José Gabriel
José Gabriel, nom de plume de José Gabriel López Buisån (Madrid, 1896 - Buenos Aires, 1957), était un journaliste, essayiste et écrivain argentin, qui joua un rÎle notable dans la vie intellectuelle et culturelle argentine de la premiÚre moitié du XXe siÚcle.
Naissance | |
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DĂ©cĂšs |
(Ă 61 ans) Buenos Aires |
Nom de naissance |
José Gabriel López Buisån |
Nationalité | |
Activités |
Journaliste, critique d'art, Ă©crivain, essayiste, syndicaliste |
Conjoint |
Matilde Delia Natta |
Dâorigine aragonaise, ayant connu une enfance bousculĂ©e, JosĂ© Gabriel Ă©migra en Argentine avec sa mĂšre et dĂ©buta dans le journalisme Ă vingt ans, en cofondant en 1917 Ă Buenos Aires, aux cĂŽtĂ©s du philosophe Alejandro Korn et du poĂšte BenjamĂn Taborga, la revue El Colegio Novecentista. Il collabora ensuite Ă Caras y Caretas, puis au quotidien La Prensa, dont il fut expulsĂ© au bout de trois ans en raison dâune retentissante action syndicale. Auteur prolifique, trĂšs impliquĂ© dans les querelles littĂ©raires, artistiques et intellectuelles des annĂ©es 1920 en Argentine, il dĂ©ploya une activitĂ© fĂ©brile, rĂ©digeant brochures, articles de presse et de revue, essais et ouvrages (y compris de fiction : romans, nouvelles, piĂšces de thĂ©Ăątre), oĂč il abordait un large Ă©ventail de thĂšmes (critiques dâart et de poĂ©sie, rĂ©flexions politiques, philosophie, histoire, etc.). Sur le plan politique, aimant Ă marquer son attachement Ă la nation argentine, il prĂŽna un « nationalisme Ă caractĂšre social », et sâĂ©vertua Ă associer sentiment national et idĂ©ologie socialiste, tout en engageant par ailleurs les pays latino-amĂ©ricains Ă mettre de cĂŽtĂ© leurs rivalitĂ©s nationales et Ă constituer une fĂ©dĂ©ration hispanoamĂ©ricaine en Ă©troite liaison avec le socialisme, afin de se libĂ©rer du joug de lâimpĂ©rialisme, en particulier de celui britannique, que JosĂ© Gabriel ne cessa de fustiger. Il eut, au long de sa vie agitĂ©e, une part active dans la plupart des Ă©vĂ©nements et des dĂ©bats politiques et culturels de la premiĂšre moitiĂ© du XXe siĂšcle en Argentine, entre autres (et outre la grĂšve Ă La Prensa) : la RĂ©forme universitaire, la Semaine tragique, les coups dâĂtat militaires de 1930 et de 1943 (la contestation desquels lui valut des sĂ©jours en prison et par deux fois lâexil Ă Montevideo), lâavĂšnement du pĂ©ronisme (auquel il accorda une adhĂ©sion rĂ©servĂ©e, ce quâil payera aprĂšs le renversement de PerĂłn par sa mise Ă lâĂ©cart de la vie intellectuelle argentine). Pendant la guerre civile espagnole, il fut dans les premiers mois du conflit reporter de guerre pour le compte du journal CrĂtica, puis consigna ses expĂ©riences et observations, en les entremĂȘlant de rĂ©flexions politiques souvent acerbes, dans trois ouvrages, dont un vient dâĂȘtre rĂ©Ă©ditĂ© (2018). Ses prioritĂ©s Ă©taient la langue nationale, lâargot rioplatense (il Ă©tait fort critique Ă lâĂ©gard de lâorganisme rĂ©gulateur du lunfardo), la culture populaire argentine, et lâantifascisme. Son franc-parler, son esprit polĂ©mique et ses positionnements politiques lui attirĂšrent lâinimitiĂ©, voire (selon Galasso) lâostracisme, de lâintelligentsia argentine, ce qui explique sans doute que quelques-unes seulement de ses Ćuvres ont Ă©tĂ© rĂ©Ă©ditĂ©es, et cela tardivement.
