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Antitziganisme

L’antitziganisme ou la romophobie[1]. renvoie Ă  l’hostilitĂ©, aux prĂ©jugĂ©s et au racisme direct envers les Roms (aussi connus comme Gitans ou Tsiganes).

Dans les diffĂ©rents pays oĂč se sont Ă©tablies des communautĂ©s dites tsiganes, les Roms ont Ă©tĂ© sujets Ă  diverses discriminations Ă  travers l’histoire et le sont encore au XXIe siĂšcle.

Étymologie

La racine zigan est la base du mot donné au peuple Rom dans beaucoup de langues européennes. Il faut néanmoins noter que dans plusieurs régions zigan et ses dérivés sont considérés comme péjoratifs et offensants. De nombreux militants et intellectuels préfÚrent donc utiliser le terme de « Romphobie »

Histoire de l’antitziganisme

XIIe et XVIe siĂšcles

Au dĂ©but du XIIe siĂšcle, dans les registres byzantins, les AtsĂ­nganoi sont mentionnĂ©s comme des « sorciers
 inspirĂ©s par le diable et qui prĂ©tendent prĂ©dire l’inconnu »[2]. Vers le XVIe siĂšcle beaucoup de Roms en Europe centrale et orientale travaillaient comme musiciens, forgerons ou soldats[3]. L’expansion ottomane au travers de l’actuel territoire de la Bulgarie moderne les relĂ©gua au bas de l’échelle sociale, puisque les ottomans les percevaient comme n’ayant pas d’« affiliation professionnelle permanente apparente »[4].

Dans le Royaume de Hongrie (aujourd’hui l’ouest de la Slovaquie, de la Hongrie et de la Croatie), des politiques fortement hostiles aux Roms virent le jour Ă  mesure que ces derniers Ă©taient vus comme des espions turcs, ou comme la cinquiĂšme colonne. Dans cette atmosphĂšre, ils Ă©taient expulsĂ©s de nombreux endroits et adoptĂšrent progressivement un mode de vie nomade[5] - [6].

La premiĂšre lĂ©gislation Ă  l’encontre des Roms apparut en Marche de Moravie en 1538, et trois ans plus tard, Ferdinand Ier ordonna l’expulsion des Roms Ă  la suite d'une sĂ©rie d’incendies Ă  Prague. Sept ans plus tard, la diĂšte d’Empire Ă  Augsbourg dĂ©clara que « quiconque tue un tzigane, ne sera pas coupable de meurtre »[6]. En 1556, le gouvernement intervint afin d'« interdire la noyade des femmes et enfants tziganes »[7].

En Angleterre, l’Egyptians Act de 1530 interdit aux Roms l’entrĂ©e dans le pays et demande Ă  ceux y rĂ©sidant de quitter le territoire dans les 16 jours. Le non-respect de cette dĂ©cision entraĂźnant des confiscations de propriĂ©tĂ©, des peines d’emprisonnement ou de dĂ©portation. L’Egyptians Act 1554 amenda la loi prĂ©cĂ©dente et posa que les Roms devaient abandonner leur « vilaines, oisives et impies vie et compagnie » et adopter un mode de vie sĂ©dentaire. Pour ceux qui Ă©choueraient Ă  adopter un mode de vie sĂ©dentaire le Conseil privĂ© interprĂ©ta l'acte en permettant l’exĂ©cution des Roms ne respectant pas les lois « comme un avertissement aux autres »[8].

XVIIIe siĂšcle

En 1710, Joseph Ier Ă©mit un Ă©dit contre les Roms, ordonnant que « tous les hommes adultes devaient ĂȘtre pendus sans procĂšs, tandis que les femmes et les jeunes garçons devaient ĂȘtre fouettĂ©s et bannis Ă  jamais ». De plus, les Roms devaient avoir leur oreille droite coupĂ©e dans le Royaume de BohĂȘme, et l'oreille gauche dans la Marche de Moravie. Dans les autres rĂ©gions d’Autriche ils Ă©taient marquĂ©s au fer, dans le dos, d'un dessin reprĂ©sentant une potence. Ces mutilations permettaient aux autoritĂ©s de les identifier comme Roms en cas d’une seconde arrestation. L’édit encourageait les responsables locaux Ă  traquer les Roms, imposant une amende de 100 Rixdales Ă  ceux qui ne le feraient pas. Quiconque venait en aide Ă  des Roms Ă©tait puni d’une demie annĂ©e de travail forcĂ©. En 1721 Charles VI amenda le dĂ©cret pour y inclure l’exĂ©cution des femmes adultes Roms, alors que les enfants devaient ĂȘtre « mis dans des hĂŽpitaux pour les Ă©duquer »[9].

