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Crustacés

Les CrustacĂ©s (Crustacea) sont un sous-embranchement des Arthropodes. Ce sont des animaux dont le corps est revĂȘtu d’un exosquelette chitinoprotĂ©ique appelĂ© exocuticule et souvent imprĂ©gnĂ© de carbonate de calcium. Cette forme de carapace est plus ou moins rigide, sauf en certaines zones qui demeurent souples et permettent l’articulation des diffĂ©rentes parties du corps ainsi que des appendices et autorisent les mouvements. Cette cuticule (Ă  ne pas confondre avec la carapace, voir plus bas) constitue un squelette externe peu extensible qui rend nĂ©cessaire le recours Ă  des mues pour rĂ©aliser la croissance linĂ©aire. Leur Ă©tude s'appelle la carcinologie, Ă  ne pas confondre avec le sens mĂ©dical donnĂ© aussi Ă  ce mot, alors synonyme d'oncologie[2]. Autrefois le terme de crustacĂ©ologie Ă©tait aussi utilisĂ©[3].

Crustacea

Les CrustacĂ©s forment un vaste ensemble de plus de 50 000 espĂšces dont les formes sont aussi diverses que celle d’une balane, d'un copĂ©pode, d’un cloporte ou d’un homard et dont les tailles varient de l’échelle millimĂ©trique des petites formes planctoniques comme les copĂ©podes Ă  celles du plus grand arthropode terrestre, le crabe de cocotier (presque m pattes Ă©tendues) ou celle du plus grand arthropode vivant, le crabe-araignĂ©e gĂ©ant du Japon (presque m d’envergure). Par ailleurs, le krill antarctique reprĂ©sente probablement la plus forte biomasse animale de la planĂšte (500 millions de tonnes, valeur approchĂ©e).

La plupart des espÚces sont aquatiques (marines ou dulçaquicoles), quelques-unes mÚnent une vie partiellement ou totalement terrestre (les cloportes, des isopodes, par exemple pour ce dernier cas). On compte dans leurs rangs de nombreuses espÚces parasites dont la morphologie est parfois trÚs déroutante.

Ce groupe est paraphylétique car, contrairement aux Pancrustacés, il exclut les hexapodes.

Morphologie

La terminologie se rapportant aux Crustacés est passablement compliquée et certains termes ont des acceptions différentes selon les taxons, les auteurs ou les époques.

Le corps des CrustacĂ©s est constituĂ© essentiellement d’élĂ©ments rĂ©pĂ©titifs, les mĂ©tamĂšres, somites ou segments, en avant et Ă  l’arriĂšre desquels on trouve respectivement l’acron et le telson (ou « segment anal »), qui ne sont gĂ©nĂ©ralement pas considĂ©rĂ©s comme d’authentiques mĂ©tamĂšres. Les mĂ©tamĂšres eux-mĂȘmes sont associĂ©s en unitĂ©s fonctionnelles qui constituent les diffĂ©rentes parties du corps ou tagmes. De l’avant vers l’arriĂšre ces tagmes sont :

Chaque somite porte, en principe, une paire d’appendices.

Crustacé. Les différentes parties du corps (tagmes) et leurs appendices
Crustacé. Appendice, nomenclature des différentes parties

Les appendices

Ils assurent des fonctions diverses (de locomotion — nage ou marche —, de capture de la nourriture, de perception de l’environnement, de respiration, d’accouplement, etc.) qui dĂ©terminent des adaptations morphologiques extrĂȘmement variĂ©es malgrĂ© lesquelles on peut y retrouver des Ă©lĂ©ments structuraux constants.

Ils se composent d’une base de deux articles : la coxa (« hanche »), ou coxopodite, insĂ©rĂ©e latĂ©ralement ou ventralement sur le corps Ă  laquelle fait suite le basis ou basipodite sur lequel s’articulent deux rames, l’une externe ou exopodite, composĂ©e d’un nombre indĂ©terminĂ© d’articles, l’autre interne ou endopodite composĂ©e typiquement de 5 articles : l’ischiopodite, le mĂ©ropodite le carpopodite, le propodite et le dactylopodite terminal.

