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Al Jazeera

Al Jazeera (en arabe : الجزيرة, litt. « L'Île », référence ici à la presqu'île du Qatar[2] ; parfois transcrit en français al-Jazira, al-Jezira ou al-Djezira) est une chaîne de télévision satellitaire d’information en continu qatarienne.

Al Jazeera
Caractéristiques
Création
Propriétaire
Langue
Pays
Siège social
Site web
Diffusion
Analogique
Non
Numérique
Oui
Satellite
En clair.
En Europe : Astra 1KR, Eurobird, Hispasat 1C, Hotbird 6, Thor 3, Turksat 2A, Eutelsat W3C[1]
Comprise dans divers bouquets payants dont, en France, Canal Sat : canal 331, SFR NEUFBOX TV SAT : canal 235 (anglais) et 237 (arabe)
Bell TV : no 516 (anglais, Canada)
Câble
Numericable - Canal 64 (France),
naxoo : chaîne no 72 et 278
IPTV
Proximus TV : chaîne no 232
Scarlet : chaîne no 276
Freebox TV : chaîne no 355
Orange TV : chaîne no 161
SFR NEUFBOX TV : chaîne no 266 (arabe), chaîne no 265 (anglais)
Zattoo
BluewinTV
Cablecom
TV Alice
Bbox : chaîne no 260
DartyBox : chaîne no 95 (arabe) et 94 (anglais)
Bell Télé Fibe : no 516 (anglais, Canada)

En 2013, la chaîne revendique 25,23 millions de spectateurs dans la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord, sur la base de deux sondages[3].

Histoire

La chaîne Al Jazeera, dont le nom signifie littéralement « l'île », basée à Doha au Qatar, est lancée le , par le cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani, émir du Qatar, qui vient d'arriver au pouvoir en renversant son père. Elle vise à rompre la mainmise des Saoudiens sur le paysage médiatique international arabe, à briser le contrôle des gouvernements arabes sur l'information nationale et donc à libéraliser le paysage médiatique arabe. Pour représenter au mieux son public arabe, Al Jazeera ne prend pas seulement des journalistes libanais[4] mais des journalistes de tous les pays arabophones. Le noyau dur de l'équipe éditoriale d'Al Jazeera provient de BBC Arabic Television[5].

Depuis 1998, la chaîne émet 24 heures sur 24 et elle est diffusée dans 35 pays, principalement du Proche-Orient, mais aussi en Europe. En France, elle est diffusée dans les bouquets Numericable, Canalsat et l'offre de Free et de Neuf. Néanmoins, on peut recevoir Al Jazeera gratuitement puisqu'elle diffuse en clair sur les satellites Hot Bird et Astra. Au Royaume-Uni, elle emploie soixante journalistes et disposait, en 2001, d'un budget de 30 millions USD.

Audiences comparées des chaînes de télévision d'informations internationales en Égypte, Jordanie, Liban, Maroc, Arabie saoudite et Émirats arabes unis en 2008.

En 1998, elle montre ses propres images des bombardements américains sur l'Irak et s'oppose à l'interprétation minimisant les bombardements faite par les chaînes nationales arabes[5].

Lors de la seconde intifada « al-Aqsa » en 2000, les journalistes locaux d'Al Jazeera interviewent régulièrement les responsables du Hamas et du Jihad islamique, la chaîne montre des images en direct. Les discours du Fatah ne sont plus les seuls reçus par les téléspectateurs[5].

Le , la chaîne diffuse un enregistrement vidéo d'Oussama ben Laden lors de l'intervention américaine contre les talibans en Afghanistan. Elle s'affirme sur la scène internationale pendant toute la durée du conflit, car elle est la seule télévision internationale à disposer de correspondants en Afghanistan. Ses positions et ses reportages sont accusés d'être protalibans et antiaméricains, et de focaliser, de par ses reportages, l'opinion publique des pays arabes contre les États-Unis. Les chaînes américaines avaient alors censuré ses images et même appelé les militaires à la considérer comme cible potentielle pour un bombardement . Le , Colin Powell, secrétaire d'État américain, s'adresse à Hamad ben Khalifa al-Thani, émir du Qatar et principal actionnaire de la chaîne, lui demandant d'intervenir auprès de la direction afin de modifier sa couverture des événements[6].