Biographie
Jeunes années et influences intellectuelles
MadrilĂšne de naissance, JosĂ© Gabriel LĂłpez BuisĂĄn passa la majeure partie de son enfance Ă Torres del Obispo, village de la province de Huesca, limitrophe de Graus, en Aragon. Dans son ouvrage La vida y la muerte en AragĂłn, il raconte en effet que les frĂšres de sa mĂšre la spoliĂšrent de sa part dâhĂ©ritage et quâelle en fut rĂ©duite Ă travailler comme servante Ă Madrid, avant de sâen retourner plus tard dans son village aragonais, avec son fils nouveau-nĂ©. Au bout de quelques annĂ©es, la famille dut quitter provisoirement Torres del Obispo pour sâinstaller en Cantabrie, oĂč elle ne sut pas davantage prospĂ©rer. En 1905, les LĂłpez BuisĂĄn rĂ©solurent donc, Ă lâinstar de tant dâautres Espagnols de cette Ă©poque, de tenter leur chance dans le RĂo de la Plata. Vers le milieu de la premiĂšre dĂ©cennie du XXe siĂšcle, JosĂ© Gabriel arriva donc, accompagnĂ© de sa mĂšre, dans le port de Buenos Aires, sâattendant Ă y retrouver le chef de famille, lequel cependant semble bien les avoir abandonnĂ©s. Cela peut sans doute en partie expliquer pourquoi JosĂ© Gabriel omettra toujours dâinclure dans sa signature dâauteur ses patronymes â dont le second, BuisĂĄn, est dâincontestable estoc pyrĂ©nĂ©en â, pour ne jamais signer que par JosĂ© Gabriel[1]. Lâauteur lui-mĂȘme rĂ©suma ainsi son enfance et adolescence: « Ă 9 ans, je demandais lâaumĂŽne dans les hameaux perchĂ©s des montagnes de Cantabrie dans la PĂ©ninsule, Ă dix ans, jâĂ©tais apprenti, Ă 11, garçon boulanger, Ă 12, garçon dâauberge, Ă 13, peintre lettriste, Ă 14, saute-ruisseau, Ă 15, employĂ© de bureauâŠÂ»[2].
Bien que se disant lui-mĂȘme aragonais, comme sa famille maternelle, JosĂ© Gabriel se considĂ©rait argentin ; du reste, il ne fera rĂ©fĂ©rence Ă lâEspagne quâĂ de trĂšs rares occasions, et son identification Ă son pays dâaccueil Ă©tait telle que â abstraction faite des trois monographies quâil consacra Ă la conjoncture politico-sociale de lâEspagne des annĂ©es 1930 â ses allusions Ă son pays natal sont tout Ă fait rares et que la majoritĂ© de ses livres concernent spĂ©cifiquement des sujets en Ă©troite relation avec lâhistoire, la langue, la politique et la vie sociale argentines. Il semble quâil ne retourna en Espagne quâune seule fois, pour quelques mois seulement, en qualitĂ© de correspondant du journal CrĂtica de Buenos Aires, dans les premiĂšres phases de la guerre civile[1].
Pendant ses annĂ©es de formation intellectuelle, JosĂ© Gabriel se sentit attirĂ© par lâĂ©cole littĂ©raire novecentista, dont le guide et mentor Ă©tait Eugenio d'Ors. Lâun des membres les plus Ă©minents de cette Ă©cole Ă©tait le poĂšte BenjamĂn Taborga, originaire de Cantabrie et lui aussi Ă©migrĂ© en Argentine, pour qui JosĂ© Gabriel eut la plus grande admiration et qui sera lâune de ses premiĂšres idoles intelectuelles :
« Taborga, philosophe authentique, provoqua un salutaire bouleversement dans ma vie⊠Avec lui, jâallai Ă la BibliothĂšque nationale et au musĂ©e des Beaux-Arts. Nous lisions beaucoup et discutions plus encore, mais toujours avec grande fraternitĂ©. Parfois cependant, parce que nous sentions trop la beautĂ©, nous en oubliions la justice. »
Taborga, dâabord germanophile, adhĂ©ra par la suite au bolchevisme ; il est Ă supposer que JosĂ© Gabriel ait suivi une trajectoire semblable. Les deux cofondĂšrent en 1917, aux cĂŽtĂ©s dâAlejandro Korn, El Colegio Novecentista, et se mirent Ă collaborer Ă La Gaceta. Taborga mourut des suites de la grippe dite espagnole, Ă lâĂąge de 30 ans Ă peine, ce qui causa une forte commotion chez son ami JosĂ© Gabriel[1].
