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Republic F-105 Thunderchief

Le Republic F-105 Thunderchief était un chasseur-bombardier supersonique conçu par les États-Unis à la fin des années 1950. Il fait partie de la première génération de chasseurs supersoniques américains, connue sous le nom de Century Series Fighters. Employé exclusivement par les États-Unis, il mena la majorité des missions de bombardement du début de la guerre du Viêt Nam. Au départ conçu comme un avion d'attaque nucléaire monoplace, deux versions Wild Weasel biplaces furent aussi fabriquées et chargées de la dangereuse tâche de suppression des défenses aériennes de l'ennemi. Ces deux rôles firent du F-105 la cible prioritaire des avions ennemis, si bien qu'il fut le seul avion de chasse américain à être retiré du service en raison d'un taux d'attrition trop élevé.

Republic F-105 Thunderchief
Vue de l'avion.
Un F-105D survivant, baptisé Memphis Belle II, exposé au National Museum of the United States Air Force.

Constructeur Republic Aviation
RĂ´le Chasseur-bombardier
Statut Retiré du service
Premier vol
Mise en service
Date de retrait
Nombre construits 833
Équipage
1 (2 pour F-105C/E/F/G)
Motorisation
Moteur Pratt & Whitney J75-P-19W
Nombre 1
Type Turboréacteur avec postcombustion
Poussée unitaire 63,74 kN (109 kN avec postcombustion)
Dimensions
vue en plan de l’avion
Envergure 10,65 m
Longueur 19,63 m
Hauteur 5,99 m
Surface alaire 35,76 m2
Masses
Ă€ vide 12,470 kg
Avec armement 16 165 kg
Maximale 23 834 kg
Performances
Vitesse maximale 2 208 km/h (Mach 2,08, Ă  11 000 m)
Vitesse ascensionnelle 11 700 m/min
Rayon d'action 1 250 km
Charge alaire 452 kg/m2
Rapport poussée/poids 0,74
Armement
Externe Voir section dédiée

Capable d'atteindre la vitesse de Mach 2, le F-105 fut conçu en vue de pĂ©nĂ©trer Ă  grande vitesse et Ă  basse altitude les lignes ennemies et d'employer une arme nuclĂ©aire tactique stockĂ©e en soute. Cependant, le F-105 pouvait aussi ĂŞtre armĂ© de bombes et de missiles air-air. Le prototype effectua son premier vol en 1955 et le Thunderchief entra en service en 1958. Il pouvait dĂ©livrer un plus grand chargement de bombes que les plus grands bombardiers de la Seconde Guerre mondiale comme le B-17 Flying Fortress ou le B-24 Liberator. Durant la guerre du ViĂŞt Nam, cet avion effectua plus de 20 000 sorties, pour 382 pertes (soit près de la moitiĂ© des 833 exemplaires produits). Bien que moins agiles que les petits chasseurs MiG, les F-105 de l'United States Air Force furent crĂ©ditĂ©s de 27,5 avions ennemis descendus.

Le F-105D monoplace fut la version de bombardement principale, délivrant des frappes contre différentes cibles militaires, alors que les versions biplaces F-105F et F-105G Wild Weasel se chargeaient de réduire au silence la défense anti-aérienne ennemie, composée principalement de missiles sol-air S-75 Dvina (terminologie OTAN : SA-2 Guideline) de fabrication soviétique. Ces missions risquées imposaient aux F-105 d'être les premiers arrivés au combat puis de partir en dernier, afin de protéger les bombardiers qui rentraient à la base après avoir terminé leur mission. Deux équipages de F-105F Wild Weasel furent récompensés de la Medal of Honor pour leurs actions contre les forces nord-vietnamiennes

Pouvant peser jusqu'Ă  24 000 kg[N 1], le Thunderchief reste l'avion de chasse monorĂ©acteur et monoplace le plus lourd de l'histoire. DĂ©passant la vitesse du son au niveau de la mer et Mach 1.5 Ă  haute-altitude, le F-105 dĂ©crocha un record mondial de vitesse en 1959. Il fut remplacĂ© dans les missions de bombardement au-dessus du Nord-ViĂŞt Nam par le McDonnell Douglas F-4 Phantom II et par l'avion Ă  gĂ©omĂ©trie variable General Dynamics F-111 Aardvark Ă  partir de 1968. Les deux variantes Wild Weasel restèrent elles en service jusqu'en 1984, avant d'ĂŞtre remplacĂ©es par la version Wild Weasel du F-4, le F-4G.