Des locaux à Doha, Qatar.

En , le président égyptien Hosni Moubarak en visite dans ses modestes locaux aurait dit : « C'est donc de cette boîte d'allumettes que vient tout ce vacarme »[7].

Les locaux de la chaîne sont bombardés par les États-Unis à deux reprises : la première fois en Afghanistan (2001)[8] et la seconde fois en Irak (2003). Un journaliste, Tarik Ayyoub, est tué à Bagdad par le bombardement[9]. The Daily Mirror annonce le à la une que le Président des États-Unis George W. Bush a voulu bombarder les locaux de la chaîne à Doha, mais le Premier ministre du Royaume-Uni Tony Blair l'en a dissuadé. Sami al-Haj, un journaliste-cameraman soudanais, est aussi victime de cette politique. Arrêté en en Afghanistan et emprisonné à partir de à la prison de Guantanamo, il est libéré six ans plus tard en , sans qu'aucune charge ne soit portée contre lui.

Années 2010

Le , Al Jazeera annonce la révélation de documents secrets sur les négociations au Proche-Orient contenant les « vrais détails tenus secrets sur les négociations entre l'Autorité palestinienne et Israël pendant la décennie écoulée ».

Le , Al Jazeera Balkans commence ses émissions depuis Sarajevo pour les téléspectateurs de Bosnie-Herzégovine, Croatie, Monténégro, Serbie et Kosovo et d'Europe via le satellite Eutelsat W3C.

La chaîne d'information ferme son bureau anglophone à Pékin le à la suite du non-renouvellement de l'accréditation de sa journaliste Melissa Chan[10] et au non-octroi de visas à d'autres journalistes. Le syndicat des journalistes étrangers en Chine lie cette mesure au traitement de l'information par Al Jazeera[11] - [12].

La chaîne a annoncé le lancement d'une déclinaison de la chaîne en français[13].

Le , Al Jazeera America, une chaîne d'information disponible aux États-Unis, est lancée. La chaîne, qui a recruté quelques vedettes de l'information aux États-Unis, est disponible sur les bouquets de Comcast, ATT et DirectTV mais pas ceux de Verizon et Time Warner qui ont refusé son inclusion[14] - [15].

En , Al Jazeera annonce la suppression de 500 postes sur près de 4 500 salariés, dont une majorité à Doha, cette restructuration serait peut-être liée à la chute des prix des hydrocarbures dont est dépendant l'État du Qatar, propriétaire de la chaîne[16].

En Égypte, trois journalistes travaillant pour la chaîne Al Jazeera ont été arrêtés et condamnés à trois ans de prison ferme en 2015 par les autorités[17].

En , l'accès au site Internet de la chaîne est bloqué en Égypte, en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis[18] - [19]. Le , peu de temps après l'annonce de la rupture des liens entre l'Arabie saoudite, le Bahreïn, le Yémen et l’Égypte avec le Qatar, qui est accusé de « soutenir le terrorisme », le gouvernement saoudien annonce la fermeture des bureaux saoudiens de la chaîne[20].

Sur le web

Le groupe Al Jazeera dispose de six sites web : trois sites pour la chaîne Al Jazeera (en arabe, en anglais et en bosnien), un pour Al Jazeera Sport, un pour Al Jazeera Documentary Channel et enfin un pour Al Jazeera Training Center. Le site d'Al Jazeera Children appartient à une autre chaîne, pour enfants, qui n'a aucun lien juridique avec le groupe Al Jazeera, mais appartient à la Qatar Foundation. Le groupe a dû changer d'hébergeur à plusieurs reprises à cause de ses orientations et des pressions politiques. Fin , au cours de la guerre d'Irak, les moteurs de recherches ont reçu trois fois plus de requêtes relatives à Al Jazeera. Sur Google, le nombre de requêtes avec le terme « Al Jazeera » avait connu la plus grande croissance lors de la dernière semaine de . Puis, durant la première semaine d'avril, cette requête est passée de la troisième place à la première. Al Jazeera lance alors un site web en anglais pour faire face à la demande croissante d'internautes occidentaux qui la voient comme une vision alternative aux informations fournies par les médias occidentaux et anglo-saxons pendant la guerre contre l'Irak[21].