DĂ©buts dans le journalisme
Le , la cĂ©lĂšbre revue Caras y Caretas, qui Ă©tait distribuĂ©e Ă©galement en Espagne, publia un article de JosĂ© Gabriel intitulĂ© Un seminario de filosofĂa. Pour le compte de cette mĂȘme revue, lâauteur traduisit plusieurs Ćuvres de Maeterlinck et sâessaya Ă rĂ©diger quelques recensions. La conscience sociale, qui ne cessera de le caractĂ©riser par la suite, transparaĂźt dĂ©jĂ dans Cuadros de pobreza (littĂ©r. Tableaux de pauvretĂ©), article paru dans la mĂȘme publication en . Il collabora aussi Ă la revue Nosotros, sous forme de plusieurs article critiques de littĂ©rature française, et, Ă 20 ans, sâapprocha de lâĂ©crivain Manuel Ugarte[1], contribuant Ă La Patria, journal fondĂ© par celui-ci en 1915, lequel journal ne survĂ©cut que trois mois, en raison de ses positions neutralistes et socialistes nationales. Ă lâĂąge de 23 ans, JosĂ© Gabriel rejoignit lâĂ©quipe de rĂ©daction de La Prensa, oĂč il faisait parallĂšlement office de dĂ©lĂ©guĂ© syndical de la FĂ©dĂ©ration argentine des journalistes. Il dĂ©crivit comme suit cet Ă©pisode particulier de sa carriĂšre journalistique :
« Le traitement personnel nây Ă©tait pas bon, et un jour, nous mettions Ă lâarrĂȘt La Prensa, peut-ĂȘtre la premiĂšre grĂšve au journal des Paz⊠Je fus licenciĂ©. Cette grĂšve me coupa les vivres et mâattira des persĂ©cutions policiĂšres⊠Pas mĂȘme Ă La Vanguardia (journal socialiste), je ne pus retrouver du travail. La Prensa mâavait marquĂ© au fer rouge⊠à la suite de cette grĂšve, il me sentencia. Je pourrais mourir ou ĂȘtre nommĂ© prĂ©sident de la Nation, que La Prensa ne me mentionnerait plus jamais⊠Je ne hais pas cette maison de don Ezequiel Paz⊠mais je peux assurer que câĂ©tait lĂ un Ătat dans lâĂtat. La Prensa dĂ©daignait la cause populaire. Il dĂ©fendait ses intĂ©rĂȘts particuliers, contre les intĂ©rĂȘts nationaux, comme dans la fameuse affaire de la devaluation de la livre. CâĂ©tait le journal qui donnait le plus dâinformations Ă©trangĂšres au monde[2]. »
ExpulsĂ© de La Prensa aprĂšs trois annĂ©es de collaboration, JosĂ© Gabriel entama ensuite une pĂ©riode dâactivitĂ© fĂ©brile, qui occupera tout le restant de sa vie. Ses textes, qui abordaient un large Ă©ventail de thĂšmes (critiques de poĂ©sie, nouvelles, articles politiques etc.), furent publiĂ©s, de maniĂšre trĂšs Ă©parse, tant dans des revues de grande diffusion, comme Caras y Caretas ou España, Ă©ditĂ©e Ă Madrid, que dans des publications locales et universitaires. Lâopuscule TĂșpac Amaru de 1918 fut la premiĂšre de ses publications Ă dĂ©passer les dimensions dâun article de presse[1].
Installation Ă La Plata et travaux dâessayiste et dâĂ©crivain
JosĂ© Gabriel sâen fut sâĂ©tablir Ă La Plata, oĂč il avait trouvĂ© Ă sâemployer comme enseignant dans un lycĂ©e de jeunes filles. Il sâĂ©prit de lâune dâelles, Matilde Delia Natta, quâil Ă©pousa promptement en 1920[1]. Câest Ă cette Ă©poque quâil publia ses premiers rĂ©cits de fiction, ainsi quâun essai sur le poĂšte du faubourg Evaristo Carriego, essai que Manuel GĂĄlvez jugea supĂ©rieur Ă celui que publiera Borges sur le mĂȘme sujet prĂšs dâune dizaine dâannĂ©es plus tard. DĂšs ce moment, il avait une conception prĂ©cise sur ce que devait ĂȘtre une culture nationale argentine et la formula dans la dĂ©claration suivante, qui lui valut dâĂąpres polĂ©miques :
« Notre critique incline Ă accorder des mĂ©rites trĂšs supĂ©rieurs aux produits dâimitation ou de transplantation, comme si, pour acquĂ©rir une valeur universelle, lâĆuvre artistique nâeĂ»t pas besoin dâĂȘtre auparavant locale et trĂšs humaine. Je nâai pas encore pu convaincre nos critiques de ce que toute lâĆuvre âuniversalisteâ de Lugones nâaura jamais, pour lâhistoire de lâart, la signification dâun seul vers local (non pas localiste) de Carriego[2]. »
Le roman La fonda (littĂ©r. lâAuberge) de 1922, notable Ă©vocation de la Buenos Aires du Centenaire (celui de la rĂ©volution de Mai, câest-Ă -dire la Buenos Aires du dĂ©but du XXe siĂšcle), avec ses fondines (guinguettes), ses cosaques de rĂ©pression, et lâondoiement des drapeaux rouge-et-noir des anarchistes[2], est son premier ouvrage narratif. Outre le roman Ă©ponyme, le livre comportait deux autres brefs romans, Un lance de honor et La joya mĂĄs cara (littĂ©r. le Bijou le plus cher), dont le premier, mettant en scĂšne un personnage collectif sous les espĂšces dâune courĂ©e de la banlieue de Buenos Aires, apparaĂźt comme le plus intĂ©ressant tant du point de vue littĂ©raire que par ses aspects sociaux et linguistiques ; lâauteur avait puisĂ© dans ses propres expĂ©riences, vĂ©cues peu dâannĂ©es auparavant, alors quâil travaillait comme factotum dans une auberge de basse catĂ©gorie[1].
