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Gerardo Salvador Merino

Gerardo Salvador Merino (Herrera de Pisuerga, 1910 – Barcelone, 1971) Ă©tait un juriste, homme politique et gestionnaire d’entreprise espagnol.

Gerardo Salvador Merino
Fonctions
Délégué national des syndicats
–
(2 ans et 4 jours)
Premier ministre Francisco Franco
Prédécesseur Néant (poste nouvellement créé)
Successeur Manuel Valdés Larrañaga
Chef de section de la Phalange
Ă  La Corogne
–
Membre du Conseil national de la
FET y de las JONS
–
Biographie
Nom de naissance Gerardo Salvador Merino
Date de naissance
Lieu de naissance Herrera de Pisuerga (Province de Palencia)
Date de décÚs
Lieu de décÚs Barcelone
Nature du décÚs Accident de la route
Nationalité Drapeau de l'Espagne Espagne
Parti politique FET y de las JONS (janvier 1934-septembre 1941)
Conjoint MarĂ­a Fermina Coderch de Sentmenat
DiplÎmé de Université centrale de Madrid
Profession Notaire
Gestionnaire d’entreprise
Religion Catholique
Résidence La Corogne ; Madrid ; ßles Baléares ; Barcelone

D’abord membre du syndicat socialiste UGT, il vira politiquement Ă  droite Ă  la suite d’un attentat meurtrier contre son pĂšre, maire conservateur cĂ©diste. Il entreprit des Ă©tudes de droit Ă  Madrid, oĂč il s’accointa avec quelques chefs de file de la Phalange, dont JosĂ© Antonio Primo de Rivera lui-mĂȘme. Notaire de son Ă©tat, il fut nommĂ©, aprĂšs son affiliation Ă  la Phalange, chef de section Ă  La Corogne, oĂč il manifesta des qualitĂ©s de tribun populiste et un fort sens social. À l’issue de la Guerre civile, oĂč il avait combattu dans la camp nationaliste, il fut dĂ©signĂ© en 1939 par le nouveau rĂ©gime DĂ©lĂ©guĂ© national des syndicats, chargĂ© de mettre en Ɠuvre le verticalisme syndical, cheval de bataille de la Phalange, dont il avait Ă©tĂ© l’un des thĂ©oriciens et qui visait Ă  remplacer les syndicats traditionnels, coupables de s’engager dans un antagonisme social dĂ©lĂ©tĂšre, par des syndicats « verticaux » englobant ouvriers, techniciens et patrons dans une mĂȘme structure nationale de collaboration, subdivisĂ©e selon les branches de production, et appelĂ©e aussi Ă  intervenir dans la marche de l’économie espagnole ; le but visĂ© Ă©tait — outre la mise au pas de la classe ouvriĂšre — le dĂ©passement de la lutte des classes et l’instauration d’une utopique harmonie sociale. L’action de Salvador Merino finit par lui attirer des inimitiĂ©s, de la part d’une partie du patronat, hostile Ă  son ouvriĂ©risme et Ă  son « totalitarisme syndical », de la part des fractions traditionnaliste et monarchiste du rĂ©gime, qu’effarouchait la germanophilie ostensible de Salvador Merino (par quoi celui-ci Ɠuvrait pour l’envoi de travailleurs volontaires en Allemagne et prĂŽnait l’entrĂ©e en guerre de l’Espagne aux cĂŽtĂ©s de l’Axe), etc. Sa (supposĂ©e) appartenance Ă  la franc-maçonnerie servit en 1941 de prĂ©texte Ă  sa condamnation par un tribunal spĂ©cial Ă  huit annĂ©es d’assignation Ă  rĂ©sidence dans les BalĂ©ares. Sa peine purgĂ©e, et s’étant dĂ©finitivement dĂ©tournĂ© de la politique, il alla dĂ©sormais occuper de hauts postes dans le monde de l’entreprise.

Biographie

Formation et jeunes années

NĂ© en 1910 Ă  Herrera de Pisuerga, localitĂ© de la province de Palencia[1], Gerardo Salvador Merino faisait partie d’une fratrie de sept enfants et eut pour parents les propriĂ©taires d’un moulin situĂ© dans son village natal[2]. Dans les premiers mois de la Seconde RĂ©publique espagnole, il adhĂ©ra au syndicat UGT, en rejoignant l’aile la plus radicale de celui-ci[3] ; aux dires de certains auteurs, il semblerait qu’il ait Ă©galement militĂ© dans les rangs du PSOE[4] - [5]. En , un attentat dirigĂ© contre son pĂšre — maire et militant du parti de droite CEDA[3] — entraĂźna la mort par mĂ©garde de sa mĂšre, incident dont il est probable qu’il dĂ©termina sa trajectoire politique ultĂ©rieure[6] - [7]. S’étant transportĂ© Ă  Madrid, il y accomplit un cursus de droit Ă  l’universitĂ© centrale, aprĂšs avoir entrepris initialement des Ă©tudes au CollĂšge royal d’études supĂ©rieures Marie-Christine Ă  l’Escurial[8], oĂč il avait fait la connaissance de Dionisio Ridruejo. Dans la capitale, il s’affilia Ă  l’association estudiantine FUE (FederaciĂłn Universitaria Escolar, hostile Ă  la dictature de Primo de Rivera)[3] et frĂ©quentait les rĂ©unions du CafĂ© Lion, oĂč il se lia d’amitiĂ© fin 1933 avec JosĂ© Antonio Primo de Rivera, qui l’exhorta Ă  s’associer Ă  la Phalange (Falange Española, FE). AprĂšs qu’il eut effectivement adhĂ©rĂ© Ă  la FE en [6], sous l’influence notamment de JosĂ© MarĂ­a Alfaro[7], il s’attacha Ă  y promouvoir l’aile ouvriĂ©riste et syndicale du parti. Ses Ă©tudes de droit achevĂ©es, il obtint sur concours en 1935 un poste de notaire Ă  Puentes de GarcĂ­a RodrĂ­guez, dans la province de La Corogne[7], oĂč il prit la tĂȘte de la section locale de la Phalange[8].