Lors de la guerre d'Irak, un informaticien de Los Angeles, John William Racine, redirige les visiteurs du site vers une page affichant un drapeau américain ainsi que la devise patriotique : « Que la liberté triomphe ». Il est condamné, en , à 2 000 dollars d'amende et 1 000 heures de travaux d'intérêt public par un tribunal de Californie[22].

En 2008, le site d'Al Jazeera est le plus visité dans le monde arabe et est classé 222 sur l'échelle internationale[23]. Chaque jour, le site est visité par plus de 3,3 millions de personnes. En , Webby Awards nomme le site comme un des cinq meilleurs sites web avec les sites de BBC News, de National Geographic, de RocketNews et de The Smoking Gun[24].

Culture libre

Al Jazeera diffuse du contenu sous licence Creative Commons depuis [25], lequel est accessible depuis un référentiel dédié. La chaîne de télévision qatarienne s'avère ainsi le premier grand média mondial à se positionner dans la culture libre.

Chronologie

La salle de presse d'Al Jazeera English à Doha (Qatar).
  • Novembre 1996, lancement de la chaîne.
  • Janvier 2001, lancement du site web (ar) Aljazeera.net.
  • , diffusion d'images non datées d'Oussama ben Laden et qui auraient été tournées lors de la réunion de fusion entre les mouvements d'Al-Qaïda et du Jihad islamique égyptien.
  • , diffusion, dès le début des frappes aériennes, d'une vidéo préenregistrée d'Oussama Ben Laden, qui annonce : « L'Amérique ne connaîtra plus jamais la sécurité avant que la Palestine ne la connaisse et avant que toutes les armées occidentales ne quittent les terres saintes »[26].
  • , interview de Donald Rumsfeld, secrétaire d'État américain à la Défense.
  • , diffusion d'un enregistrement sonore d'un porte-parole d'Al-Qaïda, Abou Ghaïth, qui affirme qu'Oussama Ben Laden est en bonne santé et que les États-Unis vont à nouveau être frappés.
  • 5 et , diffusion d'un entretien en deux parties, réalisé en juin à Karachi au Pakistan, avec deux dirigeants d’Al-Qaïda, le Koweïtien Khaled Cheikh Mohammed, et le yéménite Ramzi ben al-Chaib, dans lequel ils revendiquent l'organisation logistique des attentats du 11 septembre 2001.
  • , incarcération du journaliste Sami al-Haj à la prison de Guantanamo.
  • , diffusion d'un entretien radiophonique attribué à Oussama Ben Laden qui revendique les attentats du .
  • , diffusion d'un enregistrement sonore, de l'islamiste Ayman al-Zawahiri, fondateur du Jihad islamique égyptien, dans lequel il menace d'attentats la France et l'Allemagne.
  • , diffusion d'un nouvel enregistrement sonore reconnu comme provenant d'Oussama Ben Laden dans lequel il salue les derniers attentats au Yémen, au Koweït, à Bali, à Moscou, et en annonce de nouveaux. Il met en garde et menace à nouveau plusieurs pays occidentaux d'être la cible de nouveaux attentats s'ils continuaient à soutenir « le gang des bouchers de la Maison-Blanche ».
  • Janvier 2003, accord de coopération entre Al Jazeera et la BBC.
  • , diffusion d'un message enregistré, attribué à Oussama Ben Laden et appelant les musulmans au djihad contre les Occidentaux en cas d'attaque contre l'Irak. Colin Powell y voit la preuve de la collaboration entre Saddam Hussein et Oussama Ben Laden.
  • Le , l'agence d'Al Jazeera de Bagdad est bombardée par les forces américaines. Le reporter Tareq Ayyoub est tué, malgré le fait que les forces américaines aient été plusieurs fois informées du lieu précis où se trouvaient les bureaux. Un événement similaire avait eu lieu contre l'agence de Kaboul, durant une intervention militaire américaine en Afghanistan.
  • , interview de Colin Powell, secrétaire d'État américain.
  • , diffusion d'un message de Saddam Hussein, daté du 14 juin dans lequel il déclare : « Nous avons sacrifié le pouvoir, mais nous refusons de sacrifier nos principes, notre foi et notre honneur ». Cinq autres messages seront diffusés jusqu'à la fin août.
  • Novembre 2003, lancement d'Al Jazeera Sport.
  • Avril 2004, les fondateurs d'Al Jazeera sont classés parmi les 100 personnes les plus influentes de l'année selon Time Magazine.
  • , le gouvernement intérimaire irakien ferme pour une durée indéfinie le bureau local de la chaîne, arguant qu'Al Jazeera présente une image négative de l'Irak et des troupes de la coalition.
  • , lancement d'Al Jazeera Children (qui, malgré ce que peut évoquer son nom, ne fait pas partie du groupe Al Jazeera, mais de la Qatar Foundation).
  • : la correspondante de la chaîne en Cisjordanie est agressée par un véhicule israélien qui essaye de la percuter par l'arrière alors qu'elle couvrait les événements en direct à Naplouse. Le technicien de la chaîne qui l'accompagnait est touché au pied par des balles en caoutchouc.
  • : lancement d'Al Jazeera English.
  • : lancement d'Al Jazeera Documentary Channel.
  • Février 2011 : grande couverture des Protestations et révolutions dans le monde arabe en 2010-2011.
  • : achat d'un lot de 2 matchs de Ligue 1 (football français), un le vendredi à 21 h et un le dimanche à 14 h pour 120 millions d'euros.
  • : un groupe inconnu jusque-là, « al-Rashedon », modifie la page d'accueil des sites web d'Al Jazeera et Al Jazeera English, pour protester contre la couverture du conflit syrien, en reprenant la terminologie du gouvernement syrien pour qualifier la rébellion de « groupes terroristes armés »[27].
  • janvier 2013 : la chaîne annonce le rachat de Current TV et le lancement d'une nouvelle chaîne en Amérique[28].
  • : Mohammed Hourani, journaliste de la chaîne, est tué par un sniper dans le gouvernorat de Deraa, dans le sud de la Syrie. Le journaliste était connu pour son opposition au président syrien Bachar el-Assad et Al Jazeera accuse le sniper d'être progouvernemental[29] - [30].
  • : lancement du site Al Jazeera en chinois[31].
  • : destruction d'un bâtiment hébergeant plusieurs médias, dont Al Jazeera en Palestine par des frappes israéliennes[32].
  • : la journaliste Shireen Abu Akleh est tuée en Cisjordanie par un tir israélien[33] - [34].