En 1774, Marie-ThĂ©rĂšse d’Autriche Ă©mit un Ă©dit interdisant les mariages entre Roms. Lorsqu'une femme Rom Ă©pousait un non-Rom, elle devait produire les preuves de « ses talents mĂ©nagers et de sa familiaritĂ© avec la doctrine catholique », alors qu’un homme Rom devait quant Ă  lui prouver « ses capacitĂ©s Ă  aider sa femme et ses enfants » ; enfin, les enfants de plus de cinq ans devaient ĂȘtre enlevĂ©s Ă  leur famille et Ă©duquĂ©s par des familles non-Roms »[10].

Un panel fut Ă©tabli en 2007 par le gouvernement roumain afin d’étudier l’esclavage des Roms aux XVIIIe et XIXe siĂšcles pour les princes, propriĂ©taires terriens et dans les monastĂšres. L’esclavage des Roms en Roumanie fut aboli aux alentours de 1856[11].

XIXe siĂšcle

Le chapardage Ă©tait un motif rĂ©current pour la persĂ©cution des Roms. En 1899, le Nachrichtendienst in Bezug auf die Zigeuner (Service de renseignements concernant les Tziganes) fut crĂ©Ă© Ă  Munich sous la direction d'Alfred Dillmann, collectant les donnĂ©es concernant l’ensemble des Roms sur le territoire allemand. Ce service de renseignement ne cessa ses activitĂ©s qu’en 1970. Les premiers rĂ©sultats furent publiĂ©s en 1905 le Zigeuner-Buch[12] (livre des Tziganes) de Dillmann, et furent utilisĂ©s dans les annĂ©es suivantes pour justifier le Porajmos. Ce livre dĂ©crit les Roms comme une « peste », une « menace », mais ne prĂ©sente pratiquement comme « crimes tziganes » que des actes d'intrusion et de vol de nourriture[12].

Porajmos

Déportation de Sinté depuis Asperg par l'Allemagne nazie, 1940

La persĂ©cution des Roms atteint son point culminant pendant la Seconde Guerre mondiale, lors du Porajmos (littĂ©ralement dĂ©vorer en romani), le gĂ©nocide des populations tziganes par les nazis, pendant rom de la Shoah. Parce que les communautĂ©s roms d’Europe orientale Ă©taient moins organisĂ©es que les communautĂ©s juives, il est plus difficile d’accĂ©der au nombre rĂ©el des victimes, mĂȘme si l'U.S. Holocaust Memorial Research Institute de Washington estime que ce dernier est compris entre 500 000 et 1,5 million. L’ancien professeur d’Ethnic Studies Ward Churchill avança l’idĂ©e que les populations Roms ont proportionnellement souffert davantage que les juifs d’Europe et que leur sort a largement Ă©tĂ© mis de cĂŽtĂ© par les universitaires et les mĂ©dias[13].

L’extermination des Roms par les autoritĂ©s de l’Allemagne nazie dans le Protectorat de BohĂȘme-Moravie a Ă©tĂ© d’une telle ampleur que la langue romani de BohĂȘme devint une langue morte. La politique des nazis varia d’un pays conquis Ă  l'autre : ils tuĂšrent quasiment tous les Roms des pays baltes, alors qu’ils ne s’attaquĂšrent pas Ă  ceux du Danemark ou de GrĂšce. Le processus de dĂ©portation et d'extermination fut facilitĂ© par les dispositions prises avant la guerre par les diffĂ©rents Ă©tats europĂ©ens visant Ă  ficher mĂ©thodiquement les communautĂ©s roms, aidant de ce fait les arrestations de ces derniers par les autoritĂ©s allemandes[14].

Les Roms furent également persécutés par les Oustachis en Croatie, qui étaient alliés aux Allemands. Il ne restait aprÚs la guerre presque aucun Rom en Croatie.

États-Unis

L'histoire des Roms aux Etats-Unis est liée à celle de l'esclavage : en 1498, les premiers Roms débarquent sur le sol américain, lors du troisiÚme voyage de Christophe Colomb aux Indes, pour servir d'esclaves[15]. Cromwell déporta des Roms britanniques pour servir d'esclaves dans les plantations du Sud. En Jamaïque, à Cuba, et en Louisiane, certains esclaves roms étaient possédés par des Noirs affranchis, menant à l'apparition de communautés afro-roms, issues de l'union de personnes noires libres et d'esclaves roms, qui existent encore aujourd'hui[16]. Entre 1762 et 1800, l'Espagne réduit des Roms en esclavage et les déporte dans leurs colonies en Louisiane[17].