PremiĂšre Guerre mondiale et positionnement politique
JosĂ© Gabriel Ă©volua en direction dâun nationalisme Ă caractĂšre social[1]. Face Ă la PremiĂšre Guerre mondiale, il fit profession de neutralisme, condamnant en effet cette guerre, au motif quâelle nâĂ©tait pas menĂ©e « entre oppresseurs et opprimĂ©s, mais entre oppresseurs et oppresseurs, câest-Ă -dire entre nĂ©griers se disputant des esclaves », tout en revendiquant « la guerre dĂ©fensive des peuples opprimĂ©s par le joug Ă©tranger, contre le capitalisme qui les opprime⊠ainsi que lâentendit Alberdi lorsquâil ne donna pas son appui Ă la guerre de la Triple Alliance contre le Paraguay »[2].
Dans le domaine littĂ©raire, il dĂ©fendit le point de vue que « la condition essentielle de lâoriginalitĂ© de lâart, sera le contenu de lâĂ©motion [surgissant au contact] du milieu environnant lâartiste » â position Ă resituer dans la polĂ©mique oĂč sâaffrontaient les deux factions les plus actives de la littĂ©rature argentine de la dĂ©cennie 1920 : le groupe de Boedo et celui de Florida, câest-Ă -dire et respectivement, les dĂ©nommĂ©s martinfierristas, hĂ©rauts du criollismo et impliquĂ©s dans la lutte sociale, dâune part, et les culturalistes et exquisitos, dâautre part, mĂȘme si les deux groupes adoptaient pareillement une posture dâavant-garde. JosĂ© Gabriel pour lors dirigeait le groupe de thĂ©Ăątre RenovaciĂłn, et publia dans la dĂ©cennie 1920 une dizaine dâouvrages sur lâart et sur la culture en gĂ©nĂ©ral, mais (comme dâautres Ă©crivains argentins) sâintĂ©ressait aussi au football. En 1930, il apparaissait comme un intellectuel extraordinairement actif et polĂ©mique, flĂ©trissant lâhypocrisie culturelle et sociale, les valeurs consacrĂ©es et la corruption acadĂ©mique et journalistique[1] ; de fait, il Ă©touffa bientĂŽt dans ce milieu de fausses valeurs, de littĂ©rateurs prĂ©somptueux, et dâinfatuation acadĂ©mique[2].
JosĂ© Gabriel affichera explicitement ses positions politiques en , par le biais dâun article quâil publia dans la revue portĂšgne Contra. La revista de los franco-tiradores (littĂ©r. Contre. La revue des francs-tireurs) et quâil intitula El titĂĄn encadenado (littĂ©r. le Titan enchaĂźnĂ©), article-hommage oĂč il glorifiait Trotski comme un nouveau PromĂ©thĂ©e, qui avait fait don Ă lâhumanitĂ© du feu de la RĂ©volution, et comme un homme « dâune doctrine si vaste et si profonde et dâune action cyclopĂ©enne, action et doctrine plus gigantesques que celles de LĂ©nine, encore que LĂ©nine le dĂ©passe en qualitĂ©s affectives et en sens de la vulgaritĂ© ». Si JosĂ© Gabriel Ă©tait bien conscient de lâaudace de son texte, il estimait cette audace justifiĂ©e, voire impĂ©rieuse, compte tenu de lâinjustice que lâon avait subir Ă Trotski. Il reconnaissait toutefois que câĂ©tait « le mauvais moment pour parler dâun homme âtabouâ, excommuniĂ© par les rĂ©actionnaires et par les rĂ©volutionnaires, jetĂ© hors de sa maison et hors de la maison dâautrui, accusĂ© dâĂȘtre un Ă©nergumĂšne par les uns, un renĂ©gat par les autres, tenu en quarantaine par tous », le mauvais moment aussi pour « remĂ©morer un homme qui, dâaprĂšs la fiction juridique du monde bourgeois et du monde prolĂ©taire prĂ©maturĂ©ment embourgeoisĂ©, nâexiste pas »[3].
La DĂ©cennie infĂąme
Dans les annĂ©es 1930, sâil se vouait surtout au journalisme, JosĂ© Gabriel donnait parallĂšlement des cours dans un Ă©tablissement dâenseignement secondaire. Au lendemain du coup dâĂtat militaire de 1930, qui renversa le prĂ©sident constitutionnel Yrigoyen et inaugura la pĂ©riode dite DĂ©cennie infĂąme (1931-1943), il fut congĂ©diĂ© et, persĂ©cutĂ© pour ses positions critiques, dut bientĂŽt sâexiler Ă Montevideo, oĂč il publia Bandera celeste, livre dans lequel il entreprit dâamalgamer le socialisme Ă lâidĂ©e nationale et oĂč il prĂŽnait une union latino-amĂ©ricaine[2]. Il soutenait en particulier que dans les pays qui continuent dâĂȘtre assujettis au colonialisme, il avait lieu de mettre de cĂŽtĂ© les rivalitĂ©s nationales et de constituer une fĂ©dĂ©ration hispanoamĂ©ricaine en Ă©troite association avec le socialisme, les syndicats ouvriers et la rĂ©volution Ă©mancipatrice[1]. Il fustigeait Staline, « imposteur rĂ©actionnaire », qui avait dĂ©voyĂ© la RĂ©volution russe[2].