Ces appendices peuvent en outre porter des expansions : du cĂŽtĂ© externe, les exites ou Ă©pipodites et du cĂŽtĂ© interne, les endites. Ces derniers constituent notamment les gnathobases, parties masticatrices des appendices buccaux. Les deux articles de la base constituent le protopodite de l’appendice. On y inclut parfois un article proximal par rapport aux deux premiers : la prĂ©coxa qui aurait Ă©tĂ© plus ou moins complĂštement incorporĂ©e Ă  la paroi du corps.

La tĂȘte ou cĂ©phalon

La tĂȘte, ou cĂ©phalon (du grec ancien ÎșÎ”Ï†Î±Î»Îź / kephaláșż, « tĂȘte ») incorpore l’acron, porteur des yeux : l’Ɠil mĂ©dian ou Ɠil nauplien unique et les yeux pairs, gĂ©nĂ©ralement composĂ©s, sessiles ou pĂ©donculĂ©s. S’y ajoutent 5 mĂ©tamĂšres dont la prĂ©sence est caractĂ©ristique de la tĂȘte des crustacĂ©s, ce sont :

  • l’antennulaire, porteur de la premiĂšre paire d’antennes, les antennules (A1) ;
  • l’antennaire, porteur de la deuxiĂšme paire d’antennes (A2) ;
  • le mandibulaire muni des mandibules (Md) ;
  • le maxillulaire muni des maxillules (Mx1) ;
  • le maxillaire, muni des maxilles (Mx2).

Les mandibules sont situĂ©es de part et d’autre de la bouche qui est entourĂ©e d’autre part du labre (labrum), impair, Ă  l’avant et des paragnathes (labium), pairs, en retrait, Ă  l’arriĂšre des mandibules. Labre et paragnathes ne sont pas considĂ©rĂ©s comme des appendices, il ne leur correspond aucun somite.

Les appendices céphaliques ont des fonctions sensorielles (A1, A2 principalement), masticatrices (Md, Mx1, Mx2 surtout) mais aussi locomotrices dans certains cas.

TrĂšs frĂ©quemment la partie dorso-latĂ©rale de la tĂȘte Ă©met vers l’arriĂšre un repli plus ou moins Ă©tendu, la carapace, qui recouvre et Ă©ventuellement se soude Ă  la partie dorsale du thorax. De cette fusion naĂźt le cĂ©phalothorax, cependant lorsqu’un seul thoracomĂšre est concernĂ© (Amphipodes, et nombreux Isopodes par exemple) il est souvent considĂ©rĂ© comme faisant partie de la « tĂȘte ».

En arriĂšre de la tĂȘte, se trouve le tronc, gĂ©nĂ©ralement divisĂ© en deux tagmes.

Le thorax ou péréion

Les somites du thorax, ou pĂ©rĂ©ion (du grec ancien Ï€Î­ÏÎŹÎŻÏŒÏ‰ : se transporter au-delĂ  de, traverser. IdĂ©e de mouvement, locomotion), sont appelĂ©s thoracomĂšres ou pĂ©rĂ©ionites et les appendices, les thoracopodes ou pĂ©rĂ©iopodes. Les fonctions de ces derniers sont diverses, ils sont souvent impliquĂ©s dans la locomotion sur le fond pour les espĂšces benthiques. Des thoracomĂšres peuvent fusionner avec le cĂ©phalon (phĂ©nomĂšne appelĂ© « cĂ©phalisation ») dans ce cas leurs appendices peuvent se transformer en maxillipĂšdes (= pattes mĂąchoires). On tend Ă  rĂ©server le nom de pĂ©rĂ©iopodes aux thoracopodes qui n’ont pas subi cette transformation. Ces pĂ©rĂ©iopodes sont parfois appelĂ©s « pattes marcheuses », mais ils ne participent pas nĂ©cessairement Ă  cette fonction. Les orifices gĂ©nitaux (gonopores) mĂąles sont frĂ©quemment situĂ©s sur le dernier thoracomĂšre.