De 1650 Ă  1700, l'Angleterre dĂ©porte de nombreuses personnes, parmi lesquels un grand nombre de Roms, en Virginie, en Pennsylvanie, en JamaĂŻque et Ă  la Barbade, pour travailler dans les plantations, dans un Ă©tat de semi-esclavage[18]. Aux XVI et XVIIe siĂšcle, les femmes roms britanniques, en particulier, Ă©taient dĂ©portĂ©es dans les colonies amĂ©ricaines et poussaient Ă  se reproduire avec des esclaves noirs, pour fournir de la main-d’Ɠuvre esclave[19].

En 1866, le président Andrew Johnson, successeur d'Abraham Lincoln, s'oppose par droit de véto au Civil Rights Act, qui proposait l'extension de la citoyenneté aux Américains noirs, chinois et "tsiganes" (Gipsies), craignant qu'une telle loi ne soit biaisée en faveur des "personnes de couleur" et contre "les personnes blanches"[20]. A partir de 1885, les immigrants roms se virent interdit d'entrer aux Etats-Unis et furent contraints à retourner en Europe[21].

Antitziganisme aujourd’hui

Femme Rom manifestant à Bucarest contre le président roumain Traian Băsescu, celui-ci ayant tenu, en mai 2007, des propos antitziganes à l'encontre d'un journaliste qui le menaçait[22].

Selon le rapport 2011 d’Amnesty International, « des discriminations systĂ©matiques sont appliquĂ©es aux 10 millions de Roms Ă  travers l’Europe. L’organisation a recensĂ© les Ă©checs des gouvernements du vieux continent quant au respect de leurs obligations »[23].

L’antitziganisme s’est poursuivi dans les annĂ©es 2000 notamment en Slovaquie[24], Hongrie[25], SlovĂ©nie[26], Roumanie[27] et au Kosovo[28]. Les Roms vivent souvent dans des ghettos populaires, sont sujets Ă  des discriminations Ă  l’école et au travail, et sont Ă©galement souvent sujets Ă  des violences policiĂšres. En Bulgarie le professeur Ognian Saparev a Ă©crit des articles expliquant que les « Tziganes » devraient ĂȘtre confinĂ©s dans des ghettos car ils ne s’intĂšgrent pas, sont culturellement enclins au vol, ne dĂ©sirent pas travailler, et utilisent leur statut de minoritĂ© pour « pratiquer du chantage » envers la majoritĂ©[29]. Les responsables de l’Union europĂ©enne ont boycottĂ© la RĂ©publique tchĂšque et la Slovaquie en 2007 du fait de la sĂ©grĂ©gation appliquĂ©e aux enfants Roms dans les Ă©coles[30].

En 2006, de nombreux Roms qui vivaient auparavant au Kosovo, vivaient dans des communautĂ©s de rĂ©fugiĂ©s au MontĂ©nĂ©gro et en Serbie. Ceux qui sont restĂ©s, craignent des attaques des Albanais, qui les voient comme « des collaborateurs serbes ». En , trois femmes Roms slovaques reçurent une compensation financiĂšre aprĂšs un procĂšs contre l’hĂŽpital qui les avait stĂ©rilisĂ©es sans leur consentement. Alors que les stĂ©rilisations ont eu lieu entre 1999 et 2002, et que les trois femmes avaient Ă  plusieurs reprises fait appel aux procureurs, elles Ă©taient restĂ©es jusque-lĂ  ignorĂ©es[31].

Le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe Thomas Hammarberg a Ă©tĂ© un critique virulent de l’antitziganisme, tant lors des rapports que des Periodic Viewpoints. En , Hammaberg notait que « aujourd’hui la rhĂ©torique contre les Roms est trĂšs similaire Ă  celle utilisĂ©e par les nazis et les fascistes avant les exterminations de masse des annĂ©es 1930 et 40. Encore une fois, il est dit que les Roms sont une menace Ă  la sĂ©curitĂ© et Ă  la santĂ© publique. Aucune distinction n’est faite entre quelques criminels et l’écrasante majoritĂ© de la population Rom. C’est honteux et dangereux »[32].

