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Rita Hayworth

Margarita Cansino, dite Rita Hayworth [ˈÉčiːtə ˈheÉȘwɝΞ][1], est une actrice et danseuse amĂ©ricaine, nĂ©e le Ă  New York et morte le dans la mĂȘme ville.

Rita Hayworth
Biographie
Naissance
DĂ©cĂšs
SĂ©pulture
Nom de naissance
Margarita Carmen Cansino
Surnom
La DĂ©esse de l’amour
Nationalité
Formation
Boys and Girls High School (en)
Alexander Hamilton High School (en)
Activités
Période d'activité
PĂšre
Eduardo Cansino (en)
MĂšre
Volga Hayworth (en)
Fratrie
Eduardo Cansino, Jr. (d)
Vernon Cansino (d)
Conjoints
Edward C. Judson (d) (de Ă  )
Orson Welles (de Ă  )
Prince Ali Khan (de Ă  )
Dick Haymes (de Ă  )
James Hill (de Ă  )
Enfants
Rebecca Welles (d)
Yasmin Aga Khan
ParentĂšle
Vinton Hayworth (oncle)
Elisa Cansino (en) (tante)
Autres informations
Taille
1,68 m
Distinction
Films notables
Rita Hayworth filmography (d)
signature de Rita Hayworth
Signature
Vue de la sépulture.

Elle est l'un des grands sex-symbols fĂ©minins des annĂ©es 1940. SurnommĂ©e « la dĂ©esse de l’amour », elle devient une actrice mythique du cinĂ©ma amĂ©ricain avec son rĂŽle principal dans le film noir Gilda.

Biographie

Famille

Margarita Carmen Cansino naĂźt le dans le quartier de Brooklyn Ă  New York[2]. Elle est l’aĂźnĂ©e de deux jeunes frĂšres.

Son pĂšre, Eduardo Cansino, danseur assez cĂ©lĂšbre, est d’origine sĂ©villane[3]. Le pĂšre d’Eduardo, Don Antonio Cansino, a parcouru le monde avec des reprĂ©sentations qui ont conquis des foules entiĂšres avant de s'installer en AmĂ©rique. Il a fondĂ© avec certains de ses enfants[4] une troupe populaire de danseurs de flamenco, les « Dancing Cansinos », le charme latin Ă©tant alors Ă  la mode aux États-Unis. Don Antonio oblige son fils aĂźnĂ© Eduardo Ă  faire de la danse, alors que celui-ci nourrit le rĂȘve de devenir matador[5].

À la suite du dĂ©cĂšs de deux de ses filles, Don Antonio rentre en Espagne avec sa famille et se consacre uniquement Ă  l’enseignement de la danse[6].

Par la suite Elisa, une autre de ses filles, monte un numĂ©ro de danse avec Eduardo, son frĂšre. Ils embarquent tous les deux en pour les États-Unis et parcourent ainsi le pays avec ce nouveau numĂ©ro dansĂ© qui devient renommĂ©[7] Rita Hayworth de Barbara Leaming[6] qui se rĂ©vĂšle particuliĂšrement lucratif.

La mĂšre de Rita, Volga, nĂ©e Hayworth, elle-mĂȘme danseuse, notamment pour les Ziegfeld Follies, est fille d’acteurs anglo-irlandais[5]. Elle avait fui le domicile de ses parents, bien dĂ©cidĂ©e Ă  monter sur les planches. TrĂšs vite, elle rencontre Eduardo et dĂ©cide de le suivre dans ses tournĂ©es. Ils se marient en 1917[6].

Ses premiers pas de danseuse

À l'Ăąge de 12-13 ans, Rita Hayworth en danseuse professionnelle avec les « Dancing Cansinos » (1931).

DĂšs ses premiĂšres annĂ©es, Rita Hayworth se produit dans la troupe familiale des « Dancing Cansinos » et danse notamment Ă  quatre ans avec Ă©ventail et castagnettes, Ă  l’occasion d’un rĂ©cital au Carnegie Hall. « J'avais quatre ans lorsque je suis montĂ©e pour la premiĂšre fois sur une scĂšne. Celle du Carnegie Hall. Mon pĂšre et ma tante Eliza s'y produisaient en une Ă©poque heureuse dans cette AmĂ©rique d'aprĂšs-guerre. Ma prestation consistait Ă  jouer des castagnettes et Ă  danser du flamenco dans un numĂ©ro spĂ©cialement mis au point pour moi par mon grand-pĂšre Don Antonio. Je ne me souviens plus si j'ai Ă©tĂ© applaudie
 Je l'ai sĂ»rement Ă©tĂ© car le public est toujours indulgent pour les enfants[8]. »

Son pùre exige d’elle un travail intense et lui impose des cours de danse rigoureux et particuliùrement contraignants.

« Travailler, travailler, c’est le seul mot que j’ai entendu pendant mon enfance, confiera plus tard la star Rita Hayworth. Mes parents m’ont appris Ă  danser avant que je marche[5]... » Rita Hayworth est alors d’une nature rĂ©servĂ©e, obĂ©issante et d’une timiditĂ© maladive[6].

Avec l’arrivĂ©e du parlant, l’ñge d’or du music-hall se termine et leurs spectacles ne font plus recette, tant et si bien que le groupe se dissout. Eduardo quitte New York, entasse sa famille dans une roulotte et part au hasard des routes[5]. PersuadĂ© que l’avenir est aux comĂ©dies musicales, il prend la direction de Los Angeles, espĂ©rant poursuivre sa carriĂšre au cinĂ©ma, les "latin-lovers" Ă©tant toujours Ă  la mode. Mais rĂ©ussir Ă  Hollywood n’est pas facile ; il fonde alors une Ă©cole de danse en 1929, Ă  l’angle de Sunset Boulevard et de Vine Boulevard ; c’est un succĂšs. Margarita y perfectionne son apprentissage et sera danseuse professionnelle dĂšs l'Ăąge de douze ans[9].

Le krach boursier de Wall Street vient Ă©branler l’entente familiale et ses finances, et met l'Ă©cole de danse en danger. Eduardo perd ses Ă©conomies dans de mauvais placements[5]. Et les Cansino, bohĂšmes dans l’ñme, repartent sur les routes dans leur roulotte dĂšs la premiĂšre offre intĂ©ressante. Eduardo pousse sa fille Ă  suivre ses cours de danse, et elle se rĂ©vĂšle la plus disposĂ©e Ă  prendre la relĂšve.

Margarita, 14 ans, avec son pĂšre et partenaire de danse, 1933.

