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Union patriotique (Espagne)

L’Union patriotique est un ancien parti politique espagnol fondĂ© en par le dictateur Miguel Primo de Rivera et destinĂ© Ă  devenir le parti unique du rĂ©gime, en lieu et place de tous les partis politiques existants.

Union patriotique
UniĂłn PatriĂłtica
Image illustrative de l’article Union patriotique (Espagne)
Logotype officiel.
Présentation
Chef national
(Jefe nacional)
Miguel Primo de Rivera
Fondation Septembre 1923 (officiellement 14 avril 1924)
Disparition 1930
SiĂšge Madrid
Journal La NaciĂłn
Devise Patrie, Religion et Monarchie
Positionnement ExtrĂȘme droite
Idéologie Conservatisme
Corporatisme
Nationalisme espagnol
Catholicisme politique
Monarchisme
Pouvoir personnel (personalismo)
AdhĂ©rents Max. 1 300 000 (chiffre officiel)

SynthĂšse

Au lendemain du coup d'État de Primo de Rivera de , le pouvoir militaire central gouverna, Ă  titre transitoire, par l’intermĂ©diaire des gouverneurs civils, assistĂ©s chacun de dĂ©lĂ©guĂ©s gouvernementaux dĂ©pĂȘchĂ©s par Primo de Rivera dans les villes et communes, avec l’objectif premier de mettre un terme au flĂ©au du caciquisme.

Dans la suite, voulant associer les civils au nouveau rĂ©gime, Primo de Rivera se proposa de doter la dictature d’un instrument citoyen qui, sans ĂȘtre habilitĂ© Ă  dĂ©finir les objectifs ni les politiques Ă  appliquer, se chargerait de leur mise en Ɠuvre et de l’administration de l’État, mettant ainsi en pratique le mot d’ordre rĂ©gĂ©nĂ©rationniste « moins de politique, plus d’administration », en plus de lui fournir une caution publique constante et d’assurer sa mainmise sur l’État. Cette force politique, sous les espĂšces d’un parti unique officiel (quoiqu’aspirant Ă  ĂȘtre un mouvement civique plutĂŽt qu’un parti politique, dans un refus explicite de tout caractĂšre de parti), aurait pour tĂąche de mobiliser la sociĂ©tĂ© civile, de construire et d’organiser une base sociale d’appui au rĂ©gime, et de faire surgir une nouvelle classe dirigeante appelĂ©e Ă  prendre en main les institutions politiques laissĂ©es vacantes. Il s’agirait d’unir, sans Ă©gard Ă  la classe sociale, « tous les Espagnols de bonne volontĂ© » et d’« idĂ©es saines » autour des principes de la « religion, de la patrie et de la monarchie » ; la dĂ©nomination d’« Union » devait symboliser l’unitĂ© de la patrie, en opposition aux caciques traditionnels et aux politiciens qui avaient conduit l’Espagne au dĂ©sastre de 1898 et Ă  une incessante conflictualitĂ© sociale.

Deux structures existantes s’offraient pour servir de soubassement au nouveau mouvement Ă  crĂ©er : d’une part le groupe paramilitaire SomatĂ©n, ranimĂ© par la dictature pour pouvoir remplir sa promesse de restauration de l’ordre public, mais bientĂŽt Ă©cartĂ© comme socle du nouveau parti en raison de son habillage fasciste, et d’autre part les militants laĂŻcs catholiques de l’ACNdP, pour qui le processus engagĂ© par le coup d’État offrait un champ propice Ă  la rĂ©alisation des objectifs du catholicisme social, but ultime de leur activitĂ© publique et motif supĂ©rieur d’adhĂ©sion au nouveau rĂ©gime ; ces propagandistas, issus de la droite catholique antilibĂ©rale et antidĂ©mocratique, dirigĂ©s par Ángel Herrera, allaient s’affairer dĂšs 1923 Ă  fonder des Unions patriotiques, d’abord en Vieille-Castille, puis ailleurs en Espagne, et constituer ainsi un faisceau d’organisations embryonnaires spontanĂ©es, bases du futur grand parti national de la droite catholique en Espagne. Le catholicisme social disposait de toutes les qualitĂ©s souhaitables pour un dictateur avide de reconnaissance, Ă  savoir : capacitĂ© Ă©prouvĂ©e de propagande et de mobilisation de masse, implantation dans une grande partie de l’Espagne, positionnement pragmatique, et une doctrine s’accordant avec les principes du rĂ©gime, dont en particulier une conception du parlementarisme Ă  l’unisson avec une vision organique de la sociĂ©tĂ© et de la reprĂ©sentation politique — doctrine, du reste, conforme aux orientations pontificales.

En , l’UP fut officiellement instituĂ©e, tandis que sa structure de fonctionnement au niveau national ne devait voir le jour qu’en , lors d’une assemblĂ©e nationale Ă  Madrid, avec adoption de statuts prĂ©voyant une organisation rigidement hiĂ©rarchisĂ©e et strictement pyramidale. Les comitĂ©s UP locaux, dans les provinces et dans les municipalitĂ©s, ces derniĂšres rĂ©gies dĂ©sormais par un nouveau statut, devaient servir de vivier pour supplĂ©er aux postes rendus vacants par suite du coup d’État, toutefois sur nomination par les gouverneurs civils.

Les affiliĂ©s Ă©taient des personnes issues de la droite traditionnelle catholique (antilibĂ©rale et antidĂ©mocratique), du maurisme et d’autres groupes conservateurs, ainsi que des apolitiques de tout bord et de simples opportunistes, mais aussi d’anciens caciques opportunĂ©ment reconvertis. Outre les petits propriĂ©taires agricoles de la Vieille-Castille, rĂ©pondirent aussi Ă  l’appel de l’UP la bourgeoisie rurale et les couches moyennes urbaines, attirĂ©es par la promesse d’ordre social et lassĂ©es des abus du rĂ©gime antĂ©rieur.

Parti crĂ©Ă© d’en haut, « Ă  partir du pouvoir et par le pouvoir » (selon l’expression de Calvo Sotelo), l’UP, incrustĂ©e dans les organismes officiels, politiquement inefficace, docilement subordonnĂ©e Ă  une politique dictatoriale brouillonne, allait de plus en plus figurer comme simple organe de propagande et de prosĂ©lytisme au service du nouveau rĂ©gime, et ses membres se retrouver relĂ©guĂ©s au rang de simples exĂ©cutants de la politique gouvernementale, sans guĂšre d’autonomie d’action de ses organes locaux. Au surplus, Primo de Rivera, entraĂźnĂ© dans une dĂ©fense Ă  outrance de son rĂ©gime face aux oppositions croissantes, la transforma en en une organisation parapoliciĂšre, en l’investissant de missions d’enquĂȘte et de renseignement en association avec le SomatĂ©n.

IdĂ©ologiquement, le parti s’adossait aux courants les plus marquants de la droite radicale europĂ©enne et avait fait siens les lieux-communs du conservatisme traditionaliste espagnol, Ă  savoir : identification de la nation espagnole Ă  la monarchie et au catholicisme ; conception organiciste et inĂ©galitaire de la sociĂ©tĂ© nationale ; antiparlementarisme et antipolitisme ; anticommunisme primaire ; centralisme ; soutien Ă  la famille comme cellule principale de la nation ; et dĂ©fense de la propriĂ©tĂ© privĂ©e comme institution de droit naturel — principes que venaient complĂ©ter les valeurs classiques de la pensĂ©e bureaucratique de l’armĂ©e : militarisme, ordre, discipline, hiĂ©rarchie et autoritĂ©. Toutefois, en dĂ©pit de quelques oripeaux fascistes, ni l’UP, ni sa section de jeunesse JUP ne prĂ©sentaient de parentĂ© effective avec les fasci italiens, plusieurs Ă©lĂ©ments traçant en effet une ligne de dĂ©marcation infranchissable entre l’expĂ©rience mussolinienne et la dictature primorivĂ©riste, dont notamment le poids dĂ©cisif de l’Église, la rĂ©fĂ©rence Ă  la Couronne, et le fait que le systĂšme socio-Ă©conomique en vigueur, malgrĂ© quelques rĂ©formes dans le sens corporatiste et Ă©tatiste, ne fut jamais remis en cause.

AprĂšs la dĂ©mission de Primo de Rivera en , l’UP, victime de dĂ©fections massives et bientĂŽt dissous, vit une partie de ses anciens membres rejoindre l’éphĂ©mĂšre UMN, hĂ©ritier supposĂ© de l’UP, cependant que les autres, oublieux de leur ostensible apolitisme, renouaient avec la tant dĂ©criĂ©e politique de partis, si bien que l’UP finit par servir de vivier de futurs dirigeants pour les partis de droite sous la subsĂ©quente RĂ©publique.

Histoire

Prémisses et fondation

Quelques mois aprĂšs l’instauration de la dictature de Primo de Rivera en , le dictateur commença Ă  s’aviser qu’il ne suffisait pas, pour « rĂ©gĂ©nĂ©rer » le pays, de mettre fin Ă  l’« oligarchie » et d’« Ă©radiquer le caciquisme », selon ce qu’il s’était proposĂ©, mais qu’il Ă©tait nĂ©cessaire Ă©galement de mettre en place une « politique nouvelle », qui s’appuierait sur des « gens aux idĂ©es saines » et sur les hommes « de bonne foi » disposĂ©s Ă  s’intĂ©grer dans un « parti politique, mais apolitique, exerçant une action politico-administrative »[1]. Il s’agirait d’une force politique qui, sans ĂȘtre habilitĂ©e Ă  dĂ©finir les objectifs ni les politiques Ă  appliquer, se chargerait de l’administration de l’État, mettant ainsi en pratique le mot d’ordre rĂ©gĂ©nĂ©rationniste « moins de politique, plus d’administration »[2].

Un dĂ©cret royal d’ institua la figure du dĂ©lĂ©guĂ© gouvernemental (« Delegado Gubernativo »), situĂ© Ă  un Ă©chelon de pouvoir immĂ©diatement infĂ©rieur Ă  celui de gouverneur civil. Chaque gouverneur civil disposerait, pour chacune des circonscriptions judiciaires de sa juridiction, d’un tel dĂ©lĂ©guĂ©, selon le mode de fonctionnement trĂšs hiĂ©rarchisĂ© caractĂ©ristique des forces armĂ©es. Ces dĂ©lĂ©guĂ©s devaient nĂ©cessairement ĂȘtre des gradĂ©s (jefe ou capitaine) de l’armĂ©e espagnole, et avaient pour missions principales de faire rapport Ă  leur supĂ©rieur de tout problĂšme ou incident survenu dans les communes de sa circonscription judiciaire et d’inspecter et d’orienter les activitĂ©s des municipalitĂ©s jusqu’à la promulgation du dĂ©cret rĂ©gulant lesdites activitĂ©s. Outre ce travail de surveillance, ils agissaient comme envoyĂ©s de Primo de Rivera dans les villes et communes, avec l’objectif premier d’affronter le caciquat, et comme agents de la future Union patriotique nationale[3].

Le , le CĂ­rculo CatĂłlico Agrario (Cercle politique agraire) de Valladolid publia le manifeste fondateur de l’UniĂłn PatriĂłtica Castellana (UPC)[4], lequel comportait un appel aux citoyens Ă  rejoindre massivement la nouvelle organisation. Selon Ramiro de Maeztu, les principaux points d’attrait du manifeste primorivĂ©riste Ă©taient l’orientation patriotique, le sens de l’ordre, et l’esprit traditionaliste[5] - [6]. Le mois suivant venaient se joindre Ă  l’UPC les « Unions patriotiques » d’Avila, de Burgos et de Palencia, et, en dehors de l’actuelle communautĂ© autonome de Castille et LĂ©on, celle de SĂ©ville. En , des Unions furent fondĂ©es Ă  SĂ©govie, Logroño, TolĂšde et Cadix, suivies en avril par celles de Valence, Ciudad Real, Badajoz, Santander et Madrid. Son premier prĂ©sident Ă©tait le professeur catholique Eduardo Callejo, fort proche d’Ángel Herrera Oria, le fondateur et promoteur de l’AsociaciĂłn CatĂłlica Nacional de Propagandistas (ACNdP). Un catholicisme traditionaliste et corporatiste, s’érigeant en dĂ©fense de la propriĂ©tĂ© et des valeurs agraires, en constituaient le noyau idĂ©ologique initial[4].

Le gĂ©nĂ©ral Miguel Primo de Rivera, qui s’était emparĂ© du pouvoir en Espagne par un coup d’État en 1923 et autour de la figure duquel s’articulait l’activitĂ© politique de l’Union patriotique.

Au printemps 1924, en dĂ©pit de la promesse faite Ă  sa prise de pouvoir par Primo de Rivera et portant que sa dictature serait temporaire, c’est-Ă -dire aussi longtemps que durerait la phase dite « parenthĂšse constitutionnelle », il apparut bientĂŽt que la dictature se prolongerait indĂ©finiment. Le voyage officiel de Primo de Rivera en Italie avait fini par le convaincre de la nĂ©cessitĂ© de faire perdurer la dictature et de la doter d’un instrument citoyen qui par le biais de manifestations, de plĂ©biscites et d’actions de propagande, pourrait l’assister, en plus de lui fournir une caution publique constante[7]. Il semble que ce fut dĂ©but avril 1924 qu’à cette fin Primo de Rivera rĂ©solut de mettre la main sur l’UPC, afin de construire Ă  partir d’elle le parti unique du nouveau rĂ©gime[8].