L’abdomen ou plĂ©on

Au plan morphologique, les CrustacĂ©s sont caractĂ©risĂ©s par la prĂ©sence d'un tĂ©gument appelĂ© cuticule qui prĂ©sente divers degrĂ©s de sclĂ©rification de la procuticule. Lorsque l'exocuticule domine, le tĂ©gument indurĂ©[4] se prĂ©sente sous forme de zones sclĂ©rifiĂ©es qui assurent une protection et un support solide oĂč ancrer les muscles (sclĂ©rites, unitĂ©s Ă©lĂ©mentaires de l'exosquelette chitineux ; piĂšces buccales, pinces). Lorsque la mĂ©socuticule souple domine, le tĂ©gument est Ă©lastique (membranes au creux des articulations, constituĂ©es de chitine blanche quasi-pure, et assurant la mobilitĂ© des diffĂ©rents segments)[5].

L'abdomen, ou plĂ©on (du grec πλέω, naviguer, voguer. IdĂ©e de dĂ©placement sur l’eau) chez les MalacostracĂ©s, est gĂ©nĂ©ralement plus Ă©troit que le thorax et pourvu d’appendices moins dĂ©veloppĂ©s. Les mĂ©tamĂšres sont appelĂ©s plĂ©omĂšres ou plĂ©onites, les appendices, les plĂ©opodes. Cependant la derniĂšre paire (voire les 3 derniĂšres, chez les Amphipodes) est frĂ©quemment appelĂ©e uropode.

Ces appendices ne sont jamais marcheurs, ils peuvent ĂȘtre natatoires, respiratoires, porteurs des Ɠufs, modifiĂ©s en vue de la fĂ©condation, etc.

Le telson ou segment anal (les deux termes ne sont pas rigoureusement synonymes !) prolonge l’abdomen, il porte l’anus et parfois deux Ă©lĂ©ments allongĂ©s, plus ou moins cylindriques, les rames caudales qui constituent la furca.

En résumé, parmi les Arthropodes actuels, les Crustacés se caractérisent notamment par :

  • au moins cinq paires de pattes ;
  • des appendices biramĂ©s (la rame externe, ou exopodite, peut disparaĂźtre) ;
  • deux paires d’antennes (A1 et A2) ;
  • un cĂ©phalon Ă  5 mĂ©tamĂšres (portant les appendices A1, A2, Md, Mx1 et Mx2) ;
  • la larve nauplius (libre ou identifiable au cours du dĂ©veloppement embryonnaire).

Alimentation

De nombreux crustacĂ©s, petits ou grands sont carnivores, soit prĂ©dateurs actifs soit charognards (crabes, homards, crevettes). Parmi les espĂšces peu mobiles ou fixes on trouve essentiellement des animaux filtreurs, microphages, comme les balanes ou les porcellanes (DĂ©capodes) par exemple et Ă  cette catĂ©gorie se rattachent aussi les EuphausiacĂ©s. Quelques espĂšces ont un rĂ©gime Ă  dominante phytophage comme le crabe de cocotier. Nombreuses sont les espĂšces parasites, externes ou internes, d’autres animaux, poissons et CrustacĂ©s notamment.

SystĂšme nerveux

Il est organisé en ganglions correspondant aux différents métamÚres mais susceptibles de fusionner (une seule masse pour les ganglions allant de la mandibule au dernier pléonite chez les crabes). Il peut présenter des différentiations ayant un rÎle endocrine.

Appareil circulatoire

Il comporte un Ă©lĂ©ment moteur, le cƓur, dorsal, d’oĂč partent des artĂšres se ramifiant en artĂ©rioles. Celles-ci dĂ©bouchent sur des espaces non ou mal dĂ©limitĂ©s (des lacunes ou des sinus) d’oĂč le liquide circulant (hĂ©molymphe) est ramenĂ© au cƓur. Ce systĂšme est dit « ouvert ». Cependant, chez les CirripĂšdes[6] et mĂȘme chez certains crabes[7] il serait, au moins partiellement, clos.

