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Maurice Rouneau

Maurice Henri Rouneau (-1982), alias Martin Rendier pendant la Seconde Guerre mondiale et devenu pour cette raison Maurice Rouneau-Rendier après la guerre, est un imprimeur belge[1] qui opéra en France dans plusieurs réseaux de Résistance : le réseau Victoire[2], qu’il créa en , à Agen, et dirigea jusqu’en ; le réseau Hilaire-Wheelwright du SOE, dans lequel il travailla aux côtés du chef de réseau George Starr de à ; le réseau Adolphe-Racketeer[3], qu’il créa en et dirigea, en Bretagne, jusqu’à la Libération.

Maurice Rouneau
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Biographie
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Distinction

Identités

Né Maurice Henri Rouneau, il utilisa différents alias selon les réseaux ou missions. Il fut ainsi : Albert dans le réseau Victoire, Galles dans le réseau Wheelwright[4], Martin Rendier, dans Adolphe et Racketeer en tant qu'agent du SOE. Il a reçu l'assimilation au grade de capitaine.

Éléments biographiques

Maurice Rouneau naît le à Awans (Belgique). Devenu ingénieur des Arts et Métiers, il exerce le métier d’imprimeur à Arras.

En 1940, lors de l’attaque allemande, il est résolu à ne jamais accepter de vivre sous le joug allemand. Recherché par la Gestapo, il quitte Arras et entre en clandestinité en se réfugiant à Lille. Il réside ensuite à Béthune, en zone interdite, sous le pseudonyme de Martin Rendier.

RĂ©seau Victoire

En , il passe en zone occupĂ©e puis en zone libre et s'installe Ă  Pau, oĂą il est employĂ© d’imprimerie. Un an plus tard, avec le sergent-chef Pierre Wallerand, il jette les bases d’un rĂ©seau qu’ils appellent Victoire. Le recrutement dĂ©bute au sein de l’unitĂ© de Wallerand, le 150e rĂ©giment d’infanterie, Ă  Agen, puis Ă  Marmande et Ă  Cahors. Il s’étend rapidement Ă  des civils, particulièrement aux Alsaciens-Lorrains rĂ©fugiĂ©s dans le sud-ouest (chef de secteur : Maurice Jacob[5]). Maurice Rouneau entre en contact avec Henri Sevenet « Rodolphe Â», agent du SOE, grâce auquel le rĂ©seau va pouvoir s’étendre gĂ©ographiquement et obtenir des parachutages d'armes. L’extension couvre plusieurs dĂ©partements : Gers, Lot-et-Garonne, Gironde, Dordogne, Landes, Hautes-PyrĂ©nĂ©es, Basses-PyrĂ©nĂ©es. Rouneau recueille aussi des agents des services spĂ©ciaux, des officiers et des aviateurs alliĂ©s qui veulent regagner le Royaume-uni et il assure leur passage Ă  la frontière pyrĂ©nĂ©enne et retour par l’Espagne vers les bases alliĂ©es. Il assure en outre personnellement la liaison avec des groupes de rĂ©sistance de la rĂ©gion lyonnaise et de Haute-Savoie, et il organise des parachutages dans ces rĂ©gions. Au moment oĂą les Allemands envahissent la zone libre, Maurice Rouneau se rĂ©fugie Ă  Castelnau-sur-l’Auvignon (Gers). C’est dans ce village que, le , George Starr, qui vient d’arriver dans le Gers pour crĂ©er et diriger le rĂ©seau action Hilaire-Wheelwhright, installe son PC. Maurice Rouneau lui rattache son rĂ©seau Victoire, les parachutages peuvent commencer.

Au sein du SOE : Adolphe-Racketeer

Ă€ la suite du dĂ©mantèlement de plusieurs rĂ©seaux, George Starr dĂ©cide, pour une question de sĂ©curitĂ©, de faire partir Maurice Rouneau en Angleterre en par les PyrĂ©nĂ©es ; après avoir Ă©tĂ© internĂ© Ă  Viella (LĂ©rida), il est parvient Ă  rejoindre Gibraltar, et de lĂ , l'Angleterre par avion Ă  la fin de . Après une pĂ©riode d'entraĂ®nement au Royaume-Uni pour devenir agent secret du SOE (section F), Maurice Rouneau, volontaire pour retourner en France, est dĂ©signĂ© en 1944 pour crĂ©er et diriger le rĂ©seau Adolphe-Racketeer en Bretagne, en remplacement du rĂ©seau Oscar-Parson de François VallĂ©e qui a Ă©tĂ© dĂ©mantelĂ© par les Allemands au dĂ©but de l’annĂ©e. Selon Michael R. D. Foot, « la Bretagne est une rĂ©gion difficile pour la section F : d’une part, parce que d’autres services secrets dĂ©siraient la monopoliser — des centaines d’aviateurs abattus passaient par lĂ  pour rentrer au pays —, d’autre part parce que la section DF[6] ne souhaitait pas voir pâtir sa filière VAR de la vigilance policière accrue que la prĂ©sence d’un rĂ©seau opĂ©rationnel ne manquerait pas de susciter, et enfin parce que les maquis FTP y Ă©taient très actifs et que leurs chefs n’étaient guère enclins Ă  sympathiser avec les Britanniques[7]. Â»