Les besoins financiers se faisant sentir, Eduardo remonte ses anciens numĂ©ros de danse, met sur pied des spectacles et dĂ©cide de prendre sa fille, alors ĂągĂ©e de treize ans, comme partenaire attitrĂ©e : les « Dancing Cansinos » ressuscitent. Ils dansent des versions modernes du tango espagnol et du bolĂ©ro, elle, se vieillissant, lui, se rajeunissant, arrivant mĂȘme Ă  passer pour un couple. Leur succĂšs est inouĂŻ. Margarita travaille beaucoup, jusqu’à vingt shows par semaine, dans des night-clubs, Ă  Hollywood comme Ă  Agua Caliente (Tijuana, frontiĂšre du Mexique) ou Ă  Santa Monica, Long Beach


Rita Hayworth prend cette nouvelle vie comme un privilĂšge de se retrouver avec son pĂšre, qu’elle admire, mais elle va vite dĂ©chanter : alcoolique, il devient tyrannique, violent et, comme elle le confiera plus tard Ă  Orson Welles, son second mari, elle subira des relations incestueuses[10]. En tournĂ©e sur des casinos flottants, son pĂšre la viole tous les soirs[11]. Les consĂ©quences psychologiques seront dĂ©sastreuses pour Rita et se feront toujours sentir dans sa vie et dans ses relations chaotiques avec les hommes[6].

Pourtant, malgrĂ© ces abus, sa rĂ©serve et sa timiditĂ© maladive, Rita Hayworth apparaĂźt sur scĂšne comme une femme sensuelle dotĂ©e d’une grĂące et d’une prestance naturelles[12]. Si elle est rĂ©servĂ©e et introvertie dans sa vie privĂ©e, elle s’épanouit dĂšs qu’elle se trouve sous le feu des projecteurs. Lors de ses reprĂ©sentations dans les night-clubs, Eduardo ne manque pas de la prĂ©senter Ă  tous ceux qui comptent Ă  Hollywood, avec le secret espoir de dĂ©crocher un contrat de cinĂ©ma[6].

De la figurante Ă  la starlette

Rita Hayworth en 1935.

Ainsi, en 1933, les studios Warner Bros. lui font passer un bout d'essai mais ne la retiennent pas, la jugeant trop ronde et de front trop Ă©troit[13]. D’autres la trouvent trop brune ou d'une allure qui ne convient pas.

C’est Winfield Sheehan, vice-prĂ©sident de la Fox Film Corporation, qui remarque l’adolescente de quinze ans « Ă  la timiditĂ© qui faisait peine Ă  voir »[14] lors d’un passage Ă  Tijuana. Il assiste au numĂ©ro de Rita Hayworth et, sĂ©duit par son charme et sa silhouette, lui fait passer des essais au studio de la Fox sur Western Avenue Ă  Hollywood. Les tests sont plus que concluants, et Sheehan lui fait signer un contrat Ă  condition qu’elle change son prĂ©nom en Rita, qu’elle suive un rĂ©gime et qu'elle prenne des leçons de diction et de maintien[12].

Elle tourne trĂšs vite un court mĂ©trage et danse dans un de ses premiers films, L'Enfer (1935), aux cĂŽtĂ©s de Spencer Tracy, film dont Eduardo sera d’ailleurs l’un des chorĂ©graphes[9]. Elle apparaĂźt dans plusieurs films de sĂ©rie B : Under the Pampas Moon, Charlie Chan en Égypte, Human Cargo dans lesquels elle incarne des filles exotiques, mexicaine, Ă©gyptienne ou russe. Mais Sheehan a un projet d’envergure et veut faire de Rita une vedette grĂące Ă  un nouveau film, Ramona, avec pour elle un premier grand rĂŽle[12].

Mais la Fox connaĂźt de sĂ©rieuses difficultĂ©s et lorsqu’elle fusionne avec la 20th Century Pictures pour devenir la 20th Century Fox, le nouveau producteur en chef Darryl F. Zanuck se dĂ©barrasse de Sheehan et dĂ©cide de retravailler tous les projets de ce dernier. Il remplace Rita Hayworth par Loretta Young pour le film Ramona (1936) alors qu’elle avait dĂ©jĂ  travaillĂ© le rĂŽle. De plus, il la libĂšre de son contrat[13], geste qu’il regrettera des annĂ©es plus tard. Quand le studio lui signifie par tĂ©lĂ©phone qu’elle n’a plus Ă  mettre les pieds Ă  la Fox, Rita Hayworth est dĂ©sespĂ©rĂ©e.

« Naturellement, j’ai pleurĂ© et criĂ© et j’ai jurĂ© que je leur montrerai qu’ils avaient fait une terrible erreur, j’ai dĂ©cidĂ© que je deviendrai cĂ©lĂšbre et qu’ils le regretteraient[15]. »

C’est Ă  ce moment-lĂ  qu’elle rencontre Edward C. Judson, un obscur homme d'affaires arriviste qui, aprĂšs avoir visionnĂ© les rushes du film Ramona[12], propose Ă  Rita Hayworth, fragilisĂ©e par la perte de son contrat, de s’occuper de sa carriĂšre pour tenter de la propulser dans le cinĂ©ma. TrĂšs vite, il lui trouve des contrats dans des sociĂ©tĂ©s de petite envergure qui produisent des films de sĂ©rie B : elle tourne un petit rĂŽle dans Meet Nero Wolfe pour la Columbia, deux westerns pour la Crescent Pictures Corporation et deux autres pour la Republic Pictures et la Boots and Saddles Pictures.

ÉtouffĂ©e par son pĂšre et sa mĂšre devenue alcoolique, Rita Hayworth prend ses distances avec sa famille et, en 1937, Ă  19 ans, Ă©pouse Judson, de vingt ans son aĂźnĂ©, ce qui lui permet d'Ă©chapper Ă  l’enfer familial. Judson se substitue totalement au pĂšre de la jeune starlette, toute docile[6]. DĂšs lors, Judson la mĂ©tamorphose. Il lui fait prendre des cours de diction, la persuade de changer totalement sa façon de se vĂȘtir, de se mettre Ă  la diĂšte, d’avoir recours Ă  la chirurgie esthĂ©tique pour creuser l’ovale de son visage (en arrachant des molaires)[13]. Rita Hayworth est trop brune et trop typĂ©e. AprĂšs des semaines de sĂ©ances d’électrolyse pour redessiner l’implantation de ses cheveux, il les lui fait teindre en auburn[6].

Poursuivant ses plans, il la prĂ©sente entre-temps Ă  Harry Cohn, le patron de la Columbia Pictures qu’il connaĂźt bien. Le producteur tombe sous le charme de la belle starlette et lui fait signer un contrat de sept ans de 250 dollars par semaine[13]. Il prend en charge les frais pour parachever sa transformation[6] et change son nom de Cansino pour le nom de sa mĂšre, Hayworth, afin de faire plus distinguĂ© (avec un y, ce qui la distingue de son oncle, Vinton Haworth, Ă©galement acteur)[13]. Elle apparaĂźt pour la premiĂšre fois sous son pseudonyme en 1937, dans le film Criminels de l'air (Criminals of the Air)[9] oĂč elle exĂ©cute Ă  nouveau des danses espagnoles. Elle tourne ensuite dans une douzaine de films de piĂštre qualitĂ© mais qui lui permettent tout de mĂȘme d’acquĂ©rir plus d'expĂ©rience.