Excrétion

Des reins sont prĂ©sents dans le mĂ©tamĂšre antennaire (MalacostracĂ©s) et dans le mĂ©tamĂšre maxillaire (autres groupes). La fonction excrĂ©trice de ces organes n’est pas toujours bien Ă©tablie. Ils peuvent avoir des fonctions osmo ou ionorĂ©gulatrices. Quant Ă  l’excrĂ©tion azotĂ©e elle peut s’accomplir au niveau des branchies par exemple.

Respiration

Elle se fait de maniĂšre plus ou moins diffuse par la surface du corps des petites espĂšces Ă  tĂ©gument mince, ou bien elle siĂšge dans des organes spĂ©cialisĂ©s comme des branchies situĂ©es soit sur le thorax soit sur l’abdomen, des « poumons » chez des dĂ©capodes terrestres ou des pseudotrachĂ©es chez des Isopodes terrestres. Les branchies sont situĂ©es dans la cavitĂ© branchiale, et on a une extension du tĂ©gument du cĂ©phalothorax, le branchiostĂ©gite. Les branchies sont soit lamellaires, soit filamenteuses, et permettent grĂące Ă  la mĂąchoire numĂ©ro 2, la maxille, des mouvements d'eau de l'arriĂšre vers l'avant.

Sexualité

La reproduction se fait toujours par voie sexuĂ©e. Certaines espĂšces sont hermaphrodites (nombreux CirripĂšdes), mais gĂ©nĂ©ralement les sexes sont sĂ©parĂ©s, ce qui s’accompagne d’un dimorphisme plus ou moins marquĂ©. On recense enfin des cas d’hermaphrodisme protandrique, par exemple chez la crevette du Nord Pandalus borealis.

Larves

La larve primitive caractĂ©ristique de crustacĂ© est la larve nauplius, planctonique munie de 3 paires d’appendices natatoires : A1, A2, et Md. L’éclosion est susceptible d'intervenir dans un Ă©tat plus avancĂ© (larve ZoĂ© par exemple, frĂ©quente chez les DĂ©capodes)[8]. ou bien le dĂ©veloppement peut ĂȘtre direct. Par ailleurs, le dĂ©veloppement peut avoir un caractĂšre progressif (addition de mĂ©tamĂšres et d’appendices : dĂ©veloppement anamorphique) ou ĂȘtre marquĂ© par des transformations morphologiques de grande ampleur s'accomplissant en une seule mue (dĂ©veloppement « mĂ©tamorphique »).

Chez les cirripÚdes le stade lécithotrophique larvaire final est la larve cypris.

Classification

Histoire scientifique

Les Crustacés comprenant de nombreuses espÚces comestibles, ce groupe est connu et étudié depuis la nuit des temps sur tous les continents.

L'une des plus anciennes sources occidentales est l'Histoire des animaux d'Aristote, oĂč celui-ci dĂ©finit le groupe des « malakostraka », les CrustacĂ©s, dont il dĂ©crit 17 espĂšces (il les sĂ©pare des arthropodes terrestres, « entoma »)[9] - [10].

À partir de l'Ă©poque moderne, plusieurs grands carcinologistes ont fait avancer la discipline : Louis Jean-Marie Daubenton (1716 – 1799), auteur de l'article « crustacĂ©es » (et de la plupart des articles liĂ©s) de l’EncyclopĂ©die (1751), Jean-Baptiste de Lamarck (1744 – 1829), fondateur de la zoologie moderne avec son Histoire naturelle des animaux sans vertĂšbres (1815-1822), Georges Cuvier (1769 – 1832), fondateur de l'anatomie comparĂ©e dans Le rĂšgne animal distribuĂ© d'aprĂšs son organisation qui systĂ©matisa la classification du vivant issue de LinnĂ©, Constantine Samuel Rafinesque (1783 – 1840), descripteur de trĂšs nombreux taxons majeurs, Charles Darwin (1809 – 1882), qui outre son travail sur l'Ă©volution produisit d'importants travaux sur les cirripĂšdes, Henri Milne Edwards (1800 - 1885), auteur d'une monographie historique, l'Histoire naturelle des CrustacĂ©s (1834-1840) qui nomma 1400 espĂšces et 350 genres, le fils de ce dernier Alphonse Milne-Edwards (1836 - 1900), directeur du MusĂ©um national d'histoire naturelle, ou encore James Dwight Dana (1813 – 1895), auteur d'un cĂ©lĂšbre Report on the Crustacea (1853-1855)[11].