DĂ©veloppement

Contexte

Au dĂ©but des annĂ©es 1950, le constructeur aĂ©ronautique amĂ©ricain Republic Aviation Company possède une solide expĂ©rience dans le milieu aĂ©ronautique. C'est en effet lui qui, sous la direction de l'ingĂ©nieur Alexander Kartveli, a conçu le cĂ©lèbre P-47 Thunderbolt, l'un des plus importants chasseurs amĂ©ricains de la Seconde Guerre mondiale, totalisant plus de 15 000 exemplaires produits. Étant le chasseur monomoteur le plus lourd de la guerre, il fut lĂ©gèrement dĂ©passĂ© lors des combats tournoyants (les dogfight) contre les très agiles Messerschmitt Bf 109 allemands, mais restait Ă©tonnamment manĹ“uvrable pour sa taille. La mise en service du P-51 Mustang, plus performant, le relĂ©gua aux missions d'appui-feu des troupes au sol, rĂ´le dans lequel il excella grâce Ă  son important armement composĂ© de roquettes et de bombes et Ă  son exceptionnelle soliditĂ©[1].

Dès 1944, une équipe dirigée par Kartveli débuta la mise au point d'un remplaçant du P-47. Il en résulta le F-84 Thunderjet, un chasseur-bombardier à aile droite à réaction subsonique mis en service en 1947[2]. Il fut utilisé par l'USAF et une dizaine d'autre forces aériennes. Son réacteur présentant de grands problèmes de fiabilité, de nouvelles versions améliorées furent étudiées. Ainsi apparaît la version F-84G en 1951, capable de transporter une bombe nucléaire Mark 7 et dotée de système de pilotage automatique et de ravitaillement en vol, il fut le premier avion de chasse monoplace doté d'une capacité nucléaire[3]. Cependant les performances du Thunderjet furent jugées insuffisantes et Republic développa le F-84F Thunderstreak, doté notamment d'une aile en flèche et d'un nouveau turboréacteur. Bien que portant aussi la dénomination F-84, il s'agissait d'un appareil radicalement différent du Thunderjet. Il servit avec succès durant la guerre de Corée[4]. Une version de reconnaissance, le RF-84F Thunderflash fut aussi utilisée. Elle se distinguait du F-84G par son nez fermé, contenant les caméras, et ses entrées d'air situées dans les emplantures des ailes[5].

Genèse du programme

Un RF-84F Thunderflash, avion dont est issu l'AP-63-FBX.

En 1950, en marge des projets expĂ©rimentaux menĂ©s sur le Thunderjet, Kartveli commença Ă  travailler sur un chasseur-bombardier supersonique tout-temps. L'avion ressemblait alors Ă  un dĂ©rivĂ© de F-84, disposant d'une soute Ă  bombes capable de transporter deux bombes nuclĂ©aires lĂ©gères Mk 28, permettant ainsi de supprimer la traĂ®nĂ©e induite par l'armement fixĂ© sous les ailes. Cette soute alourdissant la structure de l'appareil, un turborĂ©acteur plus puissant que le Wright J65-W-3 Ă©quipant le F-84F Thunderstreak Ă©tait alors nĂ©cessaire. Les rĂ©acteurs Ă©quipant les avions de cette Ă©poque Ă©taient effectivement peu performants, et ces derniers Ă©taient pour la plupart sous-motorisĂ©s. Mais l'apparition d'une nouvelle gĂ©nĂ©ration de turborĂ©acteurs comme le J57 de Pratt & Whitney, fournissant le double de la puissance du J65, vint rĂ©soudre ce problème. La firme Republic proposa alors Ă  l'USAF deux modèles: l'AP-63-FBX (Advanced Project 63 Fighter Bomber Experimental), dĂ©rivĂ© du Thunderflash et Ă©quipĂ© d'un rĂ©acteur J73 (plus tard remplacĂ© par un J71), d'une aile agrandie et d'une soute Ă  bombes et le F-84X, une version modernisĂ©e du F-84F dotĂ©e d'une nouvelle aile et d'un rĂ©acteur J57. L'USAF lui prĂ©fĂ©ra l'AP-63-FBX, qui pouvait atteindre la vitesse maximale de 1 400 km/h, transporter des armes nuclĂ©aires en soute et six bombes de 450 kg sous les ailes[6], et donna Ă  ce dernier la dĂ©nomination de F-105 en [7] - [8].

