José Luis Arrese
José Luis de Arrese Magra (Bilbao, 1905 - Corella, 1986) est un homme politique, architecte et essayiste espagnol.
José Luis Arrese | |
Fonctions | |
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Gouverneur civil de Malaga | |
â (1 an, 5 mois et 12 jours) |
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Prédécesseur | Francisco Prieto Moreno |
Successeur | Emilio Lamo de Espinosa |
Ministre-secrétaire général de la FET y de las JONS | |
â (4 ans, 2 mois et 1 jour) |
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Premier ministre | Francisco Franco |
PrĂ©dĂ©cesseur | AgustĂn Muñoz Grandes |
Successeur | JosĂ© SolĂs Ruiz |
Ministre-secrétaire général de la FET y de las JONS | |
â (1 an et 10 jours) |
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Prédécesseur | Raimundo Fernåndez-Cuesta y Merelo |
Successeur | JosĂ© SolĂs Ruiz |
Ministre du Logement | |
â (3 ans et 21 jours) |
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Prédécesseur | Néant (fonction nouvellement créée) |
Successeur | JosĂ© MarĂa MartĂnez SĂĄnchez-Arjona |
Procureur aux Cortes franquistes | |
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Biographie | |
Nom de naissance | José Luis de Arrese Magra |
Date de naissance | |
Lieu de naissance | Bilbao (Espagne) |
Date de décÚs | |
Lieu de décÚs | Corella |
Nature du décÚs | Naturelle |
Nationalité | Espagnole |
Parti politique | FE de las JONS FET y de las JONS |
Conjoint | MarĂa Teresa SĂĄenz de Heredia |
DiplÎmé de | Université polytechnique de Madrid |
Profession | Architecte |
Religion | Catholique |
RĂ©sidence | Madrid ; Corella ; Ăźles Canaries |
Issu dâun milieu ultra-catholique et carliste, il sâaffilia de bonne heure Ă la Phalange et figura comme lâun des thĂ©oriciens du phalangisme social. Pendant la Guerre civile, sâĂ©tant insurgĂ© contre lâinstitution du parti unique FET y de las JONS (renommĂ© plus tard Mouvement national) destinĂ© Ă intĂ©grer en son sein, sous la houlette de Franco, phalangistes et carlistes, il fut incarcĂ©rĂ© et Ă©chappa de justesse Ă la peine capitale. Venu Ă rĂ©sipiscence, il fut rĂ©compensĂ© de sa docilitĂ© nouvelle fin 1939 par un poste de gouverneur civil Ă Malaga, oĂč il se montra un gestionnaire efficace. Nonobstant une nouvelle brouille avec les autoritĂ©s franquistes, il fut nommĂ© en 1941 ministre-secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du Mouvement, auquel titre il procĂ©da Ă une vaste purge et sâemploya Ă Ă©vincer progressivement du pouvoir Serrano Suñer, qui faisait de lâombre au Caudillo, et Ă domestiquer plus avant la Phalange pour en faire une simple plateforme de recrutement et dâappui bureaucratique au rĂ©gime.
Ayant Ă©tĂ© lâun des plus zĂ©lĂ©s avocats de lâentrĂ©e en guerre de lâEspagne aux cĂŽtĂ©s de lâAllemagne nazie pendant la guerre mondiale, il connut une pĂ©riode dâostracisme aprĂšs la dĂ©faite de lâAxe tandis que le rĂ©gime, dĂ©savouant son passĂ© fasciste, sâappliquait Ă redorer son blason en cultivant les rĂ©fĂ©rences catholiques et monarchistes. ChargĂ© en 1956 dâimaginer une armature institutionnelle du rĂ©gime, le projet conçu par lui, qui faisait la part belle Ă la Phalange, dĂ©clencha une telle bouffĂ©e de protestations de la part des autres secteurs du franquisme quâil dut ĂȘtre abandonnĂ©. RemplacĂ© alors Ă la direction du Mouvement, il fut relĂ©guĂ© au poste de ministre du Logement, oĂč son plan de construction de logements sociaux se heurta Ă lâopposition des technocrates libĂ©raux, lesquels avaient dĂ©sormais la haute main sur la politique gouvernementale ; Arrese prĂ©fĂ©ra alors remettre sa dĂ©mission, au bout de trois annĂ©es dâexercice. Il continua de siĂ©ger aux Cortes franquistes jusquâĂ lâextinction du rĂ©gime franquiste en 1977.
Architecte de formation, Arrese était membre de diverses académies des beaux-arts et cofonda avec son épouse la fondation qui porte son nom, vouée à la préservation du patrimoine architectural.
Biographie
Formation et jeunes années
NĂ© Ă Bilbao le [1], au sein dâune famille distinguĂ©e, ultra-catholique et dâallĂ©geance carliste[2] - [3], il suivit une formation dâarchitecte Ă lâĂcole technique supĂ©rieure d'architecture de Madrid. Pendant ses annĂ©es dâĂ©tudiant, il remplit lâoffice de vice-prĂ©sident de l'AsociaciĂłn CatĂłlica de Propagandistas et de prĂ©sident de lâAssociation de lâarchitecture[4].
Ses Ă©tudes achevĂ©es, il devint architecte de profession[5] et contracta mariage avec MarĂa Teresa SĂĄenz de Heredia, cousine germaine de JosĂ© Antonio Primo de Rivera[6] - [note 1]. Arrese, qui nourrissait depuis sa jeunesse de profondes convictions catholiques[2], cofonda la FĂ©dĂ©ration espagnole des travailleurs et la FĂ©dĂ©ration patronale catholique[7]. Il adhĂ©ra plus tard Ă la Phalange espagnole, parti dâextrĂȘme droite de faible envergure, mais fort actif et violent, fondĂ© en 1933 par JosĂ© Antonio Primo de Rivera. Bien quâArrese ait affirmĂ© par la suite ĂȘtre une « vieille chemise » â câest-Ă -dire un phalangiste affiliĂ© dĂšs avant la Guerre civile[8] â, il apparaĂźt pourtant quâil nâadhĂ©ra Ă la Phalange quâen , peu avant le dĂ©clenchement de ce conflit armĂ©[2] - [note 2].
