux ;
  • Essoufflement ;
  • Respiration sifflante ;
  • DĂ©veloppement d’une allergie au chrome ;
  • Cancer des poumons, nasaux, des sinus.

Exposition par voie orale :

  • ProblĂšme gastro-intestinaux :
    • UlcĂ©rations buccales ;
    • Douleurs abdominales ;
    • Vomissements.
  • HĂ©matologiques :
    • AnĂ©mies ;
    • Leucocytose[26].

D’autres produits toxiques utilisĂ©s dans le tannage peuvent ĂȘtre relevĂ©s. Parmi eux, nous trouvons :

  • Le mĂ©thyl d’isothiazolinone ;
  • L’anthracĂšne ;
  • L’arsenic ;
  • Le formaldĂ©hyde.

Ces diffĂ©rents Ă©lĂ©ments peuvent engendrer des pathologies telles que l’asthme, des problĂšmes de vues, des problĂšmes de peau tels que des dermatites, de l’urticaire, de l'eczĂ©ma, des problĂšmes de reins, de foie ou bien de poumons. Certaines de ces substances peuvent aussi ĂȘtre cancĂ©rogĂšnes[27].

À part cela

Au XIXe siÚcle, l'ouvrage du chimiste allemand Sigismund HermbstÀdt, Principes du tannage du cuir (1806), rapporta plus de royalties à son auteur que le Frankenstein de Mary Shelley[28].

Notes et références

  1. (en) A.C. Neville, Biology of the Arthropod Cuticle, Springer Science & Business Media, (lire en ligne), p. 126-140
  2. Jeanne Raccaud-Schoeller, Les insectes. Physiologie, développement, Masson, , p. 8
  3. « A history of new ideas in tanning », sur leathermag.com (consulté le ).
  4. « EVOLUTION DES PROGRÈS DU TANNAGE DU CUIR, DES ORIGINES À L’ÈRE MODERNE », sur https://www.tout-en-cuir.fr (consultĂ© le )
  5. (en) « A history of new ideas in tanning », sur www.leathermag.com, (consulté le )
  6. « Evolution des progrĂšs du tannage du cuir, des origines Ă  l’ùre moderne », sur www.tout-en-cuir.fr (consultĂ© le )
  7. Berlioz Lionel, Travail des peaux d'ovins et de caprins en mégisserie française et principaux facteur influençant la qualité des cuirs, Lyon, , 77 p., p. 27-28, 30
  8. Reportage Le scandale du Bycast et du cuir au Bangladesh, novembre 2012
  9. « Dordogne 100% Cuir : une tannerie d'exception pour un cuir de luxe » [vidéo], sur YouTube (consulté le ).
  10. [PDF] Commission Européenne, Tannage des cuirs et peaux : Document de référence sur les meilleures techniques disponibles, février 2003, (consulté le 14 septembre 2019)
  11. (en) Josep M. Morera, Esther BartolĂ­, Cristian SolĂ© et Luisa F.Cabeza, « Minimization of the environmental impact of chrome tanning : a new process reusing the tanning float », Journal of Cleaner Production, vol. 19, nos 17-18,‎ novembre - dĂ©cembre 2011, p. 2128-2132 (DOI 10.1016/j.jclepro.2011.07.018)
  12. (en) El-Khateeb, Mohamed, Nashy, Elshahat, Abdel Ghany, N. et Awad Abouelata, Ahmed, « Environmental impact elimination of chrome tanning effluent using electrocoagulation process assisted by chemical oxidation », Desalination and Water Treatment, no 65,‎ , p. 147–152 (DOI 10.5004/dwt.2017.20250)
  13. (en) V. Sivakumar, K. Jeyaraj, R. Chandrasekar et G. Swaminathan, « Titanium - chrome combination tannage: An alternative eco-friendly tanning system for upper leather manufacture », Leather International, vol. 210, no 4785,‎ , p. 32-36
  14. Simon, Caroline, CopolymÚres à base de tannins et déchets lignocellulosiques avec des matériaux synthétiques en substitution des sels de chrome pour applications en flexibilité, , 467 p. (lire en ligne)
  15. « Tannage des cuirs et peaux », sur ineris.fr,
  16. « Les étapes du tannage du cuir », sur tout-en-cuir.fr (consulté le )
  17. ">« MĂ©tiers d’autrefois : le tanneur », sur metiers.free.fr (consultĂ© le )
  18. « COMMENT FABRIQUE T ON UN BLOUSON EN CUIR ? » [vidéo], sur YouTube (consulté le ).
  19. « Définition refendage », sur cntrl.fr
  20. « Définition dérayage », sur Larousse.fr
  21. Berlioz Lionel, Travail des peaux d'ovins et des caprins en mégisserie française et principaux facteur influençant la qualité des cuirs, Lyon 11,
  22. Ambroise Tardieu. Dictionnaire d’hygiĂšne publique et de salubritĂ© ou RĂ©pertoire de toutes les questions relatives Ă  la santĂ© publique...J.-B. BailliĂšre et Fils, 1862
  23. Panneau d'information d'une exposition organisée au Port-Musée de Douarnenez en 2013
  24. « Tannage végétal ou le tannage au chrome ? | Les Cuirs Nomades », sur www.lescuirsnomades.fr (consulté le )
  25. El-Hassan KE, El-Kordofani YM, Mithani A, Diab TEE, Babikir ZAA, A.Imeer AT, Elhassan GO, Alfarouk KO, Bashir. AHH. The Prevalence of Occupational Dermatosis among Workers in Khartoum State’s Tanneries.American Journal of Dermatology and Venereology 2014; 3(5): 81-83 doi:10.5923/j.ajdv.20140305.01
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  27. "Toxic hazards of leather industry and technologies to combat threat: a review". www.academia.edu. Archived from the original on 2016-03-24. Retrieved 2015-11-07.
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Voir aussi

Bibliographie

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Articles connexes

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