Phase de conception

En , l'USAF dĂ©sireuse de se procurer des chasseurs supersoniques passe commande de 199 F-105A[8]. En effet, la guerre de CorĂ©e rĂ©vĂ©la l'avance soviĂ©tique en matière d'avion de combat, les États-Unis dĂ©cidèrent alors retrouver leur leadership en la matière. Aussi la conception du F-105 Ă©volua en fonction des avancĂ©es technologiques. La conception originelle des 108 premiers exemplaires de production utilisait deux J71, afin d'atteindre la vitesse de Mach 1,5. La guerre de CorĂ©e Ă©tant terminĂ©e, les besoins de l'USAF diminuèrent et en , le contrat passa Ă  seulement 37 F-105 et 9 RF-105, ces derniers Ă©tant des variantes de reconnaissance plus sophistiquĂ©es embarquant des capteurs infrarouges et des radars amĂ©liorĂ©s[8]. Au fur et Ă  mesure de la conception, le AP-63-FBX fut modifiĂ© et ressembla de moins en moins au RF-84. L'empennage horizontal fut dĂ©placĂ© Ă  l'arrière du fuselage, les ailes furent placĂ©es au milieu de celui-ci et un aĂ©rofrein en quatre parties fut placĂ© Ă  l'arrière de l'avion. La soute fut agrandie, pouvant contenir suivant les missions une arme nuclĂ©aire de 1 500 kg, une bombe de 900 kg ou un rĂ©servoir auxiliaire de 1 300 l[9]. Les quatre mitrailleuses T-130 de calibre .60 furent remplacĂ©es par une unique mitrailleuse hexatube M61 Vulcan (appelĂ©e Ă  l'Ă©poque T-171D) de calibre 20 mm offrant une cadence de 6 000 coups par minute[10].

Toutes ces modifications augmentèrent considĂ©rablement le poids de l'appareil, aussi la poussĂ©e dĂ©livrĂ©e par le Allison J71 devint vite insuffisante. Republic dĂ©cida donc d'utiliser un Pratt & Whitney J57, en attendant de trouver un meilleur turborĂ©acteur. Une maquette de l'avion est construite en et validĂ©e par les autoritĂ©s. Mais en , Ă  cause des nombreux retards pris par Republic et Ă  cause de la fin de la guerre de CorĂ©e, l'USAF suspend le projet F-105 (baptisĂ© WS-306A par les autoritĂ©s). Cependant l'avionneur continua le dĂ©veloppement de son cĂ´tĂ© et trouva le turborĂ©acteur idĂ©al pour le AP-63-FBX, le Pratt & Whitney J75, alors en phase de test pour Ă©quiper le F-106 Delta Dart. Le J75 dĂ©veloppait une poussĂ©e avec post-combustion de 109 kN, contre 67 kN pour le J57. Mais le J75 n'Ă©tait pas encore totalement prĂŞt, et les premiers avions devraient ĂŞtre Ă©quipĂ©s du J57[11].

Les prototypes

Le YF-105A (serial 54-0098), premier des deux prototypes du F-105.

En , l'USAF redonne une chance à Republic et lui commande trois appareils équipés du J57 et en octobre, la commande passe à six appareils[8]. En , l'USAF, désireuse de renforcer son potentiel de frappe nucléaire tactique commande finalement 15 avions: 2 YF-105A équipés de J57, 10 F-105B et 3 RF-105B équipés de J75. Ces avions devront être dotés d'une capacité de ravitaillement en vol et d'un système de conduite de tir très sophistiqué pour l'époque, le General Electric MA-8[12]. Cette commande s'inscrit dans le plan Cook-Craigie, une nouvelle méthode de développement d'aéronef accélérant la mise en production. Avec ce plan, la phase de prototypage à proprement parler est sautée, les défauts trouvés sur les premiers avions de production devant être corrigés sur les avions suivants[N 2] - [13]. Mais Republic n'était pas le seul constructeur aspirant à fournir un chasseur-bombardier à l'USAF. En effet, North American développait au même moment le YF-107 Ultra Sabre, un avion moins conventionnel que le F-105, conçu à partir du F-100 Super Sabre et doté d'une entrée d'air dorsale à géométrie variable. L'USAF manifesta un vif intérêt pour l'avion, ce qui ne manqua pas d'inciter Republic à accélérer le développement de son F-105. En , le premier prototype YF-105A (serial 54-0098) fut terminé et envoyé à la base aérienne Edwards, en Californie pour y effectuer ses tests[14].