Quand la Guerre civile Ă©clata en , Arrese se trouvait Ă Madrid, mais rĂ©ussit Ă se rĂ©fugier dans lâambassade de NorvĂšge, puis Ă rejoindre la zone insurgĂ©e[1] - [7]. Au printemps 1937, il sâimpliqua dans les dĂ©nommĂ©s Ă©vĂ©nements de Salamanque, ralliant la faction de la Phalange emmenĂ©e par Manuel Hedilla et hostile au dĂ©cret dâunification prĂ©voyant la fusion des partis phalangiste et carliste[8]. AprĂšs lâĂ©chec des hĂ©dillistes, il fut interpellĂ© par les autoritĂ©s et Ă©crouĂ©. Sur le point dâĂȘtre fusillĂ©[9], il Ă©chappa pourtant Ă la peine de mort â commuĂ©e en peine dâincarcĂ©ration â grĂące Ă lâintervention de RamĂłn Serrano SĂșñer, beau-frĂšre du gĂ©nĂ©ralissime Franco[10] (certains auteurs tenant toutefois que ce fut son Ă©pouse MarĂa Teresa qui entreprit des dĂ©marches auprĂšs de Serrano Suñer[11]). AprĂšs un certain temps passĂ© en prison, il dĂ©savoua sa rĂ©bellion de naguĂšre et se montra dĂ©sormais nettement plus docile face au nouveau rĂ©gime[5], ce qui lui valut notamment dâĂȘtre nommĂ© gouverneur civil de Malaga Ă la mi-[12].
Gouverneur civil de Malaga
Arrese, nouveau gouverneur civil de la province de Malaga, trouva Ă son arrivĂ©e une province appauvrie et gravement frappĂ©e par la pĂ©nurie alimentaire. En peu de temps, il rĂ©ussit Ă juguler le marchĂ© noir et organisa, le jour de NoĂ«l de la mĂȘme annĂ©e, une distribution de jouets et de cadeaux pour les enfants du chef-lieu de province[2]. En , il parvint Ă rĂ©soudre la pĂ©nurie de vivres en faisant acheminer du Maroc espagnol plusieurs milliers de tonnes de nourriture par deux navires de transport[13]. Dans le domaine urbanistique, il fit Ă©largir la plage, tant en gagnant du terrain sur la mer qu'en dĂ©plaçant vers lâintĂ©rieur la limite de la plage, mesure qui se rĂ©vĂ©lera opportune Ă lâheure du tourisme de masse[14]. Cette mĂȘme annĂ©e encore, Arrese Ă©tablit un nouveau plan dâurbanisme pour la ville de Malaga, lequel cependant ne sera pas mis en Ćuvre[15].
Ă la tĂȘte du parti unique
En riposte Ă la nomination de Galarza comme ministre de lâIntĂ©rieur, Arrese, de concert avec huit autres dirigeants provinciaux du parti unique FET y de las JONS (dit aussi le Mouvement national), prĂ©senta sa dĂ©mission[7], mais accepta peu aprĂšs dâĂȘtre dĂ©signĂ©, une fois apaisĂ©e la dĂ©nommĂ©e crise de , ministre-secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du Mouvement[16] - [17] - [7] ; ce poste, qui avait alors rang de ministre, se trouvait vacant depuis , par suite de la dĂ©mission dâAgustĂn Muñoz Grandes[14]. En effet, si Franco avait tout dâabord mandĂ© Arrese Ă Madrid, en raison de soupçons de conspiration[18], Arrese rĂ©ussit Ă convaincre le Caudillo quâil ne trempait dans aucun complot contre sa personne. Franco retira des explications fournies par Arrese une satisfaction telle que non seulement il sâabstint de le destituer, mais encore quâil le nomma Ă la direction de la Phalange-Mouvement. Certains auteurs indiquent que la proposition de placer Arrese Ă la tĂȘte du parti unique Ă©tait venue de la cheffe de la Section fĂ©minine (SF), Pilar Primo de Rivera[19]. Franco, qui Ă cette Ă©poque cherchait Ă mieux maĂźtriser la mouvance fasciste, mais sans pour autant se dĂ©barrasser de lâatout phalangiste, nomma Ă des postes importants trois figures de la Phalange, toutes loyales Ă Franco et non susceptibles de provoquer des dissensions avec lui. Au surplus, en nommant lâobĂ©issant Arrese secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de la FET, Franco mettait sur pied une polaritĂ© rivale Ă celle de Serrano Suñer, qui dut cĂ©der une partie de ses attributions Ă Arrese[20] - [21] - [22]. Du reste, dans un premier temps, Serrano Suñer ne percevait pas dans le nouveau secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral une menace pour ses amples pouvoirs et se faisait fort de continuer dâĂȘtre en mesure de dominer le parti comme il lâavait fait quand FernĂĄndez-Cuesta et Muñoz Grandes en Ă©taient secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral[23].
Purges de novembre 1941
Arrese entreprit Ă partir de une purge au sein du parti, dans le but dâen expulser les Ă©lĂ©ments les plus « incontrĂŽlĂ©s » ou les plus à « gauche » qui sâĂ©taient affiliĂ©s Ă la Phalange durant la Guerre civile. Dans les quatre annĂ©es suivantes, quelque 4 000 militants furent ainsi exclus du parti[24]. La rĂ©pression sâĂ©tendit Ă dâautres organes, comme les syndicats verticaux, et frappa en particulier le dĂ©lĂ©guĂ© national des Syndicats, Gerardo Salvador Merino, dont les partisans insubordonnĂ©s furent de mĂȘme expulsĂ©s du parti dĂšs lâ[25]. Merino en effet, dirigeant le plus radical de la Phalange, issu de la gauche, avait su, par ses vibrants discours rĂ©volutionnaires, attirer dans la Phalange nombre dâouvriers et de personnes anciennement de gauche[26] ; en sâinspirant des syndicats nazis et de mĂ©thodes qui ne pouvaient quâinquiĂ©ter lâĂglise et les catholiques, Merino sâĂ©tait mis Ă dĂ©velopper son action Ă la faveur de la promulgation de la loi dâunification syndicale[20] et contribua Ă accroĂźtre le nombre dâaffiliĂ©s de la FET Ă prĂšs dâun million. AprĂšs cette purge, la seule dans toute l'histoire du parti, Ă laquelle Arrese avait procĂ©dĂ© en Ă©liminant de ses rangs la crypto-gauche, les anciens francs-maçons et dâautres militants indĂ©sirables, le rĂŽle du parti ne cessera par la suite de sâamenuiser[26] : Arrese, prenant ses distances Ă lâĂ©gard de Serrano Suñer, mit Franco en mesure de convertir chaque jour davantage la Phalange en une simple bureaucratie, en plate-forme dâappui populaire et en appareil dâorganisation de manifestations de masse en soutien Ă Franco, tout en estompant ses vellĂ©itĂ©s rĂ©volutionnaires[27]. Arrese, Ă qui cette Ă©puration permit de consolider sa domination sur le parti, se vit en outre confier le soin de la propagande et de la presse du rĂ©gime â jusque-lĂ sous la tutelle du ministĂšre de lâIntĂ©rieur[28] â, qui allaient figurer dĂ©sormais parmi les attributions du vice-secrĂ©tariat de lâĂducation populaire, et donc tomber Ă©galement sous la houlette dâArrese. La censure et la cinĂ©matographie passĂšrent elles aussi sous lâautoritĂ© de cet organisme[29].
