Accueil🇫🇷Chercher

Logement social

Un logement social est un logement destiné, à la suite d'une initiative publique ou privée, à des personnes qui ont des difficultés à se loger le plus souvent pour des raisons financières. L'expression sert aussi à désigner le secteur économique constitué par ce marché immobilier et les politiques d'économie sociale qui président à son administration.

En Europe, le logement passe par diverses traditions et des histoires nationales qui toutes visent à l’encadrement des loyers et à plus ou moins d'extension du logement social. Contrairement aux termes « public housing » aux États-Unis, council homes (en) en Grande-Bretagne ou habitation à loyer modéré en France, le terme sozialwohnung (de) en Allemagne ne réfère pas au statut public ou privé du propriétaire. Plus de 90 % des Sozialwohnungen ont été construits par des investisseurs privés, brouillant la frontière entre public et privé qui structure les représentations et les usages du logement social dans d’autres pays[1].

Le secteur du logement social reste quantitativement minoritaire à la fin du XXe siècle : environ un tiers du parc total aux Pays-Bas, un quart en Suède, 20 % en Grande-Bretagne et 18 % en France, mais à peine 10 % en Allemagne, 5 % en Italie et au Portugal, moins de 2 % en Espagne, pratiquement rien en Grèce[1].

En Europe

Début 2019, alors que la démographie européenne a globalement continué à croître, selon la fédération européenne des bailleurs sociaux (Housing Europe), la Banque mondiale, la Commission européenne, la crainte d'un manque de logements abordables, décents (et peu énergivore) pour tous reste unanimement partagée[2]. Selon la fédération, « 300 milliards d'euros, le plan d'investissement dont nous manquons pour traiter véritablement la question du logement abordable »[2].

En Allemagne

Selon l'association allemande des bailleurs sociaux et promoteurs immobiliers (2019), après la rĂ©unification ce sont près d'un demi-million d'appartements allemands qui ont Ă©tĂ© dĂ©molis, que les bailleurs sociaux n'ont pas reconstruits. Ceci a alimentĂ© la spĂ©culation immobilière, exacerbĂ©e par la pĂ©nurie de logements urbains[2]. Ces effets ont Ă©tĂ© partiellement limitĂ©s par des allocations donnĂ©es aux locataires du parc privĂ©, et localement par l'encadrement des loyers. Puis la Constitution a Ă©tĂ© modifiĂ©e pour que les États fĂ©dĂ©rĂ©s puissent directement participer Ă  la construction[2]. 80 000 logements sociaux/an nouveaux est l'objectif pour 2019-21, appuyĂ© par 4,5 milliard d'euros de subventions sur 3 ans attribuĂ©s aux Länder. L’État peut vendre aux communes du foncier Ă  prix normal et ces permis de construire sont dĂ©livrĂ©s plus vite[2].

Au Royaume-Uni

Selon la Feantsa (Fédération européenne d'organisations luttant contre le sans-abrisme) la période Thatcher, a suscité une vague de « privatisation forcée » du secteur HLM, notamment à Londres[2]. Là, « la grande partie de ces propriétaires sont des investisseurs, qui louent ces biens aux offices HLM aux prix du marché privé », regrette début 2019 James Murry, adjoint londonien au logement auprès du maire Sadiq Khan. Londres a lancé un plan « Building council home for Londoners » doté de 5,4 milliards d'euros visant 116.000 nouveaux logements sociaux entre 2019 et 2022[2].

En France

Groupe de la Ruche (1892-1896), des maisons ouvrières à La Plaine Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), par Georges Guyon, architecte français fondateur pour le logement social.

Napoléon III est à l'origine de la construction des premiers logements sociaux. Dès 1852, un fond de dotation de 10 millions est affecté à la distribution de subventions à l'industrie privée. La cité Napoléon 58-60 rue Rochechouart à Paris semble être la préférence des ouvriers pour les aménagements qui respectent au mieux l'indépendance et l'autonomie de la famille.

Le logement social entre 1890-1934 est un événement fondateur dans un contexte économique et social avec les grandes lignes des lois sur les Habitations à bon marché (HBM) : en 1894 la loi Siegfried (Jules Siegfried), en 1906 la loi Strauss (Paul Strauss), en 1908 la loi Ribot (Alexandre Ribot) ou encore en 1912 la loi Bonnevay (Laurent Bonnevay).

Jules Siegfried, Émile Cheysson et Léon Say sont les cofondateurs du CEDIAS-Musée social avec le comte Aldebert de Chambrun, qui y consacra sa fortune. Émile Cacheux, sociologue, ingénieur des Arts et Manufactures, est membre du CEDIAS-Musée social.

Jules Siegfried, Georges Picot, Émile Cheysson et Jean-Baptiste André Godin, personnages importants et militants fervents du logement social, ont obtenu que des constructions « témoins » à taille réelle soient exposées sur l'esplanade des Invalides. Les mots « économie » et « social » ont attendu la fin du XIXe siècle pour s'unir enfin, comme l'atteste le succès des habitations ouvrières, section XI à l'Exposition universelle de Paris en 1889.

Georges Eugène Haussmann et Georges Guyon parmi les premiers - intègrent à leurs constructions un nouveau cahier des charges : tout logement doit pouvoir être aéré et recevoir la lumière naturelle, même les logements sociaux.