La reconnaissance officielle de l’UP comme parti national n’intervint pas avant . Le gouvernement central adressa le une circulaire aux dĂ©lĂ©guĂ©s gouvernementaux et aux gouverneurs civils par laquelle il les requit d’« unir et d’organiser tous les hommes de bonne volontĂ© afin de les prĂ©parer pour le moment oĂč le Directoire aurait achevĂ© d’accomplir sa mission ». Cette missive fut la premiĂšre d’une sĂ©rie d’instructions et de consignes adressĂ©es au gouverneurs civils et destinĂ©es Ă  piloter, par le truchement des dĂ©lĂ©guĂ©s de gouvernement, le processus de fondation de sections de l’UP dans les diffĂ©rentes communes. Cette structure simple et hiĂ©rarchisĂ©e, typiquement militaire, comprenant les gouverneurs civils et des dĂ©lĂ©guĂ©s de gouvernement pour les assister, prĂ©sentait l’avantage de pouvoir aisĂ©ment ĂȘtre mise en place dans toutes les provinces d’Espagne[9] - [10] - [11].

Dix jours plus tard, Primo de Rivera esquissait les grandes lignes de son projet : construire un « parti politique, mais qui est au fond apolitique, au sens courant du terme », qui tenterait d’« unir et d’organiser tous les Espagnols de bonne volontĂ© » et d’« idĂ©es saines » autour des principes de la « religion, de la patrie et de la monarchie » (rappelant fortement le triptyque carliste Dieu, Patrie, Roi). En consĂ©quence, la nouvelle organisation se dispenserait d’idĂ©ologie, serait incompatible avec la constitution de 1876, alors toujours en vigueur, et aurait pour rĂŽle de « stimuler l’esprit de citoyennetĂ© de sorte que les Unions [patriotiques] arrivent Ă  former une majoritĂ© parlementaire sur laquelle le roi puisse s’appuyer et qui soit la premiĂšre Ă©tape vers la normalitĂ© constitutionnelle »[12] - [13].

Le , Primo de Rivera communiqua par la voie d’une circulaire Ă  l’attention des gouverneurs civils et des dĂ©lĂ©guĂ©s gouvernementaux que le nouveau grand parti « apolitique » se nommerait UniĂłn PatriĂłtica, et leur demandait d’inviter « les citoyens Ă  organiser le nouveau parti, de constituer des comitĂ©s locaux et provinciaux ». Le , il leur fit parvenir des instructions « pour organiser les nouveaux bataillons citoyens » (huestes ciudadanas) en crĂ©ant des comitĂ©s « upĂ©tistes », dont un bon nombre furent ensuite dĂ©signĂ©s pour former les nouvelles municipalitĂ©s, en conformitĂ© avec le systĂšme de normes portĂ© par le Statut municipal nouvellement adoptĂ©[14].

AprĂšs que Primo de Rivera eut annoncĂ© la conversion de l’UP en parti gouvernemental, les associations autonomes de droite de tout type (de la FĂ©dĂ©ration civico-somatĂ©niste jusqu’aux Unions patriotiques locales) allaient immanquablement s’intĂ©grer dans la « mĂšre des partis », aussi Primo de Rivera dĂ©cida-t-il en d’unifier sous l’étiquette UP le mouvement d’adhĂ©sion spontanĂ© qui s’était produit Ă  partir de 1923. Une fois surmontĂ©e la phase de destruction institutionnelle initiale, la dictature avait en effet besoin d’un instrument politique infĂ©odĂ© pour entreprendre le travail de reconstruction envisagĂ©, en ce compris le nouveau rĂ©gime provincial, l’établissement d’un nouveau systĂšme de listes Ă©lectorales, la rĂ©forme de la justice municipale, la pacification du Maroc, etc.[15] - [13] L’objectif Ă©tait de mettre sur pied un grand mouvement populaire porteur des principes idĂ©ologiques de la dictature et qui aurait Ă  se configurer en vue de concourir sur un Ă©ventuel thĂ©Ăątre de lutte partisane[16]. Lors de son assemblĂ©e le Ă  Medina del Campo, l’UPC (castillane) dĂ©cida d’abandonner le qualificatif de castellana et de s’appeler dĂ©sormais simplement UniĂłn PatriĂłtica[17].

Aperçu général

Les forces armĂ©es espagnoles, qui avaient fait leur virage conservateur aprĂšs le dĂ©sastre de 1898, s’étaient ralliĂ©es Ă  la majoritĂ© silencieuse favorable aux milieux qui au sein de la Restauration incarnaient les positionnements les plus autoritaires. Au lendemain de la victoire du coup d’État, avec l’arrivĂ©e de l’armĂ©e au pouvoir suprĂȘme, les secteurs conservateurs les moins constitutionnalistes allaient manifester des dĂ©sirs de participation politique[18].

La scission d’abord, et la dissolution ensuite (en ), de l’éphĂ©mĂšre Parti social populaire, conservateur, dĂ©mocrate chrĂ©tien et corporatiste, fondĂ© en dĂ©cembre de l’annĂ©e d’auparavant, allait valoir Ă  l’UP un bon nombre de membres, enclins Ă  borner leur action Ă  la seule sphĂšre sociale, prĂ©misse Ă  leurs yeux de la mise en place d’un systĂšme rĂ©pondant aux postulats du catholicisme moderne[19].

D’autre part, un ensemble de personnages, Ă©trangers pour une bonne part au maurisme antĂ©rieur, allaient assumer de grandes responsabilitĂ©s dans le processus d’encadrement de l’UP et dans quelques-unes de ses incarnations les plus marquantes. Ayant pris leurs distances vis-Ă -vis de la dĂ©mocratie parlementaire libĂ©rale, ils se trouvaient Ă  l’aise dans une situation et dans un projet oĂč primaient par-dessus tout le culte des essences nationales symbolisĂ©es par la religion et la royautĂ© — toutefois sans trop se focaliser, en qui concerne cette derniĂšre, sur la personne du monarque du moment. De plus, l’intense travail de modernisation Ă©conomique et sociale de l’Espagne, qu’avait d’emblĂ©e entrepris le rĂ©gime, rejoignait une partie de leurs aspirations les plus profondes, par la conciliation entre dĂ©veloppement matĂ©riel et sauvegarde de l’hĂ©ritage historique[20]. Parmi eux figuraient notamment des professionnels issus majoritairement des sections les plus confessionnelles de l’ACNdP, pour qui le processus engagĂ© par le coup d’État offrait un champ propice pour rĂ©aliser les objectifs du catholicisme social, but ultime de leur activitĂ© publique et motif supĂ©rieur d’adhĂ©sion au nouveau rĂ©gime, avant mĂȘme toute sympathie idĂ©ologique (notamment monarchiste, en particulier alphonsine)[19].

Vers la fin de 1923, les efforts pour mobiliser politiquement les Ă©lĂ©ments dirigeants destinĂ©s Ă  remplacer les militaires dans l’exercice du pouvoir et Ă  constituer le « bloc d’hommes de l’ordre » se portaient plus particuliĂšrement dorĂ©navant sur deux organisations : La Traza, qui s’était habilement muĂ©e en FĂ©dĂ©ration civico-somatĂ©niste (FederaciĂłn CĂ­vico-Somatenista, FCS) pour s’assurer l’acceptation du dictateur, et les propagandistas catholiques d’Ángel Herrera. À partir d’, l’entourage de Primo de Rivera menait des pourparlers avec diffĂ©rents groupes conservateurs dans le but de dĂ©terminer une base d’appui. DĂšs septembre, le journal d’Herrera El Debate appelait Ă  la nĂ©cessaire mobilisation de « la grande masse » pour constituer un grand parti de droite qui collaborerait « dĂšs maintenant » avec le Directoire et se prĂ©parerait Ă  « remplacer par nos organisations celles devenues caduques, renversĂ©es par la Dictature »[21] - [16] - [22] - [16].

Traza et Somatén

Comme socle de dĂ©part pour Ă©difier la nouvelle organisation politique, Primo de Rivera songea dans un premier temps Ă  La Traza, groupuscule barcelonais calquĂ© sur les fasci mussoliniens et Ă©paulĂ© par le gĂ©nĂ©ral Eduardo LĂłpez Ochoa, et qui aprĂšs le coup d’État avait changĂ© sa dĂ©nomination en Partido Somatenista Español (Parti somatĂ©niste espagnol), puis en FederaciĂłn CĂ­vico-Somatenista (FĂ©dĂ©ration civico-somatĂ©niste, FCS)[23].

Historiquement, le SomatĂ©n catalan avait au cours du XIXe siĂšcle laissĂ© provisoirement de cĂŽtĂ© son rĂŽle de protecteur de la propriĂ©tĂ© privĂ©e pour s’engager dans la lutte contre les troupes françaises, puis contre les carlistes et contre les rĂ©publicains rebelles. Au XXe siĂšcle, la rĂ©orientation du SomatĂ©n allait s’accĂ©lĂ©rer avec la grĂšve de la Canadenca de 1919, oĂč malgrĂ© le caractĂšre rural traditionnel de l’institution, ses membres patrouillĂšrent dans les rues de Barcelone, pour intervenir par la suite dans les conflits du travail comme briseur de grĂšve et comme pourvoyeur d’hommes de main au service du patronat. Catholiques, catalanistes conservateurs, monarchistes et carlistes voyaient d’un bon Ɠil la rĂ©surrection du SomatĂ©n sous les espĂšces d’une force de maintien de l’ordre, de la propriĂ©tĂ© et de la discipline sociale. Ses actions percutantes pendant la Semaine tragique et sa riposte Ă©nergique Ă  l’agitation ouvriĂšre de 1917-1920 Ă  Barcelone avaient fait que dans d’autres rĂ©gions d’Espagne oĂč sĂ©vissait un haut degrĂ© de conflictualitĂ© sociale le SomatĂ©n eut bientĂŽt des Ă©mules sous la forme de groupes de citoyens armĂ©s. À Madrid, oĂč une institution traditionnelle du type du SomatĂ©n catalan n’existait pas, il fallut attendre jusqu’aux Ă©vĂ©nements d’aoĂ»t 1917 pour assister Ă  la crĂ©ation des Gardes civiques madrilĂšnes, subdivisĂ©es par la suite en deux organisations, toutes deux fondĂ©es et entretenues par le patronat de la capitale : d’une part la DĂ©fense citoyenne, qui allait donner naissance au SomatĂ©n de Madrid, et d’autre part l’Union citoyenne. Par la dĂ©crue de la conflictualitĂ© du travail vers 1920, ces organisations perdirent de leur pertinence, et ce n’est qu’avec l’avĂšnement de la dictature de Primo de Rivera qu’une organisation semblable ressurgit Ă  Madrid[24] - [25] - [26] - [27].

Le SomatĂ©n dans sa version moderne, dĂ©sormais d’extension nationale, surgit en 1923 comme moyen de rĂ©aliser l’une des grandes promesses de Primo de Rivera, Ă  savoir instaurer l’ordre et la discipline, ce qui lui avait valu dans une bonne mesure sa lĂ©gitimitĂ© dans la sociĂ©tĂ© espagnole de l’époque. En effet, l’institutionnalisation du SomatĂ©n national au titre de milice civique garante de l’ordre public avait Ă©tĂ© l’un des premiers engagements conclus par Primo de Rivera avec les classes conservatrices et aisĂ©es qui s’étaient rangĂ©es Ă  ses cĂŽtĂ©s. La proposition de constituer en confraternitĂ© avec l’armĂ©e une milice civique permanente fut bien accueillie tant par les associations patronales (en particulier le Fomento del Trabajo Nacional) et par les propriĂ©taires terriens de la puissante ConfĂ©dĂ©ration nationale catholico-agraire (ConfederaciĂłn Nacional CatĂłlica-Agraria), que par les groupes mauristes, par certains secteurs de la petite bourgeoisie urbaine et par les cercles conservateurs rĂ©gĂ©nĂ©rationnistes mĂ©contents du rĂ©gime de CĂĄnovas[28] - [29] - [30]. MalgrĂ© une apparence d’autonomie, le SomatĂ©n Ă©tait dans la pratique entiĂšrement subordonnĂ© Ă  l’armĂ©e, comme en tĂ©moignent son organisation se recoupant avec la subdivision en RĂ©gions militaires sous la direction de Commandants gĂ©nĂ©raux, et l’entraĂźnement de ses membres sous la conduite de militaires[31].

L’analogie qui a pu ĂȘtre Ă©tablie entre le SomatĂ©n et l’organisation fasciste a Ă©tĂ© rĂ©pudiĂ©e par l’auteur Shlomo Ben-Ami, compte tenu que l’esprit du SomatĂ©n, que le rĂ©gime entendait transformer en une organisation de vigilance, Ă©tait trĂšs Ă©loignĂ© de la ferveur rĂ©volutionnaire avec laquelle les classes moyennes et infĂ©rieures italiennes rejoignaient les milices fascistes[32] - [31]. L’historien Javier Tusell, abondant dans le sens de l’inexistence d’un SomatĂ©n fascisant, observe que celui-ci est une organisation sous tutelle de l’autoritĂ© militaire, et par lĂ  fonciĂšrement diffĂ©rent des milices mussoliniennes ; d’autre part, dans le cas espagnol, le SomatĂ©n avait Ă©tĂ© ranimĂ© par un rĂ©gime dictatorial nouvellement installĂ©, Ă  la diffĂ©rence de l’Italie, oĂč un mouvement politique d’un type nouveau et transgresseur avait fait irruption et rĂ©ussi Ă  renverser le systĂšme politique en place[33] - [34].

Une autre caractĂ©ristique du SomatĂ©n est son hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© sociale, prĂ©sente d’emblĂ©e dans la formation et faisant fi de la barriĂšre des classes, surtout aprĂšs que Primo de Rivera lui-mĂȘme eut dĂ©clarĂ© que dans le SomatĂ©n « ont leur place les hommes de toutes idĂ©es politiques, et seuls les dĂ©tracteurs Ă  outrance peuvent taxer de rĂ©trograde ou de tyrannique une institution qui a pour devise paix, justice et ordre, qui sont les trois postulats de la vĂ©ritable dĂ©mocratie »[34] - [35].