Description de la mission[8]
« […] Dans le bureau du major B-P[9] s’étalait une immense carte murale de France.
Le débarquement doit se faire par ici (l’index du commandant indique le pied du Cotentin) et aussi probablement de ce côté-là (l’index revient se promener aux environs de Saint-Nazaire).
— Premier objectif probable : couper les presqu’îles, dont celle de Bretagne, qui est la plus importante. Les Allemands, pour parer Ă  toute opĂ©ration offensive sur les cĂ´tes françaises, ont massĂ© ici, Ă  l’ouest de Rennes [10] — très exactement autour de Guer —, d’importantes forces blindĂ©es. De lĂ , ils pourraient en effet se porter sur les cĂ´tes de la Manche ou sur celles de l’Atlantique. Leurs Panzer pourraient ĂŞtre acheminĂ©s, soit par route, soit par fer. Mais pour des raisons de rapiditĂ©, de commoditĂ© et d’économie de carburant, ils choisiront vraisemblablement ce dernier moyen. C’est Ă  cette intention qu’ils ont amĂ©nagĂ© de façon toute particulière la petite gare de Guer, leur permettant de rejoindre les grandes lignes. Il vous faudra ainsi opĂ©rer les coupures de voies entre Guer et Rennes, Guer-Messac, Guer-PloĂ«rmel et, par mesure de prĂ©caution, entre Messac-Rennes, Messac-Redon et PloĂ«rmel-La Brohinière. Fractionnez les voies ferrĂ©es en plusieurs endroits sur la mĂŞme ligne, de façon Ă  rendre des rĂ©parations rapides impossibles. […] Il faudra aussi dĂ©truire Ă  l’ennemi le maximum de carburant pour qu’il ne puisse pas partir par la route. En bref, vous devez tout faire pour que les blindĂ©s allemands ne puissent atteindre le front avant le cinquième jour qui suivra le dĂ©barquement. Cela, c’est le travail indispensable. Ensuite, vous devrez essayer de couper les rĂ©seaux tĂ©lĂ©phoniques et spĂ©cialement la ligne directe Brest-Berlin, installĂ©e par les Allemands. C’est tout. Comme matĂ©riel, dès que vous aurez trouvĂ© des terrains de parachutage, nous vous enverrons surtout des explosifs, quelques fusils-mitrailleurs et mitraillettes et des pistolets silencieux. N’oubliez pas qu’il s’agit d’opĂ©rations de sabotage pour lesquelles il vous faudra un personnel rĂ©duit, mais dĂ©cidé…  »