Le YF-105A effectua son premier vol le , pilotĂ© par le pilote d'essai en chef de Republic, Russell « Rusty » Roth. Bien que motorisĂ© par un turborĂ©acteur J57-P-25 peu puissant et pourvu d'entrĂ©es d'air subsoniques semblables Ă  celles du Thunderflash, le YF-105A dĂ©passa Mach 1,2 dès son premier vol. 12 autres vols se succĂ©dèrent, totalisant 22 heures de vol. Au cours de son dernier vol d'essai l'avion rencontra un problème au niveau du train d’atterrissage droit durant un virage trop brusque et le pilote fut obligĂ© de poser l'avion sur le ventre, l'endommageant de façon critique. Le second YF-105, pourtant prĂŞt Ă  reprendre les tests, ne vola qu'en . En effet, les rĂ©sultats obtenus par le premier montrèrent que, mĂŞme Ă©quipĂ© du J75 plus puissant, l'avion ne pouvait pas atteindre les performances demandĂ©es en raison d'une trop grande traĂ®nĂ©e. Republic remodela donc la structure de l'appareil. La principale modification fut de rendre l'avion conforme Ă  la loi des aires, ce qui entraĂ®na une rĂ©duction de la section du fuselage au niveau des ailes. Le fuselage fut allongĂ© de 60 cm. La dĂ©rive fut agrandie et une entrĂ©e d'air fut placĂ©e Ă  son emplanture. Mais la plus visible de ces modifications concernait les deux entrĂ©es d'air en flèche orientĂ©e vers l'avant et situĂ©es Ă  l'emplanture des ailes. Leurs sections Ă©tant modifiables par le pilote suivant les besoins du rĂ©acteur. Ce modèle, Ă©quipĂ© du J75 enfin disponible, fut baptisĂ© F-105B[15].

Production

Un F-105B (54-0102), fin 1959.

En , l'USAF passe commande de 65 F-105B et de 17 RF-105, puis rajoute 5 F-105C, une version d'entrainement biplace, en juin. Cette commande signe la victoire du F-105 face au F-107, son concurrent. Le premier F-105B-1-RE (54-0100) accomplit son premier vol le . Le pilote d'essai Henry Baird n'arrivant pas à sortir le train d'atterrissage avant, il posa l'avion sur deux roues, l'endommageant légèrement. Mais un problème survint lors de la tentative de déplacer l'avion à l'aide d'une grue, endommageant encore plus l'avion et retardant le planning de vol prévu. En juillet de la même année, l'USAF approuva le nom Thunderchief[16], perpétuant la tradition des Thunder de Republic[17]. Fin 1956, l'USAF modifie sa commande et annule l'acquisition de RF-105, l'USAF préférant le RF-101 Voodoo pour les missions de reconnaissance[18]. Les trois RF-105B fabriqués furent rebaptisés JF-105B et participèrent à divers vols de test[19]. Début 1957, l'USAF annula aussi la commande de F-105C, qui aurait été la première version biplace du Thunderchief[20]. Comme le premier, le deuxième F-105B (54-0101) de pré-production connaîtra une défaillance d'un train d'atterrissage et sera obligé d'atterrir sur le ventre. Le problème est rapidement identifié et corrigé sur les appareils suivants. L'intégration des nombreux systèmes électroniques, dont le système de conduite de tir MA-8, un système de navigation Doppler, un système de contrôle de navigation et un pilote automatique, entraîne de légers retards supplémentaires. L'USAF dresse une liste d'armes que le F-105 doit pouvoir employer. Parmi elles se trouvent le missile air-air AIM-9 Sidewinder, des lances-paillettes anti-radar et des armes nucléaires, comme la TX-43[19].

