Prise de Moscou
Après la bataille de la Moskova (ou de Borodino), livrée le , l'armée russe se replie en abandonnant la capitale du gouvernement de Moscou. La prise de Moscou par l'armée de Napoléon Ier, le , se fait sans combat mais la ville est ravagée par un grand incendie. Son occupation dure jusqu’au , Napoléon attendant une capitulation russe qui n'arrive pas.
Date | |
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Lieu | Moscou |
Issue | Capitulation de Moscou |
Empire français | Empire russe |
Napoléon Ier | Alexandre Ier et Mikhaïl Koutouzov |
Batailles
- Hoogstraten (de)
- Anvers
- Berg-op-Zoom
- Courtrai
Coordonnées | 55° 45′ 09″ nord, 37° 37′ 23,11″ est |
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L'entrée dans la ville
À 14 heures, Napoléon fait son entrée à Moscou, avec sa garde et le 1er corps, dans l’ancienne capitale de la Moscovie. La ville est déserte. Son gouverneur, Fédor Rostoptchine, l'a vidée de toute provision.
Le lendemain, l'Empereur s’installe au Kremlin, le palais des tsars situé au milieu de la ville. Le maréchal Mortier est nommé gouverneur, avec ordre d’empêcher le pillage par tous les moyens. Des secours sont donnés aux blessés russes qui encombrent les hôpitaux, ainsi qu’aux Moscovites qui n’ont pas voulu suivre l’armée de Koutouzov.
Ayant pris ce qu'il considère comme une capitale[1], en se fondant sur les règles de la guerre, Napoléon pense que l'empereur Alexandre Ier lui offrira sa capitulation sur le mont Poklonnaïa. Un armistice est accordé aux Russes et Napoléon, fort de son triomphe, propose la paix à Alexandre. Il ne reçoit que des réponses évasives laissant vaguement espérer un arrangement, mais qui arrangent les deux parties. Les Français ont ainsi le temps de reprendre des forces, les Russes attendent les grands froids qui obligeront les Français à évacuer la Russie.
Avant l’ordre d’évacuation, Moscou comptait environ 270 000 habitants. La plupart évacuèrent la ville et les restants se chargèrent de brûler ou de dérober les derniers stocks de nourriture pour en priver les Français. Quand Napoléon entra dans le Kremlin, il restait le tiers de la population dont la plupart étaient des commerçants étrangers, des serviteurs ou des personnes invalides ou ne voulant pas fuir. Ceux-ci se tinrent à l’écart des troupes, y compris la nombreuse communauté française présente.
L'incendie
Du 14 au du calendrier grégorien (2 au du calendrier julien), des feux sont lancés par l'armée russe à Moscou et ravagent la ville, essentiellement construite en bois. Ce fut le pire coup porté aux Français qui, privés d'abris, ne pouvaient plus rester sur place. À un signal donné, le feu éclate dans mille endroits à la fois. C’est en vain que les Français tentent d'éteindre l’incendie : le ravage des flammes ne s’arrête que dans la soirée du , lorsque près de 7 000 maisons en bois et 4 000 maisons de pierres, soit les neuf dixièmes de la ville, sont en cendres. 20 000 malades ou blessés sont victimes de ce désastre. « J'ai vaincu des armées, mais je n'ai pu vaincre les flammes » s'est exclamé Napoléon dans Le Mémorial de Sainte-Hélène.
La retraite
Occupant une ville en ruines, sans avoir reçu la capitulation russe, face à une manœuvre russe le poussant à quitter Moscou, Napoléon entame sa longue retraite le .
Mortier a ordre d’abandonner le Kremlin le 23, après l’avoir détruit, et de ne laisser en arrière ni blessés, ni malades. Dans sa marche rétrograde, la Grande Armée est constamment harcelée par l’ennemi.
Napoléon estima plus tard que son erreur avait été de ne pas quitter Moscou deux semaines plus tôt et de surprendre l'armée de Koutouzov qui campait à proximité, à Tarutino. Même si cela n'aurait pas suffi à vaincre immédiatement la Russie, celle-ci aurait été ensuite incapable d'affronter les Français.
L'étendue du désastre
Ivan Katayev estime les destructions aux trois quarts des bâtiments de la ville :
- 6 496 maisons particulières sur 9 151, dont 6 584 en bois et 2 567 en brique.
- 8 251 commerces et entrepĂ´ts, dont la plus grande partie de KitaĂŻ-gorod et dans le quartier d'affaires de Zamoskvorechye.
- 122 des 329 Ă©glises.