À l’éclatement de la Guerre civile, Salvador Merino, enrĂŽlĂ© comme volontaire[7], combattit sur le front des Asturies[9] et fut blessĂ© Ă  plusieurs reprises. Au lendemain du dĂ©cret d’unification d’, qui prescrivait aux phalangistes et aux carlistes de se regrouper dans un parti unique, la FET y de las JONS, Salvador Merino se rapprocha de la faction autour de Pilar Primo de Rivera et alla faire partie du Conseil national du nouveau parti[7]. Partisan de Manuel Hedilla, il fut dĂ©signĂ© par celui-ci en 1937 chef provincial de la Phalange Ă  La Corogne[10], mais ne tarda pas Ă  se rendre impopulaire auprĂšs des classes moyennes par son discours ouvriĂ©riste, en particulier aprĂšs qu’il eut forgĂ© le slogan « Ă  bas la bourgeoisie »[9]. Pendant son sĂ©jour en Galice, il entretint une Ă©troite amitiĂ© avec l’architecte phalangiste GermĂĄn Álvarez de Sotomayor[4]. Bon orateur et dotĂ© de talents d’organisateur, il parvint en Ă  rĂ©unir dans les arĂšnes de La Corogne une vaste foule de 14 000 phalangistes, oĂč il avait invitĂ© le gĂ©nĂ©ral Juan YagĂŒe Ă  prononcer un discours, dans lequel celui-ci prĂŽna avec ardeur la rĂ©volution national-syndicaliste, ce qui valut Ă  Gerardo Salvador d’ĂȘtre destituĂ© sans dĂ©lai de ses fonctions[11]. La mĂȘme annĂ©e 1938, il appartenait au groupe connu sous le nom de « Groupe de Burgos », lequel estimait qu’il Ă©tait urgent de faire contre-poids, dans l’organisation phalangiste, Ă  la masse d’élĂ©ments de droite intĂ©grĂ©s dans ses rangs au cours de la Guerre civile[2].

Peu aprĂšs, il s’enrĂŽla une nouvelle fois, avec le grade de caporal, dans l’armĂ©e franquiste et resta sur le front pendant la derniĂšre annĂ©e de la Guerre civile[12]. En , il participa Ă  l’expĂ©dition du vaisseau Castillo de Olite[13], lequel fut envoyĂ© par le fond dans le port de CarthagĂšne par les rĂ©publicains ; cependant, Salvador Merino eut la vie sauve, fut fait prisonnier Ă  CarthagĂšne, et incita peu aprĂšs ses codĂ©tenus Ă  se soulever, concourant ainsi Ă  la conquĂȘte de la ville par le camp nationaliste le [14].

Contextualisation : syndicalisme vertical

Le phalangisme avait conçu un modĂšle syndical qui rompait radicalement avec le syndicalisme traditionnel ayant jusque-lĂ  prĂ©valu en Espagne. Ce modĂšle nouveau prĂ©voyait la crĂ©ation d’une structure « verticale » qui, en englobant travailleurs et patrons dans une mĂȘme organisation, agirait comme instrument d’harmonisation sociale propre Ă  neutraliser toute vellĂ©itĂ© de lutte des classes et jouerait dans le futur État national-syndicaliste Ă©galement un rĂŽle dĂ©terminant dans le dĂ©veloppement de l’économie[15]. La doctrine syndicale du parti unique FET y de las JONS comportait le dĂ©passement dĂ©finitif tant du capitalisme que du marxisme, selon une ligne semblable Ă  celle suivie dans l’Italie fasciste et dans l’Allemagne nazie, encore que le phalangisme, en dĂ©pit des similitudes Ă©videntes, tant du point de vue des formes que du contenu, entre le syndicalisme phalangiste et ses modĂšles fascistes italien et allemand, ait mis tous ses soins Ă  se prĂ©senter comme une solution authentiquement espagnole au problĂšme social[16].

Le « verticalisme » Ă©tait appelĂ© Ă  remplir une fonction double, celle de planification Ă©conomique et celle d’encadrement social, en accord avec l’article neuviĂšme du programme de la FET y de las JONS :

« Nous concevons l’Espagne sur le plan Ă©conomique comme un gigantesque syndicat de producteurs ; nous organiserons corporativement la sociĂ©tĂ© espagnole au moyen d’un systĂšme de syndicats verticaux par branche de la production, au service de l’intĂ©gritĂ© Ă©conomique nationale. »

Du reste, au sein de la Phalange rĂ©gnait un consensus absolu sur la nĂ©cessitĂ© de supprimer l’autonomie d’organisation de la classe ouvriĂšre[17].

Cependant, dans un premier stade, en raison de la difficultĂ© Ă  dĂ©ployer ses structures syndicales singuliĂšres dans le milieu du travail sous la Seconde RĂ©publique, le parti se voyait contraint de crĂ©er des organisations syndicales « vĂ©ritablement horizontales, basĂ©es sur la classe, selon l’usage marxiste », incarnĂ©es dans les Centrales ouvriĂšres national-syndicalistes (en abrĂ©gĂ© CONS), puis, ultĂ©rieurement, dans les Centrales patronales national-syndicalistes (en espagnol Centrales de Empresarios Nacional-Sindicalistas, CENS). Les phalangistes justifiaient le caractĂšre horizontal et de classe de ces centrales, qui contredisait les prĂ©misses thĂ©oriques verticalistes du parti, en les prĂ©sentant comme une Ă©tape transitoire intermĂ©diaire dans la perspective de la future mise en place du syndicat vertical[18].