La dĂ©mocratie restaurĂ©e en 1932, il revint en Argentine, Ă©lisant Ă nouveau domicile Ă La Plata. Il dirigea, le temps de dix numĂ©ros, la revue MartĂn Fierro, fondĂ©e en 1934 Ă lâoccasion du centenaire de la naissance du poĂšte JosĂ© HernĂĄndez, auteur de lâĂ©popĂ©e gauchesca MartĂn Fierro, de qui la revue revendique lâattachement national argentin[1]. Il collabora Ă©galement Ă la revue Señales, dont lâorientation idĂ©ologique Ă©tait dĂ©finie par Jauretche et Scalabrini Ortiz, oĂč il sâen prenait avec virulence Ă lâimpĂ©rialisme britannique de mĂȘme quâau nationalisme de droite, aux socialistes et aux « bureaucrates et traĂźtres stalinistes »[2].
La guerre dâEspagne
Au dĂ©clenchement de la rĂ©bellion militaire en Espagne, JosĂ© Gabriel dĂ©cida, de sa propre initiative, mais au titre de correspondant du journal CrĂtica, de sâembarquer sur la vapeur SatrĂșstegui pour traverser lâAtlantique et mettre pied Ă Barcelone[1]. Il milita un temps au sein du POUM (acronyme de Partido Obrero Unificado Marxista) dirigĂ© par AndrĂ©s Nin, sur des positions proches du trotskisme. Ă son retour en Argentine, il fit paraĂźtre Burgueses y proletarios en España (littĂ©r. Bourgeois et ProlĂ©taires en Espagne), Vida y muerte en AragĂłn. Lucha y construcciĂłn revolucionaria en España (littĂ©r. Vie et Mort en Aragon. Lutte et construction rĂ©volutionnaire en Espagne), et España en la cruz. Viaje de un cronista a la guerra (littĂ©r. lâEspagne sur la croix. Voyage dâun chroniqueur vers la guerre). Il est aussi lâauteur dâune Ă©lĂ©gie en hommage Ă Federico GarcĂa Lorca, Ă la suite de lâassassinat de celui-ci en 1936[2].
PubliĂ© en 1937, España en la cruz est le compte-rendu de son pĂ©riple en Espagne. Sensiblement plus littĂ©raire et plus ample que Vida y muerte en AragĂłn, qui paraĂźtra en 1938, le livre Ă©voque dans sa premiĂšre partie lâatmosphĂšre qui rĂ©gnait lors de la traversĂ©e â quâil effectua en deuxiĂšme classe â, la misĂšre et lâinsalubritĂ© de la troisiĂšme, les personnages romanesques et, de façon gĂ©nĂ©rale, assez sinistres avec lesquels il entra en contact, et lâomniprĂ©sence de la politique dans les conversations et prĂ©occupations des passagers, le capitaine du navire protĂ©geant les fascistes et interdisant toute manifestation contraire. Lâensemble est entrelardĂ© de rĂ©flexions politiques, sur le Front populaire et sur la politique europĂ©enne, rĂ©flexions dont il est lĂ©gitime de dĂ©duire que ses idĂ©es sont celles du POUM dâAndrĂ©s Nin. Le navire fit escale dans plusieurs villes brĂ©siliennes, puis successivement Ă Dakar, Ă Casablanca, Ă Gibraltar, Ă Oran et enfin Ă GĂȘnes, oĂč il reste bloquĂ©, le mouillage Ă Barcelone lui Ă©tant en effet interdit, car le port de cette ville Ă©tait, selon la compagnie de navigation, minĂ©. JosĂ© Gabriel met Ă profit ces escales forcĂ©es pour livrer ses impressions sur chacune de ces villes abordĂ©es. Cependant, faire route sur Barcelone demeurait ardu au dĂ©part de GĂȘnes, et finalement, se joignant Ă un certain Santiago, anarchiste aragonais, qui avait travaillĂ© dans les plantations de cafĂ© au BrĂ©sil et sâefforçait de se rĂ©incorporer dans la CNT pour prendre part Ă la lutte, il rĂ©ussit Ă rallier Portbou par le train, puis de lĂ Barcelone, un mois aprĂšs la soulĂšvement. JosĂ© Gabriel donne une vive description de la Barcelone rĂ©volutionnaire, pĂ©trie de contradictions, et de plusieurs de ses personnalitĂ©s et types humains[1].
