Callibrachion
Callibrachion gaudryi
Callibrachion est un genre Ă©teint de synapsides Caseidae ayant vĂ©cu dans le centre-est de la France durant le Permien infĂ©rieur (AssĂ©lien). Lâholotype et unique spĂ©cimen connu (MNHN.F.AUT490) est reprĂ©sentĂ© par un squelette postcrĂąnien presque complet associĂ© Ă des fragments de crĂąne dĂ©couvert Ă la fin du XIXe siĂšcle dans le bassin Permien dâAutun dans le dĂ©partement de SaĂŽne-et-Loire en RĂ©gion Bourgogne-Franche-ComtĂ©. Il reprĂ©sente un individu immature mesurant moins de 1,5 m de long. Callibrachion fut longtemps considĂ©rĂ© comme un synonyme du genre Haptodus et classĂ© parmi les pĂ©lycosaures sphĂ©nacodontidĂ©s. En 2015, une nouvelle Ă©tude a rĂ©vĂ©lĂ© que Callibrachion Ă©tait un animal diffĂ©rent dâHaptodus et quâil appartenait aux casĂ©asaures plutĂŽt quâaux sphĂ©nacodontidĂ©s. Ceci a Ă©tĂ© confirmĂ© en 2016 par une analyse cladistique qui a rĂ©cupĂ©rĂ© Callibrachion comme un casĂ©idĂ© basal. Les dents pointues et la cage thoracique non Ă©largie de Callibrachion indique que cet animal Ă©tait probablement faunivore[1] - [2].
Description
Le squelette de Callibrachion est relativement complet mais est mal conservĂ©. Il est prĂ©servĂ© sur une plaque de schiste noir qui expose la face ventrale du squelette. Ce dernier se compose dâun crĂąne fragmentaire, de la cage thoracique, des membres antĂ©rieurs, et du membre postĂ©rieur droit. Le membre postĂ©rieur gauche et la queue sont manquants ainsi que quelques Ă©lĂ©ments des Ă©paules et du bassin. Le canal notochordal exposĂ© et la dĂ©sarticulation du scapulocoracoĂŻde et de lâilion (oĂč la vascularisation osseuse est visible) rĂ©vĂšle un stade ontogĂ©nĂ©tique immature. En revanche les mĂ©tapodes bien ossifiĂ©s indiquent quâil ne sâagit pas dâun juvĂ©nile prĂ©coce. Bien que presque complet, aucun caractĂšre autapomorphique ne peut ĂȘtre identifiĂ© chez Callibrachion en raison de lâĂ©tat de conservation gĂ©nĂ©ralement mĂ©diocre du spĂ©cimen ainsi que de la grande incomplĂ©tude du crĂąne qui concentre habituellement de nombreux caractĂšres distinctifs. Callibrachion est dĂ©fini par une combinaison de caractĂšres tels que des dents coniques fines et droites, des cĂŽtes modĂ©rĂ©ment Ă©paissies, la possible prĂ©sence dâun foramen ectĂ©picondylien fermĂ©, un ilion avec la lame dorsale haute typique des casĂ©idĂ©s, des phalanges robustes mais non Ă©largies, et une formule phalangienne non rĂ©duite[2].
Le crĂąne est reprĂ©sentĂ© par plusieurs fragments dont seul le maxillaire (et possiblement une portion du prĂ©maxillaire) est clairement identifiable par sa rangĂ©e de dents marginales. Le bord ventral est lĂ©gĂšrement convexe, avec une rĂ©gion de dents caniniformes Ă l'extrĂ©mitĂ© antĂ©rieure indiquĂ©e par les bases dentaires larges contrairement aux plus petites conservĂ©es postĂ©rieurement Ă ces derniĂšres. Une deuxiĂšme rĂ©gion de dents Ă©largies est prĂ©sente postĂ©rieurement aux positions caniniformes et rappelle ce qui est observĂ© chez les Ă©othyrididĂ©s et chez le casĂ©idĂ© basal Martensius. Il nâest pas possible de fournir un nombre prĂ©cis de dents ou une estimation de la longueur du maxillaire, car le contour de lâĂ©lĂ©ment est incertain. Les dents conservĂ©es ont une couronne mince et conique avec une surface lisse, dĂ©pourvue de toute courbure significative sauf dans la partie antĂ©rieure de la rangĂ©e de dents conservĂ©es. La mandibule est reprĂ©sentĂ©e par une branche mince et plutĂŽt peu profonde de la mĂąchoire droite. Sa longueur conservĂ©e dâenviron 70 mm pourrait ĂȘtre proche de sa longueur dâorigine, car des dents larges et lĂ©gĂšrement incurvĂ©es se trouvent dans ce qui est trĂšs probablement lâextrĂ©mitĂ© du dentaire[2].