Le directoire militaire une fois mis en place lĂ©galement, et dĂšs que les premiĂšres mesures propres Ă  garantir l’ordre public (Ă©tat de guerre, suspension des garanties constitutionnelles, dissolution du parlement et militarisation de l’administration gĂ©nĂ©rale de l’État) eurent Ă©tĂ© prises par l’exĂ©cutif, le gouvernement militaire promulgua le le DĂ©cret royal portant crĂ©ation du SomatĂ©n dans toutes les provinces espagnoles[36]. La finalitĂ© premiĂšre de ladite organisation Ă©tait « la prĂ©servation de la paix sociale », la dĂ©fense de la propriĂ©tĂ© privĂ©e et la collaboration citoyenne avec l’autoritĂ© constituĂ©e. Sa fonction Ă©tait double : l’une de nature pratique, par sa mobilisation comme milice auxiliaire des forces et corps de sĂ©curitĂ© de l’État, et l’autre d’ordre moral, comme incitatif Ă  la participation citoyenne aux valeurs civiques portĂ©es par le SomatĂ©n[36].

Ce nonobstant, Ă  la suite de son voyage en Italie de (en compagnie du roi Alphonse XIII), Primo de Rivera Ă©carta l’option de La Traza (dont du reste les membres seront contraints de s’incorporer dans l’UP en ) comme base de son futur parti et finit par se rĂ©soudre Ă  la deuxiĂšme option, Ă  savoir les organisations qu’appuyait alors la droite catholique et qui allaient donner le jour Ă  l’UniĂłn PatriĂłtica Castellana (Union patriotique castillane, UPC), force politique qui s’efforçait d’emboĂźter le pas au Parti populaire italien catholique[37]. Aussi, en vue de la constitution du parti unique du rĂ©gime, le dictateur s’empressa-t-il de mettre sous sa coupe une formation politique en gestation issue du monde catholique antilibĂ©ral et antidĂ©mocratique, non carliste, concrĂštement liĂ© Ă  l’AsociaciĂłn CatĂłlica Nacional de Propagandistas que dirigeait Ángel Herrera Oria et qui avait Ă©tĂ© l’organisation Ă  l’origine des premiĂšres « unions patriotiques » crĂ©Ă©es dans l’intention de mettre sur pied le grand parti de la droite catholique en Espagne[2].

L’ACNdP

L’exemple italien avait conduit le rĂ©gime en Ă  se dĂ©terminer pour l’une des deux organisations en lice depuis octobre pour le monopole de collaboration avec Primo de Rivera, c’est-Ă -dire Ă  opter pour le groupe des propagandistas catholiques, lequel comptait de nombreux affiliĂ©s, organes d’opinion et sous-organisations (le PSP, la ConfederaciĂłn Nacional CatĂłlico-Agraria, l’ACNdP, etc.), et qui obtint donc le placet dictatorial, au dĂ©triment de la FĂ©dĂ©ration civico-somatĂ©niste (FCS), laquelle, minoritaire et restĂ©e fort localisĂ©e (implantĂ©e presque exclusivement Ă  Barcelone), arborait un profil ostensiblement pro-fasciste, caractĂ©ristique qui agissait en sa dĂ©faveur, car malgrĂ© les sympathies Ă©prouvĂ©es par Primo de Rivera pour le fascisme, la tradition libĂ©rale-catholique Ă  laquelle il se rattachait le portait Ă  se distancier des aspects radicaux de la doctrine fasciste italienne. Le catholicisme social, au contraire, disposait, de par son positionnement pragmatique, de tous les atouts souhaitables pour un dictateur avide de reconnaissance, Ă  savoir : capacitĂ© Ă©prouvĂ©e de propagande et de mobilisation de masse, idĂ©es s’accordant avec les principes du rĂ©gime, et implantation dans une grande partie de l’Espagne[38] - [39].

Au surplus, Ă  la diffĂ©rence de la FCS, le catholicisme social avant lancĂ© dĂšs une campagne active de propagande qui dĂ©boucha en dĂ©cembre de la mĂȘme annĂ©e Ă  la fondation de l’UniĂłn PatriĂłtica Castellana, faisceau d’organisations embryonnaires et de caractĂšre spontanĂ© qui avaient jetĂ© les bases de la future UP[13]. Fin , Ángel Herrera avait hissĂ© la banniĂšre de l’UP castillane Ă  Valladolid, capitale de la Castille, avec un net accent rĂ©gionaliste. Ses aptitudes d’organisateur apparurent au grand jour lorsque, quelques semaines plus tard, nombre de localitĂ©s des provinces de Palencia, d’Avila et de Burgos accueillirent Ă  leur tour les promoteurs du nouveau mouvement. Primo de Rivera, au lendemain d’une tentative avortĂ©e de compromis avec Herrera, lança — selon le mot de Cuenca Toribio — une « OPA » sur le mouvement, en le plaçant sous sa tutelle Ă  partir d’ et en en confiant la garde au ministre de l’IntĂ©rieur, le gĂ©nĂ©ral MartĂ­nez Anido[40]. Au moment oĂč, en , Primo de Rivera scellait sa coopĂ©ration avec les propagandistas, l’UP castillane s’affairait Ă  fonder des sections dans d’autres mĂ©tropoles rĂ©gionales, dont SĂ©ville, Palencia, Cadix, Valence, etc.[13] Au mois de , l’organisation Ă©tait en place de maniĂšre effective Ă  SĂ©govie, Logroño et Cadix[41], mais d’abord et surtout en Vieille-Castille, oĂč la mĂȘme annĂ©e la petite paysannerie castillane profondĂ©ment conservatrice avait soutenu avec enthousiasme la fondation de l’UP[42].

Mise en place des structures

En , quand Primo de Rivera eut officialisĂ© son parti, il en dĂ©lĂ©gua la direction nationale au gĂ©nĂ©ral Luis Hermosa. Pourtant, durant plus d’une annĂ©e, le dĂ©veloppement du parti et son organisation nationale durent ĂȘtre diffĂ©rĂ©es par suite de la campagne militaire au Maroc, et aucune structure d’un Ă©chelon supĂ©rieur au niveau provincial ne fut mis en place dans un premier temps, tandis qu’il n’y eut pas non plus de coordination nationale du parti, hormis par l’intermĂ©diaire des gouverneurs civils[14] - [43].

Au cours de l’étĂ© 1924, sous l’égide des gouverneurs civils, une vaste quĂȘte d’adhĂ©rents fut menĂ©e auprĂšs des « hommes neutres et honorables ». Lesdits gouverneurs avaient reçu l’ordre fin aoĂ»t de faire en sorte que dans un dĂ©lai de trois mois au plus, tous les comitĂ©s locaux soient mis en place. Toutefois, avant la constitution du Directoire civil en , aucune structure dĂ©passant l’échelon provincial n’avait encore Ă©tĂ© crĂ©Ă©e, en raison de quoi la coordination au niveau national allait dĂ©sormais ĂȘtre une tĂąche exclusive des gouverneurs civils, qui auraient Ă  en rĂ©fĂ©rer au ministĂšre de l’IntĂ©rieur (Ministerio de la GobernaciĂłn)[17]. Il s’ensuit que l’Union patriotique (UP) devint un parti organisĂ©, selon l’expression du ministre de la dictature JosĂ© Calvo Sotelo, « Ă  partir du pouvoir et par le pouvoir »[44]. De fait, le dĂ©veloppement de l’UP dans les provinces pendant sa premiĂšre phase de fonctionnement, c’est-Ă -dire grosso modo de Ă  , Ă©tait marquĂ© par une soumission complĂšte des sections locales aux directives des dĂ©lĂ©guĂ©s de gouvernement, par la subsĂ©quente prolifĂ©ration de comitĂ©s locaux, et par sa faible portĂ©e publique[45].

En , les dĂ©lĂ©guĂ©s gouvernementaux avaient reçu les premiĂšres instructions pour organiser l’UP, qui portaient que les commissions locales d’organisation auraient Ă  ĂȘtre formĂ©es « Ă  l’initiative des autoritĂ©s de chaque village », qui seraient requises d’appeler Ă  se rĂ©unir « les personnes d’honorabilitĂ© et de prestige reconnus, sans distinction d’idĂ©es et appartenant Ă  toutes les classes sociales ». Au cours du processus de crĂ©ation des nouvelles structures, les dĂ©lĂ©guĂ©s gouvernementaux avaient ordre d’assumer « Ă  tout moment la vigilance et la tutelle sur les comitĂ©s ». Leur mission Ă©tait de s’assurer de la qualification des futurs upĂ©tistes et d’éviter que les comitĂ©s soient « accaparĂ©s par tels ou par tels secteurs politiques n’ayant pas renoncĂ© Ă  leur ancienne affiliation et se joignant fallacieusement Ă  l’UP ». Selon l’historien Ben-Ami, Ă  l’étĂ© 1924, les prĂ©requis pour entrer Ă  l’UP Ă©taient l’acceptation de la constitution de 1876, la disposition Ă  soutenir le Directoire, et le serment « de bonne foi », ce qui tend Ă  dĂ©montrer que Primo de Rivera avait abandonnĂ© les principes du rĂ©gĂ©nĂ©rationnisme anti-cacique et se proposait d’incorporer le plus grand nombre possible de forces sociales[46] - [43]. La mĂȘme missive laissait entendre qu’une fois formĂ©es les commissions locales, il Ă©tait de la responsabilitĂ© des adhĂ©rents d’« exercer une propagande active pour gagner des adeptes », par le biais de « la presse locale » et de « meetings » et au moyen de « circulaires, voire de placards aux coins des rues ». Les organes locaux une fois constituĂ©s, la procĂ©dure suivante Ă©tait de composer les comitĂ©s judiciaires ainsi que la commission provinciale, chargĂ©e de diriger la politique de la province et d’agir Ă  l’image du bureau central du parti[43].

Au printemps 1925, les bureaux des gouverneurs civils reçurent le premier communiquĂ© leur enjoignant de constituer un « ComitĂ© central » (Junta Central) du parti. Le but Ă©tait de doter l’organisation d’une structure nationale et des organes de gouvernement et d’information nĂ©cessaires Ă  donner substance concrĂšte Ă  l’emprise sociale que le parti avait su acquĂ©rir. Cette initiative aussi allait ĂȘtre paralysĂ©e par les dĂ©placements successifs de Primo de Rivera au Maroc, oĂč la situation militaire rĂ©clamait sa prĂ©sence[47].

Le , Primo de Rivera annonça avoir terminĂ© la phase constituante de l’UP, tandis que quelques semaines plus tard, un certain nombre de membres de l’UP occupaient des postes au sein du Directoire civil. Au dĂ©but de se tint enfin Ă  Madrid l’AssemblĂ©e nationale des Unions patriotiques, lors de laquelle furent approuvĂ©s les statuts du parti et furent Ă©lus les membres des organes de celui-ci, qui depuis sa naissance en 1924 ne s’était toujours pas dotĂ© d’une structure dĂ©passant la sphĂšre provinciale. Primo de Rivera fut confirmĂ© dans sa qualitĂ© de jefe nacional (chef national) et l’on procĂ©da Ă  la nomination d’un Conseil directeur national[48].

Quelques mois aprĂšs, en , Primo de Rivera donna ordre aux gouverneurs civils, dont un tiers Ă©taient membres de l’UP, de nommer des upĂ©tistes aux fonctions municipales et aux dĂ©putations provinciales, pour lesquelles la part revenant aux upĂ©tistes fut fixĂ© en Ă  quatre cinquiĂšmes[49], ce qui ne laissa d’ĂȘtre considĂ©rĂ© avec dĂ©fiance par quelques-uns des membres les plus Ă©minents du Directoire civil ; JosĂ© Calvo Sotelo p. ex. tint Ă  avertir Primo de Rivera que « les partis politiques, lorsqu’ils sont organisĂ©s Ă  partir du pouvoir et par le pouvoir, naissent condamnĂ©s Ă  l’infĂ©conditĂ© par manque de sĂšve », et Eduardo AunĂłs devait Ă©voquer plus tard « la tonalitĂ© grisĂątre, dans ses meilleures parties, et vaseuse dans les restantes, qu’eut fatalement le parti unique de l’Union patriotique », en raison de ce que s’affiliaient Ă  l’UP une « infinitĂ© d’élĂ©ments » issus des anciens partis de l’alternance, et qui, laissĂ©s pour compte par le pouvoir, « couraient s’enrĂŽler dans les troupes du vainqueur, car la seule chose qui les intĂ©ressait Ă©tait d’ĂȘtre toujours sur la pente ascendante ». Primo de Rivera lui-mĂȘme s’en Ă©tait avisĂ© quand il Ă©mit l’instruction de sĂ©lectionner les affiliĂ©s, afin que l’UP ne se mue pas en une « agence d’avantages et de placement », mesure qui se rĂ©vĂ©la de peu d’effet, attendu que, surtout en Andalousie, les membres des anciens partis constitutionnels, en particulier les partis conservateurs, ainsi que leurs rĂ©seaux cacicaux, passaient massivement Ă  l’upĂ©tisme pour aller occuper les postes de direction provinciaux et locaux et les ComitĂ©s consultatifs, comme ce fut le cas notamment de JosĂ© de Yanguas MessĂ­a, ci-devant dĂ©putĂ© conservateur pour la ville de Linares, et qui rĂ©ussit ensuite Ă  prĂ©sider l’AssemblĂ©e nationale consultative[50].