Ligne éditoriale et réceptions critiques

La chaîne est considérée par certains comme une chaîne de propagande du gouvernement qatari[35] - [36]. En 2012, néanmoins, The Atlantic considère qu'Al Jazeera présente un visage beaucoup plus modéré et occidentalisé que le djihadisme islamique ou l'orthodoxie sunnite rigide et bien que le réseau ait été critiqué comme « cheval de Troie "islamiste" », il présente en fait peu de contenu spécifiquement religieux dans ses émissions[37].

Pour Gilles Kepel, la version arabe de la chaine satellitaire est devenue le canal de propagande principal des Frères musulmans à travers le monde[38].

Censure d'un documentaire sur l'esclavage dans le monde musulman

En août 2018, il a été rapporté qu'Al Jazeera avait censuré la série documentaire Rotas da Escravatura (Routes de l'esclavage) , une série européenne conjointe de la chaîne française Arte, de la RTP portugaise et de LX Filmes. L'intégralité du premier épisode, qui traitait du "processus qui a conduit l'empire musulman à tisser durablement un immense réseau de traite négrière à travers l'Afrique, le Moyen-Orient et l'Asie", avait été supprimée. En retour, la chaîne de télévision a affirmé que l'esclavage en Afrique était une pratique fondée par les Portugais[39]. Cependant, l'implication généralisée des musulmans dans la traite des esclaves depuis ses débuts est un fait historiquement établi par les historiens ; parmi d'autres, comme Murray Gordon, Kishori Saran Lal, Tidiane N'Diaye, Safiur Rahman Mubarakpuri, Christopher Scott Rose et Ronald Segal, Bernard Lewis a abordé ce thème dans son livre Race and Slavery in the Middle Eastː an Historical Inquiry.[40]

En Occident

Selon Les Échos, Al Jazeera est considérée par ses détracteurs comme « trop favorable aux islamistes »[41], voire, pour Rue89, comme la « chaîne de Ben Laden » ou encore le porte-parole du Hezbollah ou du Hamas[42].