Les 15 premiers F-105 furent utilisĂ©s afin d'Ă©valuer les performances de l'appareil et subirent des batteries de tests. Le , le premier Thunderchief, un F-105B-6-RE, est pris en charge par le 4th Fighter-Day Wing du Tactical Air Command (TAC) et entre en service opĂ©rationnel dans le 335th Fighter-Day Squadron en . Le TAC devra cependant attendre 1959 pour aligner un squadron de F-105B complet[21] - [22]. Le , un F-105B, pilotĂ© par le gĂ©nĂ©ral de brigade Joseph H. Moore, dĂ©croche un record mondial de vitesse, en volant Ă  1 956,96 km/h de moyenne sur un circuit fermĂ© de 100 km[23]. Cinq jours plus tard, le pilote d'essai en chef de Republic Martin J. Signiorelli, s'Ă©crase dans l'ocĂ©an Atlantique aux commandes d'un F-105B, cette perte sera la seule mort liĂ©e au programme[19]. Les essais du F-105B se poursuivirent jusqu'en 1961 et rĂ©vĂ©lèrent un avion stable, se comportant bien dans l'air et dotĂ© d'une grande prĂ©cision de tir. 75 F-105B sortirent des usines de Republic situĂ©es Ă  Farmingdale, dans l'État de New York, chaque exemplaire nĂ©cessitant 144 jours de travail. Cependant, et malgrĂ© toutes ses qualitĂ©s, le F-105B ne disposait pas de la capacitĂ© d'attaque tout-temps dont rĂŞvait l'USAF[24].

Le premier F-105D construit (58-1146).

C'est pour cette raison qu'en , en parallèle du dĂ©veloppement du F-105B, Republic travailla avec l'USAF Ă  la conception d'un nouveau modèle de F-105. Ce nouveau modèle, baptisĂ© F-105D, devait employer le système de conduite de tir AN/ASG-19 Thunderstick, nettement supĂ©rieur au MA-8, et un nouveau radar NASARR R-14A. Ce changement d'avionique, augmentant le poids de l'avion, entraĂ®na quelques modifications. Le canon M61A1 fut lĂ©gèrement dĂ©placĂ©, et le cockpit gagna en ergonomie. La plus importante de ces modifications fut le choix du rĂ©acteur J75-P-19W, plus puissant, qui nĂ©cessita aux ingĂ©nieurs de redessiner l'arrière du fuselage. Le F-105D Ă©tait un appareil plus coĂ»teux et au temps de fabrication plus long (214 jours)[24]. Le premier exemplaire du F-105D (58-1146) vola le et les premiers F-105D opĂ©rationnels furent livrĂ©s au 4520th Combat Crew Training Wing sur la base aĂ©rienne de Nellis en [25].

Au dĂ©but de sa carrière, en 1961, le F-105 affichait le taux d’accidents le plus faible de tous les avions de combat de l’histoire de l’USAF. Mais en , les accidents survenus dans le F-105 Thunderchief augmentèrent de façon remarquable. On signala 33,7 accidents pour 100 000 heures de vol Ă  mi-parcours de 1964, ce qui reprĂ©sentait une augmentation considĂ©rable par rapport aux annĂ©es prĂ©cĂ©dentes. Entre autres, le , un F-105 s’écrasa dans un quartier de Las Vegas, tuant trois enfants et une femme avec le pilote. C'Ă©tait le 16e accident depuis le dĂ©but de l'annĂ©e. L'avion fut interdit de vol jusqu'Ă  que les enquĂŞtes de sĂ©curitĂ© rĂ©vĂ©lèrent plusieurs problèmes dangereux qui furent ensuite rĂ©parĂ©s[26].