Harry Cohn, rĂ©putĂ© pour sa vulgaritĂ©, est trĂšs vite obsĂ©dĂ© par la jeune femme qui refuse ses avances. Orson Welles qualifie cette obsession de « fantastique sens de la propriĂ©tĂ© »[10]. Et Rita Hayworth subit aussi bien une cour empressĂ©e que des humiliations rĂ©pĂ©tĂ©es, Cohn lui faisant payer chĂšrement tous ses refus. Il Ă©pie toutes ses relations, allant jusqu'Ă  installer des micros dans sa loge pour ĂȘtre au courant de ses faits et gestes, ce qui ne l’empĂȘche pas de renouveler Ă  chaque fois ses contrats[6].

La déesse de l'amour

Rita Hayworth et Tyrone Power dans ArĂšnes sanglantes (1941).

Rita Hayworth se fait enfin remarquer dans le film de Howard Hawks Seuls les anges ont des ailes malgrĂ© la prĂ©sence Ă©crasante de ses deux cĂ©lĂšbres partenaires, Cary Grant et Jean Arthur, alors la star de la Columbia. RebutĂ©e par la grossiĂšretĂ© de Cohn, Jean Arthur quittera par la suite la Columbia[16]. Ce film est dĂ©terminant pour la carriĂšre de Rita Hayworth, mais l’expĂ©rience est loin d’ĂȘtre des plus agrĂ©ables ; elle dĂ©clara plus tard : « Ce fut un film difficile pour moi. C’était la premiĂšre fois que je jouais dans un film « A » important et j’avais vraiment peur. Cary Grant a Ă©tĂ© charmant et trĂšs gentil avec moi. Il m’a dit : « Ne t’inquiĂšte pas, ça va marcher » [17]. »

Effectivement, le film est un succĂšs : les critiques sont enthousiastes et le public masculin aussi, rĂ©agissant Ă  chaque apparition de Rita Hayworth[17]. Harry Cohn en prend bonne note. Lui qui n’a jamais rĂ©ussi Ă  crĂ©er une vĂ©ritable star sous contrat exclusif dans ses studios tient peut-ĂȘtre lĂ  un vĂ©ritable filon. Il commence Ă  s’occuper intensivement d’elle[18].

Rita Hayworth gagne alors 2 500 dollars par semaine et cette somme sera multipliĂ©e par dix au cours des annĂ©es suivantes. Sa carriĂšre dĂ©marre[16].

Mais Harry Cohn a du mal Ă  trouver des projets pour sa nouvelle vedette[13] et d'autres studios de Hollywood vont Ă©galement rĂ©vĂ©ler l’actrice. Elle tourne deux sĂ©ries B pour la Columbia, ainsi qu'un film musical, Musique dans mon cƓur, et un film de serial, Blondie on a Budget, basĂ© sur un Comic strip amĂ©ricain.

La Metro-Goldwyn-Mayer est la premiĂšre des Majors du cinĂ©ma Ă  utiliser Rita Hayworth. Le rĂ©alisateur George Cukor lui avait fait passer des essais en 1938 pour la comĂ©die Vacances. La jugeant trop immature pour interprĂ©ter la sƓur de Katharine Hepburn, mais lui reconnaissant un charme indĂ©finissable[8], il la recommande deux ans plus tard Ă  la Metro-Goldwyn-Mayer pour un rĂŽle secondaire trĂšs glamour dans Suzanne et ses idĂ©es avec Joan Crawford. Harry Cohn la « prĂȘte » volontiers Ă  la cĂ©lĂšbre compagnie. Le public rĂ©agit immĂ©diatement, Ă  tel point que la Columbia doit tirer un grand nombre de photos publicitaires pour satisfaire ses admirateurs[13].

Rita Hayworth en 1942, faisant la promotion de la récupération des déchets métalliques pour soutenir l'effort de guerre américain.
Rita Hayworth, pin-up girl en 1944.

Elle tourne ensuite deux autres films pour la Columbia : un remake du film français Gribouille, The Lady in question de Charles Vidor (qui deviendra son réalisateur fétiche et avec, pour la premiÚre fois, Glenn Ford avec qui elle tournera cinq films) et L'Ange de Broadway, réalisé par le scénariste Ben Hecht.

Harry Cohn est maintenant sĂ»r de la valeur de Rita Hayworth. Ne sachant toujours pas comment l’employer[13], il continue Ă  la « prĂȘter » Ă  d’autres compagnies plus cĂ©lĂšbres. Harry Cohn apprĂ©cie de voir son Ă©toile gagner en cĂ©lĂ©britĂ© : son investissement lui rapporte un pourcentage sur le salaire versĂ© par les autres studios[6].

Ainsi, une autre des principales compagnies s’intĂ©resse Ă  l’étoile naissante et l’engage pour ses deux prochains films. Ce studio, la Warner Bros. Pictures, produit le nouveau film de James Cagney, La Blonde framboise avec Olivia de Havilland et Ann Sheridan comme interprĂštes fĂ©minines, lorsque Ă©clate un conflit entre Jack Warner, le producteur, et Ann Sheridan qui refuse de faire le film. Le rĂ©alisateur du film, Raoul Walsh pense alors Ă  Rita Hayworth qu’il avait remarquĂ©e Ă  Agua Caliente, quand elle dansait avec les Cansinos, et dans un film de la Columbia. Il annonce Ă  Jack Warner : « J’ai la fille qu'il vous faut[19] ! »

FraĂźche et pĂ©tillante, Hayworth va brillamment composer son personnage de sĂ©ductrice, qui fait craquer James Cagney, Ă©poux de la trĂšs sĂ©rieuse Olivia de Havilland. « Quand le petit dentiste (Cagney) parle d’elle comme de son « idĂ©al », c’est Ă  l’image dĂ©sormais classique de Rita Hayworth qu’il se rĂ©fĂšre : la femme dont les hommes rĂȘvent et sur laquelle ils fantasment[6] », image de sĂ©ductrice qu'on retrouve dans ses films suivants. Le sex-symbol des annĂ©es quarante est nĂ©. Le film remporte un vif succĂšs ; un critique du « Times » Ă©crit : « 
 Rita Hayworth vole toutes les scĂšnes oĂč elle joue avec James Cagney et Olivia de Havilland ; c’est elle qui domine le film. » Rita Hayworth devient une star du jour au lendemain[19]. Le deuxiĂšme film de la Warner est une comĂ©die romantique, Ma femme se marie demain (Affectionately Yours) ; la compagnie essaye de racheter le contrat de Rita Hayworth Ă  la Columbia, en vain.

C’est ensuite la 20th Century Fox qui la rĂ©clame pour ArĂšnes sanglantes, film en Technicolor, avec Tyrone Power et Linda Darnell. Rouben Mamoulian, le rĂ©alisateur, a auditionnĂ© plus de trente actrices pour le rĂŽle de Doña Sol mais il finit par exiger de Darryl Zanuck qu’il fasse venir Rita Hayworth au casting[12]. DĂšs qu’il la voit, fascinĂ© par sa gestuelle sensuelle, il sait que c’est elle. Elle y rĂ©alise une magnifique performance et renforce son image de femme fatale. Hermes Pan, cĂ©lĂšbre chorĂ©graphe des films de Fred Astaire et Ginger Rogers entre autres, est un artisan de la gestuelle de Rita Hayworth pour ces ArĂšnes sanglantes : bien des scĂšnes sont chorĂ©graphiĂ©es avec prĂ©cision, comme la scĂšne mĂ©morable oĂč l’ensorcelante Doña Sol/Rita Hayworth mime le torĂ©ro donnant l’estocade au taureau reprĂ©sentĂ© par Tyrone Power, exprimant tout le dĂ©sir et la fascination sensuelle qu’elle exerce sur sa proie[6].