En France

En France, selon le journal Le Ravi, la chaîne présentée comme « la chaîne des parents » (c'est-à-dire des immigrés de première génération, arabophones), commence à se diffuser, sans doute depuis 2009 et le conflit à Gaza, auprès des jeunes générations qui pourtant, pour la majorité, ne comprennent pas l'arabe littéraire[43].

Fin 2017 est lancé le média AJ+ sur les réseaux sociaux. Il se présente comme indépendant mais est en réalité une filiale d'Al Jazeera et financé à ce titre par le Qatar. AJ+ se distingue par une ligne rédactionnelle officiellement progressiste, féministe et LGBT-friendly pour séduire les jeunes connectés, mais ne présente en réalité la plupart du temps qu'un seul point de vue orienté, par exemple sur la notion de race, le conflit israélo-palestinien, l'affaire Tariq Ramadan, le port du voile islamique, donnant à ce titre la parole à des militants du controversé Parti des indigènes de la République. Si les prises de position sociétales sur les femmes ou les LGBT peuvent surprendre alors qu'aucune femme ne siège au Parlement du Qatar, qu'Amnesty International dénonce « les discriminations dans la législation et dans la pratique » et que l'émirat est une monarchie de droit divin autoritaire prônant la charia, où la flagellation et la peine de mort sont en vigueur, il faut selon l'universitaire Mohamed El Oifi comprendre ainsi une forme de stratégie : « Al-Jazira ouvre son antenne à toutes les oppositions - sauf à celles du Qatar -, c'est la chaîne de toutes les contestations, de défense des gens marginalisés, le porte-voix des peuples. […] AJ+ ne change pas de ligne éditoriale mais d'interlocuteur. Pour capter un public jeune et radical, elle adapte ses contenus ». Ainsi, AJ+ n'a jamais présenté de contenu sur le Qatar, tandis que, note Marianne « d'innombrables faits divers sont égrenés sans cesse dans le but transparent d'instiller l'idée que l'islamophobie et le racisme sont omniprésents en France »[44].

En 2021, la chaîne consacre de nombreux reportages à Éric Zemmour, dont elle fait, selon Gilles Kepel, « l’expression paroxystique de « l’islamophobie » française, dans une perspective proche des « décolonialistes » et fortement teintée d’idéologie frériste »[38].

En Israël

Le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a annoncé le vouloir « expulser Al Jazeera d'Israël », cette chaîne étant accusée par les autorités israéliennes d'attiser les tensions aux alentours des lieux saints[45]. Le dimanche , le ministre israélien des Communications, Ayoub Kara, a déclaré que la chaîne serait devenue « le principal outil de Daesh, du Hamas, du Hezbollah et de l'Iran »[46]. Avigdor Liberman compare en 2017 Al Jazeera à un appareil de propagande « dans le style de l'Allemagne nazie ou de la Russie soviétique »[47]. Après avoir annoncé, mi-août, vouloir retirer la carte de presse à un journaliste d'Al Jazeera, le Bureau de Presse du Gouvernement israélien a décidé, fin août, de suspendre la résiliation d'accréditation pendant six mois et de vérifier l'impartialité de ses travaux avant de prendre une décision définitive[48].

Dans le monde arabe

Dans le monde arabe, Al Jazeera est diversement perçue : certains la considèrent comme proaméricaine et prosioniste[49], les gouvernements arabes lui reprochant de porter atteinte à leur contrôle total sur les médias, et les « néo-libéraux arabes » critiquent son populisme[5].

Pour Mohammed El Oifi, maître de conférences à l'Institut d'études politiques de Paris, Al Jazeera bénéficie dans le monde arabe d'« une légitimité populaire dont les autres chaînes d’information ne bénéficient pas ». Elle jouit ainsi dans la région d'« une véritable hégémonie médiatique »[42].

Au Bahreïn

Depuis , Bahreïn interdit aux journalistes d'Al Jazeera de travailler — la chaîne d'information n'a ainsi pas pu relater les premières élections nationales de Bahreïn où les femmes avaient le droit de vote et le droit de se présenter. Le gouvernement bahreïni estime qu'Al Jazeera chercherait « délibérément à nuire à Bahreïn » lorsqu'elle retransmet, sans autorisation gouvernementale, des manifestations antiaméricaines ; le ministre de l'Information Nabil al-Hamr ajoute qu'Al Jazeera serait biaisée en faveur d'Israël et « infiltrée par les sionistes » — mais les autorités n'ont pas confirmé cette seconde accusation[50].