En , le lent processus de mise en place de lâarmature institutionnelle du rĂ©gime franquiste franchit une nouvelle Ă©tape avec la promulgation des Lois fondamentales et de la loi instituant les Cortes, conçues comme une sorte de parlement corporatiste, grosso modo sur le modĂšle de la Chambre des Faisceaux et des Corporations mussolinienne. Significativement, la tĂąche dâen tracer les lignes de force fut confiĂ©e non pas Ă Serrano Suñer, mais au docile Arrese[30].
Incident de Begoña et chute de Serrano Suñer
La lutte pour la domination de la Phalange nĂ©cessitait dâaffronter Serrano Suñer, qui, quoiquâayant certes perdu de son pouvoir Ă lâintĂ©rieur du parti, continuait dâĂȘtre une figure influente. Selon Stanley G. Payne, Arrese joua un rĂŽle de premier plan dans la chute, au , de Felipe XimĂ©nez de Sandoval, chef du Service extĂ©rieur de la Phalange et bras droit de Serrano Suñer au ministĂšre des Affaires extĂ©rieures[31]. La version traditionnelle soutient quâil Ă©tait derriĂšre le montage dâune fausse accusation dâhomosexualitĂ© Ă l'encontre de XimĂ©nez de Sandoval, laquelle aurait entraĂźnĂ© son expulsion du corps diplomatique et du parti unique[31].
En Ă©clata lâune des crises politiques les plus graves survenues sous la dictature de Franco, point culminant dâun long affrontement entre lâarmĂ©e et la Phalange : Ă lâissue dâune cĂ©rĂ©monie de commĂ©moration pour les combattants carlistes morts sur le champ dâhonneur qui se tenait Ă Begoña, faubourg de Bilbao, et Ă laquelle avaient assistĂ© les ministres Varela et Iturmendi, un groupe de carlistes et de monarchistes qui au sortir de la basilique avait profĂ©rĂ© des cris contre Franco et la Phalange fut pris Ă partie par un groupe de phalangistes, les deux groupes Ă©changeant dâabord leurs slogans, puis des insultes, enfin des coups, jusquâau moment oĂč des grenades Ă main furent lancĂ©es depuis le groupe des phalangistes. Varela, demeurĂ© indemne, envoya des tĂ©lĂ©grammes Ă tous les capitaines gĂ©nĂ©raux des rĂ©gions et Ă©leva une vigoureuse protestation auprĂšs de Franco[32] - [30] - [33]. AprĂšs lâentretien quâil eut avec Franco le pour lui demander dâagir contre la Phalange, mais oĂč il Ă©tait apparu que Franco nâavait pas lâintention dâentreprendre quoi que ce soit, Varela prĂ©senta sa dĂ©mission. Carrero Blanco, qui avait pendant des mois conspirĂ© avec Arrese pour Ă©vincer Serrano Suñer, souffla Ă l'oreille du Caudillo que si les deux dĂ©missions annoncĂ©es avaient lieu (celles de Varela et de Galarza), et que si Serrano Suñer Ă©tait maintenu Ă son poste, les militaires et dâautres anti-phalangistes clameraient que la Phalange avait obtenu une victoire complĂšte[34]. L'incident dĂ©boucha donc sur une crise gouvernementale, Ă lâoccasion de laquelle Franco procĂ©da Ă un remaniement de son gouvernement, limogeant le ministre des ArmĂ©es Varela et Ă©cartant le ministre de lâIntĂ©rieur Galarza, et, en contrepartie, congĂ©diant Ă©galement, afin de tenir la balance Ă©gale entre la Phalange et lâarmĂ©e, le phalangiste Serrano SĂșñer, pour le remplacer par GĂłmez-Jordana, le premier en date de ses ministres des Affaires Ă©trangĂšres. De plus, Franco dĂ©cida dâassumer personnellement la prĂ©sidence du ComitĂ© politique de la Phalange[32] - [35] - [36].
La chute de Serrano Suñer Ă lâ signifia la victoire dĂ©finitive dâArrese dans la lutte pour la domination de la FET y de las JONS[37], de sorte que dĂšs ce moment Arrese ne rencontra plus dâopposition ni nâeut plus de rivaux dans le parti. En revanche, tant Arrese que les autres dirigeants phalangistes sâĂ©taient avisĂ©s que leur sort politique Ă©tait dorĂ©navant liĂ© Ă celui du dictateur lui-mĂȘme et sâabstinrent dĂšs lors de contester le pouvoir du Caudillo, mettant au contraire tous leurs efforts et toute leur Ă©nergie Ă consolider aussi bien ses pouvoirs que ses champs dâautoritĂ©, en particulier face Ă ses rivaux monarchistes et militaires[38]. Aussi la Phalange se retrouva-t-elle totalement soumise Ă Franco[39].
Seconde Guerre mondiale et ostracisme
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Arrese se signala comme lâun des principaux zĂ©lateurs de lâAllemagne nazie. Il entretenait des contacts rĂ©guliers avec Hans Thomsen[40], chef du Parti nazi en Espagne, et avec Erich Gardemann, conseiller de lâambassade dâAllemagne Ă Madrid, les assurant que la chute de Serrano Suñer entraĂźnerait automatiquement une coopĂ©ration accrue entre lâEspagne franquiste et lâAllemagne[41]. Vers la fin de 1942, Arrese appartenait au groupe de personnalitĂ©s politiques et militaires qui faisaient pression sur Franco Ă lâeffet que lâEspagne sâengage dans la guerre aux cĂŽtĂ©s d'Adolf Hitler[42]. Lorsquâen novembre de cette mĂȘme annĂ©e eut lieu le dĂ©barquement alliĂ© en Afrique du Nord, Arrese futâ avec JosĂ© Antonio GirĂłn de Velasco et Carlos Asensio â parmi les ministres qui proclamĂšrent que câĂ©tait lĂ le moment pour lâEspagne dâentrer en guerre. Cette position dĂ©clencha un vif dĂ©bat et de fortes dissensions internes au sein du gouvernement franquiste[43] ; quoi quâil en soit, lâEspagne sâabstiendra finalement de prendre part au conflit.