Rita Hayworth en cover girl Ă  la une d'un magazine en 1946.

« Les gens l’identifiaient Ă  la fascinante dĂ©esse de l’amour, mais elle n’était qu’une petite fille de huit ans. C’était une stupĂ©fiante transformation – ou plutĂŽt un alliage stupĂ©fiant. On ne pouvait pas croire que ces deux ĂȘtres Ă©taient une mĂȘme personne
 Elle m’a toujours fait penser Ă  une gitane par sa façon de se comporter. Soudain elle se levait et se mettait Ă  danser. On lui parlait, mais elle ne rĂ©pondait pas, elle se contentait de danser. Et c’était beau ! » Hermes Pan[20]. Le chorĂ©graphe devient et reste un de ses meilleurs amis.

Rita Hayworth fait maintenant la couverture de tous les magazines et la une des quotidiens et, grĂące au film, elle devient une star internationale[12]. Zanuck la rĂ©clame encore, persuadĂ© maintenant de son impact auprĂšs du public, pour le film musical Mon amie Sally d’Irving Cummings avec Victor Mature, et pour Six destins de Julien Duvivier. DĂ©sormais, Cohn ne se permet plus de « louer » sa star aux autres studios de production, bien dĂ©cidĂ© Ă  ne l’employer que pour la Columbia.

La célÚbre photo de Life magazine

En 1941, le photographe Bob Landry prend une photo de Rita Hayworth qui la montre agenouillĂ©e sur son propre lit en dĂ©shabillĂ© de satin et dentelle noirs. Le clichĂ© fait la couverture du grand magazine Life, et l'actrice obtient alors une popularitĂ© considĂ©rable auprĂšs des G.I. amĂ©ricains engagĂ©s dans la Seconde Guerre mondiale : plus de cinq millions d’exemplaires de cette photo seront tirĂ©s[21]. C’est alors le rĂšgne des pin-up girls, et Rita Hayworth est, avec Betty Grable, sans doute la plus populaire auprĂšs de ces soldats qui Ă©pinglent leurs photos aux murs de leur chambrĂ©e durant la guerre[13]. Pour soutenir le moral des troupes, Rita Hayworth participe Ă  l’Hollywood Canteen en dansant au bras des GI’s et visite des bases militaires et des hĂŽpitaux, et fait une immense tournĂ©e auprĂšs des soldats (on la voit en particulier en compagnie de Marlene Dietrich).

À la Columbia, l’actrice se remet Ă  la danse pour des comĂ©dies musicales comme Musique dans mon cƓur ; elle en tourne deux avec Fred Astaire : L'amour vient en dansant et Ô toi ma charmante. L’alchimie entre les deux danseurs est manifeste, et touche le public. Dans ses mĂ©moires, Fred Astaire Ă©crit combien les deux films tournĂ©s avec Rita Hayworth « furent de dĂ©licieuses expĂ©riences » et combien il avait aimĂ© danser avec elle, peut-ĂȘtre mĂȘme sa partenaire prĂ©fĂ©rĂ©e selon l’historien du cinĂ©ma Glenn Shipley[12]. « Chacun de ses mouvements Ă©pousait les siens, comme jamais avec aucune autre partenaire »[22]. Rita Hayworth considĂšre ces deux tournages comme prĂ©cieux dans sa carriĂšre : « Fred Ă©tait venu Ă  la Columbia et m’avait demandĂ©e, il savait que j’étais danseuse
 Sans lui, je n’aurais jamais jouĂ© dans ces deux films »[15].

C’est en mĂȘme temps que la sortie du film qu’elle divorce () d’un Edward Judson devenu menaçant, violent et d’une jalousie maladive. Les spĂ©culations sur ses amours vont alors bon train. Outre une relation suivie avec son partenaire de Mon amie Sally, Victor Mature, on lui prĂȘte des liaisons avec David Niven, Gilbert Roland, Tony Martin et le collectionneur de conquĂȘtes fĂ©minines, le milliardaire Howard Hughes[12].

L'Ă©toile au firmament

Rita Hayworth en 1947.

Orson Welles

Acteur et rĂ©alisateur de gĂ©nie, Orson Welles est fascinĂ© par la cĂ©lĂšbre photo de Rita Hayworth parue dans le magazine Life et entreprend de sĂ©duire « la plus belle femme des États-Unis »[23]. La star succombe Ă  la passion et Ă  la dĂ©termination de Welles : les deux cĂ©lĂ©britĂ©s finissent par se frĂ©quenter assidĂ»ment[24].

Toujours entourĂ© d’une troupe de thĂ©Ăątre composĂ©e d’acteurs comme Joseph Cotten ou Agnes Moorehead, Orson, rĂ©formĂ©[25] de l’armĂ©e, veut participer Ă  l’effort de guerre en montant un spectacle de divertissement, le « Mercury Wonder Show », en produisant des numĂ©ros de variĂ©tĂ©s et de magie sous un chapiteau. Rita Hayworth y participe avec une joie folle, trop heureuse de faire partie d’une « famille », et s’amuse comme une enfant Ă  exĂ©cuter auprĂšs d’Orson des tours d’illusionniste. AprĂšs quelques reprĂ©sentations de rodage, la premiĂšre du spectacle doit avoir lieu en , mais la veille, Harry Cohn interdit Ă  sa star de monter sur scĂšne[23] car il ne supporte pas de la voir dans un spectacle qui pourrait la distraire du film qu’elle est en train de tourner[26]. Rita Hayworth a beau le supplier, son producteur a lĂ©galement le droit d’user de ses prĂ©rogatives. Contrainte et dĂ©pitĂ©e, elle se consacre exclusivement au film musical, La Reine de Broadway[6]. Fou d’elle et bouleversĂ© par sa dĂ©tresse, Orson Welles lui propose le mariage, et c’est Ă  la sauvette et en petit comitĂ© qu’a lieu la cĂ©rĂ©monie, le [23].

Rita Hayworth regagne les plateaux pour La Reine de Broadway, avec Gene Kelly pour partenaire et Charles Vidor comme rĂ©alisateur. Ce film met en valeur les rĂ©elles qualitĂ©s de danseuse de Rita Hayworth et rĂ©vĂšle les talents de chorĂ©graphe de Gene Kelly (et de Stanley Donen), notamment dans le fameux numĂ©ro « The alter ego dance » oĂč il danse avec lui-mĂȘme. À sa sortie en 1944, le film est un triomphe sans prĂ©cĂ©dent qui vaut, cette fois, une renommĂ©e mondiale Ă  Rita Hayworth. Elle tourne encore avec succĂšs deux films musicaux, Cette nuit et toujours de Victor Saville (1945) et L'Étoile des Ă©toiles d’Alexander Hall (1947).