Les CONS rĂ©ussirent Ă  se dĂ©velopper et Ă  s’implanter, en particulier par suite d’un notable effort de propagande de rue et grĂące Ă  des projets mutualistes et Ă  des bourses de travail. Dans le mĂȘme temps, la thĂ©orie syndicale phalangiste s’affinait plus avant et se complĂ©tait progressivement, notamment par les Ă©crits de JosĂ© Luis Arrese, qui permettaient au parti de forger une doctrine syndicale spĂ©cifique apte Ă  entraĂźner travailleurs et patrons Ă  soutenir massivement le modĂšle visant un dĂ©passement absolu de l’antagonisme social[19]. La thĂ©orie national-syndicaliste sous-tendait une utopie d’harmonisation sociale oĂč le syndicat vertical serait l’outil pour unir la classe ouvriĂšre et le patronat, tous deux Ă©puisĂ©s par le stĂ©rile conflit de classes qui les dĂ©voyait du vĂ©ritable objectif, savoir : la renaissance nationale. L’idĂ©ologie libĂ©rale et son antithĂšse marxiste, matĂ©rialistes toutes deux et par lĂ  souffrant de la mĂȘme tare, avaient Ă©chouĂ© autant l’une que l’autre parce que, arguait Arrese, « elles ne s’étaient pas adaptĂ©es au caractĂšre espagnol, et parce qu’elles Ă©taient injustes »[20] - [21] ; le national-syndicalisme en revanche, dont le programme s’appuyait sur la volontĂ© de « spiritualiser la vie, d’espagnoliser l’Espagne et d’instaurer la justice »[22] surgissait comme la solution de rechange idĂ©ale, Ă  mĂȘme de sĂ©duire travailleurs, patrons et techniciens, car de souche exclusivement espagnole. Par sa nature verticale, c’est-Ă -dire englobant tous les secteurs productifs, le syndicalisme phalangiste portait en lui une utopie sociale oĂč chaque Ă©lĂ©ment de la production voyait ses besoins satisfaits, et garantissait que les relations sur le lieu de travail entre patrons et leurs subalternes s’établissent, comme prĂ©alable Ă  la paix sociale, dans des conditions de confiance rĂ©ciproque (certes forcĂ©ment asymĂ©trique)[23].

AprĂšs les Ă©lections de fĂ©vrier 1936, qui avaient portĂ© au pouvoir le Front populaire, les syndicats phalangistes regroupĂ©s dans les CONS furent mis hors la loi et leurs locaux fermĂ©s, bien que l’organisation ait continuĂ© d’agir de façon plus ou moins clandestine. Par suite du coup d’État du 18 juillet 1936, ces structures clandestines disparurent dans la zone restĂ©e sous autoritĂ© rĂ©publicaine, le syndicalisme phalangiste y Ă©tant dĂ©sormais rĂ©primĂ© en raison du soutien apportĂ© par la Phalange au soulĂšvement militaire. Dans la zone devenue nationaliste, les CONS connurent au contraire une croissance sans prĂ©cĂ©dent, s’expliquant par des affiliations massives au parti FE de las JONS, dont les militants Ă©taient statutairement obligĂ©s de se syndiquer, et aussi par l’atmosphĂšre de peur qui poussait les travailleurs Ă  adhĂ©rer au parti pour garder leur emploi, voire parfois pour prĂ©server leur vie[24].

Dans la zone nationaliste, il fut dĂ©cidĂ© de mettre sur pied les Centrales de Empresarios Nacional-Sindicalistas (CENS), dont la premiĂšre fut crĂ©Ă©e Ă  Saragosse en , et dont le dĂ©veloppement allait ĂȘtre favorisĂ© par la Guerre civile et par les premiĂšres Ă©bauches d’institutionnalisation du rĂ©gime franquiste. L’expansion territoriale ultĂ©rieure des CENS fut pendant l’annĂ©e 1937 un processus lent et laborieux, Ă  cause d’une classe patronale dans son ensemble assez rĂ©fractaire aux tentatives phalangistes de l’enserrer dans son modĂšle syndical. Du reste, la crĂ©ation des CENS ne constituait encore qu’une Ă©tape prĂ©alable en vue de la formation d’une organisation unique pour ouvriers et patrons, prĂ©lude au stade oĂč le syndicalisme officiel serait habilitĂ© Ă  organiser l’économie dans le futur État national-syndicaliste. L’attitude peu coopĂ©rative des chefs d’entreprise s’explique d’une part par la disparition concomitante des anciennes associations patronales qui leur avaient servi traditionnellement Ă  s’organiser et qui Ă©taient relĂ©guĂ©es dĂ©sormais Ă  devenir autant d’élĂ©ments d’une entitĂ© plus vaste et temporaire, censĂ©e prĂ©parer la voie vers la « verticalitĂ© » syndicale, et d’autre part par la contrariĂ©tĂ© que suscitaient dans le patronat les promesses de hausses de salaire, de congĂ©s payĂ©s, de prĂ©voyance sociale et de certaines normes rigides, applicables entre autres aux licenciements[25].