En , Arrese effectua une visite[note 3] - [44] - [45] en Allemagne, oĂč il put sâentretenir personnellement avec Hitler[42], ce qui provoqua les vives protestations de GĂłmez-Jordana, celui-ci nâayant pas Ă©tĂ© prĂ©alablement informĂ© de ce voyage. En partie Ă la suite de ces protestations, et pour Ă©viter une dĂ©gradation des relations avec les puissances alliĂ©es, Franco ordonna Ă Arrese de restreindre ses commentaires sur lâAllemagne nazie ou sur lâissue du conflit, qui ne saurait ĂȘtre selon Arrese qu'Ă lâavantage de lâAxe ; fait est quâaprĂšs son retour dâAllemagne, qui coĂŻncida avec la dĂ©faite allemande de Stalingrad, Arrese se montra plus circonspect dans ses marques dâappui au nazisme[46]. La Phalange aussi sâaligna sur la nouvelle stratĂ©gie de Franco, et Arrese Ă prĂ©sent sâĂ©vertuait Ă expliquer le plus souvent possible que la Phalange nâavait rien Ă voir avec le fascisme italien et quâelle Ă©tait un mouvement « authentiquement espagnol »[47].
Cette prudence sâaccrut encore aprĂšs la chute de Mussolini et lâeffondrement de lâItalie fasciste en . Quelques mois plus tard, en septembre, Arrese prononça un discours oĂč il dĂ©clara que « lâEspagne nâĂ©tait pas une nation totalitaire », ce qui ne manqua de chagriner certains membres de la Phalange, tels que Pilar Primo de Rivera[48]. La dissolution de la Milice nationale de la FET y de las JONS (les chemises bleues) le , sur ordre dâArrese lui-mĂȘme, fait figure de symbole de ce renversement de tendance[49].
Le , une fois consommĂ©e la dĂ©faite de lâAllemagne nazie, Franco remania son gouvernement, en Ă©vinçant ceux de ses membres les plus liĂ©s Ă lâAxe, notamment Lequerica et Asensio Cabanillas[50] - [51]. Dans lâadministration, nombre de phalangistes germanophiles furent limogĂ©s et sâĂ©vanouirent de la scĂšne politique[52] - [53]. Ce qui donne toute sa signification Ă ce remaniement est la nomination aux Affaires Ă©trangĂšres dâun exposant du monde catholique, en la personne dâAlberto MartĂn-Artajo, Ă©lĂ©ment clef, bien quâavant tout dâordre symbolique, destinĂ© Ă accentuer lâidentitĂ© catholique du rĂ©gime et Ă ancrer lâappui des catholiques. Le fidĂšle Arrese dut quitter le gouvernement, laissant derriĂšre lui, comme principal accomplissement, la totale domestication de la Phalange et la rĂ©duction de sa cosmĂ©tique fasciste[54] - [55]. AprĂšs la destitution dâArrese, Franco ne lui dĂ©signa pas de successeur et le poste de secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral resta vacant[56] - [note 4]. Arrese connut ensuite plusieurs annĂ©es dâostracisme politique[1], oĂč il nâoccupa plus aucune charge de quelque importance.
Retour sur la scĂšne politique (1956)
Arrese reprit la tĂȘte du Mouvement national Ă la suite de la dĂ©nommĂ©e crise de fĂ©vrier 1956, lors de laquelle Franco limogea abruptement le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du Mouvement Raimundo FernĂĄndez-Cuesta[57]. Dans les annĂ©es 1950, La Phalange-Mouvement, en dĂ©pit de ses airs belliqueux, se faisait sans cesse plus faible, cependant que les monarchistes intensifiaient leur activitĂ©, ainsi que les dirigeants catholiques, et que mĂȘme lâopposition de gauche commençait Ă montrer des signes de vie. En rĂ©action, Franco s'appliqua Ă consolider son rĂ©gime, et le changement le plus important de son nouveau gouvernement fut de remettre Arrese, son phalangiste prĂ©fĂ©rĂ©, au poste de secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du Mouvement. En outre, un groupe de jeunes dirigeants du Mouvement fut promu Ă cette occasion, dont JesĂșs Rubio, Torcuato FernĂĄndez-Miranda et Manuel Fraga Iribarne[58].
Ladite crise, au cours de laquelle les antagonismes prĂ©sents dans la sphĂšre interne du rĂ©gime sâĂ©taient fortement exacerbĂ©s, avait conduit Arrese Ă juger que lâinstitutionnalisation dĂ©finitive du Mouvement ne pouvait plus dĂ©sormais ĂȘtre diffĂ©rĂ©e, si lâon voulait clarifier le panorama politique espagnol, caractĂ©risĂ© en effet par lâaffrontement des diverses tendances politiques regroupĂ©es sous lâĂ©gide du rĂ©gime franquiste. Arrese, loyal au Caudillo et soucieux de la stabilitĂ© de la dictature, mais tout en restant fidĂšle aux principes originaux du phalangisme, entreprit de mettre au point un projet propre Ă soumettre Ă lâimpĂ©ratif dâunitĂ© et de discipline tels et tels Ă©lĂ©ments de la Phalange ayant ouvertement affichĂ© leur mĂ©contentement Ă propos de la façon dont la crise de 1956 avait Ă©tĂ© rĂ©solue, mais propre en mĂȘme temps Ă ne pas sacrifier outre mesure son programme politique, grĂące au renforcement du Mouvement par la conversion de celui-ci en un organisme dĂ©finitivement institutionnalisĂ©. Aux yeux dâArrese, les discussions et tensions politiques dĂ©coulant de la diversitĂ© intĂ©rieure du rĂ©gime devaient ĂȘtre encadrĂ©es par le Mouvement, lequel aurait Ă jouer le rĂŽle de centre de dĂ©cision prĂ©pondĂ©rant et dâinstance Ă©mettrice de directives politiques Ă lâintention de lâĂtat, que le gouvernement aurait ensuite pour tĂąche de mettre en Ćuvre[59]. De maniĂšre tout Ă fait claire, Arrese postulait que câĂ©tait « [dans le Mouvement], et dans lui seul et non dans un autre, que rĂ©side la fonction politique du pouvoir, et argumenter que ce pouvoir ne lui appartient pas, reviendrait Ă douter de la lĂ©gitimitĂ© elle-mĂȘme du RĂ©gime »[60]. Arrese sâattela donc Ă clarifier la doctrine de lâĂtat franquiste Ă partir dâun vigoureux substrat idĂ©ologique phalangiste, Ă dĂ©finir les pouvoirs du Conseil national du Mouvement, chargĂ© de veiller Ă la bonne conformitĂ© de la lĂ©gislation de lâĂtat aux principes phalangistes, et Ă distinguer les attributions du chef de lâĂtat dâavec celles du chef de gouvernement, en laissant ouverte la possibilitĂ© quâĂ lâavenir cette derniĂšre fonction puisse ĂȘtre assignĂ©e Ă une personne distincte de Franco, encore quâĂ la seule initiative de celui-ci. Arrese ambitionnait de transformer le Mouvement en une source de pouvoir habilitĂ©e Ă engager un processus de nature constituante et apte Ă garantir en son sein la continuitĂ© du rĂ©gime, « par delĂ le caprice et les vellĂ©itĂ©s des hommes »[59].
