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Siège de Hambourg

Le siège de Hambourg se déroule de à , à la fin des guerres de la Sixième Coalition. La garnison française de Hambourg, commandée par le maréchal Davout, y résiste victorieusement pendant près six mois aux troupes coalisées de la Prusse, de la Russie et de la Suède.

Siège de Hambourg
Description de cette image, également commentée ci-après
Carte de Hambourg pendant le siège de la ville.
Informations générales
Date 24 décembre 1813 - 12 mai 1814
Lieu Hambourg
Issue Victoire française[1]
Retour de la garnison française en France.
Forces en présence
42 000 hommesEntre 52 000 et 120 000 hommes selon les pĂ©riodes
Pertes
5 000 morts dans les hĂ´pitaux
6 000 morts au combat, dĂ©serteurs ou disparus
Non connues précisément[1]

Batailles

Campagne de Russie (1812)


Campagne d'Allemagne (1813)


Campagne de France (1814)


Campagne des Six-Jours :



Front italien :

Front des Pays-Bas :
CoordonnĂ©es 53° 33′ 00″ nord, 10° 00′ 00″ est
GĂ©olocalisation sur la carte : Allemagne
(Voir situation sur carte : Allemagne)
Siège de Hambourg
GĂ©olocalisation sur la carte : Hambourg
(Voir situation sur carte : Hambourg)
Siège de Hambourg

Isolé du principal théâtre d'opérations de la campagne d'Allemagne par la défaite du maréchal Oudinot à la bataille de Gross Beeren, le 13e corps du maréchal Davout regagne la région de Hambourg, que les Français ont fortifiée pendant l'été. Après la bataille de Leipzig et la retraite de la Grande Armée jusqu'au Rhin, le soulèvement de la Hollande et l'occupation de Brême par les Russes coupent les communications entre Hambourg et la France.

Tout d'abord séparées par les défenses naturelles constituées du bas-cours de l'Elbe et du Bille, la garnison française et l'armée de siège se livrent une guerre psychologique pendant tout le mois de décembre. En janvier, les bras de l'Elbe gèlent et les Russes lancent plusieurs assauts contre la place. Malgré la perte de quelques postes avancés, la garnison française parvient à conserver les positions stratégiques d'Haarbourg et de Wilhelmsbourg. À partir du , le dégel marque la fin des assauts et le retour à une guerre psychologique.

Lorsque Napoléon Ier abdique le , le maréchal Davout tient encore solidement Hambourg. Il refuse de croire au retour des Bourbons jusqu'au et continue après cette date à refuser la reddition de la place à son adversaire russe. Début mai, le maréchal est relevé de son commandement et le général Foucher de Careil négocie la restitution de la place tandis que le général Gérard reconduit le 13e corps en France. Celui-ci quitte Hambourg, libre, avec armes et bagages, les 27, 29 et .

Le maréchal Davout est mis en cause dès le mois de pour sa gestion des relations avec les populations civiles et particulièrement pour la saisie des fonds de la Banque de Hambourg. Bien que rapidement abandonnées, ces accusations ainsi que son ralliement tardif à Louis XVIII vaudront au maréchal une disgrâce qui ne prendra fin qu'au retour de l'Empereur aux Cent-Jours.

Contexte

Annexion de Hambourg

Les villes de Hambourg et Brême sont occupées par l'armée française à partir de 1806 et la fin de la campagne de Prusse[2]. Après avoir connu divers gouverneurs militaires, elles sont rattachées à l'Empire français le [2], tandis que le maréchal Davout est nommé gouverneur général des villes hanséatiques le 1er décembre[3]. L'annexion correspond à une volonté de resserrer le blocus continental[4], qui a du mal à être mis en place dans ces villes tournées vers le commerce.

RĂ©volte de Hambourg

Après la campagne de Russie et la destruction presque complète de la Grande Armée impériale, le sentiment nationaliste relève partout la tête en Allemagne. Le , une insurrection populaire contraint le général Claude Carra-Saint-Cyr, commandant la 32e division militaire qui englobe Hambourg, à évacuer la ville[5]. Le , un corps russe commandé par le général Tettenborn y fait son entrée[6].