Cadre législatif du verticalisme syndical et mise en place de la Délégation nationale des syndicats

Le syndicalisme vertical allait prendre corps en vertu de deux lois : la Loi de l’unitĂ© syndicale (Ley de Unidad Sindical), du , imposant l’unification obligatoire des syndicats en une seule et mĂȘme Organisation syndicale espagnole (OSE), et la Loi dĂ©finissant les bases de l’Organisation syndicale (Ley de Bases de la OrganizaciĂłn Sindical), de . Le cadre lĂ©gislatif ainsi mis en place, conforme aux principes du parti unique FET y de las JONS, visait Ă  rĂ©pondre Ă  la nĂ©cessitĂ© d’une paix sociale durable pour le nouvel État naissant, paix sociale que la seule coercition ne suffirait pas Ă  rĂ©aliser et Ă  l’effet de laquelle l’encadrement des travailleurs dans une structure syndicale assurant le contrĂŽle social, le dĂ©passement de la lutte des classes et l’harmonie dans le monde du travail n’apparaissait pas moins important que la dĂ©sactivation du mouvement ouvrier[26].

Entre ces deux lois fut promulguĂ©e en la Charte du travail (Fuero del Trabajo), premiĂšre d’une sĂ©rie de Lois fondamentales du franquisme, qui contredisait la charte du parti unique en ceci qu’il ne plaçait pas la future structure syndicale sous tutelle complĂšte du parti, quand mĂȘme ses dispositions avaient Ă©tĂ© conçues dans une optique phalangiste[27]. La Charte du travail Ă©tait la rĂ©sultante d’un dĂ©licat Ă©quilibre des pouvoirs, fait de compromis et de concessions, Ă  l’intĂ©rieur de la coalition des forces qui s’étaient soulevĂ©es en armes contre la RĂ©publique. Pour ce qui est du syndicat, le Fuero reflĂ©tait autant l’influence du national-syndicalisme que la prise en compte de l’existence de diverses organisations syndicales et patronales, distinctes des CONS et des CENS phalangistes, et rĂ©tives Ă  un assujettissement total Ă  la Phalange[28]. De cet esprit de conciliation faisait partie Ă©galement la dĂ©cision d’instituer un ministĂšre de l’Organisation et de l’Action syndicales, dont le titulaire Ă©tait le « nĂ©o-phalangiste » Pedro GonzĂĄlez-Bueno, et de ne pas faire de cas des prĂ©tentions hĂ©gĂ©monistes de la Phalange en la matiĂšre, en accord avec la volontĂ© du gĂ©nĂ©ral Franco de parvenir Ă  un Ă©quilibre et Ă  l’apaisement politiques[29] - [30].

C’est au ministre GonzĂĄlez-Bueno qu’il revint de rĂ©diger une premiĂšre mouture de la Ley de Bases de la OrganizaciĂłn Sindical, dont l’ultime brouillon fut toutefois vivement rejetĂ© par le Conseil national du parti d’abord, puis par le Conseil des ministres le ; si ladite loi adoptait bien la rhĂ©torique fasciste dans ses Ă©noncĂ©s et faisait droit au modĂšle d’organisation national-syndicaliste, elle maintenait la future organisation syndicale hors de portĂ©e du parti FET y de las JONS, laissant en effet au ministre de l’Organisation et de l’Action syndicales d’amples prĂ©rogatives en matiĂšre notamment de nominations, au dĂ©triment de la Phalange. Par cette fronde, la position de GonzĂĄlez-Bueno se retrouva fortement endommagĂ©e, ce dont le ministre allait faire les frais lors d’un prochain remaniement gouvernemental le , en mĂȘme temps que le ministĂšre lui-mĂȘme ; dĂ©sormais, toutes les questions syndicales allaient ressortir Ă  un Service des syndicats, partie intĂ©grante de FET y de las JONS, mĂȘme si en contrepartie certaines limites Ă©taient fixĂ©es Ă  la volontĂ© phalangiste de voir les syndicats exercer un pouvoir totalitaire sur l’ensemble des organisations Ă©conomiques[31].

Nomination et action de Salvador Merino Ă  la tĂȘte de la DĂ©lĂ©gation nationale des syndicats

Le , c’est-Ă -dire quelques mois aprĂšs la fin de la Guerre civile et dans le contexte d’une tendance Ă  la fascisation du rĂ©gime[32], Salvador Merino fut nommĂ© par AgustĂ­n Muñoz Grandes, secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du Mouvement (qui avait rang de ministre), Ă  la tĂȘte de la DĂ©lĂ©gation nationale des syndicats (DelegaciĂłn Nacional de Sindicatos, sigle DNS)[33] - [34] - [35], nouvel organisme rĂ©cemment dĂ©couplĂ© du dĂ©funt ministĂšre de l’Organisation et de l’Action syndicales. À ce titre, il allait avoir la haute main sur toute la future structure syndicale[32] et ĂȘtre secondĂ© dans sa mission par de vieilles chemises (c’est-Ă -dire des phalangistes de la premiĂšre heure) et des camarades ayant la pleine confiance de Muñoz Grandes[2]. À la diffĂ©rence d’autres hiĂ©rarques du parti unique FET y de las JONS, Salvador Merino se voyait investi de pouvoirs explicites pour un profond remaniement du monde syndical espagnol[36].

Ainsi chargĂ© de diriger et d’organiser, depuis le parti, la nouvelle DNS, Salvador Merino s’attela Ă  la tĂąche finale de structurer l’organisation syndicale sur un mode clairement phalangiste[37] et eut bientĂŽt fait d’élaborer un modĂšle syndical fort ambitieux, par quoi il ne manqua pas de se heurter aux fractions plus conservatrices du rĂ©gime franquiste[7]. Éminemment dotĂ© de sens social, il aspirait Ă  mettre sur pied une organisation syndicale de masse apte Ă  rassembler l’ensemble des travailleurs espagnols et Ă  devenir le cƓur du pouvoir dans le nouvel État en devenir[2].