Selon la derniĂšre enquĂȘte de Human Rights First en matiĂšre de crime de haine, les Roms souffrent quotidiennement d’attaques dans la rue et d’autres lieux publics, entre leur habitation, leur lieu de travail et les marchĂ©s. Dans un nombre sĂ©rieux de cas de violence contre des Roms, les agresseurs se sont rendus dans des quartiers majoritairement habitĂ©s par des Roms. Ces schĂ©mas de violence gĂ©nĂ©ralisĂ©e sont parfois tant censĂ©s causer un prĂ©judice immĂ©diat aux Roms sans distinction d’ñge, que causer l’éradication physique de la prĂ©sence des Roms dans les villes et villages[33].

Union européenne

Le fait de placer les Ă©lĂšves Roms dans des Ă©coles ou classes sĂ©parĂ©es reste important et rĂ©pandu dans les pays d’Europe centrale et orientale[34]. En Hongrie, Roumanie, Bulgarie et en Slovaquie, beaucoup d’enfants Roms sont placĂ©s dans des Ă©coles, ou des classes, qui leur sont rĂ©servĂ©s, mais oĂč le niveau d’éducation est Ă©galement infĂ©rieur Ă  celui des autres Ă©coles[35]. En Hongrie, Bulgarie et Slovaquie, beaucoup d’enfants Roms sont envoyĂ©s dans des Ă©coles pour enfants avec problĂšmes d’apprentissage, que ces Ă©coles leur soient appropriĂ©es ou non. En Bulgarie, ils sont envoyĂ©s dans des « Ă©coles pour dĂ©linquants », oĂč de nombreux droits de l’homme ne sont pas respectĂ©s[35].

Une Ă©tude des Nations unies[36] montrait que les Roms d’Europe centrale et orientale, comme ceux de Bulgarie, sont arrĂȘtĂ©s pour vol proportionnellement davantage que les autres groupes[37]. Amnesty International et des organisations Roms telles que L’Union Rom ont condamnĂ© le racisme et les persĂ©cutions courantes de la police et des gouvernements[38]. En , un article de Business Week trouvait que les rĂ©gions oĂč vivent des populations Roms Ă©taient des « occasions manquĂ©es en matiĂšre d’économie »[39]. Des centaines de personnes du village d’Ostravice dans les montagnes Beskides ont signĂ© une pĂ©tition contre le projet de dĂ©placement de familles Roms d’Ostrava dans leur village, craignant une invasion Rom et que leurs Ă©coles ne puissent pas faire face Ă  l’afflux d’enfants Roms[40].

En 2009, le comitĂ© antiracisme des Nations unies soutenait que « les Roms souffrent d’un racisme rĂ©pandu Ă  travers toute l’Union EuropĂ©enne » que « les crimes commis en raison de la race sont une expĂ©rience quotidienne » pour les Roms, selon l’Agence de l’Union EuropĂ©enne pour les droits fondamentaux »[41].

Allemagne

AprĂšs 2005 l’Allemagne dĂ©porta vers le Kosovo 50 000 personnes, pour la plupart des Roms. C'Ă©taient des demandeurs d’asile ayant fui leur pays durant la guerre du Kosovo. Les personnes ont Ă©tĂ© dĂ©portĂ©es aprĂšs avoir vĂ©cu plus de dix ans en Allemagne. Les dĂ©portations ont Ă©tĂ© hautement controversĂ©es : beaucoup des enfants dĂ©portĂ©s recevaient une Ă©ducation en Allemagne, parlaient allemand comme leur langue maternelle, et se considĂ©raient comme allemands[42].

Bulgarie

Manifestation du contre la « violence tzigane » aprÚs le massacre d'un jeune homme bulgare

En dépit du faible taux de fécondité dans le pays, le ministÚre de la Santé bulgare envisageait une loi ayant pour but de diminuer le taux de fécondité de certains groupes minoritaires, et notamment celui des Roms, en raison du fort taux de mortalité parmi les familles Roms, qui est typiquement élevé. Ce projet fut abandonné un peu plus tard notamment en raison du conflit engendré entre la législation européenne et la constitution bulgare[43].

En 2011, des manifestations anti-Roms éclatent peu avant les élections, alors que les Roms n'ont pas de perspective d'emploi, sont marqués par une criminalité importante et servent de bouc émissaire face aux inégalités sociales et à l'inefficacité de la justice[44].