Le terme « carcinologie », qui dĂ©signe l'Ă©tude spĂ©cifique des CrustacĂ©s (mĂȘme si l'Ă©tymologie du mot le limiterait Ă  tort aux seuls crabes), est apparu en français dans les annĂ©es 1840[2], et est toujours d'usage actuellement dans le milieu scientifique.

Systématique

Martin et Davis (2001)[12] proposent une mise Ă  jour de la classification des CrustacĂ©s. En soulignant les difficultĂ©s de la tĂąche, ils prĂ©sentent de maniĂšre critique, les nouveaux outils disponibles pour l’accomplir : analyse cladistique, systĂ©matique molĂ©culaire, gĂ©nĂ©tique, morphologie du sperme, morphologie larvaire et fossiles.

ConsidĂ©rant les CrustacĂ©s comme un subphylum des arthropodes (phylum) ils y distinguent 6 groupes ayant rang de classe : les branchiopodes, les rĂ©mipĂšdes, les cĂ©phalocarides, les maxillopodes, les ostracodes et les malacostracĂ©s dont ils indiquent la composition jusqu’au niveau de la famille. Le caractĂšre artificiel du groupe des maxillopodes notamment est soulignĂ©.

Classes des Crustacés selon Martin & Davis[12] :

Selon World Register of Marine Species (10 mars 2017)[13] :

Le World Register of Marine Species considÚre le groupe des Crustacea comme « paraphylétique mais utile », et continue donc à l'accepter malgré son invalidité probable[14].

La position des CrustacĂ©s sur l'arbre phylogĂ©nĂ©tique par rapport aux hexapodes et aux myriapodes est en effet discutĂ©e. Un taxon des Pancrustacea, rĂ©putĂ© monophylĂ©tique, a Ă©tĂ© proposĂ© comme alternative Ă  la classification traditionnelle : les CrustacĂ©s et peut-ĂȘtre les hexapodes y seraient paraphylĂ©tiques, ces derniers Ă©tant apparus Ă  plusieurs reprises au sein des prĂ©cĂ©dents.

Écologie

Migration du crabe Gecarcoidea natalis de l'Ăźle Christmas.

Les CrustacĂ©s sont presque omniprĂ©sents sur la planĂšte oĂč ils remplissent de nombreuses fonctions au sein des Ă©cosystĂšmes et rendent de multiples services Ă©cosystĂ©miques Ă  l'humanitĂ©[15].