Le livre La vida y la muerte en AragĂłn, modestement Ă©ditĂ© par la maison dâĂ©dition ImĂĄn de Buenos Aires et Mexico, sâil prĂ©sente lâallure inquiĂšte et prĂ©cipitĂ©e des chroniques de guerre, reflĂšte toutefois aussi la conviction quâavait lâauteur de vivre un moment crucial de lâhistoire. Il dĂ©signe les responsables de la mauvaise tournure prise par la guerre, que sont selon lui, schĂ©matiquement, les bourgeois rĂ©publicains, les socialistes, et, Ă leur tĂȘte, les communistes, qui avaient tous pour objectif de brider la rĂ©volution prolĂ©tarienne. Dans ce but, ils dĂ©truisirent les milices populaires, les collectivisations, muselĂšrent les partis rĂ©volutionnaires, assassinĂšrent Durruti, Nin et Berneri, et envoyĂšrent le peuple mourir en masse dans des batailles absurdes telles que celle de Teruel et, ensuite, celle de lâĂbre. Pour autant, JosĂ© Gabriel se gardait de tout pessimisme et nourrissait lâespoir que, en lâabsence dâune victoire militaire, on en obtiendrait une politique. Il persiffle les comportements de ceux qui dirigeaient la guerre, ainsi que la censure qui rĂ©gnait dans le camp rĂ©publicain, la propagande qui mĂ©tamorphosait les Ă©checs en victoires, lâĂąpre rivalitĂ© entre les diffĂ©rentes organisations rĂ©volutionnaires etc. Sâassociant Ă un confrĂšre français, il sollicita et obtint la mise Ă sa disposition dâune Peugeot neuve avec chauffeur, Ă bord de laquelle il guide le lecteur Ă travers la gĂ©ographie aragonaise (Bujaraloz, Fuentes de Ebro, Sariñena, Barbastro, Graus, Torres del ObispoâŠ), par le biais dâune sĂ©rie de tableaux de la rĂ©alitĂ© qui font figure dâautant dâinstantanĂ©s photographiques. Ses rĂ©flexions politiques et pensĂ©es, qui restent toujours succinctes, en accord avec le genre de la chronique journalistique, se distinguent par lĂ de celles plus rĂ©flĂ©chies et analytiques de España en la cruz. Ainsi, au fil des quarante courts chapitres qui composent ce livre de seulement 120 pages dans son Ă©dition originale (sans compter lâappendice de 52 pages), se succĂšdent regards sur le paysage, donnĂ©es sur les mĆurs, observations sur les coutumes nationales, Ă©vocation des miliciennes et de la vie dans les tranchĂ©es etc. Lâauteur note le naturel avec lequel fut admise lâabolition de lâargent et le « tout pour tous », et aussi la facilitĂ© avec laquelle Ă©tait acceptĂ©e la mort de soi et dâautrui â ce qui motiva le titre de lâouvrage. Ă lâinverse, le dĂ©voiement de la gauche française et de son Front populaire face Ă la lutte des rĂ©publicains espagnols produisit en chacun des protagonistes une profonde indignation[1].
Retour en Argentine et avÚnement du péronisme
AprĂšs la guerre dâEspagne, la trajectoire intellectuelle de JosĂ© Gabriel ne cessera dâĂȘtre toujours rebelle, polĂ©mique et combattive. Son abondante bibliographie et les centaines dâarticles Ă©crits par lui attestent de sa grande capacitĂ© de travail. Comme auparavant, ses prioritĂ©s Ă©taient la langue nationale, la culture populaire argentine et lâantifascisme. Il obtint en 1939 un poste dâenseignant, mais en fut suspendu en 1941[1], pour avoir dĂ©noncĂ© un concours frauduleux.
Publiant sans trĂšve, il fit paraĂźtre El loco de los huesos, Vida de Florentino Ameghino, deux essais, lâun sur Walt Whitman et lâautre sur Gregorio ArĂĄoz de Lamadrid, un recueil de nouvelles intitulĂ© El Pozo, puis dâautres essais encore, dont El nadador y el agua (littĂ©r. le Nageur et lâEau), La modernidad, La literatura et VindicaciĂłn del arte (littĂ©r. Vengeance de lâart)[2].On lui doit par ailleurs divers essais sur la langue populaire du RĂo de la Plata, et dâautres oĂč il met en lumiĂšre les nombreux entrecroisements entre la littĂ©rature rioplatense et la culture hispanique. La dĂ©fense et illustration du parler rioplatense, Ă©loignĂ©e de tout purisme, exprimĂ©e avec acuitĂ© dans une prose toute personnelle et une analyse anti-acadĂ©mique lucide, et son opposition aux censeurs et aux tentatives admonestatoires de rĂ©genter la langue au travers dâinstitutions linguistiques, seront une constante de ses travaux dans ce domaine[4].