La colonne vertĂ©brale n'est reprĂ©sentĂ©e que par environ douze centra de vertĂšbres dorsales, ainsi que des restes incertains de la sĂ©rie cervicale et des arcs neuraux. La queue nâest pas conservĂ©e. Deux centres cervicaux Ă peine visibles semblent se situer entre le crĂąne et la ceinture scapulaire. Certaines vertĂšbres ont Ă©tĂ© endommagĂ©es par la prĂ©paration, tandis que dâautres sont recouvertes par la ceinture scapulaire. NĂ©anmoins, grĂące Ă lâarticulation du squelette, il est possible de fournir une estimation du nombre prĂ©sacrĂ©. En particulier, la sĂ©rie ininterrompue dâenviron 21 cĂŽtes dorsales indique un nombre prĂ©sacrĂ© minimal de 23 vertĂšbres. Les cĂŽtes sont robustes. Dans la rĂ©gion dorsale postĂ©rieure, les cĂŽtes diminuent en longueur mais pas en largeur[2].
Les membres sont Ă©galement robustes. La scapula se distingue notamment en Ă©tant beaucoup plus courte que lâhumĂ©rus. Les deux mains sont assez bien conservĂ©es et articulĂ©es. Les os de la main sont robustes et bien dĂ©veloppĂ©s. Cependant, les mĂ©tacarpes et les phalanges ne prĂ©sentent pas la morphologie trapue et Ă©largie des casĂ©idĂ©s dĂ©rivĂ©s. Leurs proportions sont plutĂŽt similaires Ă celles observĂ©s chez Eocasea, Martensius, et Casea broilii. Le doigt IV est le plus long de la sĂ©rie. Une de ses phalanges mĂ©dianes est raccourcie, mesurant environ 70 % de la longueur des phalanges voisines. Les phalanges terminales sont fortement incurvĂ©es, avec un fort tubercule flĂ©chisseur et un toit dorsal plat Ă©largi. La main prĂ©sente la condition plĂ©siomorphe des premiers amniotes avec une formule phalangienne de 2-3-4-5-3[N 1]. Les Ă©lĂ©ments conservĂ©s du pied droit sont pour la plupart dĂ©sarticulĂ©s. Il nâest pas possible de prĂ©ciser sa formule phalangienne mais les Ă©lĂ©ments individuels semblent ĂȘtre aussi robustes et fortement dĂ©veloppĂ©s que ceux de la main[2].