Certaines espĂšces aquatiques (daphnies, copĂ©podes, triops) sont adaptĂ©es aux milieux pĂ©riodiquement exondĂ©s, grĂące Ă  des Ɠufs trĂšs rĂ©sistants, qui peuvent Ă©ventuellement ĂȘtre transportĂ©s et dispersĂ©s par les oiseaux ou d'autres espĂšces, mais elles sont nĂ©anmoins en voie de rĂ©gression voire de disparition (Triops par exemple)[16]. Pour ces espĂšces, il est important que les mares et zones humides temporaires soient conservĂ©es, sans pollution, mais il faut aussi qu'elles soient biologiquement interconnectĂ©es[17], via des inondations ou cours d'eau temporaires, ou via des animaux transporteurs de propagules tels que les oiseaux (oiseaux migrateurs, s'il s'agit de longues distances)[18] - [19]. Bien qu'incapables de voler, certains crustacĂ©s aquatiques survolent les terres Ă©mergĂ©es, des bras de mer emportĂ©s par les oiseaux par endozoochorie en gĂ©nĂ©ral (sous forme d'Ɠufs, dans leur intestin, en mĂȘme temps Ă©ventuellement que des propagules ou spores de bactĂ©ries, champignons, protozoaires et algues[20]. Ceci contribue Ă  la rĂ©silience Ă©cologique des milieux et Ă  la colonisation rapide de nĂ©omilieux (sur les iles volcaniques Ă©mergentes par exemple), mais cela permet aussi Ă  des espĂšces exotiques d'ĂȘtre introduites dans un milieu Ă©loignĂ© du leur, elles peuvent Ă©ventuellement alors devenir invasives si elles s'adaptent Ă  leur nouveau milieu[21]. La mise en relation par des canaux ou les eaux de ballast de bassins versants diffĂ©rents est aussi un puissant facteur de dispersion (Dikerogammarus villosus - crevette tueuse ou gammare du Danube par exemple). Ainsi l'aire de rĂ©partition d'un crustacĂ© peut aussi reflĂ©ter celle des animaux qui les transportent[22].

Perception de la douleur chez les Crustacés

Depuis le 1er mars 2018, le gouvernement suisse interdit de plonger les homards vivants dans l'eau bouillante. Ces crustacĂ©s doivent ĂȘtre Ă©tourdis prĂ©alablement soit par chocs Ă©lectriques ou par destruction mĂ©canique du cerveau dans le but de leur Ă©viter une souffrance inutile[23].

Selon Robert Elwood, professeur Ă©mĂ©rite Ă  l'École des sciences biologiques de l'UniversitĂ© Queen's de Belfast, les recherches tendent de plus en plus Ă  dĂ©montrer que les CrustacĂ©s sont capables de percevoir la souffrance[24]. Selon Maisie Tomlinson, directrice de la campagne Crustacean Compassion, il est estimĂ© que certains crustacĂ©s, comme le crabe par exemple, mettent jusqu'Ă  trois minutes pour perdre conscience lorsqu'ils sont plongĂ©s dans l'eau bouillante[24].

Une autre Ă©tude de Robert Elwood[25] a montrĂ© que lorsqu'un agent acide est dĂ©posĂ© sur les antennes de crevettes roses (Palaemon elegans), cela provoque chez elles le toilettage et le pansage de la rĂ©gion affectĂ©e pendant plus de 5 minutes, ce qui pourrait ĂȘtre perçu comme une rĂ©ponse protectrice Ă  la douleur. Mais une Ă©tude[26] menĂ©e prĂ©cĂ©demment par une autre Ă©quipe sur des crevettes similaires, a conclu Ă  l'absence de rĂ©cepteur de l'aciditĂ© sur les antennes.

Jonathan Birch, philosophe de la biologie Ă  la London School of Economics, propose d’appliquer le principe de prĂ©caution Ă  nos connaissances scientifiques sur la sensibilitĂ© et la conscience des autres animaux. Sans abaisser les standards scientifiques, ce principe conduit Ă  inclure automatiquement dans nos lois de protection les espĂšces pour lesquelles on a dĂ©montrĂ© la prĂ©sence d’au moins un indicateur crĂ©dible de sensibilitĂ©. Si nous avons de bonnes raisons de croire qu’une espĂšce de crabes est sensible, cela devrait ĂȘtre suffisant pour supposer que les crabes (plus de 4000 espĂšces) en gĂ©nĂ©ral le sont. C’est donc l’ordre entier des dĂ©capodes que l’on doit inclure dans les lois de protection animale qui exigent de tuer les animaux rapidement en minimisant leurs souffrances[27].

Importance Ă©conomique

PĂȘche et aquaculture

Il importe de noter que les crustacĂ©s planctoniques (CopĂ©podes, EuphausiacĂ©s notamment) assurent, pour l’essentiel, le transfert de l’énergie captĂ©e par le phytoplancton vers les niveaux trophiques plus Ă©levĂ©s oĂč se situent les espĂšces d’intĂ©rĂȘt commercial. Ils jouent donc un rĂŽle de premier plan pour les activitĂ©s halieutiques.