Spécifications techniques

Vue d'ensemble

Le fuselage du F-105, d'une longueur de 19,6 m dans sa version D, Ă©tait divisĂ© en quatre sections, la première, pressurisĂ©e, Ă©tait composĂ©e du cockpit et du radĂ´me. Elle accueillait ainsi toute l'avionique et aussi, situĂ© dans le cĂ´tĂ© gauche du nez, le canon M61-A1 de 20 mm alimentĂ© par 1 028 obus[27]. La partie centrale, la plus volumineuse des quatre, embarquait le rĂ©servoir de carburant principal et la soute Ă  armement, caractĂ©ristique de cet appareil, qui faisait de lui le seul avion de chasse de l'Ă©poque Ă  en possĂ©der. Cette soute mesurait 4,83 m de longueur pour 0,81 m de largeur et de profondeur et Ă©tait principalement destinĂ©e Ă  accueillir la bombe nuclĂ©aire B28IN. Elle Ă©tait fermĂ©e par deux portes s'ouvrant vers l'intĂ©rieur, ce qui permettait une ouverture jusqu'Ă  la vitesse de Mach 2. En dehors de ce chargement spĂ©cifique, la soute pouvait contenir, suivant les missions, un rĂ©servoir supplĂ©mentaire de 1 300 L. Cette dernière configuration fut la plus couramment utilisĂ©e en opĂ©ration. La troisième partie abritait l'imposant rĂ©acteur J75 ainsi qu'un autre rĂ©servoir de carburant. La partie arrière Ă©tait quant Ă  elle amovible par les techniciens au sol afin de faciliter la maintenance du moteur[25].

Cette vue d'un F-105D permet de distinguer les entrées d'air caractéristiques du Thunderchief et sa voilure en flèche.

De conception relativement classique pour l'Ă©poque, le Thunderchief Ă©tait dotĂ© d'une aile mĂ©diane en flèche Ă  45° montĂ©e au milieu du fuselage. Les deux entrĂ©es d'air, inspirĂ©es des recherches effectuĂ©es sur le prototype XF-103, Ă©taient situĂ©es aux emplantures de l'aile. Une rampe placĂ©e Ă  l'intĂ©rieur de l'entrĂ©e d'air permettait Ă  l'ordinateur de bord d'ajuster le volume d'air apportĂ© au rĂ©acteur en fonction des besoins[16] - [28]. Une entrĂ©e d'air supplĂ©mentaire Ă©tait situĂ©e Ă  la base de la dĂ©rive afin de refroidir le compartiment moteur. Cette dĂ©rive principale Ă©tait complĂ©tĂ©e d'une petite dĂ©rive ventrale en magnĂ©sium destinĂ©e Ă  amĂ©liorer la stabilitĂ© de l'avion. Le train d'atterrissage tricycle se dĂ©ployait et se rĂ©tractait de façon conventionnelle, la roue avant se repliant vers l'intĂ©rieur dans le nez et les roues arrière Ă  l'intĂ©rieur des ailes. La prĂ©sence de la dĂ©rive ventrale et la place demandĂ©e par l'emport de bombe sous le fuselage nĂ©cessitait un train particulièrement haut, le cockpit se retrouvant ainsi Ă  près de 3,8 m du sol, ce qui donnait au F-105 sa silhouette particulière. Ce train Ă©tait complĂ©tĂ© d'un parachute de freinage logĂ© derrière la dĂ©rive, ainsi que d'un crochet, destinĂ© aux atterrissage d'urgence[29].

La capacitĂ© en carburant totale de l'appareil pouvait atteindre 11 300 L avec trois rĂ©servoirs largables (deux sous les ailes et un sous le ventre) ou 4 778 L sans. La première configuration n'Ă©tait que rarement employĂ©e au combat, le rĂ©servoir ventral laissant sa place Ă  un rack de six bombes[30]. En plus de ces rĂ©servoirs, le F-105 pouvait ĂŞtre ravitaillĂ© en vol grâce Ă  une perche retractable situĂ©e dans le cĂ´tĂ© gauche du nez. Un rĂ©ceptacle fut ajoutĂ© ultĂ©rieurement sur le nez des versions D et F pour permettre au F-105 d'utiliser le système de ravitaillement en vol conçu par Boeing[31].

Cockpit

Cockpit d'un F-105D. Le cockpit arrière des versions biplaces était sensiblement identique.