Rouneau est infiltrĂ© par bateau dans la nuit du 15 au Ă  Beg-an-Fry, une plage de GuimaĂ«c, près de Morlaix[11], avec le lieutenant Pierre Roger Duffoir. Dès leur arrivĂ©e, ils apprennent que les contacts qu’ils devaient prendre Ă  Guer ne sont plus utilisables. Fin avril, le dĂ©mantèlement du rĂ©seau Labourer[12] prive Racketer de moyens de communication radio avec Londres. Maurice Rouneau fait face Ă  cette grave difficultĂ© en s’appuyant sur le rĂ©seau Wheelwhright, grâce Ă  des agents de liaison qui se relayent pour acheminer les messages Ă  radiotĂ©lĂ©graphier de Bretagne dans le Midi. Avec le dispositif mis en place par Maurice Rouneau, le rĂ©seau Racketter est actif jusqu’à la LibĂ©ration : opĂ©rations de sabotage autour de Rennes, parachutages d’armes Ă  Berrien et Ă  Huelgoat... Des arrestations conduisent Maurice Rouneau, Ă  prendre le maquis. Au moment du dĂ©barquement en Normandie, la BBC diffuse les messages Ă  l’intention des groupes de RĂ©sistance, avec les phrases sibyllines convenues. Le , un premier message d’alerte leur indique qu’ils doivent se tenir prĂŞts pendant une quinzaine Ă  entendre le message d’action. Dans la soirĂ©e du , les messages d’action sont diffusĂ©s, signifiant que le dĂ©barquement est dĂ©clenchĂ© et que les groupes doivent exĂ©cuter les plans prĂ©vus de sabotage et de guĂ©rilla. Ă€ l’adresse du rĂ©seau Racketter, le message d’alerte pour le plan Rail est : « L’avenue fourmillait d’autos Â» ; le message d’alerte pour le plan GuĂ©rilla/routes : « AccusĂ©, levez-vous ! Â» ; le message d’action pour le plan Rail : « Le camion est en panne Â» ; et le message d’action pour le plan GuĂ©rilla/routes : « Son innocence est indĂ©niable Â». S'agissant du Plan Rail, six Ă©quipes commandĂ©es par Charles Le Joncourt sabotent avec succès les six cibles ferroviaires dĂ©signĂ©es, ainsi que les lignes Rennes-Saint-Brieuc, Redon-Quimper et Guer-PlĂ©lan-Rennes. De plus, dans le Finistère, les Ă©quipes commandĂ©es par le Dr Le Jaune coupent toutes les voies ferrĂ©es autour de Carhaix : Carhaix-Guingamp, Carhaix-Morlaix et Carhaix-LoudĂ©ac [13]. Pour le plan GuĂ©rilla/Routes, les groupes de guĂ©rilla, sous le commandement de Yves Rouswald de Berrien, entrent en action, attaquent et harcèlent les colonnes allemandes et les groupes isolĂ©s, leur infligent de lourdes pertes, s’emparent de leurs armes et font 400 prisonniers. Ă€ l’arrivĂ©e des AmĂ©ricains, ils leur remettent ces prisonniers ; puis Maurice Rouneau travaille Ă  dĂ©masquer les organisations d’espionnage allemandes. Le , la mission de Racketter est terminĂ©e : pour atteindre le front de Normandie, les divisions allemandes de Bretagne ont mis 9 jours et les divisions d’élite d’infanterie et de parachutisme 11 jours. Maurice Rouneau et Pierre Duffoir rentrent Ă  Londres. Maurice Rouneau est remis Ă  la disposition du BCRAL Ă  compter du en qualitĂ© de chargĂ© de mission de première classe, assimilĂ© au grade de capitaine. Il rejoint la DGER Ă  Paris, le . Il est libĂ©rĂ© et renvoyĂ© dans ses foyers Ă  compter du 1er mars.

Après la guerre, il adopte le nom de Maurice Rouneau-Rendier. Il meurt en 1982 à l’hôpital de Rennes.

Ĺ’uvre

Maurice Rouneau-Rendier a écrit ses mémoires de guerre dans un ouvrage intitulé Quatre ans dans l'ombre :

  • Édition originale, A. Bousquet, 1948 ;
  • RĂ©Ă©dition, revue et corrigĂ©e, en tant que première partie de Le RĂ©seau Victoire dans le Gers, mĂ©moires du Ă  la LibĂ©ration, documents rassemblĂ©s par Jeanne et Michèle Robert, collection « TĂ©moignages et RĂ©cits Â», Éditions Alan Sutton, 2003, (ISBN 2-84253-837-4).

Dans cette Ă©dition, une deuxième partie est le tĂ©moignage de sa femme Jeanne Robert, intitulĂ© « Ă‰vasion 1943 (passage des PyrĂ©nĂ©es) Â», pp. 167-192.

Distinctions

CITATION [14]

Capitaine (Ă  titre temporaire) Maurice Henri Rouneau

317861 Liste générale


Cet officier fut débarqué par mer en Bretagne en pour organiser des groupes de sabotage chargés de provoquer le maximum de dislocations dans les transports allemands de ce district.

L’opérateur radio du capitaine Rouneau fut arrêté presqu’aussitôt, le laissant sans aucun moyen de communication avec Londres. Ceci ne le découragea pas et il s’arrangea pour envoyer des messages par un circuit à plusieurs centaines de kilomètres plus au sud. Par ce moyen, il réceptionna des opérations de parachutage et réussit à former et armer un certain nombre de groupes de sabotage en dépit de l’activité de la Gestapo et de la capture de plusieurs de ses hommes et de son matériel. Le Capitaine Rouneau organisa et réalisa plusieurs opérations de sabotage de voies ferrées et, de plus, il commanda des groupes de guérilla armés, tuant nombre d’ennemis et, dans une de ces occasions, faisant 400 prisonniers qu’il remit aux autorités américaines. Ses activités ont aidé considérablement l’avance des Américains dans ce secteur et il continua à fournir des renseignements aux forces américaines pendant quelque temps après que sa position eut été débordée. Le Capitaine Rouneau a accompli de hauts faits avec très peu de moyens.