OpposĂ© au fascisme, quâil avait eu Ă subir en Espagne, il ne put se rallier au coup dâĂtat de 1943 (le nouveau rĂ©gime prĂ©tendait mĂȘme rĂ©gir le langage et interdit le lunfardo) et milita briĂšvement dans les rangs de la contestation antipĂ©roniste, ce qui lui valut un sĂ©jour en prison, puis un nouvel exil Ă Montevideo[1], dâoĂč il sâen alla ensuite enseigner Ă lâuniversitĂ© San Marcos au PĂ©rou. Cependant, Ă son retour en Argentine, il rĂ©visa son point de vue et, Ă©crivant dans la revue Hechos e Ideas, appuya Ă prĂ©sent le gouvernement de PerĂłn et surtout Evita, dans les colonnes de la revue Argentina de hoy, publication des socialistes passĂ©s au pĂ©ronisme[2], sans toutefois se dĂ©partir jamais de son attitude critique. En particulier, la mort dâEvita et les nouvelles orientations de la politique du prĂ©sident PerĂłn lâamenĂšrent Ă prendre quelques distances, nonobstant quoi les intellectuels antipĂ©ronistes continuĂšrent Ă le considĂ©rer comme leur ennemi[1]. Entretemps parurent de lui trois nouveaux ouvrages : El destino imperial, Historia de la gramĂĄtica et La encrucijada (littĂ©r. la CroisĂ©e des chemins). Devenu ensuite collaborateur du journal El Laborista, câest en cette qualitĂ© que le surprit le bombardement du 16 juin 1955 perpĂ©trĂ© par des militaires antipĂ©ronistes, qui le porta Ă sâassocier Ă la marche vers la place de Mai pour dĂ©fendre le gouvernement, Ă©vĂ©nement quâil relata dans un opuscule intitulĂ© Llenos de coraje y de miedo (littĂ©r. Plein de courage et de peur) et dans le poĂšme AntĂfona[2].
AprÚs-péronisme et derniÚres années
AprĂšs la chute de PerĂłn par suite du coup dâĂtat de septembre 1955, JosĂ© Gabriel, qui, frisant maintenant la soixantaine, avait figurĂ© parmi ceux qui tentĂšrent en vain de sâopposer au renversement de PerĂłn, se retrouva Ă nouveau sans travail et fut violemment attaquĂ© par ses collĂšgues Ă©crivains[1]. Lâhistorien Norberto Galasso note :
« Celui qui avait Ă©tĂ© marginalisĂ© comme anarchiste et trotskiste, comme rebelle et mal embouchĂ©, pour avoir prĂŽnĂ© une synthĂšse entre marxisme et libĂ©ration nationale ou pour sâĂȘtre immiscĂ© dans la question sociale parallĂšlement Ă une analyse du MartĂn Fierro, ajoute Ă prĂ©sent Ă son passif une nouvelle transgression : son pĂ©ronisme militant des derniĂšres annĂ©es. AussitĂŽt, le voilĂ congĂ©diĂ© du ministĂšre, ne gardant que pĂ©niblement son poste au Laborista, relĂ©guĂ© dans une section secondaire et avec un salaire modique qui lui permet Ă peine, Ă lui et Ă sa famille, de survivre[2]. »
Il vĂ©cut alors modestement Ă Villa Obrera, dans la proche banlieue sud-est de Buenos Aires, au no 3602 de la rue Madariaga. Il mourut le , terrassĂ© par un infarctus, alors quâil Ă©tait Ă taper des notes Ă la machine[2].
Postérité
Il sâĂ©coulera 17 ans avant que quelquâun ne songe Ă lui consacrer un Ă©crit (SuĂĄrez Danero, en 1974) ; 58, pour voir rĂ©Ă©ditĂ©s certains de ses textes (Guillermo Korn, en 2015) ; et jusquâĂ 61 ans, avant quâune maison dâĂ©dition, en lâespĂšce aragonaise, nâentreprenne de rĂ©Ă©diter un de ses livres[1].
La rĂ©Ă©dition de 2015, sous la direction de Guillermo Korn, comprend une sĂ©lection dâessais de JosĂ© Gabriel traitant des façons de comprendre la langue populaire, oĂč lâauteur relĂšve les nombreuses passerelles entre la littĂ©rature rioplatense et la culture espagnole[4].
Bibliographie
Ćuvres de JosĂ© Gabriel
- Tupac Amaru, Buenos Aires, (brochure)
- Las salvaciones, Buenos Aires, Arca, (brochure)
- La educaciĂłn filosĂłfica, Buenos Aires, Centro de Estudiantes de Derecho y Ciencias Sociales, (brochure)
- Evaristo Carriego, Buenos Aires, Agencia Sudamericana de Libros,
- La fonda. Un lance de honor. La joya mås cara, Buenos Aires, Tor, (récits) Rééd. de La fonda (novela porteña), Imån, Buenos Aires 1939.