En 2017 le vice-premier ministre Valeri Simeonov est reconnu coupable de discours discriminatoire envers les Roms. Selon un sondage réalisé par une des Open Society Foundations, 92 % des Bulgares ont déjà été témoins de discours de haine visant les Roms, les deux tiers disant en entendre souvent ou trÚs souvent[45].

Des émeutes dans lesquelles des Bulgares viennent détruire les habitations des Roms sont en augmentation en 2019 et ont tendance à se multiplier à l'approche des élections, notamment lorsque le score des parti de droite ou conservateurs est faible[46].

Danemark

Au Danemark, il y a eu de nombreuses controverses lorsque la ville d’Elseneur dĂ©cida de placer tous les Ă©lĂšves Roms dans des classes spĂ©ciales au sein des Ă©coles publiques. Les classes ont Ă©tĂ© plus tard abandonnĂ©es, notamment aprĂšs qu’il a eu Ă©tĂ© dĂ©terminĂ© qu’elles Ă©taient discriminantes, et les Ă©lĂšves Roms ont Ă©tĂ© remis dans les classes normales[47].

En 2017, le Danemark interdit la mendicité. Cette mesure vise les Roms qui arrivent nombreux d'Europe de l'Est[48].

France

L'histoire des Roms en France est initialement marquée par une période de tranquillité, qui se termine à l'arrivée de Louis XIV sur le trÎne de France, qui fait passer une série de mesures répressives contre les Roms, auxquelles contribuent son ministre Colbert. Les déclarations prétendent que ceux-ci "ont commis plusieurs meurtres, des vols et des pillages, et que ces gens-là ne savent rien faire d'autre que de piller les autres nations."[49]

Entre 1660 et 1682, les opĂ©rations de police Ă  l'Ă©gard des Roms sont renforcĂ©es dans le royaume, avec la promulgation de la "DĂ©claration du roy contre les bohĂšmes", qui ordonne que tous les Roms soient arrĂȘtĂ©s et dĂ©portĂ©s aux galĂšres, oĂč ils doivent rester jusqu'Ă  leur mort, que toutes les femmes roms doivent ĂȘtre rasĂ©es et enfermĂ©es dans les hĂŽpitaux, et que les enfants doivent ĂȘtre pris et Ă©levĂ©s en orphelins. Les accusations principales sont le vagabondage, la rĂ©union dans un lieu, la mendicitĂ©, la bonne aventure, le travail avec des armes, mais aussi la magie, la sorcellerie, et le vol[49].

Le , les « nomades, bohĂ©miens et vagabonds » circulant en France sont dĂ©nombrĂ©s. Une commission extraparlementaire considĂšre peu aprĂšs que les « nomades Ă  caractĂšre ethnique » (les Tsiganes) constituent l'essentiel de « l'armĂ©e du vagabondage dangereux », et suggĂšre « d'obliger les nomades Ă  dĂ©tenir une piĂšce d'identitĂ©, passeport, carnet ou livret, (...) qui pourrait ĂȘtre uniforme et exigĂ©e sous peine de prĂ©somption de vagabondage  »[50].

Bien avant la gĂ©nĂ©ralisation de la carte d’identitĂ© pour les Français, la loi du impose un carnet anthropomĂ©trique destinĂ© Ă  identifier les nomades et Ă  surveiller leurs dĂ©placements[50].

« Art. 3 : Sont rĂ©putĂ©s nomades pour l'application de la prĂ©sente loi, quelle que soit leur nationalitĂ©, tous individus circulant en France sans domicile ni rĂ©sidence fixe et ne rentrant dans aucune des catĂ©gories ci-dessus spĂ©cifiĂ©es, mĂȘme s'ils ont des ressources ou prĂ©tendent exercer une profession. Ces nomades devront ĂȘtre munis d'un carnet anthropomĂ©trique d'identitĂ©. »

Le carnet est remplacĂ© en 1969 par un livret de circulation, lui mĂȘme supprimĂ© par la loi du . La loi de 1969 instituant le statut discriminatoire des « gens du voyage » est abrogĂ©e par la loi du 22 dĂ©cembre 2016 relative Ă  l’égalitĂ© et Ă  la citoyennetĂ©[51].

La France a Ă©tĂ© la cible de critiques notamment pour son traitement des Roms. À l’étĂ© 2010, les autoritĂ©s françaises ont dĂ©moli au moins 51 camps roms illĂ©gaux et ont commencĂ© Ă  rapatrier leurs rĂ©sidents vers leur pays d’origine[52]. Le gouvernement français a Ă©tĂ© accusĂ© de mener ces actions dans un seul but politique[53].