Projet institutionnel
Arrese vit dans son retour au gouvernement lâoccasion, peut-ĂȘtre la derniĂšre, de mener Ă bien lâancien projet dâinstitutionnaliser le franquisme, dans le sens dâun affermissement des pouvoirs du parti unique phalangiste et dâune rĂ©duction de lâorientation monarchiste et catholique qui tendait Ă prĂ©valoir depuis 1945. SitĂŽt arrivĂ© au SecrĂ©tariat gĂ©nĂ©ral du parti unique, il se mit en devoir dâĂ©laborer un projet de structure institutionnelle oĂč le rĂŽle de la Phalange et de sa direction politique serait considĂ©rablement renforcĂ© au sein du rĂ©gime franquiste[61]. Arrese se proposait dâĂ©tablir un authentique Ătat national-syndicaliste propre Ă remĂ©dier â ainsi quâil lâavait dĂ©clarĂ© lors dâun rassemblement phalangiste tenu en Ă Valladolid â Ă lâinsatisfaction des phalangistes due Ă ce que « beaucoup de nos aspirations rĂ©volutionnaires attendent encore de se rĂ©aliser » et Ă ce que « la sociĂ©tĂ© qui nous entoure renferme une bonne part dâinjuste et de sordide »[62].
En 1956, Arrese, Ă qui Franco avait donnĂ© carte blanche pour concevoir de nouvelles lois fondamentales, prĂ©senta donc un projet constitutionnel qui provoqua un tollĂ© et mit en lumiĂšre de profondes contradictions au sein du rĂ©gime. Dans ce projet, toute lâinitiative revenait aux forces actives de la Phalange et au Mouvement national, quâil dĂ©finissait comme « lâensemble des forces militantes qui donne rĂ©alitĂ© Ă lâidĂ©e politique de la FET y de las JONS, qui reprĂ©sente et actualise de façon permanente la volontĂ© politique des Espagnols ». Ă lâavenir, le rĂŽle politique central serait, selon ce projet, celui du secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du Mouvement, dont le titulaire serait dĂ©signĂ© par le Conseil national, devant lequel il serait seul responsable, tandis que ce Conseil exercerait en mĂȘme temps comme tribunal suprĂȘme et comme arbitre de toute la lĂ©gislation nationale. Le Mouvement national serait ainsi la colonne vertĂ©brale de lâĂtat et le dĂ©positaire de la souverainetĂ©. Sur recommandation du secrĂ©taire national et du prĂ©sident des Cortes, le futur chef de lâĂtat nommerait le prĂ©sident du gouvernement pour une pĂ©riode de cinq ans, encore quâil puisse ĂȘtre destituĂ© dâoffice par le Conseil national. Franco resterait chef Ă vie du Mouvement, mais le chef dâĂtat suivant nâoccuperait plus ce poste[63] - [64].
Cependant, ledit projet se heurtant bientĂŽt Ă lâopposition dâimportantes fractions de la dictature, la tentative ne tarda pas longtemps Ă dĂ©boucher sur un Ă©chec[65] - [66]. Les principaux dĂ©tracteurs de cette proposition de nouvelles lois fondamentales furent les dirigeants de lâarmĂ©e et de lâĂglise. La formule dâArrese accordait en effet au Mouvement des pouvoirs exorbitants : son Conseil national, composĂ© de conseillers de droit, de personnes dĂ©signĂ©es par le chef de lâĂtat et de conseillers Ă©lus qui devaient tous ĂȘtre affiliĂ©s au Mouvement, et dans le cas des Ă©lus, de vĂ©ritables militants, aurait le pouvoir dâĂ©lire le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du Mouvement, obligatoirement consultĂ© lors de la dĂ©signation dâun chef de gouvernement, que le Conseil national pourrait censurer[64]. Il vint Ă©galement de fortes critiques de la part des monarchistes, des carlistes, et mĂȘme de quelques membres du gouvernement. Ă la consternation de LĂłpez RodĂł, Franco rĂ©itĂ©ra publiquement son appui Ă Arrese. Mais ce qui porta finalement Franco Ă renoncer Ă ce projet fut la rĂ©probation manifestĂ©e dĂ©but 1957 par trois cardinaux espagnols, emmenĂ©s par Enrique PlĂĄ y Deniel, qui affirmĂšrent que le projet dâArrese violait la doctrine pontificale. Les projets proposĂ©s, arguaient-ils, ne procĂ©daient pas de la tradition espagnole, mais du totalitarisme Ă©tranger, et la forme de gouvernement envisagĂ©e Ă©tait « une vĂ©ritable dictature de parti unique, comme le furent le fascisme en Italie, le nazisme en Allemagne et le pĂ©ronisme en Argentine ». Il ne fallait ni retomber dans le libĂ©ralisme dâune dĂ©mocratie inorganique, ni tendre vers une dictature Ă parti unique, mais promouvoir une action et une vĂ©ritable reprĂ©sentation organiques[67] - [68]. Artajo de son cĂŽtĂ© mobilisa plusieurs personnalitĂ©s de lâAction catholique pour faire Ă©chec au projet. Face au dĂ©ferlement de protestations, et admonestĂ© de la sorte par les autoritĂ©s ecclĂ©siastiques, qui redoutaient un systĂšme autoritaire draconien, Franco, qui du reste commençait alors Ă accorder la prioritĂ© aux problĂšmes Ă©conomiques, finit en par opposer son veto au projet[69] et par lâarchiver sine die. Du projet dâArrese, une seule composante verra finalement le jour en 1958, sous les espĂšces du projet de loi sur les Principes du Mouvement national, mais alors intĂ©gralement remaniĂ© par les soins de Luis Carrero Blanco[70]. LâĂ©chec dâArrese entraĂźna sa fin comme secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral, et son remplacement Ă ce poste le par JosĂ© SolĂs[71].