Sa premiĂšre dĂ©cision fut la signature du dĂ©cret du prĂ©voyant le transfert, au bĂ©nĂ©fice du patrimoine de la DNS, des biens saisis sur les syndicats de gauche pendant la Guerre civile[14], et l’un de ses premiers objectifs fut de mobiliser l’organisation syndicale pour remĂ©dier au chĂŽmage croissant, qui atteignait en 1940 le chiffre officiel de 500 000 personnes privĂ©es de travail ; il envoya des directives Ă  ses dĂ©lĂ©guĂ©s provinciaux les incitant Ă  concevoir et proposer des plans d’emploi[38].

Au cours des mois suivants, octobre et , il s’employa Ă  mettre en place Ă  l’intention des syndicats espagnols toute une structure administrative, dans laquelle il parvint Ă  intĂ©grer une partie des cadres issus des anciennes organisations syndicales. En novembre, il procĂ©da Ă  un fort nombre de nominations, dont 35 nouveaux dĂ©lĂ©guĂ©s provinciaux[39].

Mais sa grande Ɠuvre fut donc d’ĂȘtre parvenu Ă  incorporer dans la nouvelle structure la totalitĂ© des organisations syndicales et patronales qui avaient jusque-lĂ , en mettant Ă  profit les flottements de la pĂ©riode GonzĂĄlez-Bueno, rĂ©ussi Ă  garder une existence plus ou moins indĂ©pendante. À cet effet, Salvador Merino rĂ©unit une Ă©quipe fort active de jeunes phalangistes, qui eut Ă  tĂąche de rĂ©diger le premier des outils lĂ©gislatifs destinĂ©s Ă  donner corps Ă  l’Organisation syndicale espagnole (OSE), Ă  savoir la Loi sur l’unitĂ© syndicale (en espagnol Ley de Unidad Sindical), laquelle, promulguĂ©e le , vint renforcer la prĂ©pondĂ©rance du modĂšle syndical phalangiste dans le processus de façonnement d’un syndicat vertical unitaire[14]. Ladite loi prescrivait que patrons et travailleurs eussent Ă  s’intĂ©grer dans une organisation syndicale unique sous l’égide de FET y de las JONS[40] (encore que Salvador Merino ait Ă©tĂ© favorable Ă  une autonomie syndicale vis-Ă -vis du reste du « Mouvement »[41]). La nouvelle organisation Ă©tait, selon ce qu’énonçait le prĂ©ambule de la loi, « la seule reconnue, avec une personnalitĂ© suffisante, par l’État, qui n’admettra l’existence d’aucune autre aux finalitĂ©s analogues ou similaires » et appelĂ©e Ă  accueillir en son sein toute association jamais crĂ©Ă©e « pour dĂ©fendre ou reprĂ©senter, totalement ou partiellement, les intĂ©rĂȘts Ă©conomiques ou de classe, qu’ils portent ou non la dĂ©nomination de syndicat, d’association ouvriĂšre, patronale, corporative, etc. ». Davantage que d’apporter une dĂ©finition administrative, qui sera l’objet de l’ultĂ©rieure Loi des bases de l’organisation syndicale, la Loi sur l’unitĂ© syndicale figure comme l’incarnation lĂ©gislative dĂ©finitive du modĂšle idĂ©ologique devant sous-tendre l’OSE[42]. Celle-ci en effet, si elle Ă©tait bien conforme au prĂ©cepte d’« unitĂ©, totalitĂ© et hiĂ©rarchie » tel que stipulĂ© dans la Charte du travail, se trouvait placĂ©e, en disconformitĂ© avec celle-ci, sous la houlette du parti FET y de las JONS ; en outre, la nouvelle lĂ©gislation instaurait le triple dessein Ă©conomique, social et de prĂ©voyance qui allait caractĂ©riser l’OSE durant toute son existence. La structuration en Syndicats nationaux par branche de production (valant mise en Ɠuvre au moins thĂ©orique du neuviĂšme des 27 articles du programme de la Phalange) devait, selon ce qu’ambitionnait Salvador Merino, paver la voie d’un pilotage par l’OSE de la politique Ă©conomique du rĂ©gime. La capacitĂ© d’encadrement de toute la population productive par le biais du dĂ©ploiement territorial de l’OSE sous la forme de Syndicats locaux et provinciaux servirait de base Ă  la fonction sociale du syndicalisme phalangiste. La mission de prĂ©voyance, c’est-Ă -dire la mise en application pratique du discours sur la justice sociale — Ă©lĂ©ment rĂ©current de la propagande phalangiste —, serait financiĂšrement assurĂ©e grĂące aux saisies des avoirs des syndicats de gauche[43]. La loi postulait d’autre part que « les Espagnols, en tant que collaborateurs Ă  la production, composent la CommunautĂ© national-syndicaliste comme unitĂ© militante dans la discipline du Mouvement ». La possibilitĂ© de conflit dans la sphĂšre du travail, proscrite doctrinalement, Ă©tait dĂ©sormais aussi bannie juridiquement, puisque la loi Ă©tablissait « la discipline sociale des producteurs en accord avec les principes d’unitĂ© et de coopĂ©ration »[44]. La loi ouvrait grandes les portes Ă  un dĂ©veloppement bureaucratique qui, au fil de la dĂ©cennie suivante, aboutit Ă  structurer l’OSE en quatre FĂ©dĂ©rations syndicales, elles-mĂȘmes subdivisĂ©es en branches d’activitĂ© Ă©conomique (bĂątiment, enseignement, Ă©levage, pĂȘcheries, etc.) correspondant aux 28 Syndicats nationaux de l’OSE[45]. En instaurant une grande rigiditĂ© dans la structure hiĂ©rarchique de l’OSE, la nouvelle lĂ©gislation garantissait la prĂ©pondĂ©rance exĂ©cutive du DĂ©lĂ©guĂ© national des syndicats dans la sphĂšre centrale du nouvel organisme, il est vrai sous l’autoritĂ© suprĂȘme du gĂ©nĂ©ral Franco en sa qualitĂ© de chef national de FET y de las JONS[44].