RĂ©partition stratigraphique
Lâholotype de Callibrachion fut dĂ©couvert au XIXe siĂšcle sur le site de Margenne lors de lâexploitation du schiste bitumineux alors en cours dans le bassin dâAutun. La richesse palĂ©ontologique de ce bassin permit Ă lâĂ©poque de dĂ©finir lâAutunien comme Ă©tage de rĂ©fĂ©rence pour le Permien infĂ©rieur continental dâEurope[3]. Selon la stratigraphie moderne, le site de Margenne appartient Ă la formation de Millery qui est lâune des formations les plus jeunes du bassin dâAutun[4]. Elle correspond Ă la partie supĂ©rieure de lâAutunien des anciens auteurs. En se basant sur les fossiles de plantes, dâinvertĂ©brĂ©s et dâamphibiens, lâAutunien fut considĂ©rĂ© comme un Ăąge Ă©quivalent Ă lâensemble des Ă©tages marins globaux du GzhĂ©lien supĂ©rieur, de lâAssĂ©lien, du Sakmarien et de lâArtinskien[3] - [5] - [4]. Depuis la fin des annĂ©es 2010, des datations radiomĂ©triques de cendres volcaniques, altĂ©rĂ©es en tonsteins, et intercalĂ©es dans les couches sĂ©dimentaires de plusieurs formations gĂ©ologiques constituant lâAutunien dâAutun ont rĂ©vĂ©lĂ© que lâAutunien correspondait presque exclusivement Ă lâĂ©tage AssĂ©lien de lâĂ©chelle stratigraphique internationale[6] - [7]. LâAutunien infĂ©rieur est reprĂ©sentĂ© par les formations dâIgornay et de Muse. La partie mĂ©diane de la Formation d'Igornay est datĂ©e Ă 299,9 ± 0,38 Ma et reprĂ©sente le GzhĂ©lien supĂ©rieur (CarbonifĂšre terminal), confirmant les premiĂšres estimations de lâĂąge des plus anciens niveaux autuniens. Le lit des schistes bitumineux de Lally dans la partie infĂ©rieure de la formation de Muse est datĂ© Ă 298,91 ± 0,08 Ma, ce qui correspond à ± 100 000 ans prĂšs, Ă la limite CarbonifĂšre-Permien fixĂ©e en milieu marin dans lâOural. La partie supĂ©rieure du lit des schistes bitumineux de Muse est datĂ©e entre 298,05 ± 0,19 et 298,57 ± 0,16 Ma. Ces datations dĂ©montrent que lâAutunien infĂ©rieur correspond au GzhĂ©lien supĂ©rieur et Ă lâAssĂ©lien basal, et englobe donc la fin du CarbonifĂšre supĂ©rieur et la base du Permien infĂ©rieur[6]. Deux autres niveaux de cendres volcaniques prĂ©sents au sommet de la formation de Muse (limite Autunien infĂ©rieur-supĂ©rieur) et dans la partie supĂ©rieure de la formation de Millery ont donnĂ© des Ăąges de 298,39 ± 0,09 Ma[N 2] et 297,7 ± 0,08 Ma, ce dernier indiquant un Ăąge AssĂ©lien infĂ©rieur-moyen. Ces datations indiquent que lâAutunien supĂ©rieur (reprĂ©sentĂ© par les formations de Surmoulin, de Millery, et de Curgy) nâa probablement pas dĂ©passĂ© un Ăąge AssĂ©lien[8] - [7]. Ainsi, ces datations prouvent que les cinq formations gĂ©ologiques du bassin dâAutun qui dĂ©finirent lâAutunien reprĂ©sentent une durĂ©e gĂ©ologique infĂ©rieure Ă 2,5 millions dâannĂ©es et englobe la limite CarbonifĂšre-Permien (GzhĂ©lien supĂ©rieur - AssĂ©lien). Cette durĂ©e est nettement plus courte que les 10 millions dâannĂ©es de dĂ©pĂŽts estimĂ©s prĂ©cĂ©demment[7]. Ainsi, le genre Callibrachion de la formation de Millery, dont lâĂąge fut successivement considĂ©rĂ© comme Sakmarien ou Artinskien, se rĂ©vĂšle ĂȘtre plus vieux avec un Ăąge AssĂ©lien infĂ©rieur ou moyen. Il est ainsi le plus ancien casĂ©idĂ© connu du Permien, seulement dĂ©passĂ© en Ăąge par les taxons du CarbonifĂšre supĂ©rieur Eocasea et Datheosaurus.
Paléoécologie
La formation de Millery atteint 250 m dâĂ©paisseur et est constituĂ©e de schistes bitumineux gris foncĂ© dĂ©posĂ©s dans un environnement lacustre[2] - [6]. Les cendres volcaniques altĂ©rĂ©es en tonsteins conservĂ©es dans ces dĂ©pĂŽts sont liĂ©es Ă un volcanisme aĂ©rien explosif. Lâorigine exacte de ces cendres volcaniques est incertaine mais les volcans actifs les plus proches du bassin dâAutun durant la limite CarbonifĂšre-Permien se trouvaient dans le nord du Massif central (rĂ©gions de Blismes et Montreuillon) et dans la rĂ©gion de la ForĂȘt-Noire et du Massif des Vosges[6]. Les rares amniotes trouvĂ©s dans ces couches lacustres, comme Callibrachion, le petit sphĂ©nacodontidĂ© Haptodus et le taxon dâaffinitĂ© incertaine âBelebeyâ augustodinensis[N 3] - [9] - [10] (venant tous les deux dâun autre site de la formation) sont allochtones. Le temnospondyle Onchiodon, un parent de plus petite taille du genre Eryops dâAmĂ©rique du Nord, est Ă©galement prĂ©sent[11] - [12] - [13].