DĂ©sormais, le public attend son numĂ©ro musical, quel que soit le genre de films oĂč elle apparaĂźt. Mais elle n’a pas beaucoup de voix et doit se faire doubler dans ses chansons[13], notamment par Nan Wynn, Anita Ellis ou Jo Ann Greer - secret que la Columbia garde jalousement[13].

BoudĂ© par le cinĂ©ma et Ă©cartĂ© de la guerre, Orson Welles s’investit dans une nouvelle passion, la politique. DĂšs lors, il participe Ă  des allocutions et des discours politiques, ainsi qu’à la campagne de rĂ©Ă©lection de Franklin Roosevelt. Pour sortir un peu de Hollywood, Rita Hayworth suit son mari sur la cĂŽte est lors de ses tournĂ©es de campagne.

Lorsque Rita Hayworth, enceinte, doit rejoindre Hollywood pour tourner Cette nuit et toujours, il n'est pas question pour Orson d’interrompre sa campagne. Il continue de plus belle ses tournĂ©es politiques, dĂ©laissant de plus en plus son Ă©pouse[12] - [23]. AprĂšs une annĂ©e d’absence et la naissance de sa premiĂšre fille, Rebecca, en , Rita Hayworth reprend le chemin des studios et signe pour son prochain film.

Gilda

Gilda (1946).

Gilda est un film phare dans la carriĂšre de Rita Hayworth dont l’image marque encore aujourd’hui tous les esprits[12]. Incarnation de la femme fatale et de son extraordinaire fascination Ă©rotique[27], Rita Hayworth atteint son apogĂ©e dans ce film noir de Charles Vidor, son rĂ©alisateur fĂ©tiche. Une alchimie collective de gens pleins de talent va rĂ©unir tous les ingrĂ©dients pour engendrer la fascination[28]. Dans une scĂšne devenue morceau d’anthologie, le personnage de Gilda, vĂȘtu d’un fourreau de satin noir, retire ses longs gants en chantant l’incendiaire chanson Put the blame on Mame : le dĂ©nudement progressif des mains qui suggĂšre un « strip tease » intĂ©gral en biaisant la censure du code Hays, reste un des sommets de l’érotisme au cinĂ©ma[29]. Avec ce film, Rita Hayworth entre Ă  jamais dans la lĂ©gende cinĂ©matographique[30].

Le succĂšs est Ă©norme et les retombĂ©es sont incroyables. Une expĂ©dition enterre au pied de la cordillĂšre des Andes une copie du film destinĂ©e Ă  la postĂ©ritĂ©. On vend un disque sur lequel, Ă  travers un stĂ©thoscope, ont Ă©tĂ© gravĂ©s les battements de cƓur de Rita Hayworth[31].

Le succĂšs est si foudroyant qu’une des premiĂšres bombes atomiques larguĂ©e en 1946 sur l’atoll de Bikini est baptisĂ©e Gilda et porte l’effigie de l’hĂ©roĂŻne[31]. Rita Hayworth, profondĂ©ment choquĂ©e[6] par ce funeste hommage, proteste : « Je hais la guerre ; toute cette histoire de bombe me dĂ©goĂ»te profondĂ©ment[32]. »

La Dame de Shanghai

MalgrĂ© la naissance de sa fille, le mariage de Rita Hayworth et d’Orson Welles bat de l’aile, sans doute Ă  cause du comportement d’Orson Welles et de la jalousie maladive de Rita Hayworth.

Alors qu’ils sont en instance de divorce, Orson Welles lui offre en guise de cadeau de rupture, son film : La Dame de Shanghai.

AprĂšs avoir lu le livre dont le film sera tirĂ©, Rita Hayworth veut jouer le personnage d'Elsa Bannister et dĂ©montrer qu’elle est aussi une actrice dramatique[33]. Aux journalistes qui lui demandent pourquoi ce film, elle rĂ©torque : « Je le devais Ă  Orson ». Welles commence le tournage auquel il a convoquĂ© la presse. Devant seize photographes, il coupe la flamboyante chevelure rousse de la star et la teint en blonde platine pour les besoins du film. Harry Cohn est effrayĂ© aprĂšs avoir vu le film[34] et quand il voit la transformation de Rita Hayworth, il est furieux et explose : « Oh mon Dieu ! Qu'est-ce que ca bĂątard a fait ? » (oh my God ! What this bastard has done ?)[15]. Selon Maurice Bessy, le public pardonne mal Ă©galement au rĂ©alisateur du film « d’avoir dĂ©mythifiĂ© la femme amĂ©ricaine, de l’avoir dĂ©noncĂ©e comme un monstre, une mangeuse d’hommes, une mante religieuse qui se rĂ©vĂšle criminelle par la pire des passions, l’argent »[35].

Le film tourne au dĂ©sastre financier (le budget est de 2 000 000 de dollars[36]), certainement imputable au fait qu’il s’agit d’une Ɠuvre d’auteur et non d’un film spĂ©cialement construit autour de la star[13]. Il comporte pourtant des scĂšnes d’anthologie comme l’entrevue d’Elsa Bannister avec Michael O'Hara dans l’aquarium gĂ©ant, ou celles du parc d’attractions et du thĂ©Ăątre chinois. Le final du film sera une autre sĂ©quence d’anthologie : l’extraordinaire scĂšne de massacre dans un labyrinthe de miroirs oĂč Elsa Bannister (Rita Hayworth) agonise au milieu de ses reflets multipliĂ©s par les fragments de miroirs tombĂ©s sous l'impact des balles.

Certains diront que Welles a voulu ternir l’image et la popularitĂ© de son Ă©pouse par vengeance[12] mais tout porte Ă  croire qu’il s’agit plutĂŽt d’un rĂšglement de comptes avec le systĂšme hollywoodien[37].

Le divorce est prononcé le .

AprĂšs Gilda, un nouveau contrat est signĂ© avec la Columbia qui lui donne une participation aux bĂ©nĂ©fices, et les cachets de Rita Hayworth deviennent considĂ©rables (400 000 dollars par film[8]). Elle crĂ©e la Beckworth Corporation Production (Beckworth : association des noms Becky - diminutif de Rebecca sa fille - et Hayworth) et produira deux films : Les Amours de Carmen avec de nouveau Charles Vidor, et dans lequel elle emploie des membres de sa famille : son pĂšre chorĂ©graphe pour les danses espagnoles, son oncle JosĂ© Cansino avec qui elle danse le flamenco, et son frĂšre Vernon qui joue un soldat, puis L'Affaire de Trinidad de Vincent Sherman.

Ali Khan

Rita Hayworth en 1941.

En 1948, Rita Hayworth décide de partir quelque temps en Europe loin des lumiÚres de Hollywood, malgré le projet de Harry Cohn de lui faire tourner le western Lona Hanson avec William Holden[6].

Le , lors d’une fĂȘte Ă  Cannes donnĂ©e par Elsa Maxwell, cĂ©lĂšbre chroniqueuse amĂ©ricaine, Rita Hayworth est prĂ©sentĂ©e au prince Ali Khan. Un an plus tard, le , au terme d’une liaison placĂ©e sous le feu des tabloĂŻds, Rita Hayworth devient princesse et se marie Ă  Vallauris

Plaque commémorative du mariage, sur l'ancien HÎtel de Ville de Vallauris.