Sources primaires (dossiers d’archives)

Notes et références

  1. David Hewson, dans les notes du livre d’Anne-Marie Walters, p. 258, le prĂ©sente comme « journalist by trade Â» (journaliste).
  2. « Historique du réseau », sur Crimes de guerre nazis en Agenais. Seconde guerre mondiale en Lot & Garonne,
  3. (en) « SOE Rouneau, Maurice Henri », sur Special Forces Roll of Honour,
  4. Mentionné par Anne-Marie Walters, p. 258.
  5. Maurice Jacob, chef de division à la préfecture du Haut-Rhin replié à Agen, il fut arrêté en 1943 par la Gestapo en raison de son action au sein de Victoire, trouvé détenteur de nombreux matériels de guerre — armes et munitions —, mort en déportation à Bergen-Belsen.
  6. DF : section du SOE chargée des lignes d’évasion en France.
  7. Foot, p. 514.
  8. Jeanne Robert et Michèle Robert 2003, p. 148-149 .
  9. Robert Archibald Bourne-Paterson.
  10. La source place par erreur Guer « Ă  l’ouest de Brest Â».
  11. Brooks Richards, p. 456.
  12. ParachutĂ©s en France, Ă  NĂ©ret (Indre), dans la nuit du 5 au 6 avril, l’équipe Baudouin-Labourer est composĂ©e de Marcel Leccia « Baudouin », chef du rĂ©seau, ÉlisĂ©e Allard « Henrique », adjoint, et Pierre Geelen « Pierre Â», opĂ©rateur radio. Tous trois furent rapidement dĂ©noncĂ©s et arrĂŞtĂ©s, avant d’avoir pu agir comme prĂ©vu dans la rĂ©gion d’Angers. Pour des rĂ©cits dĂ©taillĂ©s, se reporter Ă  l'article Marcel Leccia, section Mission en France : RĂ©cit de la rĂ©ception de l'Ă©quipe LABOURER et ActivitĂ© de l'Ă©quipe LABOURER.
  13. Boxshall, sheet 58.
  14. London Gazette, .
  15. En raison d’une confusion lors de la liquidation juste après la guerre, ce dossier mélange deux organisations totalement indépendantes, mais toutes deux dépendant de la section F du SOE : 1°) le réseau ADOLPHE de Pierre Culioli ; il s’agit en fait d’un groupe qui constituait une partie du réseau Prosper-PHYSICIAN et qui opéra dans le Loir-et-Cher au premier semestre 1943, sans avoir été reconnu comme réseau indépendant par Londres ; 2°) le réseau Adolphe-RACKETEER de Maurice Rouneau-Rendier, qui opéra en Bretagne en 1944, officiellement missionné par la section F.

Annexes

Bibliographie

  • Michael R. D. Foot et Jean-Louis CrĂ©mieux-Brilhac (annot.) (trad. de l'anglais par Rachel Bouyssou), Des Anglais dans la RĂ©sistance : le service secret britannique d'action (SOE) en France, 1940-1944 [« SOE in France. An account of the Work of the British Special Operations Executive in France, 1940-1944 »], Paris, Tallandier, , 799 p. (ISBN 978-2-84734-329-8). Traduction en français par Rachel Bouyssou de (en) M. R. D. Foot, SOE in France an account of the work of the British Special Operations Executive in France, 1940-1944, London London Portland, OR, Whitehall History Pub. Frank Cass, (ISBN 978-0-7146-5528-4).
    Ce livre présente la version « officielle » britannique de l’histoire du SOE en France. Une référence essentielle sur le sujet du SOE en France.
  • Lt. Col. E.G. Boxshall, Chronology of SOE operations with the resistance in France during world war II, 1960, document dactylographiĂ© (exemplaire en provenance de la bibliothèque de Pearl Witherington-Cornioley, consultable Ă  la bibliothèque de Valençay). Voir sheet 42, WHEELWRIGHT CIRCUIT et sheet 58, RACKETEER CIRCUIT.
  • (en) Anne-Marie Walters, Moondrop to Gascony, Macmillan & Co Ltd, 1946. Ce livre a obtenu le prix John Llewellyn Rhys en 1947.
  • Sir Brooks Richards (trad. Pierrick Roullet), Flottilles secrètes : les liaisons maritimes clandestines en France et en Afrique du Nord : 1940-1944 [« Secret Flotillas »], Le Touvet (Isère), Éditions Marcel-Didier Vrac (M.D.V.), (ISBN 2-910821-41-2).
  • Jeanne Robert et Michèle Robert, Le rĂ©seau victoire dans le Gers : MĂ©moires du 19 mai 1940 Ă  la libĂ©ration, Saint-Cyr-sur-Loire, Alan Sutton, coll. « TĂ©moignages et rĂ©cits », (ISBN 978-2-84253-837-8)

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