La réaction française ne se fait pas attendre. Tandis que le maréchal Davout est nommé à la tête de la 32e division militaire avec autorité sur le 1er corps du général Vandamme, celui-ci quitte Brême début mai et marche sur Hambourg. Après avoir contré le une tentative de Tettenborn contre une de ses brigades, Vandamme ouvre le feu sur la ville le 19[6]. Le roi Frédéric VI de Danemark met à la disposition de Davout une division que ce dernier fait marcher sur Lübeck. Les Russes sont contraints d'évacuer Hambourg, et les Franco-Danois y font leur entrée le [7].

Napoléon Ier ordonne une répression sévère à la suite de ces événements[6]. Néanmoins, Davout parvient à la modérer, jusqu'à obtenir la promulgation d'une amnistie le [8].

Campagne d'Allemagne

carte du Nord de l'Allemagne présentant les mouvements de troupe
Carte des mouvements de troupes à la fin du mois d'août 1813.

Le plan initial de l'empereur des Français consiste en un vaste mouvement enveloppant des armées alliées[Note 1] dans lequel l'armée française, après s'être avancée jusqu'à Dresde, poussera vers Berlin puis obliquera au sud[9]. Dans ce schéma, les troupes qui occupent l'embouchure de l'Elbe n'ont qu'un rôle secondaire à jouer et Napoléon substitue l'expérimenté 1er corps par le 13e corps, qui vient d'être formé[8].

Après les victoires françaises non exploitĂ©es de LĂĽtzen et de Bautzen, un armistice est signĂ© entre les belligĂ©rants qui arrĂŞtent les opĂ©rations du au [10]. Ă€ la reprise des hostilitĂ©s, NapolĂ©on refuse de se replier sur le Rhin et d'abandonner la Hollande et Hambourg, en dĂ©pit de sa très nette infĂ©rioritĂ© numĂ©rique : il considère ces deux rĂ©gions comme dĂ©finitivement françaises[11]. Tandis que l'empereur manĹ“uvre autour de Dresde pour Ă©carter BlĂĽcher et y Ă©crase l'armĂ©e autrichienne de Schwarzenberg, Oudinot, Ă  la tĂŞte de 60 000 hommes, marche sur Berlin entre l'Elbe et la Spree[12], et compte donner la main Ă  la garnison de Hambourg. Il est arrĂŞtĂ© Ă  Gross Beeren par Bernadotte[12], ce qui isole dĂ©finitivement le 13e corps du principal théâtre d'opĂ©rations.

Après la bataille de Leipzig, l'armée française bat en retraite vers la France. Elle ne laisse en Allemagne que des garnisons assiégées dans des places fortes comme Hambourg, Magdebourg ou Dresde.

Opérations préliminaires

Travaux de fortifications de la ville

Dans la perspective d'un siège, le maréchal fait entamer d'importants travaux de fortification. Pour s'assurer le contrôle de l'Elbe, les Français rétablissent les remparts de Haarbourg, sur la rive gauche du fleuve, et construisent un immense pont entre les deux villes. La remise en état de défense de la place répond aux instructions de l'empereur qui charge le général Haxo de la supervision des travaux[13] ; le commandement général du génie sur place est donné au colonel Deponthon[14].

Pendant l'armistice de l'été 1813, l'empereur fait marcher sur Hambourg un renfort d'artillerie[13] et une compagnie de marins sous les ordres du contre-amiral Lhermite. Ils ont pour mission d'assurer le service et la défense des nombreuses îles du bas cours de l'Elbe[13].

À la fin de l'été, une partie des habitations trop proches des ouvrages défensifs ayant été rasée, la place est en état de défense[13].

Opérations dans le Mecklembourg et le Holstein

Après la rupture de l'armistice le , Davout transfère son quartier général de Hambourg à Hogendorf, sur la route de Lübeck[15]. Les forces coalisées, sous les ordres de Bernadotte, occupent une ligne allant de Lauenbourg à Trittau. Le 13e corps enfonce cette ligne de défense lors du combat de Lauenbourg et pousse son avance jusqu'à Schwerin qu'il atteint le [15]. En apprenant la défaite d'Oudinot à Gross Beeren, Davout se replie derrière une ligne allant de Lübeck à Lauenbourg.