(Alpes-Maritimes), au chĂąteau de l'Horizon, dans un faste purement hollywoodien[5]. Le , la princesse Yasmin Aga Khan, sa deuxiĂšme fille, naĂźt de cette union. Rita Hayworth sĂ©journe alors souvent Ă  Cannes au chĂąteau de l'Horizon, la villa que possĂšde son mari, ainsi qu'Ă  Deauville[38]. Mais le conte de fĂ©es est de courte durĂ©e. Rita Hayworth, qui voulait fuir Hollywood, retrouve d’autres fastes encore plus contraignants. De plus, elle subit les tendances polygames de son mari, ce qui la blesse profondĂ©ment[5]. Le couple divorce en 1953.

Retour Ă  Hollywood

Rita Hayworth fait un retour triomphal Ă  Hollywood et tourne, en 1952, dans L'Affaire de Trinidad : ce film est lancĂ© comme un nouveau Gilda mais le charme n’opĂšre pas.

Sa popularitĂ© Ă©tant toujours grande, elle aborde le genre biblique avec SalomĂ©. Le film est d’abord mis en chantier par Orson Welles mais, retardĂ© par le montage d’Othello, Orson cĂšde la rĂ©alisation Ă  Rouben Mamoulian[39]. Harry Cohn veut rivaliser avec Samson et Dalila, le pĂ©plum biblique de Cecil B. de Mille[39]. L’histoire, d’aprĂšs la piĂšce de thĂ©Ăątre d'Oscar Wilde, est complĂštement remaniĂ©e pour en faire un film Ă  la gloire de la star. Le rĂ©sultat est kitchissime, criblĂ© d’invraisemblances, mais Rita Hayworth reste Ă©blouissante et magnifiquement mise en valeur, jusqu’à la scĂšne qui fera la cĂ©lĂ©britĂ© du film, celle oĂč elle semble nue lorsqu’elle exĂ©cute la danse voluptueuse des « sept voiles »[5].

LancĂ© Ă  grand renfort publicitaire, SalomĂ©, d’un budget de 2 000 000 de dollars[39], va rapporter 4 750 000 dollars[40].

Toujours aussi sensuelle, Rita Hayworth tourne ensuite La Belle du Pacifique, elle y incarne la prostituée Sadie Thompson, un rÎle interprété avant elle par Gloria Swanson et Joan Crawford[41].

Difficultés et quatriÚme mariage

Les premiĂšres annĂ©es aprĂšs son retour Ă  Hollywood sont difficiles pour Rita Hayworth. La bataille juridique l'opposant Ă  Ali pour la garde de Yasmin va durer plusieurs annĂ©es ; des menaces vont peser sur la vie de sa fille, des conflits continuels se prolongeront avec Harry Cohn, des ennuis naĂźtront avec le Maccarthysme. Rita Hayworth est soumise Ă  une enquĂȘte par le FBI en pleine pĂ©riode du Maccarthysme Ă  cause des activitĂ©s politiques d’Orson Welles lors de ses campagnes du dĂ©but des annĂ©es quarante. Rita Hayworth doit signer une dĂ©claration de non-appartenance au parti communiste[42]. Elles vont ĂȘtre Ă©galement marquĂ©es par un quatriĂšme mariage le - qui va s’avĂ©rer dĂ©sastreux - avec Dick Haymes, ancien chanteur des orchestres de Benny Goodman et de Jimmy Dorsey. Une fois encore, Rita Hayworth s'en remet complĂštement Ă  un personnage qui va se rĂ©vĂ©ler aussi trouble que l'Ă©tait son premier mari, Edward C. Judson, ce qui va jeter sa vie privĂ©e dans des imbroglios sans fin avec la presse, dans une frĂ©nĂ©sie mĂ©diatique. Pendant cette pĂ©riode, Rita Hayworth fait racheter ses parts de la sociĂ©tĂ© Beckworth par la Columbia et signe un nouveau contrat, qui sera le dernier. Un nouveau film est mis en chantier, qui reprend les ingrĂ©dients de SalomĂ©, un rĂ©cit biblique avec William Dieterle pour Joseph et ses frĂšres. Mais le film capote Ă  la suite du refus de Harry Cohn d’engager Dick Haymes[43] comme interprĂšte principal du film[6].

Par la suite, elle refuse le rĂŽle de Maria Vargas dans La Comtesse aux pieds nus, qui lui rappelle trop sa vie personnelle[44], ainsi que le rĂŽle de Karen Holmes dans Tant qu'il y aura des hommes. Un autre projet europĂ©en sur la vie de la danseuse Isadora Duncan ne verra pas le jour, Harry Cohn exigeant d’elle, par le biais des tribunaux, qu’elle fasse les deux films qu’elle lui devait encore avant de tourner pour une autre sociĂ©tĂ©.

À la suite des disputes continuelles et des violences perpĂ©trĂ©es par son mari, Rita Hayworth demande le divorce fin 1955.

CinquiĂšme mariage et derniers succĂšs

Elle retourne Ă  la Columbia en 1957 pour L'Enfer des tropiques avec Robert Mitchum, et remporte encore de grands succĂšs dans d’excellents films comme La Blonde ou la rousse avec Frank Sinatra, son dernier film Ă  la Columbia. Bien qu’elle y interprĂšte le rĂŽle d’une femme mĂ»re, elle sait administrer une belle leçon par son jeu, son rayonnement et ses numĂ©ros dansĂ©s, Ă  la nouvelle star de la Columbia Kim Novak, nouvelle « pouliche » choisie par Cohn pour remplacer Rita Hayworth dans son « Ă©curie »[45]. Elle est heureuse de passer le flambeau et d’en avoir enfin fini avec Harry Cohn.

En 1958, Rita Hayworth Ă©pouse son cinquiĂšme mari, James Hill, un producteur rencontrĂ© lors du tournage de La Blonde ou la Rousse. CrĂ©ateur d’une sociĂ©tĂ© de production avec Harold Hecht et Burt Lancaster, la Hecht-Hill-Lancaster, Hill propose le rĂŽle d’Ann Shankland Ă  Rita Hayworth pour le film Tables sĂ©parĂ©es tirĂ© d’une piĂšce anglaise de Terence Rattigan[8]. Grand succĂšs financier, le film reçoit sept nominations dont deux oscars pour les interprĂ©tations de David Niven et Wendy Hiller. Puis Rita Hayworth tourne Ceux de Cordura qui marque sĂ»rement la fin de son mythe de star[46].

Rita Hayworth divorce trĂšs rapidement de James Hill. En 1961, elle dĂ©clarait : « James Hill a Ă©tĂ© le plus calme et le plus solide de mes maris. MĂȘme avec lui, cependant, je n'ai jamais pu construire quelque chose. Il me considĂ©rait comme l'une de ses entreprises et son affection pour moi n'a jamais Ă©tĂ© un vĂ©ritable amour
 Toutes ces expĂ©riences nĂ©gatives de vie commune m'ont Ă©cƓurĂ©e. J'ai sans doute en moi Ă©galement les germes de cette incapacitĂ© Ă  vivre normalement. Ou peut-ĂȘtre que tout simplement ma vie a Ă©tĂ© une longue erreur dont je suis la principale victime[8]. »

La décennie se termine par le drame policier Du sang en premiÚre page du dramaturge Clifford Odets.