En , Ă  l’occasion du 5e anniversaire du coup d’État, le rĂ©gime accueillit Ă  Madrid les maires de la quasi-totalitĂ© des communes de la pĂ©ninsule espagnole et de ses deux archipels (Canaries et BalĂ©ares). Les Ă©diles et les conseils communaux, escortĂ©s par une masse considĂ©rable de citoyens et membres de l’UP, dĂ©filĂšrent devant Primo de Rivera pour tĂ©moigner de la reconnaissance du pays pour son Ɠuvre de chef d’État[51]. Cette mobilisation tardive et prĂ©cipitĂ©e, dont l’important effort d’organisation fut en grande partie le travail de l’UP, avait Ă©tĂ© pensĂ©e comme un Ă©vĂ©nement de masse destinĂ© Ă  marquer l’adhĂ©sion au dictateur et Ă  attester que le rĂ©gime jouissait de vigueur et du soutien populaire, Ă  un moment oĂč dĂ©jĂ  des signes inquiĂ©tants de dĂ©tĂ©rioration se faisaient jour[52]. Accessoirement, cet Ă©vĂ©nement met en Ă©vidence la nette diffĂ©rence entre la dictature espagnole et le fascisme italien, puisqu’il n’y eut pas Ă  Madrid la moindre trace de squadrisme ou de paramilitarisme ; tout en effet, abstraction faite des uniformes des autoritĂ©s militaires, y Ă©tait civil et donna l’occasion Ă  l’Espagne profonde conservatrice de faire une vĂ©ritable dĂ©monstration de force, mais rĂ©gulĂ©e et humaine, fort Ă©loignĂ©e des canevas totalitaires[53].

Idéologie et sociologie des adhérents

L’UP fut dĂšs sa fondation un amalgame d’élĂ©ments provenant de secteurs idĂ©ologiques et sociaux fort disparates, accueillant des personnes issues de la droite traditionnelle catholique (antilibĂ©rale et antidĂ©mocratique), du maurisme et d’autres groupes conservateurs, ainsi que des apolitiques de tout bord et aussi de simples opportunistes[54]. Les novices, bien que volontaires, Ă©taient dĂ©pourvus de l’esprit civique qui caractĂ©risait les partisans mauristes, et leurs positionnements allaient du messianisme et du catholicisme intĂ©griste jusqu’à l’anti-politisme, en passant par le pseudo-conservatisme ; s’y ajoutait une multitude de citoyens espagnols sans autre conviction prĂ©cise, mais dĂ©sireux de voir un ordre s’imposer et de juguler les abus du rĂ©gime antĂ©rieur[55] - [6]. Selon l’historien Ben-Ami, l’UP avait pu s’établir grĂące au dĂ©sir des petits propriĂ©taires agricoles de la Vieille-Castille de s’engager aux cĂŽtĂ©s du nouveau rĂ©gime pour tenter d’éviter l’échec de celui-ci[41]. Il est vrai aussi que la volontĂ© (illusoire) de crĂ©er un simulacre de vie dĂ©mocratique, en marge des procĂ©dures et normes de la dictature, parvint Ă  insuffler une certaine vitalitĂ© Ă  l’UP au lendemain de sa naissance et durant sa premiĂšre phase[56].

Sociologiquement, on recense un nombre significatif de personnes de la bourgeoisie rurale et des couches moyennes urbaines, la plupart sans antĂ©cĂ©dents politiques, et une minoritĂ© avec un passĂ© de militant dans les rangs du maurisme. Une autre filiĂšre de recrutement Ă©tait le groupe des fonctionnaires et petits et moyens agriculteurs, plus particuliĂšrement castillans et lĂ©onais. À ce substrat de base vint donc s’ajouter bientĂŽt, une fois le rĂ©gime affermi, la cohorte des opportunistes, en ce compris les usufruitiers, d’échelle intermĂ©diaire ou basse, de l’ancien rĂ©gime politique ; les zones oĂč ce transbordement prit le plus d’ampleur Ă©taient les terres par excellence du caciquat espagnol, Ă  savoir le sud (la province de Cadix, etc.) et la Galice[57][note 1].

Renouvellement du personnel politique

Agissant en qualitĂ© de parti du pouvoir, et promis Ă  se voir confier les institutions politiques du pays, l’UP ne pouvait manquer de susciter d’emblĂ©e les convoitises des reprĂ©sentants de la tant dĂ©criĂ©e « vieille politique » et, de lĂ , les comportements camĂ©lĂ©onesques de l’ancienne classe politique face Ă  la nouvelle conjoncture[45]. Ce sont donc les arrivistes, parmi lesquels plusieurs rĂ©publicains, et les caciques et intrigants de l’époque canoviste qui, mettant Ă  profit l’inexpĂ©rience politique des fractions issues de la droite authentique, s’emparĂšrent des rĂȘnes du parti dans la pratique quotidienne, en particulier dans les villages et bourgs de campagne, principal vivier de l’UP[58]. Si dans les villes de grande taille, les comitĂ©s de l’UP se sont certes constituĂ©s avec des individus rĂ©ellement neufs n’ayant jouĂ© qu’un faible rĂŽle dans la vie politique antĂ©rieure, dans les petites localitĂ©s au contraire, on constate la persistance des anciennes Ă©lites locales grĂące Ă  leur capacitĂ© d’adaptation Ă  la nouvelle situation ; Ă  la suite de la disparition des partis dits « dynastiques », il leur fallut reconfigurer leur pĂ©rimĂštre de pouvoir, parfois en partageant l’activitĂ© politique avec des nouveaux-arrivĂ©s, dans un exercice de substitution d’allĂ©geances, en basculant des anciens partis vers les normes du nouveau pouvoir central[59]. De façon gĂ©nĂ©rale, les autres strates sociales reprĂ©sentĂ©es, p. ex. les petits et moyens entrepreneurs et les commerçants de toute catĂ©gorie, ne devaient pas, mĂȘme dans les grandes villes, parvenir par leur participation Ă  faire valoir leurs points de vue[60]. Cet Ă©tat de choses eut pour effet collatĂ©ral que les groupes qui s’étaient engagĂ©s dans le projet originel de la dictature allaient progressivement abandonner l’UP[59].

Cette pĂ©rennitĂ© du caciquat fut le principal obstacle au renouvellement effectif des Ă©lites pendant la dictature ; si certes il y eut un changement, celui-ci fut d’une ampleur moindre que ce qu’on avait pu escompter de la « rupture » proclamĂ©e avec tant d’emphase. Alors que dans certaines zones et provinces (notamment Ă  TolĂšde, Ciudad Real, Guadalajara), l’UP permit l’ascension d’élites locales, dans d’autres lieux (Pays valencien, et nombre de zones en Andalousie), ces foyers de renouveau allaient ĂȘtre bientĂŽt Ă©teints par l’action des anciens caciques ; mais dans certaines rĂ©gions, force leur fut de consentir, encore qu’à chaque fois en position dominante, Ă  un arrangement avec les nouveaux dirigeants[60]. Au dĂ©but, les personnages qui rejoignirent le parti Ă©taient des seconds couteaux ou politiciens locaux ayant abjurĂ© leurs anciennes organisations et fait serment d’« honorabilitĂ© »[45], mais bientĂŽt, les anciennes forces caciquiennes allaient dĂ©laisser leurs attaches aux organisations dĂ©funtes pour entreprendre de recomposer leur clientĂšle autour du nouveau parti[61].

Recrutement et effectifs

À partir d’ et jusqu’à sa dĂ©signation comme prĂ©sident national du parti une couple d’annĂ©es aprĂšs, Primo de Rivera procĂ©da plusieurs fois Ă  des levĂ©es arbitraires parmi les groupes sociaux les plus variĂ©s, mais surtout dans la bureaucratie d’État et dans l’administration provinciale. De telles pressions et coercitions allaient s’amenuiser par la suite, jusqu’à disparaĂźtre dans la phase finale du rĂ©gime, oĂč on assista dans certains lieux Ă  de vĂ©ritables dĂ©bandades[62]. De grande importance, comme facteur d’attirance pour le parti, Ă©tait le journal La NaciĂłn, l’organe de presse de l’UP, soutenu avec des fonds de l’administration[63].

Quant au nombre d’affiliĂ©s, le point culminant fut atteint en , avec 1 319 428 adhĂ©rents, selon les chiffres officiels, pour ensuite, Ă  partir de cette date, dĂ©croĂźtre jusqu’à se situer vers la fin de 1929 entre 600 000 et 700 000. Une donnĂ©e plus significative et rĂ©vĂ©latrice du « tiĂšde accueil que connut le projet mobilisateur primorivĂ©riste dans la population espagnole » est, d’aprĂšs GonzĂĄlez Calleja, le modeste tirage atteint par La NaciĂłn, journal de l’UP et du rĂ©gime, avec une cinquantaine de milliers d’exemplaires en 1927[64]. Il reste qu’à certains moments, aux pĂ©riodes fastes de la dictature, des personnes de toute condition, opportunistes et vellĂ©itaires pour beaucoup d’entre elles, acceptĂšrent de grĂ© ou de force la discipline de l’UP, par quoi peuvent apparaĂźtre crĂ©dibles les chiffres faisant Ă©tat d’effectifs d’upĂ©tistes dĂ©passant le demi-million, exorbitant chiffre d’adhĂ©sion active que jamais un parti n’a su atteindre dans aucune conjoncture de l’histoire espagnole contemporaine, encore que les singularitĂ©s de l’UP, allant Ă  l’encontre de sa catĂ©gorisation comme organisation proprement politique, amĂšnent Ă  relativiser la portĂ©e de ce chiffre[62].

Dernier flamboiement

Pendant sa seconde phase (la pĂ©riode comprise entre et dĂ©but 1929), le problĂšme marocain rĂ©solu dĂ©sormais, et dans le contexte d’une situation Ă©conomique ne montrant pour l’heure encore aucun signe de dĂ©gradation, le parti fit l’objet d’une tentative de redynamisation officielle, lorsque Primo de Rivera voulut renforcer les positions de l’UP comme outil en appui Ă  l’institutionnalisation du nouveau rĂ©gime politique qui Ă©tait appelĂ© Ă  rĂ©sulter de l’instauration, annoncĂ©e en , du Directoire civil, oĂč l’exĂ©cutif allait se prĂ©senter comme le gouvernement UP, et oĂč dorĂ©navant les objectifs de la dictature et ceux du parti Ă©taient censĂ©s se confondre[65]. Entre dĂ©but 1926 et fin 1927, Primo de Rivera engagea donc une campagne pour renforcer l’UP. Le ComitĂ© exĂ©cutif national s’employa Ă  rĂ©organiser le mouvement en encourageant la crĂ©ation d’Unions patriotiques dans les provinces et municipalitĂ©s oĂč le parti n’avait pas encore pris pied ou n’était pas encore organisĂ©, en plus de susciter la fondation de sections fĂ©minines et de jeunesse[66] - [67]. Mais l’UP allait par la suite et de plus en plus faire figure de simple organe de propagande, politiquement inefficace, ancrĂ© dans les organismes officiels et limitĂ© Ă  se plier docilement aux ordres et dĂ©sirs du gouvernement[68] - [69].

L’annĂ©e suivante, dans les jours suivant immĂ©diatement le rassemblement de , Primo de Rivera aspira Ă  capitaliser l’aval qu’avait reçu sa politique de la part d’amples couches de la population. La conjoncture Ă©tait alors en effet propice Ă  une tentative de donner corps au projet que le versatile dictateur avait caressĂ© depuis le dĂ©but de la dictature et qui consistait Ă  asseoir la normalisation institutionnelle du rĂ©gime sur les deux forces politiques qu’étaient le socialisme collaborationniste (reprĂ©sentĂ© par Largo Caballero) et le parti gouvernemental, appelĂ©s Ă  incarner respectivement la gauche et la droite du systĂšme. Une fois encore, ce fut Ă  l’UP qu’incomba la majeure partie de la mise en Ɠuvre de cette initiative, qui bĂ©nĂ©ficia aussi des conseils de quelques personnalitĂ©s du canovisme les plus proches du rĂ©gime, tels que Juan de la Cierva, mais n’eut pas la vigueur nĂ©cessaire Ă  sa mise en chantier effective, par quoi l’entreprise resta sans rĂ©sultats tangibles[70].

DĂ©clin et dislocation finale

JosĂ© Calvo Sotelo, en dĂ©saccord avec la formation d’un parti « depuis le pouvoir », rompit son alliance avec la dictature, alliance qu’il avait conclue dans un esprit apolitique[71] :

« L’Union patriotique fut l’une des faiblesses de Primo de Rivera. Sa genĂšse remonte Ă  noĂ«l 1924. Il se trouvait alors Ă  Tarragone, d’oĂč il remit Ă  MartĂ­nez Anido une minute de tĂ©lĂ©gramme Ă  l’intention des gouverneurs leur donnant des instructions pour l’organisation des nouveaux bataillons citoyens. MartĂ­nez Anido et moi voyions l’initiative avec une profonde mĂ©fiance. Et nous en fĂźmes part dans une lettre trĂšs copieuse. Notre point de vue se rĂ©sumait en ces paroles : « Les partis politiques, quand ils sont organisĂ©s de l’intĂ©rieur du Pouvoir et par le Pouvoir, naissent condamnĂ©s Ă  l’infĂ©conditĂ© par manque de sĂšve ». Le prĂ©sident Ă©tait homme prĂȘt Ă  rectifier et il rectifia souvent, y compris sur des problĂšmes essentiels. Mais en cette question, non. Nos observations ne le dissuadĂšrent pas de son plan [...] Jamais le GĂ©nĂ©ral n’a considĂ©rĂ© l’Union patriotique comme un parti politique. VoilĂ  qui exalte son idĂ©e, rendant celle-ci indemne de toute petitesse. Mais, tout bonnement, de ne pas ĂȘtre un parti politique la condamnait Ă  un avenir stĂ©rile. Parce que, guidĂ© par un Ă©clectisme ambigu, elle accomplit son recrutement parmi des gens d’idĂ©ologies les plus variĂ©es, mĂȘme si les gens de droite prĂ©dominaient »[72]. »

À l’échelon provincial, une fois retombĂ© l’élan suscitĂ© par le plĂ©biscite de , le parti disparut Ă  nouveau de la scĂšne publique. Sa condition de parti de pouvoir subordonnĂ© Ă  une politique dictatoriale brouillonne Ă©tranglait l’autonomie d’action de ses bases et relĂ©guait les organes locaux, pourtant missionnĂ©s d’aiguillonner le parti et de mobiliser les citoyens, au rang de simples exĂ©cutants de la politique gouvernementale[67].