Bien que Brême ait été brièvement occupée par le corps de Tettenborn, le 13e corps maintient sa communication avec la France via la Hollande[16]. Cependant, après la bataille de Leipzig, la Grande Armée bat en retraite vers la France, poursuivie par les armées coalisées, et la Hollande se soulève[17]. Ce n'est que le que Davout reçoit ordre de l'Empereur de se replier vers la France en laissant une garnison dans Hambourg, et il est alors trop tard : la rive gauche de l'Elbe est déjà occupée par de forts contingents coalisés[18].

Le 1er décembre gèlent les marais et le canal de Stecknitz, derrière lesquels les Français sont retranchés. Ces défenses naturelles maintenant franchissables à pied sec par les coalisés, le maréchal Davout ordonne le repli sur la ville de Hambourg, tandis que ses alliés danois remontent vers le nord pour couvrir leur royaume[18].

Forces en présence

Armée française

Portrait en pied d'un homme en uniforme devant un champ de bataille
Le maréchal Davout, commandant les troupes françaises.

Au dĂ©but de l'Ă©tĂ©, le 13e corps est fort de 32 000 hommes, auxquels s'ajoutent environ 10 000 Danois[8]. De retour Ă  Hambourg, il est renforcĂ© par les dĂ©bris de divers corps ayant rejoint la zone sous son contrĂ´le Ă  la suite de la retraite de Leipzig[19].

Au dĂ©but du siège, les forces françaises comptent 42 000 hommes[19], dont 8 000 aux hĂ´pitaux[20].

Les troupes sont réparties ainsi[Note 2] :

Général en chef : maréchal Davout.

État-major

3e division

Elle est commandée par le général Loison[1] - [22], également responsable de la sécurité dans Hambourg intra muros[23].

La division compte au total 9 842 hommes[22].

40e division

Elle est commandée selon les sources par le général Pécheux[1] ou le général Vichery[22] - [24].

La division compte au total 10 000 hommes[22].

50e division

Elle est commandée selon les sources par le général Thiébault[1] ou le général Pécheux[22] - [24].

La division compte au total 9 680 hommes[22].

Division de cavalerie

La division de cavalerie est commandée par le général de division Watier de Saint-Alphonse[22], assisté des généraux de brigade Dubois de Thimville et Guiton[24]. Elle est structurée autour du 28e régiment de chasseurs à cheval[1] - [22] - [24] et comporte des éléments de plusieurs autres régiments dont trois régiments provisoires de cuirassiers[22].

Au total, la division compte 5 800 hommes[20] et 3 800 chevaux[24].

Autres troupes combattantes

Le contre-amiral Lhermite dirige un dĂ©tachement de marins fort de 1 200 hommes[20] - [25]. Ce dĂ©tachement est destinĂ© au service dans les diffĂ©rents bras de l'Elbe entre Hambourg et Haarbourg.

Outre les 24 pièces d'artillerie divisionnaire, la place de Hambourg est garnie de 52 pièces attelées issues du 8e régiment d'artillerie à pied et de divers autres régiments[25]. La place compte également 350 canons de remparts[25] - [26].

Armées coalisées

portrait d'un homme en uniforme
Le général Bennigsen, commandant les troupes coalisés.

Les effectifs des armées coalisées varient fortement durant les six mois du siège.

Les assiĂ©geants sont initialement le corps du lieutenant-gĂ©nĂ©ral von Wallmoden, fort d'environ 52 000 hommes, constituĂ© de Hanovriens et de rĂ©giments hansĂ©atiques[1]. Ce corps est rattachĂ© Ă  l'armĂ©e du Nord commandĂ©e par Bernadotte. Le gĂ©nĂ©ral Bennigsen prend ensuite le commandement des opĂ©rations de siège, apportant avec lui un certain nombre de troupes russes[1]. En , les coalisĂ©s sont environ 120 000 dans la zone de siège[20]. Lorsque Bernadotte et ses troupes font mouvement vers le Rhin, Benningsen dispose encore d'environ 80 000 hommes[19].