En 2019, la scolarisation des enfants est souvent refusée et dans certaines communes le taux de scolarisation de dépasse pas les 50 %. L'accÚs au logement ou aux soins hospitaliers leur est également difficile. Des stéréotypes leur sont souvent associés, comme le vol d'enfants, et ils peuvent servir de bouc émissaire. Dans les banlieues pauvres, avoir une population encore plus pauvre à proximité est mal accepté[54].

En , un rapport sur le droit des personnes Roms de la DĂ©fenseure des droits pointe un dĂ©faut de protection de cette population. Elle rappelle alors que la communautĂ© Rom constitue un « "groupe socialement dĂ©favorisĂ© et vulnĂ©rable" reconnu comme tel par la Cour europĂ©enne des Droits de l’homme qui demande une attention et protection particuliĂšres », et qu'elles continuent de vivre des discriminations dans le contexte français[55].

En à Villeron une centaine de Roms dans un bidonville sont chassés par la population locale, dont le maire[56].

Hongrie

En Hongrie, la situation de la minoritĂ© rom est trĂšs variĂ©e sur le plan social et Ă©conomique, Ă  l'instar de l'ensemble de la population hongroise. Une partie importante des Roms de Hongrie est intĂ©grĂ©e aux circuits Ă©conomiques locaux et nationaux, notamment celle qui habite depuis des gĂ©nĂ©rations dans les grandes villes comme Budapest. Une autre partie est identifiĂ©e comme constitutive de la grande pauvretĂ© en milieu rural, surtout dans les villages de l'est du pays. Cette pauvretĂ© s'explique par la sous-qualification structurelle d'une bonne partie de la main-d'Ɠuvre, Ă  l'origine d'une exclusion violente du marchĂ© de l'emploi dans les premiĂšres annĂ©es qui ont suivi le communisme. Le creusement des inĂ©galitĂ©s sociales et territoriales a enclenchĂ© depuis quelques annĂ©es un dĂ©but d'exode rural vers la pĂ©riphĂ©rie des villes hongroises mais aussi plus anecdotiquement vers les pays occidentaux.

La discrimination Ă  l'Ă©gard des Roms concerne essentiellement les populations les plus prĂ©caires. Elle se traduit par un discours stigmatisant sur le coĂ»t du chĂŽmage de masse pour la collectivitĂ© et notamment une critique virulente des aides sociales auxquelles ils ont accĂšs. Cette critique est reprise par une large partie de la droite (Fidesz) et de façon plus radicale par le Jobbik (extrĂȘme droite). La montĂ©e des mouvements nationalistes hongrois et le dĂ©veloppement de groupes para-policiers dans les campagnes de l'est (la Garde hongroise) ont Ă©tĂ© Ă  l'origine de tensions fortes contre ces groupes. En 2009, la Hongrie a Ă©tĂ© le lieu d'une escalade de violences inĂ©dite, qui a abouti au meurtre d'un pĂšre et de son fils de cinq ans le 23 fĂ©vrier Ă  TatĂĄrszentgyörgy, un village du sud-est de Budapest. Leur maison a Ă©tĂ© incendiĂ©e au cocktail Molotov par des groupes non identifiĂ©s. Les deux autres enfants de la victime ont Ă©tĂ© gravement brĂ»lĂ©s. Des suspects ont Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s[57]. Afin de se prĂ©munir de ces exactions, des Roms ont fondĂ© une Garde rom Ă  l'image de la Garde hongroise[58]. Les enfants issus de la communautĂ© Rom sont parfois victimes de sĂ©grĂ©gation Ă  l'Ă©cole, Ă©tant placĂ©s dans une classe Ă  part, sans sortie scolaire ni de piscine[59].

Le parti d’extrĂȘme droite Jobbik organise des marches anti-Tsiganes. Des centaines de ses militants dĂ©filent en octobre 2012 dans une banlieue de Miskolc abritant une forte communautĂ© tsigane en criant : « Allez donc travailler ! Disparaissez, nous ne voulons plus payer vos allocations sociales ». Le chef du Jobbik, Gabor Vona, dĂ©clare Ă  cette occasion que « les gens qui ne travaillent pas ne devraient pas avoir d’enfants » et appelle au rĂ©tablissement de la peine de mort[60]. L'homme politique et journaliste Zsolt Bayer, fondateur du parti Fidesz, provoque l'indignation en 2013 aprĂšs avoir qualifiĂ© les Roms d’« animaux » qui n’étaient pas dignes de vivre comme des ĂȘtres humains, ajoutant Ă©galement qu'une grande partie des Roms serait des « assassins » qu’il faudrait « Ă©liminer »[61].