En Algérie

Le , à la suite des attentats du 11 décembre 2007 à Alger, la chaîne pose la question suivante sur son site web : « Soutenez-vous les attentats d'Al-Qaïda en Algérie ? ». La presse et le gouvernement algérien critiquent la couverture de la chaîne qatarie[51] - [52] - [53].

En Égypte

Le , le journaliste Mahmoud Hussein d'Al Jazeera a été arrêté en Égypte, les autorités égyptiennes accusant la chaîne et le journaliste de soutenir l'opposition islamiste dans le pays à travers la production de documentaires[54] - [55].

Notes et références

  1. english.aljazeera.net
  2. « FAQ », sur aljazeera.com (consulté le ).
  3. AFP, « Audiences monde arabe : Al Jazeera loin devant France 24 et la BBC », Teleobs, (lire en ligne, consulté le )
  4. La plupart des journalistes des grands médias arabophones (et donc contrôlés par les capitaux saoudiens) sont de nationalité libanaise
  5. Mohammed El Oifi. L'effet Al-Jazira. In: Politique étrangère, no 3, 2004 - 69e année pp. 649-660. doi : 10.3406/polit.2004.1140. http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342x_2004_num_69_3_1140
  6. Reporters sans frontières - Qatar - rapport annuel 2003
  7. (en) Foreign Affairs; Glasnost In the Gulf, Thomas Friedman, The New York Times, 27 février 2001.
  8. (en-GB) « Al-Jazeera Kabul offices hit in US raid », bbc.co.uk, (lire en ligne, consulté le )
  9. (en-GB) Jonathan Steele, « Tareq Ayyoub », The Guardian, (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le )
  10. Chine : une journaliste étrangère expulsée, Le Monde, 8 mai 2012.
  11. « Chine : Al Jazeera doit fermer un bureau », sur Le Figaro, .
  12. « Al-Jazira contrainte de fermer son bureau anglophone en Chine », sur Le Monde, .
  13. Georges Malbrunot, « Bientôt Al Jazeera en français », Le Figaro,
  14. « Al Jazeera America réussira-t-elle son pari ? », AFP et La Libre Belgique,
  15. Anne Orenstein, « Al Jazeera se lance aux Etats-Unis et suscite la méfiance », France Info,
  16. La chaîne de télévision Al-Jazira va supprimer environ 500 emplois, Le Monde, 27 mars 2016
  17. « En Égypte, trois journalistes d’Al-Jazira condamnés à trois ans de prison », Le Monde.fr, (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
  18. « L’Égypte bloque le site d’Al-Jazira et d’autres médias qui ne lui sont pas favorables », Le Monde.fr, (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
  19. (en) « UAE Foreign Ministry bans all Qatari news websites », Al-Arabiya,
  20. « L'Arabie saoudite ferme les bureaux de la TV du Qatar Al Jazeera », leparisien.fr, 2017-06-05cest17:53:10+02:00 (lire en ligne, consulté le )
  21. Al Jazeera : Aljazeera.net, Al Jazeera Sport
  22. Reporters sans frontières - Internet - Qatar
  23. aljazeera.net - Traffic Details from Alexa
  24. Webby Awards
  25. (en) « Al Jazeera Launches Creative Commons Repository », creativecommons.org, 13 janvier 2009.
  26. Message d'Oussama ben Laden, Société Radio-Canada.
  27. (en) Rania El Gamal, Erika Soloman et Tim Pearce, « Qatar's Al Jazeera website hacked by Syria's Assad loyalists », Reuters, .
  28. Al Jazeera rachète Current TV d'Al Gore, Le Figaro, 3 janvier 2013.
  29. (en) « Al Jazeera reporter killed by sniper in Syria », Al Jazeera,
  30. (en) « Sniper kills Jazeera reporter in Syria: TV », AFP,
  31. « Al Jazeera launches Mandarin-language website », Al Jazeera,
  32. (en) Virginia Pietromarchi, Mersiha Gadzo et Usaid Siddiqui, « Israeli air raid flattens Gaza building housing Al Jazeera », Al Jazeera,