Déroulement du siège

Guerre psychologique en décembre

Espérant voir les Hambourgeois renouveler le soulèvement de mars et les Hollandais du 13e corps[Note 3] suivre l'exemple de leurs compatriotes insurgés, Bennigsen lance deux proclamations les appelant au soulèvement[19] - [23]. Elles restent sans effet devant les mesures énergiques prises par le général en chef français[23].

Davout profite de cette pĂ©riode pour parfaire les fortifications autour de la « chaussĂ©e Deponthon » qui relie Hambourg Ă  Haarbourg en construisant une redoute sur une Ă®le face Ă  Altona et une autre vis-Ă -vis de Hamm[23]. En dĂ©cembre, Davout ordonne l'Ă©vacuation des orphelins de la ville ainsi que de tous les enfants dont les parents accepteraient l'Ă©loignement[27]. 15 360 personnes sont Ă©vacuĂ©es les 24, 25 et [28].

Le maréchal répartit également les fonctions entre les différents généraux. Tandis que Thébault est chargé de l'approvisionnement et Loison de la sécurité intra muros, Vichery est chargé du secteur à l'Est de la ville, Gengoult et Delcambre sont au Nord face à Altona et Pécheux tient Haarbourg tout en détachant la brigade Osten pour garder les îles de l'Elbe[23] - [20].

Assauts hivernaux

carte ancienne
Carte des îles de l'Elbe entre Hambourg et Haarbourg.

À partir de janvier, le froid est si vif que l'Elbe et le Bille gèlent, malgré les travaux incessants des Français qui cherchent à maintenir la protection naturelle du réseau de canaux[23]. Les coalisés lancent alors quelques assauts qui contraignent les Français à se retirer des villages d'Eimsbüttel et d'Eppendorf au Nord, ainsi que de plusieurs positions à l'Est[23].

Le , les Russes du général Strogonov[29] attaquent les fortifications avancées de Haarbourg. Les colonnes avançant le long de l'Elbe et par Wilstorf (de) sont repoussées par le général Delcambre qui y perd 200 hommes[23] tandis que les Russes laissent 800 hommes sur le terrain[29].

Le , à l'occasion de l'anniversaire de l'impératrice Élisabeth, Bennigsen ordonne un assaut général sur les fronts Nord et Est[27]. Le seul résultat de cet assaut qui coute 700 hommes au 13e corps[23] et 300 aux russes[30] est la prise de l'église de Hamm[27]. À la suite de cet assaut, Davout ordonne la destruction d'une grande partie des habitations du faubourg d'Altona[Note 4] - [27].

Le , après avoir reçu le renfort du corps de TolstoĂŻ, Bennigsen lance une attaque gĂ©nĂ©rale[27]. L'installation par Davout d'un poste d'observation dans le clocher de l'Ă©glise Saint-Michel prive les Russes de l'effet de surprise escomptĂ©[27]. L'attaque principale est dirigĂ©e vers l'Ă®le de Wilhelmsbourg qui est l'objet d'âpres combats tout au long de la journĂ©e. Les Russes prennent initialement l'avantage[31]. La colonne du gĂ©nĂ©ral Markov en provenance d'Altona et celle du gĂ©nĂ©ral Emme en provenance du sud-est et qui contourne Haarbourg convergent vers l'entrĂ©e du pont qui relie l'Ă®le Ă  Hambourg[23]. DĂ©semparĂ©s par la mise hors de combat de leurs chefs (le colonel du 29e rĂ©giment d'infanterie de ligne est tuĂ© et le gĂ©nĂ©ral Osten blessĂ©), les Français commencent Ă  refluer sur le pont lorsque le marĂ©chal Davout se porte en personne sur le lieu de l'action et donne l'ordre aux rĂ©serves restĂ©es Ă  Hambourg de contre-attaquer[23]. En fin d'après-midi, le gĂ©nĂ©ral Leclerc, après avoir repoussĂ© une colonne russe commandĂ©e par TolstoĂŻ, peut envoyer des renforts sur le pont. Dans le mĂŞme temps, le gĂ©nĂ©ral PĂ©cheux sort de Haarbourg, qu'il a dĂ©fendu contre l'assaut d'une colonne russe, dĂ©gage le tronçon de pont qui la relie Ă  Wilhelmsbourg et prend les Russes Ă  revers[32]. EnfoncĂ©s par la contre-attaque française, ceux-ci se replient jusqu'Ă  Altona[33]. La garnison perd dans cet engagement 1 200 tuĂ©s, blessĂ©s et prisonniers[33].