Les adieux d'un sex-symbol

Rita Hayworth en 1977.

Le dĂ©clin de Rita Hayworth s'amorce et, au cours des annĂ©es 1960, sa condition laisse penser qu’elle a sombrĂ© dans l’alcool alors que ce sont les premiers symptĂŽmes de la maladie qui apparaissent : Rita Hayworth est atteinte de la maladie d'Alzheimer. Mal connue Ă  l’époque, ses sautes d’humeur et ses trous de mĂ©moire sont mis sur le compte de la boisson. En 1962, on lui propose le rĂŽle principal dans la piĂšce de thĂ©Ăątre Step On A Crack, mais elle abandonne Ă  la suite d'angoisses et d'Ă©puisement nerveux[6].

AprĂšs la comĂ©die Les Joyeux Voleurs de George Marshall, elle fait encore de belles compositions dans la superproduction Le Plus Grand Cirque du monde de Henry Hathaway avec John Wayne, malgrĂ© ses difficultĂ©s Ă  mĂ©moriser les dialogues. Dans PiĂšge au grisbi de Burt Kennedy, elle retrouve son partenaire et ami Glenn Ford ; et dans Sur la route de Salina de Georges Lautner elle joue le rĂŽle d’une mĂšre infortunĂ©e propriĂ©taire d’un bar[13].

Durant cette pĂ©riode, ses crises empirent dans la totale incomprĂ©hension de son entourage. Elle doit reprendre le rĂŽle de Lauren Bacall dans un des plus gros succĂšs de Broadway, Applause, ce qui aurait pu relancer sa carriĂšre, mais elle n’arrive plus du tout Ă  apprendre le texte[6].

La sachant Ă  court d’argent, Robert Mitchum, son partenaire et ami de L'Enfer des tropiques, la fait engager dans ce qui sera son dernier film, La ColĂšre de Dieu. Elle termine le film tant bien que mal malgrĂ© ses abus d’alcool et ses graves problĂšmes de mĂ©moire[47].

Elle commence le tournage de Tales That Witness Madness en 1972, mais les symptĂŽmes s'aggravant, elle est remplacĂ©e par Kim Novak[48]. La rumeur de sa dĂ©chĂ©ance se rĂ©pand, c'est la derniĂšre proposition de film qui lui est faite. En 1976, elle est prise d’une crise de dĂ©mence en plein vol et photographiĂ©e Ă  Londres Ă  sa sortie de l’avion, l’air complĂštement hagard[49]. En 1980, un mĂ©decin diagnostique chez la star la maladie d'Alzheimer. En 1981, elle est placĂ©e sous la tutelle de sa fille Yasmina Khan, devenue princesse elle aussi et qui deviendra l'une des plus efficaces porte-parole de l’Association pour la dĂ©fense des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ; elle organisera au nom de sa mĂšre des galas pour rĂ©colter des fonds[5].

Le , Rita Hayworth s’éteint Ă  New York. Elle est inhumĂ©e au cimetiĂšre Holy Cross Cemetery (Culver City), dans le faubourg de Los Angeles.

Empreintes de Rita Hayworth sur le parvis du Grauman's Chinese Theatre Ă  Hollywood.

Elle a laissé ses empreintes dans le ciment du Grauman's Chinese Theatre et elle possÚde son étoile sur le Hollywood Walk of Fame (trottoir des célébrités) au 1645, Vine Street.

Citations

Ils ont dit :

  • « J'ai toujours Ă©tĂ© utilisĂ©e et manipulĂ©e par les hommes », dira un jour Rita Hayworth. « Le premier qui m'ait exploitĂ©e Ă©tait mon pĂšre ! Il savait que de m'exhiber Ă  ses cĂŽtĂ©s ne pouvait que plaire au public. Il savait que cela lui rapporterait un peu plus d'argent. Et nous en avions besoin ! »[8]
  • Au sujet de l'image Ă©rotique qui lui collera Ă  la peau toute sa vie : « Les hommes s’endorment avec Gilda et se rĂ©veillent avec moi », constate-t-elle amĂšrement.
  • « Plus qu'une femme, Rita Hayworth est l'une des incarnations de notre principal mythe national. Elle est la DĂ©esse de l'amour », selon le magazine amĂ©ricain Life[50].
  • De Rita Hayworth, Orson Welles disait : « Peut-ĂȘtre vivrai-je si longtemps que je finirai par l’oublier. »[51]

Filmographie

En tant qu'actrice

Rita Hayworth en 1942.
Gilda (1946).
Rita Hayworth et Joseph Buloff dans Les Amours de Carmen (1948).

Années 1930

Années 1940

Années 1950

Années 1960

Années 1970

En tant que productrice

Documentaires télévisés

Le , la chaĂźne de tĂ©lĂ©vision OCS propose un documentaire intitulĂ© Rita Hayworth, la crĂ©ation d'un sex-symbol, rĂ©alisĂ© par les sƓurs Kuperberg[52]. En , Ă  l'occasion de la journĂ©e de la femme, la chaĂźne Arte propose plusieurs documentaires consacrĂ©s Ă  des stars d'Hollywood[53], dont un retraçant la vie de Rita. Ce documentaire de moins d'une heure s'intitule Rita Hayworth, gloire et blessures[54]. Il y Ă©voque notamment la fragilitĂ© de l'actrice, ainsi que son courage face aux difficultĂ©s du mĂ©tier[54].