De nombreuses espĂšces de CrustacĂ©s font l’objet d’une pĂȘche trĂšs active (crabes, crevettes, langoustes, langoustines, homards, krill, Ă©crevisses).

L’aquaculture intensive des crevettes pĂ©nĂ©ides principalement, Ă  la suite des travaux de Hudinaga (1942)[28] a connu un trĂšs fort dĂ©veloppement dans les rĂ©gions tropicales au cours des derniĂšres dĂ©cennies du XXe siĂšcle.

En 2005, les captures (pĂȘche) et production (aquaculture) au niveau mondial[29], ont Ă©tĂ© de respectivement de 6 Ă— 106 tonnes et de 4 Ă— 106 tonnes soit, au total, environ 6,4 % de l’ensemble des ressources aquatiques.

Aquariologie

Les larves nauplius et mĂ©tanauplius, voire les « adultes » d'Artemia salina, ainsi que les daphnies sont utilisĂ©s comme nourriture des poissons d’aquarium.

Agents de salissure (« fouling »)

Plusieurs espĂšces, principalement des cirripĂšdes (balanes), s’installent sur les coques des navires, ce qui diminue leur vitesse, occasionne d’importants frais de carĂ©nage et l'utilisation de peintures antisalissures dont certaines, Ă  base de tributylĂ©tain, se sont rĂ©vĂ©lĂ©es trĂšs toxiques. Une coque de bateau de mer sera naturellement nettoyĂ©e de ses algues et crustacĂ©s marins en naviguant quelques jours en eaux fluviales.

Sources de produits chimiques

La chitine ou des enzymes comme la phosphatase alcaline de la crevette Pandalus borealis.

Agents de destruction du bois

En Europe c’est le petit Isopode Limnoria lignorum qui cause les plus importants dĂ©gĂąts.

Santé

Des crustacĂ©s d’eau douce sont des hĂŽtes intermĂ©diaires dans le cycle de parasites de l’Homme : les crabes du genre Potamon pour Paragonimus ringeri (la douve pulmonaire) et des CopĂ©podes pour Diphyllobothrium latum (un tĂ©nia).

Références

  1. Integrated Taxonomic Information System (ITIS), www.itis.gov, CC0 https://doi.org/10.5066/F7KH0KBK, consulté le 30 novembre 2015
  2. Informations lexicographiques et étymologiques de « carcinologie » dans le Trésor de la langue française informatisé, sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales
  3. Crustacéologie dans Antoine Jacques Louis Jourdan, Dictionnaire raisonné, etymologique, synonymique et polyglotte, éditions J.-B. BailliÚre, 1834. Volume 2, page 620.
  4. Chitine calcifiĂ©e par des sels de calcium et de magnĂ©sium puisĂ©s dans l'eau de mer et transfĂ©rĂ©s dans le milieu intĂ©rieur par la surface branchiale (minĂ©ralisation par des carbonates de calcium et de magnĂ©sium, et aussi des phosphates de calcium). cf. Pierre Drach, « Mue et cycle d'intermue chez les crustacĂ©s dĂ©capodes », Ann. Inst. OcĂ©anogr. Monaco, vol. 19, no 3,‎ , p. 103—391
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  9. Arnaud Zucker, Aristote et les classifications zoologiques, Éditions Peeters, (ISBN 90-429-1660-5, lire en ligne), p. 145
  10. Hendrik Cornelius Dirk De Wit, Histoire du DĂ©veloppement de la Biologie, vol. III, Lausanne, Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, (ISBN 2-88074-264-1, lire en ligne), p. 5-10
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Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Morphologie
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Morphologie et anatomie
  • (en) W.T. Calman et R. Lankester (dir.), Crustacea [« A treatise on zoology »], Ascher and Co. Amsterdam, , 346 p.
  • (en) R.S. Schram, Crustacea, Oxford University Press, , 606 p.

Références taxonomiques

Liens externes

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