- VindicaciĂłn de las artes, Buenos Aires, Mercatalli, (critique dâart)
- Martorell, La Plata, FĂ©lix Santi, (monographie artistique)
- Farsa Eugenesia, Buenos Aires, Calpe-J. Urgoiti, (drame classique)
- Frente a MoisĂ©s, Buenos Aires, Ăngel Estrada, (monographie artistique)
- El Cisne de Mantua, La Plata, FĂ©lix Santi,
- Reglas para un manual del polĂtico, La Plata, FĂ©lix Santi,
- Sentido de lo moderno, La Plata, FĂ©lix Santi, (brochure)
- Bandera celeste. La lucha social argentina, Buenos Aires, Porter Hermanos,
- La revoluciĂłn española, Buenos Aires, (Ă compte dâauteur), (essai de critique sociale)
- Cantar de Los infantes de Lara, La Plata, (Ă compte dâauteur),
- El pozo negro, Relatos del mundo, Buenos Aires, Claridad,
- España en la cruz. Viaje a la guerra española, Santiago du Chili, Ercilla,
- Las semanas del jardĂn, Santiago du Chili, Ercilla, (lâEspagne et lâAmĂ©rique vues Ă travers un livre inconnu de Cervantes)
- La vida y la muerte en Aragón. Lucha y construcción revolucionaria en España, Buenos Aires, Imån,
- El nadador y el agua, Buenos Aires, CompañĂa Impresora Argentina,
- Ditirambo a GarcĂa Lorca, Buenos Aires, Colombo,
- El loco de los huesos. Vida, obra y drama del Continente Americano y de Florentino Ameghino, Buenos Aires, Ediciones ImĂĄn-Sarmiento,
- Aclaraciones a la cultura, Buenos Aires, Colombo,
- San MartĂn, imagen angĂ©lica, La Plata, Imprenta E. Capdevile,
- Entrada en la modernidad, Buenos Aires, Concordia,
- La Madrid. El valor legendario, Buenos Aires, Emecé,
- Walt Whitman, Montevideo, Ceibo,
- Curso de literatura española, Montevideo, Organización taquigråfica,
- Historia de la gramĂĄtica, Lima, Lumen-San Marcos,
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RĂ©Ă©ditions
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- La vida y la muerte en Aragón (préface de Javier Barreiro), Madrid & Sariñena, El Perro Malo & Salvador Trallero Ediciones,
Ouvrages et articles sur José Gabriel
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- (es) Norberto Galasso, « JosĂ© Gabriel LĂłpez BuisĂĄn, ese hombre desconocido y olvidado. Se cumplieron 117 años del nacimiento del español que viviĂł en la argentina y defendiĂł la causa nacional », Tiempo Argentino,â
- (es) Lucas Gonzålez, Jerónimo Boragina, Gustavo Dorado et Ernesto Sommaro, Voluntarios de argentina en la guerra civil española, Buenos Aires, Ediciones del CCC (Centro Cultural de la Cooperación Floreal Gorini),
- (es) Guillermo Korn, Estudio preliminar pour De leguleyos, hablistas y celadores de la lengua, Buenos Aires, Biblioteca Nacional, , p. 11-51.
- (es) JosĂ© Luis Melero, Los libros de la guerra. BibliografĂa comentada de la Guerra Civil en AragĂłn (1936-1949), Saragosse, Rolde de Estudios Aragoneses, , p. 96-98
- (es) Héctor Marcelo Oliveri, José Gobello. Sus ideas, sus escritos, sus amores, Buenos Aires, Corregidor,
- (es) DarĂo Pulcher, Escritores âmalditosâ: peronismo histĂłrico y campo intelectual en una aproximaciĂłn de Jauretche,
- (es) Leopoldo del Signo, « JosĂ© Gabriel, el Ășltimo gaucho », La Nueva España, no 69,â
- (es) Eduardo SuĂĄrez Danero, « JosĂ© Gabriel, sin pelos en la lengua. Textos de un polemista mordaz, relegado al olvido por la cultura oficial. BiografĂa de un luchador », La OpiniĂłn Cultural,â
- (es) Horacio Tarcus (dir.), Diccionario biogråfico de la izquierda argentina (article Gabriel, José), Buenos Aires, Emecé,
Références
- Préface de Javier Barreiro à la réédition de La Vida y la muerte en Aragón, Madrid & Sariñena, El Perro Malo & Salvador Trallero Ediciones, 2018, p. 1-11.
- (es) Norberto Galasso, « JosĂ© Gabriel LĂłpez BuisĂĄn, ese hombre desconocido y olvidado », Tiempo Argentino, Buenos Aires,â .
- (es) Grupo de investigación, « Sobre José Gabriel, "La vida y la muerte en Aragón" », El impacto de la Guerra Civil Española en la vida intelectual de Hispanoamérica, (consulté le ).
- (es) « El idioma de los argentinos en los ensayos de José Gabriel », sur www.telam.com.ar, Buenos Aires, Télam, (consulté le ).
Liens externes
- (es) Norberto Galasso, « JosĂ© Gabriel LĂłpez BuisĂĄn, ese hombre desconocido y olvidado », Tiempo Argentino, Buenos Aires,â (lire en ligne)
- (es) Préface de Javier Barreiro à la réédition de La Vida y la muerte en Aragón, Madrid & Sariñena, El Perro Malo & Salvador Trallero Ediciones, 2018, p. 1-11, reproduit in extenso sur le site personnel de J. Barreiro.
- (es) « El idioma de los argentinos en los ensayos de José Gabriel », sur www.telam.com.ar, Buenos Aires, Télam, (consulté le )
- (es) Grupo de investigación, « Sobre José Gabriel, "La vida y la muerte en Aragón" », El impacto de la Guerra Civil Española en la vida intelectual de Hispanoamérica, (consulté le )