Ministre du Logement
Le remaniement ministĂ©riel du marqua la fin de la nomination de figures de la vieille garde phalangiste dans les grands ministĂšres et consacra lâarrivĂ©e Ă des postes importants des dĂ©nommĂ©s technocrates, pour la plupart liĂ©s Ă lâOpus Dei. Avec le dĂ©classement dĂ©finitif de la Phalange-Mouvement, Franco mit de cĂŽtĂ© le soubassement politico-idĂ©ologique originel du rĂ©gime, et au fil du temps, le rĂ©gime allait pencher de plus en plus vers ce que certains thĂ©oriciens appelleront lâ« autoritarisme bureaucratique », sans socle politique et idĂ©ologique nettement dĂ©fini, et aussi sans perspectives clairement dessinĂ©es. Franco destitua GirĂłn comme ministre du Travail aprĂšs 16 annĂ©es dans le cabinet ministĂ©riel, et relĂ©gua Arrese au ministĂšre du Logement, nouvellement instituĂ©, dont il gardera la charge pendant environ trois ans[72] - [73] - [71]. Pourtant, en , lors dâune rĂ©union du Conseil national de la FET, Franco confirma le rĂŽle central du Mouvement dans les structures prĂ©vues pour sa succession. Son pouvoir reposait en effet sur des milices dĂ©cidĂ©es, et la monarchie, malgrĂ© tous ses notables et ses cadres intellectuels, ne pourrait sâimposer contre elles[74].
Le nouveau dĂ©partement ministĂ©riel du Logement se vit attribuer quelques-unes des fonctions naguĂšre assumĂ©es par lâInstitut national du logement (en abrĂ©gĂ© INV, v pour vivienda, logement), par la Direction gĂ©nĂ©rale des rĂ©gions dĂ©vastĂ©es ou par le Commissariat Ă lâamĂ©nagement urbain de Madrid[75]. Non seulement la hiĂ©rarchie catholique, mais aussi lâĂ©quipe phalangiste tentaient dâobtenir quâune partie des gains de la nouvelle prospĂ©ritĂ© Ă©conomique profite aux plus dĂ©favorisĂ©s. Dans le domaine du bĂątiment, on avait presque rien rĂ©alisĂ© depuis la fin de la Guerre civile : quelque 30 mille logements par an, pour une population qui avait connu une croissance annuelle de 300 mille individus[76]. Arrese imprima un virage complet Ă la politique de logement menĂ©e jusque-lĂ â principalement par les syndicats verticaux, au travers de lâĆuvre syndicale du foyer (Obra Sindical del Hogar, OSH) â et sâappliqua Ă mettre en place une politique axĂ©e sur la propriĂ©tĂ© du logement, en opposition Ă la politique antĂ©rieure de location[77]. En somme, Arrese favorisa lâabandon de la politique de logements Ă bas prix construits par lâĂtat, pour consentir Ă ce quâen lieu et place, cette fonction soit remplie par le secteur privĂ©[78]. En , peu aprĂšs sa nomination, il annonça publiquement que serait adoptĂ© un Plan dâurgence social propre Ă faire face au grave problĂšme de la prolifĂ©ration de taudis qui affectait alors la banlieue madrilĂšne[79]. Ledit plan fut approuvĂ© Ă la fin de cette annĂ©e et commença Ă porter ses fruits en peu de temps, de sorte quâil fut envisagĂ© de lâĂ©tendre Ă dâautres zones dâEspagne, notamment Barcelone et Bilbao[80]. Cependant, un conflit Ă©clata bientĂŽt entre Arrese, qui proposait la construction dâun million de logements sociaux, et Navarro Rubio, qui voyait dans cette proposition une menace pour la politique Ă©conomique quâil menait alors. Franco ayant pris fait et cause pour Navarro Rubio, Arrese, figure emblĂ©matique des thĂ©ories sociales du Mouvement, fut contraint de renoncer Ă son portefeuille[76]. En effet, le , Ă lâoccasion dâun nouveau remaniement ministĂ©riel, Arrese, qui depuis 1957 nâavait Ă©tĂ© lĂ que pour figurer la permanence du Mouvement, et de qui la rĂ©ussite Ă©conomique avait fait un symbole inutile, fut sacrifiĂ©[81] - [82].
DerniÚres années
AprĂšs son dĂ©part du gouvernement, Arrese ne devait plus exercer de fonction importante dans lâadministration ou dans le gouvernement. Toutefois, il continua Ă siĂ©ger comme procureur dans les Cortes franquistes, ainsi que comme membre du Conseil national du Mouvement et du Conseil du royaume[84]. Il fut lâun des procureurs absents lors du vote en de la Loi pour la rĂ©forme politique[85], dont lâadoption entraĂźna le dĂ©nommĂ© « hara-kiri des Cortes franquistes ».
Son prestige comme architecte et comme historien de lâart lui valurent dâĂȘtre nommĂ© en 1967 membre attitrĂ© de la Real Academia de Bellas Artes de San Fernando, dans la section de lâarchitecture ; il prononça son discours de rĂ©ception en novembre de la mĂȘme annĂ©e[86] - [87] - [7]. Il fut en outre dĂ©signĂ© acadĂ©micien dâhonneur de lâAcademia de Bellas Artes de San Telmo (de Malaga) et de celle de Santa Isabel de HungrĂa (de SĂ©ville, en 1972), ainsi que prĂ©sident de la SociĂ©tĂ© espagnole dâanthropologie, dâethnographie et de prĂ©histoire, prĂ©sident du Patronato JosĂ© MarĂa Quadrado, appartenant au CSIC, et membre honoraire de lâInstitut dâĂ©tudes madrilĂšnes (depuis 1966)[7].
En 1973, conjointement avec son Ă©pouse, il crĂ©a la Fondation Arrese[88] - [89], Ă laquelle seront plus tard lĂ©guĂ©s le MusĂ©e dâart sacrĂ© de lâIncarnation, inaugurĂ© en 1975, et la maison patricienne dite maison Arrese, tous deux sis Ă Corella en Navarre. La fondation acquit en effet des mains des MĂšres bĂ©nĂ©dictines le couvent et lâĂ©glise de lâIncarnation de Corella, qui Ă ce moment menaçaient ruine. Dans son ouvrage Arte religioso en un pueblo de España, Arrese dresse de la fondation qui porte son nom un inventaire critique et historique exhaustif, comportant plus de 800 pages[7].
Ses rĂ©alisations dâarchitecte, peu nombreuses en raison des longues annĂ©es vouĂ©es Ă la politique, comprennent : le palais de lâAudiencia Ă Malaga ; le groupe scolaire Abentofail Ă Guadix ; le groupe scolaire GarcĂa Boada Ă Madrid ; le groupe scolaire Hermanos SĂĄenz de Heredia Ă Corella ; les Colegios Mayores JosĂ© Antonio, Francisco Franco et Hispano Ărabe Ă Madrid ; le couvent et lâĂ©glise Saint-Joseph de Corella ; la Banco Rural Ă Madrid ; la tour du Rosaire (Torre del Rosario, de 1953), Ă Corella ; lâĂ©glise des PĂšres Combonianos ; le monument Ă OnĂ©simo Redondo Ă Labajos ; le monument aux morts Ă Corella ; le Foyer rural (Hogar Rural) Ă Corella ; le bĂątiment de la poste Ă Corella ; la Maison syndicale de Corella ; la restauration du chĂąteau dâArĂ©valo ; le rectorat de lâUniversitĂ© polytechnique de Madrid, de 1981[7].