Notes et références

  1. Prononciation en anglais américain retranscrite selon la norme API.
  2. (en) Biographie sur IMDb.
  3. (en) Adrienne L. McLean, Being Rita Hayworth, Rutgers University Press, , p. 35.
  4. Huit fils et trois filles.
  5. Paris Match -M2533-1983-.
  6. Barbara Leaming, Rita Hayworth ; biographie, Paris, Presses de la Renaissance, , 346 p. (ISBN 2-85616-554-0).
  7. En 1926, grñce à leur succùs, la Warner Bros. Pictures les engage pour participer à un film afin de promouvoir le Vitaphone, nouveau systùme d’enregistrement du son sur disque
  8. Christian Dureau, Rita Hayworth, Paris, Editions PAC, (ISBN 2-85336-260-4).
  9. EncyclopĂ©die alpha du cinĂ©ma - Volume 11 - Éditions Grammont S.A. - Alpha Éditions.
  10. RapportĂ© par Orson Welles Ă  l’auteur Barbara Leaming, Rita Hayworth ; biographie, Paris, Presses de la Renaissance, , 346 p. (ISBN 2-85616-554-0).
  11. (en) Diane Telgen et Jim Kamp, Latinas! Women of Achievement, Visible Ink Press, , p. 172.
  12. Séra, Rita Hayworth, Paris, Nocturne, coll. « BD ciné », , 36 p. (ISBN 2-84907-109-9).
  13. Le CinĂ©ma Grande histoire illustrĂ©e du 7e art. Volume 3. Éditions Atlas.
  14. Winfield Sheehan Ă  Louella Parsons dans Tell it to Louella.
  15. The films of Rita Hayworth, The Legend & Career of a « Love Goddness ». par Gene Ringgold - The Citadel Press/Secaucus - New Jersey, 1974.
  16. Le CinĂ©ma Grande histoire illustrĂ©e du 7e art. Volume 2. Éditions Atlas.
  17. Todd McCarthy (trad. de l'anglais), Hawks : biographie, Arles Lyon, Solin Actes Sud Institut LumiĂšre, , 941 p. (ISBN 2-7427-2442-7).
  18. RapportĂ© par Henry Rogers, publicitaire qui s’occupa de Rita Hayworth pour sa campagne publicitaire au dĂ©but des annĂ©es quarante. Rita Hayworth Biographie. Presses de la Renaissance. (ISBN 2-85616-554-0).
  19. Raoul Walsh (trad. de l'anglais), Un demi-siÚcle à Hollywood : mémoires d'un cinéaste, Paris, Calmann-Levy, , 349 p. (ISBN 2-7021-0114-3).
  20. Hermes Pan - Rita Hayworth Biographie. Barbara Leaming - Presses de la Renaissance. (ISBN 2-85616-554-0).
  21. The Famous Pictures Collection
  22. Glenn Shipley The films of Rita Hayworth, The Legend & Career of a « Love Goddess » par Gene Ringgold – The Citadel Press – Secaucus – New Jersey 1974.
  23. Martine Moriconi - Studio Magazine.
  24. TĂ©lĂ©rama, « Orson Welles : “La vĂ©ritĂ© est que je n’ai jamais compris les femmes” » AccĂšs libre, sur TĂ©lĂ©rama, (consultĂ© le )
  25. « Orson Welles a de l’asthme, les pieds plats et le dos tordu. » Martine Moriconi - Studio Magazine.
  26. . Elle est donc remplacée par Marlene Dietrich, amie du couple.
  27. Dictionnaire du cinĂ©ma – Les films – Jacques Lourcelles – Éditions Robert Laffont – 1992 (ISBN 2-258-04027-2).
  28. 50 ans de cinĂ©ma amĂ©ricain par Jean-Pierre Coursodon et Bertrand Tavernier – Éditions Nathan - 1991/1995 - (ISBN 2-258-04027-2).
  29. Ado Kyrou, Amour-érotisme et cinéma, Le Terrain Vague, , p. 279
  30. (en) Peter W. Engelmeier, Icons of film. The 20th century, Prestel, , p. 50.
  31. L'encyclopédie du cinéma - tome 2 - Roger Boussinot - Les Savoirs Bordas (ISBN 2-04-027052-3).
  32. Delphine Valloire - arte.tv/fr.
  33. With Orson Welles Stories from a Life in film.
  34. Entretien par Juan Cobos, Miguel Rubio et José Antonio Pruneda - Cahiers du cinéma no 165.
  35. EncyclopĂ©die alpha du cinĂ©ma - Le cinĂ©ma policier Volume 8 - Éditions Grammont S.A. - Alpha Éditions.
  36. Le Film noir, Patrick Brion, Éditions de la Martiniùre.
  37. Jacques Siclier – Le Monde ().
  38. Roland Godefroy, Deauville, 25 ans de cinéma américain, éditions CID, 2000.
  39. William Dieterle - HervĂ© Dumont - CNRS Éditions/CinĂ©mathĂšque française (ISBN 2-271-06001-X).
  40. https://www.imdb.com/title/tt0046269/business.
  41. Cf. Faiblesse humaine (1928) et Pluie (1932).
  42. Le Maccarthysme à Hollywood – Victor Navasky – Balland - 1982.
  43. Dick Haymes avait un tel ascendant sur Rita Hayworth qu’il la pousse Ă  signer ce nouveau contrat et Ă  exiger cette condition pourtant plus dĂ©favorable aux propres intĂ©rĂȘts de la star mais faite principalement pour relancer sa carriĂšre Ă  lui. Rita Hayworth, Biographie. Barbara Leaming.
  44. Le film aurait Ă©tĂ© inspirĂ© de sa vie. Joseph L. Mankiewicz, Patrick Brion, Éditions de la MartiniĂšre, 1978 (ISBN 2-7324-3326-8).
  45. EncyclopĂ©die alpha du cinĂ©ma - Le cinĂ©ma romantique Volume 1 - Éditions Grammont S.A. - Alpha Éditions.
  46. Grand dictionnaire illustré du cinéma, vol. 2, éditions Atlas - (ISBN 2-7312-0414-0) édité erroné.
  47. Robert Mitchum, François GuĂ©rif, Éditions DenoĂ«l, 2003 (ISBN 2-207-25414-3).
  48. https://www.imdb.com/title/tt0070770/trivia.
  49. (en) St. Petersburg Times du .
  50. Life Magazine.
  51. EncyclopĂ©die alpha du cinĂ©ma - Le cinĂ©ma Ă©rotique Volume 7 - Éditions Grammont S.A. - Alpha Éditions.
  52. « Rita Hayworth, douleur et gloire sur OCS », sur tvmag.lefigaro.fr, (consulté le ).
  53. Olivier De Bruyn, « West, Hayworth, Hepburn et Coppola : quatre Ɠuvres pour quatre grandes stars d'Hollywood », sur www.marianne.net, 2021-03-07utc19:00:00+0000 (consultĂ© le ).
  54. Jean-Marc VERDREL, « « Rita Hayworth : gloire et blessures », dimanche 14 mars sur ARTE », sur Les coulisses de la Télévision (consulté le ).

Annexes

Bibliographie

  • (en) Gene Ringgold, The films of Rita Hayworth : the legend and career of a love goddess, Secaucus, N.J, Citadel Press, (ISBN 0-8065-0907-4)
  • (en) Gerald Peary, Rita Hayworth : A Pyramid Illustrated History of the Movies, New York, Pyramid Publ, (ISBN 0-515-04116-5)
  • (en) John Kobal, Rita Hayworth : the time, the place, and the woman, New York, Norton, , 328 p. (ISBN 0-393-07526-5)
  • (en) Joe Morella et Edward Z. Epstein, Rita : the life of Rita Hayworth, New York, Delacorte Press, , 261 p. (ISBN 0-385-29265-1)
  • Christian Dureau, Rita Hayworth, Paris, Editions PAC, (ISBN 2-85336-260-4)
  • Barbara Leaming (trad. de l'anglais), Rita Hayworth ; biographie, Paris, Presses de la Renaissance, (rĂ©impr. Ramsay Poche, 2008), 415 p. (ISBN 2-85616-554-0 et 978-2-84114-926-1)
  • (en) Adrienne L. McLean, Being Rita Hayworth : labor, identity, and Hollywood stardom, New Brunswick, N.J, Rutgers University Press, (ISBN 0-8135-3389-9)
  • GaĂ«l LĂ©pingle, Rita Hayworth, Éditions de l'ƒil, (ISBN 978-2351373347)

Articles connexes

Liens externes

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