Paléobiologie
Les dents coniques, minces, et peu recourbĂ©es du Callibrachion diffĂšrent nettement des dents spatulĂ©es ou en forme de feuille et pourvues de cuspides des casĂ©idĂ©s herbivores plus tardif. Elles ressemblent davantage Ă celles des EothyrididĂ©s et du casĂ©idĂ© basal Martensius. Les premiers Ă©taient de petits prĂ©dateurs, le second Ă©tait vraisemblablement insectivore au stade juvĂ©nile et omnivore Ă lâĂąge adulte[14]. Callibrachion ne possĂ©dait pas la cage thoracique Ă©largie des casĂ©idĂ©s herbivores qui abritait un intestin trĂšs dĂ©veloppĂ© nĂ©cessaire Ă la digestion de vĂ©gĂ©taux riches en fibre. Lâabsence de cette caractĂ©ristique chez Callibrachion couplĂ© Ă sa denture particuliĂšre indiquent que cet animal avait probablement un rĂ©gime alimentaire faunivore et devait se nourrir dâinsectes et de petits vertĂ©brĂ©s[2].
Classification
Depuis sa description en 1893 jusquâĂ la fin des annĂ©es 1970, la plupart des palĂ©ontologues ayant Ă©tudiĂ© Callibrachion lâont estimĂ© proche dâanimaux classĂ©s aujourdâhui parmi les Sphenacodontidae. Certains auteurs pensaient Ă©galement quâil ne reprĂ©sentait pas un genre Ă part entiĂšre et quâil pouvait ĂȘtre attribuĂ© au genre Haptodus. Dans les annĂ©es 1990, Michel Laurent en est arrivĂ© Ă douter de la nature synapside de Callibrachion (alors classĂ© comme Haptodus gaudryi) et le considĂ©rait comme un nomen dubium[15]. Ce nâest quâen 2015 que lâanimal fut rĂ©Ă©tudiĂ© par Spindler et des collĂšgues et identifiĂ© comme un casĂ©asaure sur la base de ses proportions globales ainsi que de caractĂ©ristiques dentaires et ostĂ©ologiques qui lâexcluent de tout autre clade de synapside[2]. En 2016, une Ă©tude phylogĂ©nĂ©tique des casĂ©asaures rĂ©cupĂšre Callibrachion comme un casĂ©idĂ© basal proche dâEocasea et Datheosaurus[16].
Ci-dessous, lâanalyse phylogĂ©nĂ©tique publiĂ©e par Neil Brocklehurst et des collĂšgues en 2016[16].
Liens externes
- Ressources relatives au vivant :
Notes et références
Notes
- La formule phalangienne correspond au nombre de phalanges constituant chaque doigts des mains et des pieds des tĂ©trapodes. Elle sâĂ©numĂšre en partant du doigt I (correspondant chez lâhomme au pouce et au gros orteil) jusquâau doigt V (lâĂ©quivalent de lâauriculaire et du petit orteil).
- LâincohĂ©rence entre cet Ăąge de 298,39 ± 0,09 Ma du sommet de la formation de Muse avec lâĂąge plus jeune de 298,05 ± 0.19 Ma provenant dâun niveau pourtant plus ancien de la mĂȘme formation pourrait sâexpliquer par un Ăąge rajeuni du tonstein datĂ© Ă 298,05 Ma. Ce rajeunissement serait dĂ» Ă la plus petite taille des grains de zircons datĂ©s et Ă une possible perte en plomb (rĂ©f. Mercuzot 2020, p. 249-250).
- Décrit comme un bolosauridé du genre Belebey par Jocelyn Falconnet (2012), ce taxon est considéré par Spindler et des collÚgues (2019) comme un nomen dubium, représentant possiblement un Edaphosauridae ou un Captorhinidae
Références
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