On estime à 2 000 le nombre de soldats russes blessés qui ont péri dans les incendies. 12 000 corps en tout ont été retrouvés. L'université d'État de Moscou, la bibliothèque Boutourline, les théâtres Petrovsky et Arbatsky ont été complètement détruits ; de nombreuses œuvres d'art, notamment l'original de Le dit de la campagne d'Igor, ont disparu à jamais. L'orphelinat de Moscou près de Kitai-Gorod, converti en hôpital, a été sauvé par la police locale. La population de Moscou estimée en 1811 à 270 000 âmes, est d'environ 215 000 résidents après la guerre, elle passe à 349 000 en 1840.
Les cartes établies par les autorités russes après la guerre (notamment des cartes militaires de 1817 réimprimées pour le public en 1831) montrent que la majorité du territoire de Moscou a été détruit dans l'incendie, à l'exception notable du Kremlin de Moscou, l'orphelinat, le quartier nord de Bely Gorod (de la rue Tverskaïa à la rue Pokrovka), les étangs du Patriarche à l'ouest, ainsi que des établissements de la banlieue.
Ces cartes qui exagèrent probablement le désastre montrent certains quartiers comme s'ils étaient détruits. Par exemple, la rue Bolshaya Nikitskaya à l'ouest du boulevard périphérique conserve nombre de ses demeures intactes ; les troupes occupantes défendent leurs propres logements ainsi que le théâtre français et la colonie française de Kouznetsky Most. Les Français tentèrent même de sauver le palais Batachov[2], occupé par Murat, mais après deux jours de lutte acharnée, celui-ci a été détruit dans l'incendie de l'arrondissement de Taganka.
Contrairement aux déclarations du général Marbot qui prétendait que l'incendie de Moscou était la principale cause de l'échec de la campagne de 1812, la destruction de Moscou n'était pas si totale, pour qu'il ne reste pas suffisamment de maisons, de palais, d'églises ou de casernes pour héberger l'ensemble de l'armée. De plus, de nombreuses unités étaient stationnées en dehors de la ville, par exemple à Ostankino (cavalerie légère) ou Khimki (corps italien) ; d'autres ont été envoyées au sud pour faire barrage aux mouvements des Russes.
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Fire of Moscow (1812) » (voir la liste des auteurs) dans sa version du .
- À cette époque, Saint-Pétersbourg était la capitale de la Russie.
- Aujourd'hui hĂ´pital Yauzskaya.
Bibliographie
- L'Incendie de Moscou raconté par Rostopchine et par Mme Narichkine sa fille, Éditions historiques Teissèdre, 14 rue Séguier 75006 Paris, réédition de . La fille de l'auteur dont il s'agit est Nathalie, mariée en 1819 au gouverneur de Crimée Dimitri Narichkine.
- François-René de Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, tome I, pages 802-807, bibliothèque de la Pléiade.
- Fédor Rostopchine, La Vérité sur l'incendie de Moscou, édité en 1823 par Ponthieu, libraire au 252 de la Galerie de Bois au Palais-Royal.
- Louise Fusil, L'Incendie de Moscou, la petite orpheline de Wilna, passage de la Berezina et retraite de Napoléon jusqu'à Wilna, imprimé en 1817 par Pillet, imprimeur au 5 de la rue Christine, Paris.
- Abbé Adrien Surrugues, curé de Saint-Louis des Français à Moscou, Lettres sur l'incendie de Moscou, éditées en 1823 par Plancher, libraire au 15 quai Saint-Michel à Paris.
- Mémoires du sergent Bourgogne, sortis le , éditions Arléa.
- G. Lecointe de Laveau, Gide fils, Moscou avant et après l'incendie, notice contenant une description de cette capitale, des mœurs de ses habitants, des événements qui se passèrent pendant l'incendie.
- Le blog « L'Estafette », outre des extraits illustrés très intéressants fournit des références de livres concernant cette page :
- Baron Guillaume Peyrusse, En suivant Napoléon, mémoires de 1809-1815, édités en 2009 aux éditions Cléa à Dijon avec une présentation, des compléments et des annotations rédigés par Christophe Bourachot.
- Louis Gardier, Un journal de la campagne de Russie, en 1812, imprimé en 1912 par Protat frères, imprimeurs à Mâcon.
- Arthur Chuquet, Lettres de 1812. La première série a été éditée en 1911 par Honoré Champion à la librairie Ancienne.
- Joseph de Kerckhove, Mémoires sur les campagnes de Russie et d'Allemagne (1812-1813), édités en 2011.
- Capitaine Vincent Bertrand, Mémoires Grande -Armée, 1805-1815, recueillis et publiés en 1909 par le colonel Chaland de la Guillanche, son petit-fils. Réédition en 1998 à la librairie des Deux empires, établie et complétée par Christophe Bourachot.
Et sur le plan littéraire on ne peut passer sous silence les passages de Guerre et Paix de Léon Tolstoï qui décrivent l'événement par le vécu de l'aristocratie russe.