En France, la politique du logement social date du milieu du XXe siècle, avec notamment la loi sur la limitation des loyers dès 1948 et la loi sur les habitations à loyer modéré (HLM) l'année suivante, en 1949[3].

La législation a peu à peu intégré des objectifs de taux de logements sociaux puis de mixité sociale.

Une Commission nationale de l'aménagement, de l'urbanisme et du foncier (CNAUF), présidée par Thierry Repentin, délégué interministériel à la mixité sociale dans l'habitat, doit veiller à ce que le prix du foncier ne soit pas dissuasif et à ce que la mixité dans l'habitat soit au moins conforme à la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) sur l'ensemble du territoire (en particulier, l'article 55 de cette loi précise où le parc social locatif doit représenter au moins 20 % ou 25 % du nombre total de résidences principales).

Après une phase de grands projets qui ont souvent conduit Ă  de grands quartiers d'habitat sociologiquement dĂ©sĂ©quilibrĂ©s uniquement consacrĂ©s au locatif social, la politique de la ville a peu Ă  peu cherchĂ© Ă  (rĂ©)insĂ©rer dans ces quartiers « des commerces, une activitĂ© Ă©conomique, mais Ă©galement Ă  faire venir de la propriĂ©tĂ© privĂ©e par des dispositions permettant de dĂ©senclaver le quartier »[4]. En 2015, quinze ans après le vote de la SRU, selon la CNAUF, « 450 000 logements ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s sur des communes dont certaines Ă©taient rĂ©ticentes, il y a quinze ans, pour accueillir du logement social. (…), sur les 1 022 communes dĂ©ficitaires sur la pĂ©riode 2011-2013 ; 615 ont atteint ou dĂ©passĂ© leurs objectifs, », mais « 387 affichaient un retard par rapport Ă  leurs objectifs. Sur ces 387 collectivitĂ©s, l'État a qualifiĂ© 222 d'entre elles comme faisant l'objet d'une situation de carence »[4] ; dans ces cas communes l'État dispose de quelques moyens de limiter la spĂ©culation foncière et il peut imposer des sanctions financières plus Ă©levĂ©es (et qui pourraient encore ĂŞtre renforcĂ©es par le projet de loi ÉgalitĂ© et CitoyennetĂ©), et mĂŞme se substituer aux maires pour crĂ©er du logement social. Depuis la loi du , Ă  certaines conditions, le patrimoine commun de l'État peut ĂŞtre vendu (anciennes casernes par exemple) Ă  un prix infĂ©rieur Ă  celui du marchĂ© pour construire du logement social[4]. Ă€ titre d'exemple un terrain parisien (4 rue de Lille, 7e) a pu ĂŞtre vendu le avec un taux de dĂ©cote de 77 %[4]. De 2013 Ă  2015, les dĂ©cotes ainsi permises ont reprĂ©sentĂ© l'Ă©quivalent de presque 27 millions d'euros. Dans quelques cas, la dĂ©cote pourrait ĂŞtre de 100 %, permettant aux bailleurs sociaux de construire sur un terrain qu'ils n'auront pas Ă  acheter[4]. En 2018, « près d'un mĂ©nage sur six » bĂ©nĂ©ficie d'un logement dit social, mais le ministère de la CohĂ©sion des territoires note une diminution de la construction de logements sociaux en 2018, confirmĂ©e dĂ©but 2019[2].

Données statistiques

L'importance du logement social est très variable selon les pays.

Le logement social en Europe
Pays Nombre de logements sociaux
pour 1 000 habitants[5]
Pays-Bas 147
Autriche 102
Danemark 102
Suède 95
Royaume-Uni 85
France 69,2[6]
Belgique 27[7]
Allemagne 27
Italie 18
Espagne 3

Notes et références

  1. Voldman Danièle, « L'encadrement des loyers depuis 1900, une question européenne », Le Mouvement Social, 2013/4 (n° 245), p. 137-147.lire en ligne
  2. Trabelsi I (2019) Regards croisés sur le logement social en Europe| BatiActu, 04/02/2019
  3. « Politique du logement social : chronologie », Vie-publique.fr, .
  4. Un logement construit représente trois emplois du BTP par an - Interview de Thierry Repentin par Sébastien Chabas, Batictu, 17 septembre 2015
  5. J. Ch, « L'Institut Montaigne propose de réformer les loyers du secteur HLM », Les Échos,‎
  6. MEEDDM, Les organismes de logement social, juin 2009.
  7. « Combien y a-t-il de logements sociaux en Belgique », Luttepauvrete.be (consulté le )

Annexes

Bibliographie

  • Le logement social en Seine Saint-Denis (1850-1999), . Collection du patrimoine Ă©ditĂ©e par l'APPIF (Association pour le patrimoine d’Île-de-France) et les Éditions du Patrimoine.
  • AndrĂ© YchĂ©, Logement, habitat & cohĂ©sion sociale, Ă©dition Mollat, .
  • Roger-Henri Guerrand, Une Europe en construction : deux siècles d'habitat social en Europe, Paris, La DĂ©couverte, , 230 p. (ISBN 978-2-7071-2131-8).
  • Roger-Henri Guerrand, Les origines du logement social en France. 1850-1914, Paris, La Villette, , 287 p. (ISBN 978-2-915456-57-8).

Articles connexes

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.