À partir de 1928, on assiste Ă  une recrudescence des actes d’opposition au rĂ©gime, sous la forme de manifestations et de grĂšves, chez les Ă©tudiants, les professeurs et les ouvriers, et chez certaines fractions de la bourgeoisie et des professions libĂ©rales, mĂ©contentes de la politique fiscale, du manque de libertĂ©s et de l’interventionnisme d’État de la dictature. De plus, des factions importantes de l’armĂ©e et des milieux conservateurs catholiques proclamaient leur opposition au dictateur[73]. L’attrition des affiliations Ă  l’UP aprĂšs 1929 marque le divorce entre le rĂ©gime et les milieux conservateurs, tels que les catholiques rĂ©formistes, qu’avaient effarouchĂ©s la primautĂ© de l’État sur l’Église, les pourparlers engagĂ©s avec le syndicat UGT dans les comitĂ©s paritaires des entreprises, et le projet de nouvelle constitution mise en chantier par le rĂ©gime[74] - [75].

À la suite du coup d’État avortĂ© de JosĂ© SĂĄnchez Guerra de , la dictature s’engagea dans une dĂ©fense Ă  outrance du rĂ©gime, durcissant la rĂ©pression intĂ©rieure et transformant ses organisations (l’UP et le SomatĂ©n) en organes de police et de surveillance. En vertu des dĂ©crets royaux des 3 et , les Unions patriotiques mirent en place des centres de recherche et de renseignement citoyen, oĂč l’on pouvait collaborer avec les autoritĂ©s au maintien de l’ordre public[76] - [77]. L’UP passa ainsi, selon les termes de GonzĂĄlez Calleja, d’« un appui passif Ă  une implication active et intense dans la prĂ©servation du rĂ©gime par le biais de tĂąches parapoliciĂšres et d’ordre public, qui la rapprochait du rĂŽle du fascisme dans le pouvoir »[78]. Bien que cette dĂ©rive quasi-totalitaire ne devait pas arriver Ă  son terme, attendu que Primo de Rivera dĂ©missionna moins d’un an plus tard, elle eut pour effet de radicaliser les positions de l’UP, qui pendant la premiĂšre moitiĂ© de l’annĂ©e s’acharna Ă  inverser la crise du rĂ©gime[77].

Fin 1929, la faiblesse de la dictature incita Ă  envisager une rĂ©organisation du parti, cette fois en instaurant des directoires locaux et provinciaux propres Ă  simplifier sa structure et Ă  lui confĂ©rer une plus grande agilitĂ©. Cependant, cette restructuration ne put ĂȘtre menĂ©e Ă  bien, et le , aprĂšs avoir perdu la faveur de l’armĂ©e et du monarque, Primo de Rivera annonça sa dĂ©mission. Seul un petit groupe de ses collaborateurs les plus radicalisĂ©s tentĂšrent de maintenir vivant l’hĂ©ritage de la dictature en fondant une organisation pouvant faire figure de successeur de l’UP, l’Union monarchique nationale (UniĂłn MonĂĄrquica Nacional, UMN)[79].

AprĂšs que le roi eut acceptĂ© sa dĂ©mission le , Primo de Rivera annonça avant de quitter l’Espagne que « les anciens ministres de la Dictature publieront un manifeste, adressĂ© au pays, que je tiens pour trĂšs efficace. Je crois que si ces anciens ministres se prĂ©sentent aux Ă©lections, ils arracheront plus de voix que n’importe quelle autre organisation politique ». Le , le journal La NaciĂłn, qui avait servi d’organe officieux de la dictature, publia une note de Primo de Rivera oĂč celui-ci donnait toute licence aux affiliĂ©s de l’UP de rejoindre d’autres organisations « pour autant que celles-ci ne soient pas opposĂ©es au crĂ©do, aux finalitĂ©s et aux normes de conduite de celle-lĂ  » et oĂč il assignait Ă  l’UP la mission de prĂ©parer les gens Ă  agir en politique « d’une maniĂšre abstraite, toujours dans les limites de notre devise : Patrie, Religion et Monarchie ». La note concluait en Ă©nonçant que « c’est donc le moment d’affirmer notre foi dans les principes originaires : robuste et saine formation de la citoyennetĂ© dans l’amour exaltĂ© pour l’Espagne, dans la fervente dĂ©votion Ă  Dieu et Ă  son Église, et dans l’adhĂ©sion Ă  la forme monarchique de gouvernement, comme fille de la tradition et du droit nationaux »[80].

La personne dĂ©signĂ©e par Primo de Rivera pour diriger la nouvelle organisation mise en avant par les anciens ministres de la dictature Ă©tait Rafael Benjumea y BurĂ­n, comte de Guadalhorce. L’objectif principal serait de dĂ©fendre l’Ɠuvre rĂ©alisĂ©e par la dictature, ainsi que l’exposa JosĂ© Calvo Sotelo le , aprĂšs s’ĂȘtre rĂ©uni, en compagnie de JosĂ© de Yanguas MessĂ­a et d’Eduardo Callejo de la Cuesta, avec le roi Alphonse XIII : « Il existe une Ɠuvre accomplie par la Dictature qu’il y a lieu de dĂ©fendre et de soutenir [...] comme le problĂšme du Maroc, les statuts provincial et municipal, la consolidation du budget, le maintien du principe d’autoritĂ© et l’essor donnĂ© aux travaux publics »[81].

Ce nonobstant, la rĂ©action gĂ©nĂ©rale des « bataillons » de l’UP fut, au lendemain de la dĂ©mission de leur chef national, la fuite et la dĂ©bandade. ParallĂšlement aux manifestations contre la dictature et aux attaques contre les siĂšges du parti, de nombreux affiliĂ©s se rendaient au bureau de l’UP pour requĂ©rir d’ĂȘtre rayĂ©s de ses registres[82]. Les personnes qui avaient, sous le patronage du rĂ©gime, monopolisĂ© la politique locale se mirent en quĂȘte de nouvelles structures leur permettant de sauvegarder les parts de pouvoir acquises durant le septennat primorivĂ©riste. Pour plusieurs de ces caciques, la solution sera de rejoindre les partis traditionnels (« dynastiques ») restaurĂ©s ou tel groupement rĂ©publicain prometteur. De ces prompts changements d’étiquette il ressort que l’UP n’avait pas Ă©tĂ© en mesure de surmonter les vieux schĂ©mas partidaires et que, dĂ©pourvue d’un corps militant engagĂ©, elle Ă©tait doctrinalement inviable comme relĂšve Ă  la dictature. Il apparut impossible de maintenir ensemble les diverses sensibilitĂ©s, par quoi le parti se disloqua en affrontements internes, aux dĂ©pens de la gestion des administrations, ce qui contribua Ă  discrĂ©diter l’organisation. Cette circonstance atteignit son expression maximale Ă  la fin du rĂ©gime, quand la crise du pouvoir central fit affleurer les tensions entre les diffĂ©rentes fractions de l’UP[83].

Aussi, l’UP subit une rapide dĂ©sagrĂ©gation et le , le Conseil directeur national donna la permission aux affiliĂ©s de s’incorporer dans d’autres partis, sous rĂ©serve que leur idĂ©ologie ne soit pas incompatible avec l’upĂ©tisme. Un mois plus tard, une AssemblĂ©e nationale se rĂ©unit Ă  Madrid, lors de laquelle une majoritĂ© de dĂ©lĂ©guĂ©s demandĂšrent la dissolution du parti, beaucoup d’entre eux allant rejoindre l’Union monarchique nationale, nouvellement fondĂ©e Ă  l’initiative d’anciens membres du Directoire civil et hĂ©ritiĂšre de la structure de l’UP[84], pendant que d’autres dirigeants et militants de base allaient s’enrĂŽler dans la CEDA, oĂč un accueil inĂ©gal leur fut rĂ©servĂ©, ou encore trouver refuge dans des secteurs de droite plus Ă©litistes. D’autre part, il Ă©tait vain d’espĂ©rer que l’UP puisse sous la dictablanda et sous la RĂ©publique se changer en un parti dĂ©mocratique. PrivĂ©e dĂ©sormais d’aide et de protection officielles, aprĂšs la tentative dĂ©sabusĂ©e de se reconstituer sous la dĂ©nomination d’Union monarchique nationale, l’UP finit donc par s’éclipser[85].

Organisation et fonctionnement

Structures de direction et d’encadrement

RecepciĂłn a Miguel Primo de Rivera en San SebastiĂĄn con banderas de la UniĂłn PatriĂłtica de GuipĂșzcoa

Le socle de base de l’Union patriotique Ă©tait fondamentalement local et provincial, et son ComitĂ© directeur national, Ă©tabli en 1926, n’eut jamais de fonctions bien prĂ©cises[63]. Ce n’est en effet qu’au dĂ©but de , lors de l’AssemblĂ©e nationale des Unions patriotiques rĂ©unie Ă  Madrid, que l’UP put enfin se doter d’une structure nationale, en adoptant dĂ©finitivement sa grille statutaire, rigidement hiĂ©rarchisĂ©e et strictement pyramidale, qui s’appuyait sur trois instances de dĂ©cision : le Chef national, le Grand Conseil directeur national (Gran Junta Directiva Nacional), et le ComitĂ© exĂ©cutif central (ComitĂ© Ejecutivo Central), le premier nommĂ© apparaissant comme le vĂ©ritable organe exĂ©cutif. Primo de Rivera y fut consacrĂ© chef national et l’on procĂ©da Ă  la dĂ©signation du Conseil directeur national — « contrefaçon du Grand Conseil du fascisme » selon GonzĂĄlez Calleja —, qui se composait d’un vice-prĂ©sident, d’un secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral, et de huit membres adjoints investis de fonctions consultatives (dont quatre Ă©lus par le ComitĂ© directeur national et quatre choisis par le Chef national), des 50 chefs provinciaux de l’UP, et de 21 personnes dĂ©signĂ©es directement par Primo de Rivera. Cependant, aprĂšs son assemblĂ©e fondatrice, cet organisme ne se rĂ©unit plus qu’une seule fois par la suite, en [48] - [86] - [87].

Aux Ă©chelons provincial et local furent instituĂ©s cinquante AssemblĂ©es et autant de ComitĂ©s directeurs provinciaux (Juntas Directivas Provinciales), oĂč la mĂȘme structure se rĂ©pĂ©tait, avec un chef provincial ou local, secondĂ© par un ComitĂ© consultatif (Junta Asesora) composĂ© de huit personnes, dont les membres Ă©taient pour moitiĂ© choisis par le chef lui-mĂȘme. L’activitĂ© du parti au niveau provincial et local Ă©tait soumise Ă  un Ă©troit contrĂŽle de Madrid, notamment par le truchement des gouverneurs civils, vu que c’étaient eux qui dĂ©cidaient de la nomination du chef provincial et des chefs locaux, qu’ils tentĂšrent Ă  plusieurs reprises d’avoir la haute main sur le parti, et qu’ils interfĂ©raient dans l’attribution des postes au sein mĂȘme de l’UP, encore qu’à partir d’ il leur ait Ă©tĂ© enjoint officiellement de s’abstenir de toute intervention[86] - [48] - [87] - [88], et lors mĂȘme que les statuts stipulaient que les autoritĂ©s gouvernementales, jusque-lĂ  acteurs centraux dans le pilotage des Unions patriotiques, Ă©taient dĂ©pouillĂ©es de leur droit d’intervenir dans les associations locales et provinciales du parti, supposĂ©es ne relever dorĂ©navant que de leurs supĂ©rieurs immĂ©diats[89].

Le dernier niveau, l’échelon municipal, pivotait autour de deux organismes : le chef local et le comitĂ© consultatif du chef local. Dans les derniers Ă©chelons prĂ©valait la mĂȘme atmosphĂšre autoritaire que dans les Ă©chelons nationaux, avec une influence dĂ©cisive des titulaires des organes exĂ©cutifs[90].

La prise en mains des institutions politiques par le parti gouvernemental fut confirmĂ©e par diverses instructions communiquĂ©es entre 1926 et 1928 spĂ©cifiant que « les corps de l’État doivent se composer quasi totalement d’affiliĂ©s des Unions patriotiques ». Pour JosĂ© Calvo Sotelo, la dĂ©cision conduisant Ă  ce que le parti monopolise les institutions et accapare l’attribution des postes Ă  pourvoir Ă©tait une grossiĂšre erreur, car cet exclusivisme eut pour effet que plusieurs personnes neutres et aptes Ă  une collaboration vigilante se tenaient Ă  l’écart des corps de l’État, laissant ceux-ci aux seuls militants du parti, au prĂ©judice du rĂ©gime, qui se privait ainsi de l’apport d’un prĂ©cieux contingent de collaborateurs honnĂȘtes et dĂ©sintĂ©ressĂ©s[89].