Le pilote prenait place dans un habitacle chauffé et climatisé relativement spacieux et confortable pour l'époque[32]. À l'intérieur se trouvaient des panneaux d'instruments essentiellement composés de jauges et de cadrans mécaniques. La manette des gaz était située sur le panneau de gauche, à côté des commandes de carburant, de radio et de radar. Le panneau de droite abritait quant à lui les contrôles d'éclairage, de train d'atterrissage, de compas et de navigation. Si le cockpit de la version F-105B était similaire à celui du F-100 Super Sabre, l'introduction de la version F-105D et de son avionique sophistiquée nécessita un réagencement des instruments afin d’accueillir leurs commandes. Parmi ces commandes figuraient l'ordinateur de navigation, le système Doppler, le pilote automatique, l'ordinateur de bombardement et surtout, l'affichage de la carte dressée par le radar de suivi de terrain[33].

Le réacteur J75-P-19W

Il s'agit d'une version améliorée du réacteur J75 déjà utilisé par le Lockheed U-2[34].

Armement

Interne :

Externe : 5 supports au total: 4 Ă— sous voilure, 1 Ă— pylĂ´ne central
CapacitĂ© jusqu'Ă  14 000 lb (6 350,29318 kg) d'armement divers

Roquettes

  • LAU-32/LAU-59 rocket pods avec 7 x FFARs chancun

Missiles

Bombe non guidée

Wild Weasel

Lors des missions Wild Weasel visant la défense antiaérienne du Nord Vietnam, les F-105D sont armés, entre autres, de bombes à fragmentation CBU-24.

Engagements

Mise en service

La patrouille acrobatique des Thunderbirds de l'USAF a utilisé le F-105B dans six démonstrations, début 1964, jusqu'à une désintégration en vol d'un appareil le , tuant le pilote[35].

Guerre du ViĂŞt Nam

Durant la guerre du ViĂŞt Nam, cet avion effectua plus de 20 000 sorties, pour 382 pertes (soit près de la moitiĂ© des 833 exemplaires produits). Bien que moins agiles que les petits chasseurs MiG, les F-105 de l’United States Air Force furent crĂ©ditĂ©s de 27,5 avions ennemis descendus.

De 1964 à 1966, des unités de F-105 sont stationné à la Takhli Royal Thai Air Force Base (en) en Thaïlande.

Sur les 150 pilotes et navigateurs de F-105 disparus au Vietnam, 48 restent encore à retrouver début 2021[36].

Afin de limiter les dégâts causés par la force aérienne populaire vietnamienne, l'Opération Bolo, ruse consistant à maquiller des chasseurs F-4 en F-105, est menée en .

Unités

United States Air Force

  • 8th Tactical Fighter Wing, Itazuke AB
    • 35th Tactical Fighter Squadron 1963–1967
    • 36th Tactical Fighter Squadron 1963–1967
    • 80th Tactical Fighter Squadron 1963–1967
  • 23d Tactical Fighter Wing, McConnell AFB
    • 560th Tactical Fighter Squadron 1963–1968
    • 561st Tactical Fighter Squadron 1963–1978
    • 562d Tactical Fighter Squadron 1963–1980
    • 563d Tactical Fighter Squadron 1963–1972
  • 355th Tactical Fighter Wing, McConnell AFB
    • 354th Tactical Fighter Squadron 1962–1970
    • 357th Tactical Fighter Squadron 1962–1970
    • 421st Tactical Fighter Squadron 1963–1967
    • 469th Tactical Fighter Squadron 1962–1968
  • 388th Tactical Fighter Wing, Korat RTAFB
    • 13th Tactical Fighter Squadron 1966–1967
    • 17th Wild Weasel Squadron 1971–1974
    • 34th Tactical Fighter Squadron 1966–1969

Notes et références

Notes

  1. Cette valeur Ă©tant la masse maximale pour laquelle l'appareil peut dĂ©coller. Un tel poids handicapant grandement les performances de l'appareil, un F-105 Ă©quipĂ© pour une mission de combat pesait environ 17 000 kg.
  2. En effet, avant ce plan, le gouvernement lançait un appel d'offres, les avionneurs soumettaient leurs propositions puis les deux ou trois sélectionnés concevaient leurs prototypes. Ces derniers étaient d'abord testés par les avionneurs eux-mêmes puis par le gouvernement, afin que ce dernier fasse un choix. L'avionneur choisi concevait ensuite la ligne de production.

Références

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

Sur le Republic F-105 Thunderchief

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