Le , les Russes tentent un nouvel assaut massif qui Ă©choue face Ă  la rĂ©sistance des gĂ©nĂ©raux Vichery et Rome[34]. Les pertes s'Ă©lèvent Ă  200 tuĂ©s chez les Français, tandis que les Russes perdent près de 5 000 hommes[31]. Après une dernière tentative nocturne le [31], les opĂ©rations se limitent Ă  des escarmouches[23]. La dĂ©bâcle de l'Elbe le met dĂ©finitivement la ville Ă  l'abri d'une prise d'assaut[23].

Reprise de la guerre psychologique et fin du siège

La fin de l'hiver et le début du printemps voient Bennigsen multiplier les appels à la défection de la garnison et les mesures de désinformation[31]. Malgré quelques désertions individuelles, ces tentatives n'atteignent pas leur but[31], mais elles installent un climat d'extrême défiance vis-à-vis du commandement russe au sein de l'état-major français[35]. Le , les Français lancent une série d'assauts dans les environs de Haarbourg pour se procurer du fourrage et du ravitaillement[23].

Le , le commandant des troupes assiégeantes est averti de l'abdication de Napoléon Ier[35] et dépêche un parlementaire à Davout pour l'en avertir. Sachant « que l'Empereur n'[a] pas l'habitude de communiquer avec ses généraux par l'intermédiaire de l'ennemi[36] » et n'ayant aucune confiance en Bennigsen, le maréchal accueille la nouvelle et la proposition d'armistice du général russe avec la plus grande des circonspections[35]. Cependant, la nouvelle lui est confirmée par une lettre du tsar Alexandre apportée par un officier hollandais, ce qui pousse Davout à demander l'envoi en France du général Delcambre pour prendre des instructions du gouvernement[35].

Pour forcer la main à son adversaire, Bennigsen fait apporter devant les avant-postes français un drapeau blanc fleurdelisé, emblème de Louis XVIII, en espérant que la garnison se soulève à la nouvelle du changement de régime[37]. Devant cette provocation, le maréchal fait canonner le drapeau[37].

Alors que les hostilités entre les puissances coalisées et la France sont officiellement arrêtées depuis l'abdication du [23], les Russes, appuyés par des canonnières anglaises, lancent le un assaut sur Haarbourg[37]. Cet assaut échoue et augmente encore la méfiance des Français envers l'état-major russe[37].

Le , un cousin du maréchal, François Davout, se présente au quartier-général russe et est aussitôt escorté jusqu'aux postes français[38]. Il est porteur de lettres de la maréchale pour son mari l'informant des événements parisiens[38]. Les deux généraux-en-chef concluent alors un armistice. Le général Delcambre peut se rendre à Paris et le , le drapeau blanc à fleurs de lys flotte sur la ville[38].

S'il apparaît évident que la place de Hambourg doit être rendue aux autorités allemandes, la question de la garnison reste posée[38]. Benningsen espère initialement l'emmener prisonnière en Russie et tente jusqu'au bout d'entraver son évacuation et celle de son matériel[38].