L’UP n’eut jamais l’envergure d’un organisme politique moderne, comme l’aura plus tard la CEDA, pour certains dirigeants de laquelle l’UP aura justement la valeur d’exemple Ă  ne pas suivre quand il s’agira de mettre au point une machine politique souple et bien huilĂ©e. Sans instances de direction efficaces, les uns et les autres se disputant les rĂŽles dirigeants, sans dĂ©bats internes, l’UP mena, malgrĂ© la vive attention que lui portait Primo de Rivera, une existence indolente, oscillant entre impulsions passagĂšres venant du gouvernement et de longues pĂ©riodes d’inertie et de dĂ©sorientation, sous le signe d’un Ă©tat provisoire durable, dans l’attente d’une pĂ©rennisation politique et idĂ©ologique qui ne devait jamais advenir[91]. Nonobstant une armature similaire Ă  celle de tout autre parti, l’UP ne prĂ©sentait jamais les traits incontestables d’une force politique dĂ©mocratique, dont notamment la capacitĂ© d’intĂ©gration et la libertĂ© d’esprit. NĂ©anmoins, rien n’autorise Ă  voir l’UP comme un syndicat d’intĂ©rĂȘts se vouant, Ă  l’abri de sa devise « Patria, ReligiĂłn y MonarquĂ­a », Ă  rĂ©partir entre ses membres les ressources du pays[62].

À la dĂ©charge du dictateur, il convient de souligner que la mise en marche du parti eut lieu avec une rapiditĂ© inusitĂ©e : c’est un mois seulement aprĂšs que Primo de Rivera se fut arrogĂ© la direction de l’UP que le parti fut portĂ© sur les fonts baptismaux le Ă  Medina del Campo devant une assistance nombreuse, mĂȘme si l’élaboration de son organigramme de fonctionnement devait prendre encore un certain temps[87].

Enfin, une couverture de presse et une politique de diffusion Ă  l’internationale et dans la jeunesse (sous les espĂšces des JUP) venaient complĂ©ter la structure organisationnelle du parti[90].

Section de jeunesse (JUP)

À l’instar de l’UP elle-mĂȘme, les sections de jeunesse du parti (Juventud PatriĂłtica, JUP) furent crĂ©Ă©es sur instigation d’en haut, et leur pratique politique dans les provinces Ă©tait totalement assujettie aux hauts dignitaires de l’organisation principale ; les valeurs transmises par les JUP Ă©taient celles mĂȘmes de cette organisation principale, Ă  savoir : le militarisme, le nationalisme espagnol autoritaire et exclusif, et la religion catholique comme essence de l’Espagne[92].

Si cette structure d’enrĂŽlement de la jeunesse procĂšde assurĂ©ment, sous l’angle formel, d’un mimĂ©tisme — ou du moins d’un parallĂ©lisme avec — les ONB de l’Italie fasciste, l’analogie ne va pas au-delĂ  de l’apparence extĂ©rieure[90]. En effet, de mĂȘme qu’en ce qui concerne l’UP elle-mĂȘme, oĂč la rĂ©alitĂ© Ă©tait loin de coĂŻncider avec l’idĂ©e formulĂ©e Ă  son sujet par PemĂĄn et selon laquelle il Ă©tait nĂ©cessaire pour amener les masses Ă  la politique de suivre l’exemple de Mussolini[93] - [92], les organisations de jeunesse n’étaient pas davantage prĂšs de rĂ©aliser cet objectif et, Ă  en croire la presse de l’époque, leur rĂŽle Ă©tait simplement celui d’escorteurs des personnalitĂ©s politiques de premier rang du parti. JuliĂĄn CortĂ©s Cavanillas (alias Carlos Wilf), l’un des thĂ©oriciens du rĂ©gime, Ă©crivit au sujet des JUP[94] :

« Le jeune d’aujourd’hui doit se rendre compte de ce que le rĂ©gime actuel a fait et fait encore pour le bien de l’Espagne ; il doit se renseigner sur ce qui a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© au cours de ces cinq annĂ©es par la Dictature, laquelle n’a pas un seul instant dĂ©tournĂ© les yeux des jours futurs, oĂč il reviendra Ă  la jeunesse d’aujourd'hui de recueillir les bĂ©nĂ©fices d’un effort aussi patriotique et austĂšre[95]. »

Initialement, les JUP durent faire face Ă  la suspicion des politiciens chevronnĂ©s de l’UP, qui discernaient dans les sections de jeunesse, Ă  cause de l’inexpĂ©rience de leurs membres, un danger potentiel pour l’organisation. Les premiĂšres villes Ă  mettre sur pied des JUP Ă©taient Madrid, Barcelone et SĂ©ville, oĂč l’on s’évertua, mais en vain, d’attirer les dirigeants des principales associations scolaires et estudiantines. Primo de Rivera ne songeait pas Ă  accorder d’autonomie aux JUP, ainsi qu’il ressort d’un sien discours prononcĂ© en , oĂč il avertissait que les JUP ne pouvaient[96] :

« [...] d’aucune maniĂšre se considĂ©rer comme des organismes intĂ©grants dĂ©liĂ©s des Unions patriotiques. Ils pourront ĂȘtre des pĂ©piniĂšres [...] aptes Ă  transmettre Ă  ces secteurs notre enthousiasme et notre idĂ©ologie, et [Ă  introduire chez eux] l’affirmation que d’ĂȘtre jeune n’implique pas d’ĂȘtre rĂ©volutionnaire au sens de rĂ©bellion ou de mĂ©connaissance de la Puissance publique. Car l’organisation de ces jeunesses patriotiques, dont nous escomptons tant et qui doivent avoir toutes nos sympathies par leur enthousiasme et leur jeunesse, en deviendrait organiquement dramatique et irrĂ©alisable en pratique. Elles doivent commencer Ă  donner l’exemple de discipline et de jeunesse. Elles doivent commencer Ă  donner l’exemple de discipline et de subordination aux organes de direction de l’UP[97]. »

Dans chaque commune ou dans chaque quartier des villes se reproduisait le mĂȘme schĂ©ma d’organisation, avec constitution d’un comitĂ© d’organisation et nomination d’un chef et d’un sous-chef. Les conditions d’affiliation imposaient d’avoir plus de 18 ans et moins de 35 ans. Les missions des sections de jeunesse s’énonçaient comme suit[98] :

« [...] mener une propagande active et vigoureuse, sans causer de perturbations ni d’inconvenances, afin que les saines doctrines et ses exhortations citoyennes parviennent aux secteurs d’opinion qui ne sont toujours pas organisĂ©s. Donner l’exemple de discipline et de subordination aux organismes de l’Union patriotique, en suivant toujours leurs rĂšgles et inspirations[99]. »

De surcroĂźt, ces mĂȘmes statuts, mettant au jour la censure interne, imposaient que lors des rĂ©unions des JUP « ne seront traitĂ©s que les sujets figurant Ă  l’ordre du jour et ceux que la PrĂ©sidence aura soumis Ă  dĂ©libĂ©ration, soit Ă  sa propre initiative, soit Ă  la requĂȘte d’une moitiĂ© plus un des adhĂ©rents »[99] - [98].

Le travail de recrutement et de propagande des JUP suivait le mĂȘme modĂšle qu’à l’UP, c’est-Ă -dire chercher Ă  attirer le plus grand nombre possible de personnes, sans Ă©gard Ă  la classe sociale[100] - [98].

La propagande Ă©tait elle aussi assujettie Ă  celle de la section adulte. Les confĂ©rences des JUP Ă©taient centrĂ©es sur l’Ɠuvre civilisatrice de l’Espagne, sur la formation et l’expansion de la nation espagnole, sur la rĂ©gĂ©nĂ©ration du pays, sur le fascisme italien, dont il Ă©tait fait l’apologie, et sur la menace du communisme en Europe[101], et faisaient l’éloge des accomplissements du rĂ©gime, tels que le Statut municipal ou l’AssemblĂ©e nationale — car c’est au moyen de ces nouvelles institutions que les maux de l’Espagne auraient Ă  ĂȘtre combattus —, tout en diabolisant les opposants Ă  la dictature et ses dĂ©tracteurs idĂ©ologiques[102]. L’action des jeunes affilĂ©s ne devait jamais aller au-delĂ  de la simple propagande, laquelle au demeurant restait fort Ă©loignĂ©e de la rhĂ©torique violente du fascisme italien. Ce n’est qu’à la suite des insurrections de Valence et de Ciudad Real en qu’un rĂŽle plus important allait ĂȘtre dĂ©volu Ă  l’UP et ses jeunes affiliĂ©s[103] - [104].

Face aux JUP, la FĂ©dĂ©ration universitaire scolaire, fondĂ©e fin 1926, jouissait d’un attrait grandissant auprĂšs de la jeunesse espagnole, au dĂ©triment du parti officiel, tandis que les JUP se rĂ©vĂ©laient totalement inefficaces Ă  contrecarrer les mobilisations contre le rĂ©gime dictatorial. La nature rigoureusement hiĂ©rarchique de la dictature de Primo de Rivera, oĂč Ăąge et expĂ©rience constituaient des prĂ©requis incontournables, Ă©tait un obstacle Ă  ce que les jeunes puissent s’engager en faveur du rĂ©gime[74].

Organes de presse

Au commencement de la dĂ©cennie 1930, l’Union patriotique dĂ©tenait un important Ă©ventail de pĂ©riodiques, quand mĂȘme bon nombre de ceux-ci Ă©taient Ă  pĂ©riodicitĂ© hebdomadaire, et que peu avaient une parution quotidienne. Les principaux pĂ©riodiques Ă©taient La NaciĂłn de Madrid, La RazĂłn de Barcelone, Diario Regional de Linares, La Voz de Cordoue, et Teruel de la ville homonyme[105], pour un total de 70 publications locales et rĂ©gionales[106].

Avec La NaciĂłn, organe officieux du parti, l’UP disposait de son propre porte-voix journalistique. Atteignant un tirage de 50 000 exemplaires en 1927, il Ă©tait de loin l’organe de presse le plus populaire du parti. D’autre part, Ă  partir d’ et jusqu’à la fin de la dictature, les militants du parti pouvaient se tenir au fait des dĂ©tails de son parcours dans les colonnes du BoletĂ­n de la UniĂłn PatriĂłtica, qui devint le vĂ©ritable organe interne de l’UP, et dont, malgrĂ© les fonds qui ne lui faisaient jamais dĂ©faut, le tirage ne dĂ©passa jamais vers la mĂȘme date les quinze mille exemplaires, chiffre significatif du peu d’intĂ©rĂȘt montrĂ© par les militants de l’UP pour les nouvelles et pour l’actualitĂ© de leur propre formation politique, surtout par rapport au nombre d’affiliĂ©s qui se chiffrait Ă  1 319 428 en [42] - [90].

RĂŽle politique

ChargĂ© de dĂ©fendre le rĂ©gime dictatorial, l’UP pratiquait le culte de la personnalitĂ© et Ɠuvrait, selon J. L. RodrĂ­guez JimĂ©nez, comme « un parti gouvernemental organisĂ© Ă  partir du pouvoir » qui « s’efforçait de mobiliser les secteurs les plus traditionnels de la petite bourgeoisie et le paysannat. À cette fin, il faisait un ample usage de la propagande et montait de constantes manifestations de loyautĂ© et de soutien au rĂ©gime et, plus particuliĂšrement, Ă  Primo de Rivera lui-mĂȘme »[107].

En , dans le cadre de sa politique de lutte contre le caciquat, Primo de Rivera donna le coup d’envoi de sa rĂ©novation administrative de l’État avec l’adoption du Statut municipal et avec de timides avancĂ©es en direction d’un gouvernement civil. Conscient du soutien populaire que lui valait pour le moment sa « politique des faits », Primo de Rivera voulut assurer sa mainmise sur l’État par la crĂ©ation d’un parti unique officiel. L’UP, rĂ©putĂ© le premier parti unique de l’histoire moderne de l’Espagne, avait pour tĂąche de constituer et d’organiser une base sociale d’appui au rĂ©gime et de faire surgir une nouvelle classe dirigeante appelĂ©e Ă  prendre en main les institutions politiques[16]. Par consĂ©quent, dans ses dĂ©buts, la jeune dictature appuyait son pouvoir sur trois grands piliers : l’armĂ©e, l’UP, et les municipalitĂ©s rĂ©formĂ©es, chargĂ©es d’attribuer les postes de dĂ©cision Ă  des citoyens acquis Ă  la cause de Primo de Rivera[108] - [109]. En vĂ©ritĂ©, l’efficacitĂ© de l’UP dans sa mission d’« extirpation du caciquisme » fut rĂ©duite, pour la raison que le parti incorpora dans ses rangs un grand nombre d’anciens caciques et permit la crĂ©ation de nouveaux caciquats, comme ce fut le cas dans la province de Cadix, lieu d’origine de Primo de Rivera, oĂč la quasi-totalitĂ© des caciques traditionnels avaient rejoint l’UP[110].

L’historiographie a eu tendance Ă  voir dans l’apparition de l’UP le point d’inflexion vers une dĂ©militarisation de la dictature. Si cette vision des choses est globalement valide, il apparaĂźt nĂ©anmoins que dans les annĂ©es 1924-25, la dictature n’était d’aucune maniĂšre empressĂ©e Ă  gommer sa teinte militaire, ni davantage aprĂšs que la pacification du protectorat maroquin eut Ă©tĂ© un fait acquis ; en effet, en dĂ©pit de la conversion du rĂ©gime en un « directoire civil », Primo de Rivera ne cessait de considĂ©rer la caste militaire comme source exclusive de son pouvoir. Ce qui donc inspira Primo de Rivera Ă  donner le jour Ă  l’UP ne fut pas la volontĂ© de lĂ©gitimer civilement son rĂ©gime, vu que cela n’a jamais Ă©tĂ© sa prĂ©occupation, et que de toute façon, il estimait que ses conquĂȘtes Ă©conomiques et sociales, qui avaient transformĂ© un pays agraire et rural en un pays industriel et urbanisĂ©, et le fait qu’il ait rĂ©solu dans un sens favorable Ă  l’Espagne un contentieux colonial, suffisaient amplement Ă  ses yeux Ă  justifier son rĂ©gime[111] - [112]. En rĂ©alitĂ©, et bien que le parti ait Ă©tĂ© prĂ©sentĂ© par le pouvoir comme le garant de la future « dĂ©militarisation » des fonctions gouvernementales, l’UP avait pour principale raison d’ĂȘtre de combler avec du personnel infĂ©odĂ© au rĂ©gime les vides qui avaient Ă©tĂ© laissĂ©s dans les administrations locales et provinciales et dans les institutions gouvernementales par la suspension de la constitution de 1876 et par la fermeture « provisoire » du parlement Ă  la suite du coup d’État[56] - [16]. D’autre part, dans cette phase de transition, le parti gouvernemental avait Ă©tĂ© conçu comme un instrument apte Ă  lĂ©gitimer les organes de la dictature et comme vivier politique et idĂ©ologique oĂč puiser les titulaires des futures charges publiques[16].