Arrese qui, sur recommandation de son mĂ©decin, faisait aussi de longs sĂ©jours dans les Ăźles Canaries[90], dĂ©cĂ©da dans sa maison de Corella, localitĂ© dâoĂč sa mĂšre Ă©tait originaire, le [91] - [89] - [92].
Personnalité et pensée politique
Arrese avait dĂ©jĂ laissĂ© entrevoir ses affinitĂ©s national-catholiques dans son ouvrage La revoluciĂłn social del Nacionalsindicalismo, paru en 1940, mais Ă©crit dĂšs 1936[93], oĂč prĂ©figurant la ligne antisĂ©mite qui allait caractĂ©riser certains phalangistes dans lâimmĂ©diat aprĂšs-guerre civile, il se plut notamment Ă rappeler « la brillante lutte de la Phalange contre le judaĂŻsme capitaliste du SEPU » (SEPU pour Sociedad Española de Precios Ănicos, littĂ©r. SociĂ©tĂ© espagnole de prix uniques, chaĂźne de grands magasins en Espagne)[94]. Arrese se distingua au long de sa carriĂšre par ce que dâaucuns ont nommĂ© sa « fidĂ©litĂ© de laquais vis-Ă -vis de Franco »[93]. Sâil a Ă©tĂ© qualifiĂ© par Antonio Cazorla SĂĄnchez dâ« insolent opportuniste »[95] - [96], il a Ă©tĂ© dĂ©peint sous des traits sans doute plus exacts par Ălvaro de Diego GonzĂĄlez, qui voit en lui un « homme intĂšgre et honnĂȘte » qui sâefforçait de mettre en Ćuvre la doctrine phalangiste dans un sens catholique-intĂ©griste[95]. Initialement rĂ©putĂ© ĂȘtre un homme proche de Serrano Suñer, il ne tarda pas Ă conspirer contre celui-ci afin de saper sa position[96].
Arrese cherchait Ă mettre en relief lâidentitĂ© catholique de la Phalange, dâune façon qui sera plus tard cataloguĂ©e comme « fascisme monial » (fascismo frailuno)[97]. Il prĂ©conisait de convertir le systĂšme syndical en un autre sâappuyant sur les coopĂ©ratives, encore que ses points de vue en matiĂšre Ă©conomique aient toujours Ă©tĂ© dâimportance secondaire et aient Ă©tĂ© Ă©clipsĂ©s par ses principes axiomatiques quâĂ©taient le christianisme et lâunitĂ© de lâEspagne[98]. Dans les annĂ©es 1930, il fut un thĂ©oricien du « verticalisme syndical », modĂšle de syndicat conçu et promu par le phalangisme et qui devait permettre de rompre radicalement avec le syndicalisme traditionnel ayant prĂ©valu jusque-lĂ en Espagne. La structure syndicale « verticale » Ă crĂ©er viserait Ă encadrer travailleurs et patrons au-dedans dâune mĂȘme et unique organisation, ferait office dâinstrument dâharmonisation sociale apte Ă neutraliser toute vellĂ©itĂ© de lutte des classes, et serait appelĂ©e Ă©galement, aprĂšs lâinstauration future de lâĂtat national-syndicaliste, Ă intervenir de maniĂšre dĂ©terminante dans la marche de lâĂ©conomie espagnole[99]. Selon ce quâindiquait Arrese :
« Il faut commencer Ă construire les syndicats en premier lieu chez ceux qui vivent sous le mĂȘme toit, en regroupant tous ceux (patrons, techniciens et ouvriers) qui doivent, car Ă©prouvant les mĂȘmes fatigues et poursuivant les mĂȘmes buts, sâentendre avec une plus grande communautĂ© dâidĂ©es. Câest cela, quâon pourrait appeler famille syndicale, qui doit ĂȘtre la cellule substantielle de la nouvelle organisation, et câest Ă partir dâelle, de cette espĂšce de syndicat dâentreprise ou de noyau primaire de la syndicalisation, que doivent surgir toutes les phases successives de la forme que lâon voudra donner Ă la future Organisation syndicale[100]. »
Le concept phalangiste du national-syndicalisme sous-tendait une utopie dâharmonisation sociale oĂč le syndicat vertical serait lâoutil pour unir classe ouvriĂšre et patronat, tous deux Ă©puisĂ©s par le stĂ©rile conflit de classes qui les dĂ©voyait du vĂ©ritable objectif, savoir : la renaissance nationale. LâidĂ©ologie libĂ©rale autant que son antithĂšse marxiste, matĂ©rialistes toutes deux et par lĂ souffrant de la mĂȘme tare, avaient Ă©chouĂ© parce que, arguait Arrese, « elles ne sâĂ©taient pas adaptĂ©es au caractĂšre espagnol, et parce quâelles Ă©taient injustes »[101] - [102]. La doctrine phalangiste envisageait le dĂ©passement dĂ©finitif tant du capitalisme que du marxisme, selon une ligne voisine de celle suivie dans lâItalie fasciste et dans lâAllemagne nazie, encore que le phalangisme se soit toujours Ă©vertuĂ©, en dĂ©pit des similitudes Ă©videntes entre le syndicalisme phalangiste et ses modĂšles fascistes italien et allemand, tant quant aux formes que du point de vue du contenu, Ă se prĂ©senter comme une solution authentiquement espagnole au problĂšme social[103] . Certes, il revendiquait le fascisme, le national-socialisme et le national-syndicalisme comme autant de dĂ©rivĂ©s du spiritualisme, considĂ©rant, selon ses propres termes, ces trois mouvements comme des « frĂšres, des frĂšres jumeaux si lâon veut, mais non siamois »[104] - [note 5].
Publications dâArrese
Arrese laissa plus dâune vingtaine dâouvrages traitant dâhistoire, de poĂ©sie, de politique sociale, de politique du logement et dâarchĂ©ologie, le plus ancien remontant Ă 1927[7].
- Dans le champ politique
- (es) La revoluciĂłn social del nacionalsindicalismo, Madrid, Editora Nacional, [note 6].
- (es) Escritos y discursos, Madrid, VicesecretarĂa de EducaciĂłn Popular, [105].
- (es) ParticipaciĂłn del pueblo en las tareas del Estado, Madrid, Instituto de Estudios PolĂticos, , 21 p.[105].