Par sa volontĂ© d’établir un État national-syndicaliste Ă  part entiĂšre, Salvador Merino Ă©tait politiquement proche de Serrano SĂșñer, l’un des artisans de son ascension aux plus hautes fonctions syndicales. Pourtant, au contraire de Serrano SĂșñer, Salvador Merino se proposait d’octroyer Ă  l’OSE vis-Ă -vis de l’État une autonomie trĂšs poussĂ©e, en plus de la doter de trĂšs larges moyens de contrĂŽle de l’économie, en concordance avec la doctrine historique national-syndicaliste qui posait que « l’organisation Ă©conomico-sociale de la production s’exerce Ă  travers des Syndicats nationaux »[46]. Salvador Merino faisait observer dans un article de presse :

« Il y a lieu de s’aviser que, d’ici peu de jours, les Syndicats nationaux se verront dotĂ©s, de fait et de droit, d’attributions de portĂ©e et de responsabilitĂ© Ă©normes en matiĂšre d’ordonnancement de l’économie nationale, en vue d’une unitĂ©, y compris mĂȘme d’instrumentation, de la politique Ă©conomique de l’État[47]. »

À l’usage de cette nouvelle ossature syndicale, Salvador Merino conçut au printemps 1940 l’idĂ©e d’un pĂ©riodique, qui prit forme au mois de juin suivant sous les espĂšces du quotidien Pueblo. Dans son premier numĂ©ro, le journal syndical annonçait que « nous Ă©puiserons, au service du travail national, toutes nos possibilitĂ©s d’action et d’incitation »[48] - [note 1].

ParallĂšlement Ă  ses fonctions Ă  la tĂȘte de la DNS, Salvador Merino Ă©tait aussi membre du Conseil national de FET y de las JONS[49], parti unique au sein duquel il ne s’identifiait rĂ©solument avec aucune des factions internes, encore qu’il se soit senti plus proche des militaires phalangistes tels que Juan YagĂŒe ou AgustĂ­n Muñoz Grandes[50]. Sa rhĂ©torique populiste et rĂ©volutionnaire fit bientĂŽt de lui l’une des figures dirigeantes les plus en vue au sein de la hiĂ©rarchie de la Phalange, et furent aussi Ă  l’origine de nombreux conflits avec d’autres chefs de file franquistes[51]. Le , lors du premier anniversaire de la victoire dans la Guerre civile, Salvador Merino rĂ©ussit Ă  rassembler et Ă  faire dĂ©filer dans les rues de Madrid une grande masse d’ouvriers, ce qui provoqua l’ire des milieux les plus Ă  droite du rĂ©gime franquiste[52].

Sympathisant ouvertement avec l’Allemagne nazie[34], il joua dans les premiĂšres annĂ©es de la Seconde Guerre mondiale un rĂŽle de premier plan dans les relations hispano-gemaniques[53]. À l’égal du ministre sans portefeuille Pedro Gamero del Castillo, il entretint des contacts rĂ©guliers avec des personnalitĂ©s et organisations nazies[54], figurant notamment, en , comme l’un des hiĂ©rarques du rĂ©gime Ă  accueillir Ă  Madrid le dirigeant nazi Heinrich Himmler pendant sa visite en Espagne[55] ; cependant, il rĂ©alisait ces contacts de façon directe, sans en rĂ©fĂ©rer au Service extĂ©rieur de la Phalange, ce qui pouvait dĂ©noter une attitude de dĂ©dain Ă  l’égard des procĂ©dures du parti[56] - [54]. En , aprĂšs que le chef du Parti nazi Ă  Madrid, Hans Thomsen, eut terminĂ© les apprĂȘts d’une visite spĂ©ciale de Salvador Merino en Allemagne, celui-ci se rendit dans ce pays, oĂč il fut impressionnĂ© par le modĂšle syndical nazi et oĂč il eut une rencontre avec Rudolf Hess, Robert Ley, Joachim von Ribbentrop et Joseph Goebbels[54] - [57]. Selon les rumeurs propagĂ©es par ses adversaires dans les cercles de pouvoir Ă  Madrid, Salvador Merino aurait en rĂ©alitĂ© fait le dĂ©placement en Allemagne pour y recueillir des appuis en vue d’un coup d’État en Espagne[58].

Les activitĂ©s et les ambitions de Salvador Merino lui valurent un grand nombre d’ennemis parmi les dirigeants franquistes, dont beaucoup voyaient en lui un fasciste subversif et un « crypto-rouge »[54]. Ses positionnements politiques, ajoutĂ©s Ă  sa dĂ©magogie populiste et Ă  la fascination qu’il professait pour le modĂšle nazi d’organisation du travail, allaient ĂȘtre Ă  l’origine d’une hostilitĂ© active dans les fractions catholique et monarchiste du patronat[46]. Dans les rangs de l’armĂ©e, il devait faire face Ă  l’opposition viscĂ©rale du gĂ©nĂ©ral AndrĂ©s Saliquet, parmi d’autres[59]. Conscient de sa grande vulnĂ©rabilitĂ© politique, Serrano SĂșñer en vint Ă  lui offrir la possibilitĂ© d’assumer le portefeuille du Travail, proposition que Salvador Merino dĂ©clina, au motif que cela entraĂźnerait pour lui la perte de contrĂŽle sur les syndicats[note 2].