Un aspect marquant de l’UP est son caractĂšre de parti constituĂ© depuis le sommet du pouvoir, et dotĂ© par celui-ci de la capacitĂ© d’action nĂ©cessaire Ă  l’accomplissement de son travail de propagande et de prosĂ©lytisme au service du nouveau rĂ©gime[113] - [114]. L’UP se trouvait dĂšs lors relĂ©guĂ© au rang de simple outil de propagande du rĂ©gime, toujours assidu Ă  se plier aux ordres de son chef national, tĂ©moin la manifestation de masse rĂ©unie en sa faveur Ă  Madrid le . En outre, en , Primo de Rivera, entraĂźnĂ© dans une dĂ©fense Ă  outrance de son rĂ©gime, la transforma aussi en une organisation parapoliciĂšre, aprĂšs l’avoir investie de fonctions d’enquĂȘte et de renseignement en collaboration avec le SomatĂ©n, ces deux structures composant alors une façon de « ligue patriotique ». AprĂšs qu’eut Ă©tĂ© rejetĂ© le projet de constitution soumis au suffrage populaire en , l’UP lança en dĂ©fense dudit projet Ă  travers toute l’Espagne une campagne attaquant notamment la constitution de 1876 et dont le principal temps fort fut le grand rassemblement au cinĂ©ma Monumental de Madrid Ă  la mi-septembre de la mĂȘme annĂ©e[115].

Primo de Rivera lui-mĂȘme resta peu clair quant aux objectifs et au destin futur de l’UP ; Ă  certaines occasions, il dĂ©clarait que diffĂ©rents partis surgiraient de l’UP dans le futur, Ă  d’autres moments, il affirmait qu’elle Ă©tait le premier parti du nouveau rĂ©gime instaurĂ© par lui. En ce qui concerne le programme, s’il proclamait qu’il s’agissait d’« un parti monarchiste centralisĂ©, dĂ©mocratique d’une façon tempĂ©rĂ©e et sereine », il crĂ©a ensuite une devise — « Patrie, Religion et Monarchie » — qui, tout en prĂ©sentant une ressemblance suspecte Ă  celle des carlistes, tendait Ă  rĂ©duire l’importance des principes monarchistes en les mentionnant en troisiĂšme lieu seulement. De mĂȘme, le projet de l’UP restait confus en ce qui touche Ă  ses liens avec le gouvernement[116].

La convocation en de l’AssemblĂ©e nationale consultative et la rĂ©daction du projet de constitution de 1929 impliquaient la rupture dĂ©finitive de la dictature avec le systĂšme parlementaire, suspendu Ă  titre « provisoire » quatre ans auparavant. Par lĂ , l’UP dĂ©savouait les idĂ©aux sous-tendant la constitution de 1876 et avait optĂ© pour l’implantation d’un systĂšme corporatiste, confirmant du mĂȘme coup son antipolitisme, son antiparlementarisme, son antirĂ©gionalisme et son centralisme[66]. L’AssemblĂ©e nationale, qui rĂ©pondait Ă  la tentative de Primo de Rivera de rĂ©soudre la quadrature du cercle consistant Ă  parlementariser un gouvernement personnel construit Ă  partir de prĂ©misses antidĂ©mocratiques, ne pouvait dĂ©boucher que sur un Ă©chec. Pourtant, ce naufrage ne se rĂ©percuta qu’assez peu sur la vie de l’UP ; paradoxalement mĂȘme, le parti gagna en importance aux yeux du dictateur et de ses plus proches collaborateurs, le bras politique qu’était l’UP Ă©tant devenu pour eux le dĂ©positaire de la meilleure garantie de survie du rĂ©gime[117].

Idéologie

Caractérisation générale

L’UP avait Ă©tĂ© conçu par Primo de Rivera comme une organisation diffĂ©rente, se dĂ©marquant des anciens partis dynastiques qu’une grande majoritĂ© d’Espagnols avaient pris en grippe[41]. Son essence, telle que la dĂ©finissait Primo de Rivera, Ă©tait d’ĂȘtre un mouvement civique plutĂŽt qu’un parti politique. Ainsi, l’un des points les plus saillants de la charte de l’UP Ă©tait le refus explicite de tout caractĂšre de parti : « L’Union patriotique est-elle un parti politique ? Ce n’est pas un parti politique. C’est une organisation citoyenne visant Ă  dĂ©velopper un programme et Ă  attirer des personnes pour l’incarner et le dĂ©fendre, et se prĂ©sentant aux Ă©lections politiques qui viendront Ă  ĂȘtre convoquĂ©es, en veillant Ă  l’accomplissement des devoirs citĂ©s ci-haut » [Lesdits devoirs sont : Devoirs religieux, ceux que le catĂ©chisme dĂ©termine. Devoirs sociaux, les prĂ©ceptes du droit naturel. Devoirs politiques, la dĂ©fense de la monarchie. Devoirs patriotiques, reconnaissance et diffusion des gloires et de la valeur historique de l’Espagne][118].

Ailleurs, Primo de Rivera dĂ©finit l’UP comme « un parti central, monarchiste, dĂ©mocratique de façon tempĂ©rĂ©e et sereine ». L’un de ses principaux idĂ©ologues, l’écrivain JosĂ© MarĂ­a PemĂĄn, auteur en 1929 de l’essai El hecho y la idea de la UniĂłn PatriĂłtica (littĂ©r. le Fait et l’IdĂ©e de l’Union patriotique)[119], eut soin de le distinguer du fascisme, affirmait que l’État qui se reconnaissait dans l’UP Ă©tait « l’État social-chrĂ©tien traditionnel », et dĂ©clarait renier le suffrage universel, qu’il estimait ĂȘtre « une grande erreur »[110]. Les tenants de l’UP, en plus d’ĂȘtre animĂ©s par un esprit clairement opposĂ© Ă  la politique partidiste, jugeaient l’action parlementaire profondĂ©ment dĂ©lĂ©tĂšre, ainsi que le laissait clairement entendre l’autre idĂ©ologue attitrĂ© du parti, JosĂ© PemartĂ­n[120] - [42].

Aussi, dans sa volontĂ© de dĂ©coupler l’UP des formations politiques antĂ©rieures, le rĂ©gime veillait-il Ă  ne pas se rĂ©fĂ©rer Ă  l’UP sous le qualificatif de parti, ceci Ă  la requĂȘte de PemĂĄn, pour qui l’UP n’était pas un parti et par voie de consĂ©quence ne penchait ni Ă  droite ni Ă  gauche[121] - [113]. La dĂ©nomination de « Union » devait symboliser l’unitĂ© de la patrie, en opposition aux caciques traditionnels et aux politiciens qui avaient conduit l’Espagne au dĂ©sastre de 1898 et Ă  la situation pĂ©nible oĂč elle s’était enlisĂ©e. Primo de Rivera misait sur l’idĂ©e que la Patrie unissait lĂ  oĂč la politique divisait[122] - [41].

Une historienne a caractĂ©risĂ© l’UP comme un mouvement diffus et ouvert Ă  tous les courants, sans guĂšre d’autre point fĂ©dĂ©rateur que le rĂ©gĂ©nĂ©rationnisme[123]. D’autres auteurs ont cataloguĂ© la dictature de Primo de Rivera comme une tentative d’intĂ©grer l’éthique capitaliste dans le catholicisme, ce qui avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© dans les annĂ©es 1920 objet de rĂ©flexion de Ramiro de Maeztu ; le modĂšle idĂ©al aurait Ă©tĂ©, pour Primo de Rivera, l’autoritarisme comme voie catholique vers la modernisation[6] - [124].

Avec l’instauration du Directoire civil en , il Ă©tait devenu patent que l’UP avait rompu avec les principes du libĂ©ralisme et qu’il se rattachait, selon Eduardo GonzĂĄlez Calleja, « aux courants les plus significatifs de la droite radicale europĂ©enne » et faisait siens « les lieux-communs les plus chers au conservatisme traditionaliste espagnol : identification de la nation Ă  la monarchie et au catholicisme, idĂ©e organiciste et inĂ©galitaire du fait national, et critique de l’alliance entre la Monarchie et le libĂ©ralisme concertĂ©e sous la Restauration [bourbonienne] », de mĂȘme que « les principes classiques de la pensĂ©e bureaucratique de l’armĂ©e : militarisme fondĂ© sur un nationalisme traditionnel de base [...] ; antiparlementarisme et antipolitisme ; dĂ©fense des valeurs inhĂ©rentes Ă  la profession militaire (ordre, discipline, hiĂ©rarchie et autoritĂ©) ; autoritarisme [...] ; anticommunisme primaire, centralisme, soutien Ă  la famille comme cellule principale de la nation et dĂ©fense de la propriĂ©tĂ© privĂ©e comme institution de droit naturel »[125].

NĂ©anmoins, comme le fait observer encore GonzĂĄlez Calleja, « l’UP n’élabora jamais un corps de doctrine cohĂ©rent [...] encore qu’elle ait esquissĂ© un conservatisme de base, avec des teintes corporatistes, antiparlementaires et autoritaires »[126] et se profilait comme une organisation « apolitique » et « anti-partite », comme un « parti-matrice » de futurs partis ayant Ă  cƓur de rĂ©gĂ©nĂ©rer l’Espagne, ou comme une « mĂšre de partis », ainsi que Primo de Rivera caractĂ©risa l’UP en [119].

Avec le passage du temps, le concept et l’assise doctrinale de l’UP allait, dans l’esprit et dans les Ă©crits de Primo de Rivera, se prĂ©ciser et s’ordonner plus avant. L’entreprise de thĂ©orisation et de clarification idĂ©ologique, qui s’imposa en fait davantage par les circonstances que par la volontĂ© du dictateur, arriva trop tard pour que l’UP parvienne Ă  un niveau de dĂ©veloppement politique suffisant lui permettant d’assumer l’important rĂŽle qui lui incombait. Le revers subi avec l’AssemblĂ©e nationale consultative avait eu pour effet que Primo de Rivera allait dĂ©sormais centrer une grande partie de son Ă©nergie Ă  renforcer l’UP[127].

Le fait que l’UP a Ă©tĂ© crĂ©Ă© « Ă  partir d’en haut » ne contredit pas, signale GĂłmez-Navarro, l’existence concomitante d’autres partis ; certaines autres formations, situĂ©es en dehors du cadre de la dictature, s’étaient en effet maintenues, parmi lesquelles se dĂ©tache en particulier le PSOE, qui opĂ©rait sur un plan socio-Ă©conomique, et non plus politique[128] - [129].

Ángel Herrera

Celui qui passe pour ĂȘtre le vĂ©ritable fondateur de l’UP — ou, selon ses termes, des « Unions patriotiques » —, est cependant Ángel Herrera, directeur du quotidien El Debate et chef de file de l’association catholique laĂŻque ACNdP[130]. Le projet et les dĂ©sidĂ©rata fluctuants de Primo de Rivera, qui souhaitait disposer, par le biais de l’UP, de la masse manƓuvrable indispensable pour rĂ©ussir un jour le remplacement de la dictature par un rĂ©gime civil d’autoritĂ© et Ă  instituer un parlementarisme s’accordant avec sa vision strictement organique de la sociĂ©tĂ© et de la reprĂ©sentation politique, Ă©taient Ă  l’unisson avec les orientations pontificales, en particulier avec celles de LĂ©on XIII, auxquelles Ángel Herrera s’était totalement rangĂ©[131] ; la culture politique des propagandistas d’Ángel Herrera concordait largement avec les principes dont Primo de Rivera voulait qu’ils rĂ©gissent dĂ©sormais l’Espagne, Ă  savoir l’unitĂ© espagnole et la prĂ©servation des traditions nationales telles que la religion catholique et l’institution monarchique[132].

Ángel Herrera, le vĂ©ritable artisan de la dĂ©mocratie chrĂ©tienne espagnole, mit Ă  profit la fin abrupte du canovisme pour parachever une pensĂ©e dĂ©jĂ  en grande partie Ă©laborĂ©e. Le coup d’État de interdisait de diffĂ©rer plus longtemps la mise sur pied d’un mouvement de masse d’empreinte conservatrice et traditionnelle, vouĂ© Ă  l’action publique, mais sans Ă©tiquettes partidaires[133].