  33. avec AFP, « La journaliste Shireen Abu Akleh d’Al-Jazeera tuée en Cisjordanie », sur Ouest-France.fr, (consulté le )
  34. « Une journaliste d'Al-Jazira tuée lors d'une opération de l'armée israélienne en Cisjordanie », sur France 24, (consulté le )
  35. (en) « Inside Al Jazeera: Is the pan-Arab channel a propaganda outfit or an essential voice? », sur The World, (consulté le )
  36. (en) « The Western Media Misguided Narrative about Al Jazeera », sur The Washington Institute (consulté le )
  37. Aram, Jr. Bakshian, « The Unlikely Rise of Al Jazeera », sur The Atlantic,
  38. Gilles Kepel, Macron à Dubaï, Doha et Djedda : géopolitique d’un itinéraire, legrandcontinent.eu, 10 décembre 2021
  39. (pt) Pedro Sousa, « Al Jazeera corta papel dos muçulmanos na escravatura e culpa portugueses », sur Diário de Notícias,
  40. (en) Bernard Lewis, Race and Slavery in the Middle Eastː an Historical Inquiry, Oxford University Press,
  41. « Le Qatar, suspect numéro 1 de financement du terrorisme », Les Échos, 5 juin 2017
  42. La revanche d'Al Jazeera sur les régimes arabes et Washington, Rue 89, Mohamed El Oifi, 12 février 2011.
  43. Article « Le nouveau muezzin des quartiers », Le Ravi, septembre 2011.
  44. Hadrien Mathoux, « "AJ+ français" : quand la propagande du Qatar se cache derrière un progressisme féministe et LGBT », marianne.net, 25 avril 2018.
  45. (en) « Israel's Netanyahu threatens to shut Al-Jazeera Jerusalem office », Reuters,
  46. FRANCE 24, « Israël compte limiter la transmission d'Al-Jazira sur son sol », sur france24.com, (consulté le ).
  47. (en) « Netanyahu vows to expel Al Jazeera from Israel for 'inciting violence' at al-Aqsa mosque », Al-Araby,
  48. « Israël suspend la révocation d'un journaliste d'Al Jazeera », sur lexpress.fr, L'Express, (consulté le ).
  49. (en) Josh Rushing, Mission Al Jazeera: Build a Bridge, Seek the Truth, Change the World, Palgrave Macmillan, (ISBN 978-1-4039-7905-6).
  50. (en) "Bahrain bans Al Jazeera TV", BBC, 10 mai 2002
  51. Djamel Ould Abbès pris à partie, El Watan, 24 décembre 2007
  52. Jean-Marc Morandini, « Un sondage de la chaîne Al Jazeera fait scandale en Algérie », sur jeanmarcmorandini.com, (consulté le ).
  53. Qatar / Algérie : quelles relations ?, Mehdi LAZAR, diploweb.com, 18 mars 2013
  54. Le Monde avec AFP, « Un journaliste d’Al-Jazeera arrêté en Égypte », Le Monde, (lire en ligne).
  55. RFI, « Égypte : arrestation d'un journaliste d'al-Jazeera », sur rfi.fr, (consulté le ).

Annexes

Bibliographie

  • Bibliographie Télévision et nouveaux médias dans le monde arabe Site d'André Lange « Histoire de la télévision et de quelques autres médias ».
  • Hugh Miles, Al-Jazira, la chaîne qui défie l'Occident, éd. Buchet Chastel (trad.fr.), 2006.
  • (en) Mohammed El-Nawawy, Adel Iskandar, Al-Jazeera: The Story of the Network That Is Rattling Governments and Redefining Modern Journalism, réimpression, 2003.
  • Olfa Lamloum, L'impact des chaînes satellitaires arabes, article paru dans la Revue internationale et stratégique, no 56, 2004.
  • Riadh Sidaoui, Al Jazeera constitue-t-elle l'opinion publique arabe ou s'harmonise-t-elle avec elle ?, Al Jazeera Centre for Studies, 9 février 2009.
  • Claire Gabrielle Talon, Al Jazeera. Liberté d'expression et pétromonarchie, PUF, 2011.

Articles connexes

Voir aussi

Liens externes

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