Le , le gĂ©nĂ©ral Foucher de Careil, envoyĂ© du gouvernement chargĂ© de la restitution de la place, arrive Ă  Hambourg[39]. Il est suivi le du gĂ©nĂ©ral GĂ©rard[39], chargĂ© par le comte d'Artois et le nouveau ministre de la Guerre, le gĂ©nĂ©ral Dupont de l'Étang, de relever le marĂ©chal Davout et de reconduire le 13e corps en France[39]. Les 26 000 hommes encore valides de la garnison retournent en France en trois colonnes qui quittent les bords de l'Elbe les 27, 29 et [39]. Le gĂ©nĂ©ral GĂ©rard emporte avec lui une centaine de pièces d'artillerie et 4 000 chevaux[39]. Les 5 000 malades encore aux hĂ´pitaux rejoignent la France Ă  la fin de leur convalescence[39].

Conséquences

Conséquences stratégiques

La garnison de Hambourg ne joue qu'un rôle secondaire dans le déroulement de la campagne de 1813. Après la défaite d'Oudinot à Gross-Beeren, le 13e corps arrête sa marche sur Berlin et en octobre, il ne peut empêcher l'armée du Nord de faire mouvement vers Leipzig. Néanmoins, la possession de Hambourg et le contrôle du bas cours de l'Elbe qu'elle entraîne permet à Davout de gêner considérablement l'économie allemande pendant tout le début de l'année 1814[16].

L'approvisionnement des places fortes allemandes (Hambourg, Magdebourg, Dresde, etc.) entraîne une forte pénurie en matériel militaire pour l'armée napoléonienne lors de la campagne de France qui s'ouvre le [40]. Aussi, la décision de l'Empereur de laisser d'aussi nombreuses garnisons en Allemagne lui a parfois été reprochée. En effet, si les garnisons immobilisaient pour le siège des troupes alliées beaucoup plus nombreuses[16], leur absence lors des batailles de 1814 où l'armée française est extrêmement réduite se fera cruellement sentir[41].

La défense de Hambourg est un sujet d'étude dans les écoles de stratégie pendant la première moitié du XIXe siècle[18].

Affaire des lingots de la Banque de Hambourg

Napoléon frappe la ville de Hambourg d'une forte contribution de guerre après sa révolte de [6]. Cependant, la partie payée immédiatement en numéraire est envoyée en France et le , le comte de Chaban, intendant général des finances de la 32e division militaire, informe Davout que l'armée risque de ne plus pourvoir payer le fonctionnement normal du service à partir de fin octobre[23]. Le maréchal avait en effet ordonné de payer comptant toutes les fournitures pour éviter de pousser la population à l'émeute[42]. Alors que l'échéance de paiement de la contribution de guerre censée être payée le 1er octobre n'est pas honorée, des renseignements parviennent au commandement français sur un transfert des lingots de la banque de Hambourg vers la ville danoise d'Altona[23]. Décision est alors prise le de s'emparer des fonds de la banque[23].

Les Français mettent la main sur 7 489 343 marcs banco[Note 5] - [43], soit environ treize millions de francs[42]. Les commerçants de Hambourg s'Ă©tant entendus pour refuser d'ĂŞtre payĂ©s avec des lingots provenant de la banque, les Français montent deux ateliers de fabrication de monnaie et fondent les lingots en pièces de la ville de Hambourg[42]. Cette monnaie est alors utilisĂ©e pour payer la solde de l'armĂ©e et le salaire des ouvriers hambourgeois employĂ©s aux travaux de fortifications, permettant de maintenir une activitĂ© Ă©conomique dans la ville assiĂ©gĂ©e[23].

Une comptabilité de l'utilisation de ces dépenses est tenue par le comte Chaban, puis par une commission créée à cet effet après son décès en mars. Dès la fin du siège, de nombreuses voix s'élèvent cependant contre la saisie de la banque de Hambourg et certains accusent par la suite Davout d'avoir empoché une partie des fonds[44].

L'affaire marque les esprits et est utilisée par la suite pour raviver le sentiment anti-français en Allemagne. Ainsi, en 1890, le maréchal von Moltke se sert du souvenir de cet évènement pour obtenir du parlement allemand le vote de crédits militaires[23]. Plus largement, l'historiographie allemande a entretenu l'image d'une période noire et l'occupation française est encore inscrite dans la mémoire collective hambourgeoise comme une « catastrophe[45] ».