- (es) El Estado totalitario en el pensamiento de JosĂ© Antonio, Madrid, VicesecretarĂa de EducaciĂłn Popular, , 84 p.[106].
- (es) Nuevos escritos y discursos, Madrid, VicesecretarĂa de EducaciĂłn Popular, , 291 p.[105].
- (es) Capitalismo, comunismo, cristianismo, Madrid, Eds. Radar, , 386 p.[106].
- (es) Hacia una meta institucional, Madrid, Ediciones del Movimiento, , 232 p.[106].
- (es) PolĂtica de vivienda. Textos y discursos, Madrid, Talleres GrĂĄficos ExprĂ©s, (deux volumes de 250 pages chacun environ. PrĂ©face dâAdolfo Muñoz Alonso).
- (es) José Antonio: actualidad de su doctrina, Madrid, [106].
- (es) Treinta años de polĂtica, Madrid, Afrodisio Aguado, , 1487 p.[106].
- (es) Una etapa constituyente, Barcelone & Madrid, Planeta, , 293 p. (ISBN 978-8432036347)[106].
- Dans le domaine de lâart
- (es) MĂĄlaga desde el punto vista urbanĂstico, Malaga, [107].
- (es) Arte religioso de un pueblo de España, Madrid, CSIC, [108].
- (es) La arquitectura del hogar y la ordenaciĂłn urbana, como reflejo de la vida familiar y social de cada Ă©poca, Madrid, [109].
- (es) Antonio Gonzålez Ruiz, Madrid, Instituto de Estudios Madrileños, [110].
- (es) ArqueologĂa, Madrid, Fondation Arrese,
- (es) El arte, la fundaciĂłn y la Medalla de Honor, Fondation Arrese, [111].
- (es) CatĂĄlogo general de arte sacro en el Museo de la EncarnaciĂłn, Madrid, [108].
- (es) El mĂșsico Blas de Laserna, Corella, Biblioteca de Corellanos Ilustres, , 208 p.[112] (en collaboration avec Eduardo AunĂłs et Julio GĂłmez. PrĂ©face de Julio Asiain).
RĂ©compenses
- Grande Croix (avec insigne distintif blanc) du MĂ©rite naval (1943)[113]
- Grand Croix de lâOrdre impĂ©rial du joug et des flĂšches (1944)[114]
- Fils adoptif de CĂĄceres (1944)[115]
- Grand croix du TrÚs-Distingué Ordre de Charles III (1945)[116]
- MĂ©daille dâor du mĂ©rite dans le travail (1954)[117]
- Grand croix de lâOrdre d'Isabelle la Catholique (1967)[118]
- Fils adoptif de Corella[119]
Notes et références
Notes
- Son pĂšre, Gregorio SĂĄenz de Heredia y SuĂĄrez de ArgudĂn (1875-1936), Ă©tait un frĂšre de la mĂšre de JosĂ© Antonio, Casilda SĂĄenz de Heredia y SuĂĄrez de ArgudĂn. Voir R. J. Maldonado y Cocat (1950), p. 127 & 147-148.
- Selon certains auteurs, il adhĂ©ra Ă la Phalange dĂšs 1933 (câest-Ă -dire aussitĂŽt aprĂšs la crĂ©ation du parti), collaborant alors directement avec JosĂ© Antonio Primo de Rivera. Cf. Luis Miguel Aparisi Laporta, « JosĂ© Luis de Arrese y Magra (dans Diccionario BiogrĂĄfico Español) », Madrid, Real Academia de la Historia, .
- Arrese se fit accompagner dâune suite, composĂ©e entre autres de Gabriel Arias-Salgado, AgustĂn Aznar, Manuel MartĂnez de Tena, VĂctor de la Serna et Xavier de Echarri. Cf. W. H. Bowen (2000), p. 149.
- Rodrigo Vivar TĂ©llez, vice-secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du parti, Ă qui revenait officiellement la charge du SecrĂ©tariat gĂ©nĂ©ral, se saisit alors des rĂȘnes de la Phalange. Cf. G. Redondo (1999), p. 785.
- Arrese en effet expose dans son ouvrage La revoluciĂłn social del Nacionalsindicalismo de 1936 :
« La troisiĂšme solution au problĂšme social [en dehors du libĂ©ralisme et du marxisme] est la solution spirituelle. Notez bien que nous ne disons pas fasciste, quand bien mĂȘme les gens le disent. Le fascisme a Ă©tĂ© la solution spiritualiste dâune nation, la premiĂšre si lâon veut ; cependant, le fascisme nâest pas une solution universelle, mais lâadaptation italienne de cette solution. Nous, qui sommes espagnols, nous ne pouvons pas ĂȘtre fascistes, et ne pouvons pas lâĂȘtre prĂ©cisĂ©ment de par lâessence mĂȘme [du fascisme]. Pourrions-nous ĂȘtre, en mĂȘme temps, des nationaux et des fascistes ? Des Espagnols et des Italiens ? Nous aurons, cela oui, des points de contact ; mais le salut romain, la chemise, etc., ne sont rien autre que des tributs de sympathie Ă un frĂšre aĂźnĂ©, cependant ils constituent la forme, non lâessence du mouvement, et les personnes qui, voyant chez nous des chemises et de lâhuile de ricin, croient que nous sommes fascistes, ni ne savent ce quâest le fascisme, ni ne connaissent le national-syndicalisme. [...] Le fascisme, le national-socialisme et le national-syndicalisme sont des enfants dâune mĂȘme mĂšre : le spiritualisme ; par consĂ©quent, frĂšres nous sommes, et frĂšres jumeaux si lâon veut, mais siamois non. »
Cf. J. L. Arrese (1936), p. 37. - OĂč Arrese affirme la nĂ©cessitĂ© de construire lâĂtat national-syndicaliste selon les principes directeurs dâune « dĂ©mocratie sociale ». Cf. J. L. RodrĂguez JimĂ©nez (1994), p. 58.
Références
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Liens externes
- Ressource relative Ă la vie publique :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- (es) Luis Miguel Aparisi Laporta, « José Luis de Arrese y Magra (dans Diccionario Biogråfico Español) », Madrid, Real Academia de la Historia, (consulté le ).
- (es) Ălex Amaya Quer, « El acelerĂłn sindicalista: Discurso social, imagen y realidad del aparato de propaganda de la organizaciĂłn sindical española, 1957-1969 », Barcelone, UniversitĂ© autonome de Barcelone (Departament dâHistĂČria Moderna i ContemporĂ nea), (thĂšse de doctorat sous la direction de Carme Molinero i Ruiz, 652 pages) ; consulter en particulier la Partie II, Chapitre 1, pages 151 Ă 170.