Italie

En , le gouvernement Berlusconi IV dĂ©clare l'« urgence nomade » et met en place des politiques discriminatoires contre les Roms. Cette politique est jugĂ©e illĂ©gale par le Conseil d'État en 2011 puis par la cour de cassation en 2013. Cependant, les pratiques continuent sous les diffĂ©rents gouvernements[62].

En 2018, 15 à 20 % des Roms d'Italie (en) vivent dans des bidonvilles. 82 % des Italiens ont une opinion défavorable sur eux. Des propos racistes contre les Roms sont recensés en moyenne tous les deux jours[63].

RĂ©publique tchĂšque

Les Roms reprĂ©sentent 2 Ă  3 % de la population de la RĂ©publique tchĂšque. Selon Ƙíčan (1998), les Roms reprĂ©sentent plus de 60 % de la population carcĂ©rale tchĂšque et environ 20 Ă  30 % gagnent leur vie de façon illĂ©gale, comme la prostitution, le trafic ou d’autres crimes[64]. Ils sont donc ainsi vingt fois surreprĂ©sentĂ©s dans les prisons tchĂšques, si l’on compare avec leur part dans le total de la population.

Entre 1966 et 2012 la stérilisation contrainte des Roms est mise en place. En 2021 une loi de compensation partielle est mise en place[65].

Le taux de criminalitĂ© Ă©levĂ© et le comportement asocial gĂ©nĂšrent une hostilitĂ© des tchĂšques envers les Roms. Selon une enquĂȘte de 2010, 83 % des tchĂšques considĂšrent les Roms comme asociaux et 45 % d’entre eux aimeraient les expulser de RĂ©publique tchĂšque[66]. La majoritĂ© des tchĂšques ne veulent pas avoir de Roms parmi leurs voisins (presque 90 %, bien plus que pour n’importe quel autre groupe[67]), les voyant comme des voleurs et des parasites sociaux. En dĂ©pit des longs dĂ©lais pour l’adoption d’un enfant, les enfants Roms dans les orphelinats ne sont pratiquement jamais adoptĂ©s par les couples tchĂšques[68]. AprĂšs la rĂ©volution de Velours en 1989 les mĂ©tiers employant traditionnellement des Roms ont soit disparu, soit Ă©tĂ© offerts Ă  des travailleurs venus d’Ukraine, Roumanie, Pologne, Slovaquie, Mongolie, ou mĂȘme du Nigeria.

Alors que l’attitude gĂ©nĂ©rale des tchĂšques envers la minoritĂ© Rom est nĂ©gative, les actes de violences antitziganes sont condamnĂ©s par l’opinion publique et rĂ©primĂ©s par les autoritĂ©s. Parmi les cas les plus mĂ©diatisĂ©s compte l’incendie criminel de Viktov en 2009, lors duquel quatre militants d’extrĂȘme-droite blessĂšrent sĂ©rieusement trois vielles femmes Roms. L’opinion publique rĂ©agit par des dons aux familles, qui grĂące Ă  cet argent purent racheter une nouvelle maison, alors que les coupables Ă©taient condamnĂ©s Ă  18 et 22 ans de prison. Les Roms sont au cƓur de l’agenda public des groupes d’extrĂȘme-droite en RĂ©publique tchĂšque, groupes qui rĂ©pandent l’antitziganisme, notamment par la mĂ©diatisation des actes criminels commis par des Roms contre la majoritĂ© tchĂšque, et surtout les cas de meurtres, viols, par exemple le viol et le meurtre d’un garçon de 13 ans Ă  Duchcov[69] ou encore le viol d’une jeune fille de 17 dans une Ă©glise de Novy Bydzov[70], ou enfin le meurtre brutal d’une femme de 81 ans Ă  Olesnice par un gang d’enfants Roms, qui avaient Ă©tĂ© envoyĂ©s commettre ce crime par le pĂšre de l’un d’entre eux, afin de profiter des punitions moindres appliquĂ©es aux mineurs[71]. Les groupes d’extrĂȘme-droite organisent Ă©galement des manifestations[72] - [73] - [74] dans les quartiers oĂč les Roms sont majoritaires, ou organisent encore des « patrouilles criminelles »[75] - [76] dans ces mĂȘmes zones. (Il n’y a nĂ©anmoins pas de milices Ă  proprement parler, puisque les patrouilles appellent davantage les policiers en aide). L’extrĂȘme-droite promeut Ă©galement le rapatriement volontaire des Roms en Inde, expliquant que l’État tchĂšque devrait couvrir l’ensemble des frais, y compris l’établissement de nouveaux lieux de vie sur place[77] - [78]. Plusieurs organisations Roms en appellent Ă  un projet similaire, nĂ©anmoins au lieu d’une relocalisation en Inde, ils dĂ©fendent une relocalisation en Allemagne, France, Royaume-Uni, Danemark, SuĂšde, Finlande ou en Belgique, dont la RĂ©publique tchĂšque devrait rembourser l’intĂ©gralitĂ© des coĂ»ts[79].