Conséquences sur la carrière du maréchal Davout

Ă€ peine entrĂ© en France, le marĂ©chal Davout se voit signifier par le ministre de la Guerre l'ordre de ne pas rĂ©sider Ă  Paris[46]. Il se retire alors dans son domaine de Savigny-sur-Orge[26]. Le , moins d'une semaine après son arrivĂ©e, le gĂ©nĂ©ral Dupont de l'Étang l'informe que le roi a reçu des plaintes sur son comportement Ă  Hambourg[26]. Trois accusations sont portĂ©es contre lui : avoir fait tirer sur le drapeau blanc après avoir acquis la certitude du rĂ©tablissement des Bourbons, avoir accaparĂ© les fonds de la banque de Hambourg et avoir « commis des actes arbitraires qui tendaient Ă  rendre odieux le nom français[46] ». Après avoir reçu fin juin les archives de son commandement, Davout rĂ©dige le MĂ©moire de M. le MarĂ©chal Davout, Prince d'EckmĂĽhl au Roi qu'il envoie Ă  Louis XVIII le [44]. Dans cet ouvrage d'une trentaine de pages, il rĂ©fute soigneusement toutes les accusations portĂ©es contre lui, sans cĂ©der au style courtisan en vogue Ă  l'Ă©poque[23]. Le , le ministre de la Guerre l'informe que le roi a acceptĂ© son MĂ©moire, qu'aucune poursuite ne sera menĂ©e contre lui, et qu'il est mĂŞme autorisĂ© Ă  publier le document pour faire taire les critiques[44].

Malgré cela, le maréchal est poursuivi par la vindicte des milieux ultra-royalistes et Louis XVIII le maintient en disgrâce[47]. Une démarche collective des maréchaux, y compris les très « en cour » Ney et Soult, ne fait pas changer d'avis le souverain[48]. Cette disgrâce a deux conséquences : la propriété de Davout devient assez vite un repaire de mécontents et de bonapartistes, et le maréchal lui-même n'est pas appelé à venir prêter son serment de fidélité au nouveau souverain[49]. C'est donc sans états d'âme qu'il rallie Napoléon dès son entrée aux Tuileries lors des Cent-Jours[50].

Notes et références

Notes

  1. Le terme d'« alliés » désigne usuellement les membres de la sixième Coalition bien que de nombreux contingents allemands, polonais et italiens continuent à servir aux côtés des Français au début de la campagne. Ils auront quasiment tous fait défection à la fin de l'année.
  2. Pendant les six mois de siège, certaines régiments ont pu être mutés d'une division à l'autre et l'état-major est réorganisé, ce qui peut expliquer les différences entre les sources.
  3. Après l'annexion à l'Empire du royaume de Hollande en 1810, les Hollandais sont considérés comme français et intégrés dans la Grande Armée. Le régiment d'infanterie légère hollandais devient le 33e régiment d'infanterie légère, présent à Hambourg.
  4. Il s'agit, d'après Helmut Stubbe da Luz, du faubourg de Hamburger Berg, situé entre Hambourg et Altona.
  5. Le marc banco est une monnaie de compte utilisée pour les opérations de banque à Hambourg. Voir le dictionnaire du CNRTL.

Références

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  2. Tulard 1999, p. 937
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  6. Hulot 2003, p. 188
  7. Hulot 2003, p. 189
  8. Hulot 2003, p. 190
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  11. Patat 2010, p. 124
  12. Patat 2010, p. 143
  13. « Napoléon et les places fortes en Allemagne », Revue d’Histoire, no 127,‎ (lire en ligne)
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  15. Hulot 2003, p. 191
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  17. Patat 2010, p. 180
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  21. Trophées des Armées Françaises, p. 295
  22. Hourtoulle 1975, p. 344
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  24. Trophées des Armées Françaises, p. 296
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  35. Hulot 2003, p. 200
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  37. Hulot 2003, p. 201
  38. Hulot 2003, p. 202
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