DisgrĂące

À l’hostilitĂ© croissante du patronat Ă  l’égard de Salvador Merino vint s’ajouter l’indignation de la classe politique et d’une partie de l’armĂ©e Ă  la suite d’informations sur des manƓuvres de diplomatie parallĂšle avec l’Allemagne tendant Ă  favoriser l’entrĂ©e en guerre de l’Espagne aux cĂŽtĂ©s de l’Axe. Officiellement, Salvador Merino avait fait le voyage d’Allemagne en , c’est-Ă -dire peu avant la crise ministĂ©rielle, pour Ă©tudier sur place les organisations syndicales allemandes ; cependant, il apparut qu’il avait Ă©galement rencontrĂ© le ministre des Affaires Ă©trangĂšres Joachim von Ribbentrop ainsi que le ministre de la Propagande Joseph Goebbels, en prĂ©sence de qui il s’était dĂ©clarĂ© fervent partisan de l’entrĂ©e en guerre de l’Espagne. Les rumeurs allaient bon train selon lesquelles Salvador Merino aurait tentĂ© d’obtenir le soutien de l’Allemagne pour faire limoger Serrano Suñer, alors titulaire des Affaires Ă©trangĂšres, ce qui acheva d’envenimer les relations entre les deux hommes. D’autres rumeurs encore portaient que Salvador Merino avait durant sa visite en Allemagne tenu des pourparlers en vue d’un possible renversement de Franco lui-mĂȘme, ce qui lui causa l’inimitiĂ© de la caste militaire espagnole[60].

Aussi, faute de soutien dans la hiĂ©rarchie franquiste, Ă  cause de son discours populiste national-syndicaliste et de sa proximitĂ© aux Nazis, Salvador Merino fut en peu Ă  peu Ă©vincĂ© de la direction des Syndicats verticaux[41]. D’aprĂšs certains auteurs, l’une des raisons de sa destitution est le pacte qu’il avait signĂ© le avec Robert Ley, chef du Deutsche Arbeitsfront, et qui prĂ©voyait l’envoi en Allemagne de 100 000 travailleurs espagnols[61] - [62], encore que cet accord ait Ă©tĂ© renĂ©gociĂ© ultĂ©rieurement et l’effectif de travailleurs ramenĂ© Ă  15 000[63], essentiellement par manque de candidats[64]. La rumeur courait d’une conspiration fomentĂ©e par lui, de concert avec les gĂ©nĂ©raux YagĂŒe et Muñoz Grandes[2]. Cependant, le prĂ©texte principal de sa chute fut la mise au jour de son prĂ©sumĂ© passĂ© de « franc-maçon »[65], dont les preuves avaient principalement Ă©tĂ© apportĂ©es, selon l’historien Stanley G. Payne, par le gĂ©nĂ©ral Saliquet[59], Ă  ce moment prĂ©sident du Tribunal spĂ©cial pour la rĂ©pression de la maçonnerie et du communisme[66] ; d’autres auteurs toutefois ont Ă©voquĂ© le rĂŽle jouĂ© par des agents des services secrets britanniques dans la dĂ©chĂ©ance de Salvador Merino[67] et qu’expliquerait sa germanophilie non dissimulĂ©e.

Une procĂ©dure contre Salvador Merino fut engagĂ©e le [66], pendant qu’il fĂȘtait sa lune de miel Ă  Majorque[68] - [7]. RentrĂ© promptement Ă  Madrid, Salvador Merino rĂ©cusa les accusations et rejeta comme fausses les lettres dont disposait le tribunal et dans lesquelles Salvador Merino promettait de faire acte de prĂ©sence Ă  toutes les rĂ©unions tenues dans les loges d’Espagne ; sans se dĂ©partir de son calme, il affirma avoir connaissance de l’existence de ces documents qui, selon ses dires, avaient Ă©tĂ© fabriquĂ©s par l’ambassade de Grande-Bretagne et par les « anglophiles » espagnols[2]. En dĂ©pit de ces circonstances et quoique suspendu de ses fonctions, il s’accrocha Ă  son poste de dĂ©lĂ©guĂ© syndical national ; GermĂĄn Álvarez de Sotomayor, son supplĂ©ant pour ce mandat, assuma l’intĂ©rim Ă  la direction des syndicats. Finalement, dĂ©but septembre, il sollicita Serrano Suñer, alors prĂ©sident du ComitĂ© politique de la Phalange, d’accepter sa dĂ©mission[69]. Officiellement destituĂ© comme DĂ©lĂ©guĂ© national le [70], il fut remplacĂ© Ă  la tĂȘte des Syndicats par Manuel ValdĂ©s Larrañaga, Ă©galement un phalangiste[note 3]. Tout en s’employant Ă  domestiquer les syndicats indociles, ce dernier se mit en devoir de rĂ©organiser leur structure interne et sut imprimer Ă  l’organisation syndicale une ligne plus conservatrice et plus religieuse[71]. C’est dans ce mĂȘme contexte que quelque membre du cabinet ministĂ©riel en vint Ă  requĂ©rir l’exĂ©cution de Salvador Merino[72].

Le , le Tribunal spĂ©cial pour la rĂ©pression de la maçonnerie et du communisme le condamna Ă  douze annĂ©es d’emprisonnement, mais la sentence fut commuĂ©e par le Conseil des ministres Ă  une peine de douze annĂ©es d’exil intĂ©rieur[73].

CarriÚre ultérieure

Ainsi tombĂ© en disgrĂące, Salvador Merino fut expulsĂ© du parti et assignĂ© Ă  rĂ©sidence dans les Ăźles BalĂ©ares[74] - [75] - [73] - [note 4]. Avec le changement de cap de la politique espagnole au fil de la guerre mondiale et dans l’aprĂšs-guerre, sa mise Ă  l’écart des sphĂšres de pouvoir allait s’accentuer encore. Ce nonobstant, une fois purgĂ©e sa peine de confinement, il trouva par la suite Ă  s’employer comme assistant dans l’industrie textile en Catalogne et obtint un emploi de notaire Ă  Cerdanyola del VallĂšs, dans la province de Barcelone[72] - [7] - [2]. Dans les dĂ©cennies 1960 et 1970, s’étant vouĂ© dĂ©sormais tout entier au monde des affaires, il se hissa au poste de directeur de gestion de la firme automobile Motor IbĂ©rica. Il pĂ©rit dans un accident de voiture le Ă  l’ñge de 60 ans[76] - [77] - [7] - [2].