En , Amnesty International a publiĂ© un rapport titrĂ© Injustice Renamed: Discrimination in Éducation of Roma persists in the Czech Republic[80]. Selon la BBC, Amnesty International y dĂ©fendait l’idĂ©e que malgrĂ© des changements cosmĂ©tiques introduits par les autoritĂ©s, peu d’amĂ©liorations rĂ©elles ont Ă©tĂ© recensĂ©es ces derniĂšres annĂ©es en matiĂšre de discrimination contre les enfants Roms[81].

En 2021, la mort d'un Rom à la suite d'une interpellation de la police suscite l'indignation. La comparaison est faite avec la mort de George Floyd, et des manifestations reprennent le slogan Black Lives Matter, exigeant que « les vies roms comptent »[82] - [83].

Roumanie

Les Roms reprĂ©sentent 3,3% de la population roumaine. Les prĂ©jugĂ©s contre les Roms sont courants parmi les Roumains, qui les caractĂ©risent comme voleurs, sales et paresseux[84]. Une enquĂȘte de l'association Pro DemocraĆŁia en Roumanie a rĂ©vĂ©lĂ© que 94% des personnes interrogĂ©es estiment que la citoyennetĂ© roumaine devrait ĂȘtre rĂ©voquĂ©e aux Roms de souche qui commettent des crimes Ă  l'Ă©tranger[85].

Plusieurs Ă©meutes anti-roms ont eu lieu au cours des derniĂšres dĂ©cennies, parmi lesquelles les Ă©meutes de Hădăreni de 1993, au cours desquelles une foule de Roumains et de Hongrois, en rĂ©ponse au meurtre d'un Roumain par un Tsigane, a incendiĂ© 13 maisons appartenant Ă  des Tsiganes, lynchĂ© trois Tsiganes et contraint 130 personnes Ă  fuir le village[86].

À Baia Mare, le maire Cătălin Cherecheș a annoncĂ© la construction d'un mur en bĂ©ton de 3 mĂštres de haut et 100 mĂštres de long pour sĂ©parer les bĂątiments dans lesquels vit la communautĂ© rom du reste de la ville et apporter « ordre et discipline » dans la rĂ©gion[87].

Depuis 2002, une instance est chargée de la lutte contre les discriminations. Avant cela il était courant que les offres d'emploi ou de logement interdisent les Roms[88].

États-Unis

Les prĂ©jugĂ©s contre les Roms sont encore courants en 2011 aux États-Unis, notamment de la part de la police[89].

Serbie

Beaucoup des Roms de Serbie vivent dans des bidonvilles, leurs enfants vont rarement à l'école, et moins de 1 % de la population a un diplÎme universitaire. La population serbe présente de l'antitziganisme. Plus de 90 % des demandeurs d'asile en provenance de Serbie sont Roms[90].

Émigration et demande d'asile

En raison de l'antitziganisme, de nombreux Roms demandent l'asile. Entre 2007 et 2017, les État de l'Union europĂ©enne ont reçu 200 000 demandes d'asile de Roms des pays des Balkans occidentaux. Entre 1996 et 2001, 65 % des Roms d'Albanie ont Ă©migrĂ© vers la GrĂšce. De nombreux Roms demandent l'asile ou immigrent en Allemagne[91].

En 2021, de nombreux passages de la frontiĂšre amĂ©ricano-mexicaine par des Roms de Roumanie sont signalĂ©s. Ceux-ci expliquent fuir le racisme de leur pays et demander l'asile aux États-Unis[92].

Notes et références

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Voir aussi

Bibliographie

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