Vie personnelle

Salvador Merino avait contractĂ© mariage avec MarĂ­a Fermina Coderch de Sentmenat[78], sƓur de l’architecte JosĂ© Antonio Coderch[2].

Publications de Salvador Merino

  • (es) La Falange y su contribuciĂłn al problema del campo. AntologĂ­a, Madrid, GrĂĄficas Reunidas, coll. « II Consejo Sindical PolĂ­tica Agraria », , 363 p..
  • (es) Escritos y discursos, Tarragone, Fides, coll. « Azul MahĂłn », , 232 p. (ISBN 978-8494491771) (choix de textes et annotations par Juan Antonio Llopart).

Notes et références

Notes

  1. Il est intĂ©ressant de citer Ă©galement JesĂșs Ercilla, mĂ©decin et journaliste phalangiste, s’exprimant dans un article intitulĂ© Unidad y lealtad (UnitĂ© et LoyautĂ©) et paru dans le journal Pueblo le , Ă  l’occasion du 20e anniversaire de sa fondation :
    « Tous les combattants intensifiaient leurs efforts pour traduire en rĂ©alitĂ©s politiques et sociales les raisons qui les avaient amenĂ©s Ă  s’armer. Cet Ă©lan et cet empressement avaient animĂ© l’équipe de syndicalistes qui s’étaient groupĂ©s autour du premier DĂ©lĂ©guĂ© national des syndicats. Pour nous commençait alors la tĂąche de rĂ©flexion, non moins ardente pour autant, de renforcer l’armature syndicale apte Ă  canaliser l’élan syndicaliste des travailleurs espagnols. [Pueblo] n’était pas, et ne pouvait ĂȘtre, qu’un journal de plus. Il y avait lieu de donner forme Ă  la nĂ©buleuse que la pensĂ©e syndicaliste du SoulĂšvement avait Ă©tĂ© jusque-lĂ  ; chemin faisant, il fallait crĂ©er une doctrine syndicaliste, mettre en avant des consignes, et dans ses pages l’on vit naĂźtre l’Organisation syndicale. [...] Le prĂ©sent journal national-syndicaliste fut comme une flĂšche dĂ©cochĂ©e vers un lendemain de rĂ©alisations. »

    CitĂ© par À. Amaya Quer (2010), p. 61.
  2. Serrano Suñer cependant insista sur sa proposition et lui demanda quelle charge il serait disposĂ© Ă  accepter, ce Ă  quoi Salvador Merino rĂ©pondit que non seulement il n’accepterait que le poste de ministre de l’IntĂ©rieur (lequel se trouvait alors vacant), mais qu’en plus cette offre devait inclure Ă©galement le secrĂ©tariat gĂ©nĂ©ral de la FET y de las JONS.
    Cf. (en) Stanley G. Payne, Fascism in Spain, 1923–1977, Madison (Wisconsin), University of Wisconsin Press, (ISBN 978-0299165642), p. 352.
  3. Manuel Valdés procéda à une purge chez les hiérarques syndicaux, expulsant la plupart des dirigeants affidés de Salvador Merino.
    Cf. J. DomĂ­nguez Arribas (2009), p. 445.
  4. Certaines sources toutefois indiquent qu’il fut confinĂ© dans la localitĂ© de Palafrugell, dans la province de GĂ©rone.

Références

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  14. À. Amaya Quer (2010), p. 45.
  15. À. Amaya Quer (2010), p. 27.
  16. À. Amaya Quer (2010), p. 28.
  17. À. Amaya Quer (2010), p. 29.
  18. À. Amaya Quer (2010), p. 29-30.
  19. À. Amaya Quer (2010), p. 31.
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  21. À. Amaya Quer (2010), p. 32.
  22. J. L. Arrese (1936), p. 38. CitĂ© par À. Amaya Quer (2010), p. 33.
  23. À. Amaya Quer (2010), p. 32-33.
  24. À. Amaya Quer (2010), p. 34-35.
  25. À. Amaya Quer (2010), p. 35-36.
  26. À. Amaya Quer (2010), p. 39.
  27. À. Amaya Quer (2010), p. 40.
  28. À. Amaya Quer (2010), p. 41-42.
  29. J. R. Urquijo Goitia (2001), p. 134.
  30. À. Amaya Quer (2010), p. 42-43.
  31. À. Amaya Quer (2010), p. 43-44.
  32. J. M. ThomĂ s (1999), p. 46-47.
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  39. W. H. Bowen (2000), p. 66.
  40. L. SuĂĄrez FernĂĄndez (2011), p. 141.
  41. F. Morente Valero (2005), p. 221.
  42. À. Amaya Quer (2010), p. 45-46.
  43. À. Amaya Quer (2010), p. 46-47.
  44. À. Amaya Quer (2010), p. 47-48.
  45. À. Amaya Quer (2010), p. 49.
  46. À. Amaya Quer (2010), p. 47.
  47. Article de Salvador Merino publié dans le journal Pueblo du 22 octobre 1940.
  48. Journal Pueblo, Ă©dition du 17 juin 1940. CitĂ© par À. Amaya Quer (2010), p. 59.
  49. J. Ruiz (2005), p. 216.
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Liens externes

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