José Pemartín

Primo de Rivera confia la mission d’étoffer son corps doctrinal Ă  deux de ses compatriotes andalous : JosĂ© PemartĂ­n et JosĂ© MarĂ­a PemĂĄn. PemartĂ­n fit paraĂźtre en 1928 son ouvrage Ă  succĂšs Los valores histĂłricos en la Dictadura española, plaidoyer percutant quoiqu’indirect pour l’UP, oĂč le rĂ©gime parlementaire d’inspiration rousseauiste figurait comme contre-exemple, et sur les ruines duquel s’élevait Ă  prĂ©sent la structure politique de la dictature primorivĂ©riste, avec comme pierre angulaire l’UP. À une Ă©poque oĂč partout en Europe certains mouvements fustigeaient l’anachronique libĂ©ralisme, les tares de son avatar espagnol apparaissaient, selon l’auteur, plus crĂ»ment encore que partout ailleurs. Rejetant le systĂšme reprĂ©sentatif basĂ© sur le suffrage universel inorganique, l’auteur faisait une esquisse globale dĂ©taillĂ©e de la structure Ă©tatique Ă  laquelle la dictature aspirait, et oĂč trouvait place tout un Ă©chafaudage institutionnel avec une profusion d’organismes, d’institutions et de corps de l’État de toute espĂšce. La parution de cet ouvrage, malgrĂ© sa facture moyenne, fut dans le XXe siĂšcle espagnol un important jalon de l’antiparlementarisme conservateur. Ce dernier, nĂ© fondamentalement dans la pĂ©riode mauriste postĂ©rieure Ă  la crise de 1909, et dont une des sources Ă©tait l’Ɠuvre d’Enrique Gil Robles, refonte de la doctrine politique classique espagnole, fut le courant de pensĂ©e le plus puissant de la droite gouvernementale modĂ©rĂ©e en Espagne tout au long du XXe siĂšcle[134] - [135]. Le concept d’españolidad, rĂ©pĂ©tĂ© Ă  satiĂ©tĂ©, et ceux de catholicisme, de monarchie et de tradition Ă©taient les idĂ©es force de l’idĂ©ologie pĂ©martinienne d’un nouvel ordre basĂ© sur le pragmatisme politique[136] - [137].

José María Pemån

JosĂ© MarĂ­a PemĂĄn, chroniqueur pour La NaciĂłn et auteur du DĂ©calogue de l’UP paru l’annĂ©e prĂ©cĂ©dente dans ledit journal avec l’agrĂ©ment de Primo de Rivera, publia en 1929 la bible du parti sous le titre de El hecho y la idea de la UniĂłn PatriĂłtica (littĂ©r. le Fait et l’IdĂ©e de l’Union patriotique)[138]. Dressant un panorama des problĂšmes de l’Espagne, le texte se garde pourtant d’adopter l’allure d’un rĂ©quisitoire implacable contre le systĂšme reprĂ©sentatif suspendu en 1923, et se cantonne Ă  en blĂąmer les excroissances parasitaires accumulĂ©es en son ĂȘtre sous l’effet d’une thĂ©orie et d’une pratique politiques en grande partie Ă©trangĂšres Ă  la tradition nationale. C’est cette derniĂšre qui doit fournir le modĂšle qu’il y a lieu de suivre si l’on veut doter d’efficacitĂ© un parlement, lequel du reste est absolument indispensable Ă  l’exercice du pouvoir dans toute communautĂ© bien rĂ©glĂ©e. Une grande partie de son argumentaire hostile au parlementarisme classique avait Ă©tĂ© puisĂ© par PemĂĄn chez les penseurs doctrinaux et politiques europĂ©ens qui, Ă  partir de positions anti-rĂ©actionnaires, prĂŽnaient Ă  cette mĂȘme Ă©poque un Ă©quilibre entre les diffĂ©rents pouvoirs de l’État. Ce dernier, croulant sous l’hypertrophie du lĂ©gislatif, subissait les consĂ©quences bien connues de l’instabilitĂ© ministĂ©rielle, de l’adultĂ©ration reprĂ©sentative, des abus de l’oligarchie, etc.. Rejetant avec une Ă©gale Ă©nergie l’absolutisme royal et parlementaire, l’auteur se faisait l’avocat des thĂšmes-clef de l’UP que sont la patrie, la religion et la monarchie, en soulignant l’impĂ©ratif d’apolitisme qui doit prĂ©valoir sur toute autre idĂ©e dans la doctrine du parti[139] :

« L’Union patriotique est une ligue de citoyens qui, appuyant la dictature et collaborant avec elle, se propose d’apporter Ă  toute la nation une Ă©thique nouvelle et une Ɠuvre sociale nouvelle et intense [...]. L’Union patriotique n’est autre que cela mĂȘme que son nom indique : une grande union nationale. Tout ce qui peut faire obstacle Ă  l’union est dĂ©libĂ©rĂ©ment exclu d’elle : couleur politique dĂ©finie, nuance de gauche ou de droite, filiation et origine de ceux qui viennent Ă  elle. À l’inverse, tout ce qui doit nĂ©cessairement faire l’objet d’acceptation unanime de tout bon citoyen est invoquĂ© chez elle avec insistance : moralitĂ©, honorabilitĂ©, ordre, Ɠuvre sociale et culturelle, bonne administration. Entre l’Union patriotique et un ancien parti, il existe Ă  dessein la diffĂ©rence radicale qu’il y a entre leurs noms eux-mĂȘmes : la diffĂ©rence existant entre un parti et une Union ; celle qui existe entre le verbe diviser [partir en espagnol] et le verbe unir[140]. »

La parution tardive de l’ouvrage devait le priver de sa puissance de feu propagandiste et l’empĂȘcher de faire figure, comme il y Ă©tait destinĂ©, de principal cadre thĂ©orique de l’UP[51].

Points communs et dissimilitudes avec le fascisme

Primo de Rivera veillait Ă  se tenir Ă  bonne distance du fascisme, lors mĂȘme qu’il avait une certaine admiration pour quelques aspects purement formels du fascisme, comme la symbolique et la rhĂ©torique[141] - [142]. En , trois mois aprĂšs le coup d’État, Primo de Rivera dĂ©clara :

« Le fascisme, ce n’est pas prĂ©cisĂ©ment notre SomatĂ©n, et je crois que celui-ci est un organe social plus adĂ©quat, plus concret dans sa mission et s’adaptant mieux Ă  notre caractĂšre. Le jour oĂč le SomatĂ©n armĂ© aura achevĂ© son organisation dans toute l’Espagne et oĂč le Parti civico-somatĂ©niste se mettra Ă  agir, l’Espagne disposera d’une force citoyenne d’une poigne incontestable[143]. »

Yanguas MessĂ­a, collaborateur politique de Primo de Rivera, affirmait Ă  son propos :

« Ni par son idĂ©ologie, ni par tempĂ©rament, il n’était un dictateur. Sa formation Ă©tait celle d’un libĂ©ral modĂ©rĂ©, et il parlait toujours de la nature transitoire de son gouvernement et du retour Ă  la normalitĂ© [...] De par son tempĂ©rament, il n’était pas dominateur, ni enclin Ă  dĂ©cider de tout, ni ambitieux. Ni, moins encore, sa main dure ne dĂ©passait-elle d’un seul pouce l’autoritĂ© indispensable[144]. »

Certes, on peut citer les paroles d’Antonio Goicoechea sur le maurisme d’avant 1923, considĂ©rĂ© comme premiĂšre amorce de la droite autoritaire primorivĂ©riste :

« Les jeunes mauristes furent, d’une certaine façon, les prĂ©curseurs des chemises noires de Mussolini et des nazis d’Adolf Hitler. Ils ont donnĂ© pour la premiĂšre fois en Espagne la sensation de l’existence d’une masse civile de la classe moyenne ne voulant plus ĂȘtre un instrument passif aux mains des politiques, ni un conglomĂ©rat inerte rĂ©signĂ© Ă  se laisser broyer entre l’orgueil de ceux d’en haut et la haine de ceux d’en bas[145] - [146]. »

Les rapports que l’UP entretenait avec la hiĂ©rarchie ecclĂ©siastique est une autre caractĂ©ristique encore qui diffĂ©rencie l’UP du parti fasciste italien[90].

Il s’en fallut donc de beaucoup que l’UP ne devienne le parti tel que l’appelaient de leurs vƓux les trazistes barcelonais, et c’étaient au contraire les propagandistas catholiques qui surent s’organiser efficacement pour servir de socle au nouveau parti, en raison, pour une grande part, de la cohĂ©rence et du dĂ©veloppement idĂ©ologique trĂšs supĂ©rieurs des propagandistas par rapport aux trazistes, et de ce qu’ils disposaient d’une vaste organisation dont les ramifications s’étendaient sur une ample partie du territoire espagnol (dont la ConfĂ©dĂ©ration nationale agraire, l’Action catholique, l’Église elle-mĂȘme), en plus d’organes de presse comme El Debate, El Correo de AndalucĂ­a, La Verdad, etc. ; s’y ajoutaient les Ă©troits contacts qu’elle entretenait avec des secteurs Ă©conomiques clef, dont en particulier les bourgeoisies catalane et basque, prĂȘtes Ă  se mobiliser et appelĂ©es Ă  devenir la principale base d’appui et d’orientation du Directoire militaire[147] - [148].

Quant au dĂ©bat ouvert par l’hispaniste israĂ©lien Shlomo Ben-Ami, celui-ci arguant que l’idĂ©ologie de l’UP comportait dĂ©jĂ  les idĂ©es fondamentales du « fascisme espagnol » de la dĂ©cennie suivante, Eduardo GonzĂĄlez Calleja note pour sa part que si certes ces idĂ©es s’étaient fait jour alors (« refus du capitalisme et du libĂ©ralisme, crainte du socialisme, pari sur un État corporatif »), l’upĂ©tisme « en tant que mouvement crĂ©Ă© par le pouvoir, ne remit jamais en cause le systĂšme socio-Ă©conomique en vigueur, quand mĂȘme il ait prĂ©conisĂ© la mise en Ɠuvre de quelques rĂ©formes dans le sens corporatiste et de l’étatisation. Au surplus, Ă  la diffĂ©rence des autres partis fascistes ou populistes (comme le pĂ©ronisme), l’UP n’entreprit pas ces rĂ©formes ni ne mobilisa la sociĂ©tĂ© pour en obtenir la rĂ©alisation, mais fut l’opportun comparse, dĂ©nuĂ© d’initiative, pour un rĂ©gime dictatorial de droite qui Ă  peine Ă©baucha un projet de dĂ©mantĂšlement du systĂšme libĂ©ral. C’est en ce seul sens-lĂ  d’alternative antidĂ©mocratique que l’on peut reconnaĂźtre l’UP comme un prĂ©curseur du fascisme espagnol »[149]. La dictature primorivĂ©riste elle-mĂȘme, souvent placĂ©e sur le mĂȘme plan que le fascisme, c’est-Ă -dire, en dĂ©pit de la diversitĂ© de ses sources idĂ©ologiques, comme un rĂ©gime de dernier recours pour les classes dominantes, est prĂ©sentĂ©e comme une solution de rechange au systĂšme agonisant de la Restauration ; aussi les historiens de tendance marxiste s’évertuent-ils Ă  l’interprĂ©ter comme une prĂ©figuration du rĂ©gime franquiste (qualifiĂ© par eux de « fasciste »), malgrĂ© la nette distance entre l’UP et le fascisme italien[150].

De son cotĂ©, JosĂ© Luis RodrĂ­guez JimĂ©nez souligne que « le parti renfermait dĂ©jĂ  des Ă©lĂ©ments qui allaient ĂȘtre fondamentaux dans la plupart des futures organisations d’extrĂȘme droite en Espagne, Ă  savoir : un rejet frontal du parlementarisme et des partis politiques, l’assignation aux forces armĂ©es d’une fonction de surveillance sur l’évolution de la vie politique et sociale, un vague corporatisme, un nationalisme espagnol et une interprĂ©tation centraliste de l’administration territoriale de l’État » ; le mĂȘme historien signale d’autre part que « dans la discours de l’Union patriotique se perçoivent des Ă©lĂ©ments nostalgiques et rĂ©actionnaires empruntĂ©s au traditionalisme et au nationalisme conservateur espagnol (les appels Ă  l’unitĂ© territoriale et spirituelle) », ainsi qu’au maurisme[107].

Certes, le nationalisme et l’anti-libĂ©ralisme constituaient le commun dĂ©nominateur ou du moins le soubassement fondamental de ces rĂ©gimes, dĂ©nommĂ©s par la politologie moderne « regĂ­mes militaires corporatistes ». Dans le cas espagnol cependant, ce parallĂ©lisme ne dĂ©coule que d’une imitation grossiĂšre et prĂ©cipitĂ©e des aspects les plus superficiels de l’État mussolinien. Le monarchisme de la droite espagnole la moins ouverte et la moins dĂ©veloppĂ©e, ainsi que le poids dĂ©cisif de l’Église, dĂ©terminaient une ligne de dĂ©marcation bien dĂ©finie et infranchissable entre l’expĂ©rience mussolinienne et la dictature primorivĂ©riste. Tant la Couronne que l’institution ecclĂ©siastique se sont toujours refusĂ©es Ă  faire appel au fascisme pour se pourvoir en noyaux fĂ©dĂ©rateurs[151]. Le Manifeste du excluait a priori toute vellĂ©itĂ© pour le dictateur de donner Ă  son rĂ©gime la moindre empreinte hyper-Ă©tatique ou d’encadrer la masse de ses adeptes dans une organisation moulĂ©e sur le culte de la force et sur l’obĂ©issance aveugle Ă  un caudillo charismatique[152]. Ni mĂȘme le SomatĂ©n — Ă©troitement apparentĂ©, pour ce qui est de sa composition et de son dĂ©veloppement, avec l’UP — n’a adoptĂ© un tel esprit[153] - [note 2].

Postérité

L’UP annonce quelques-uns des Ă©lĂ©ments caractĂ©ristiques de l’extrĂȘme droite espagnole sous la Seconde RĂ©publique, comme le rejet du libĂ©ralisme et de la dĂ©mocratie[154].

Si Primo de Rivera n’eut jamais de reprĂ©sentation un tant soit peu claire du destin exact qu’il envisageait pour l’UP[132], il reste que la destinĂ©e de l’UP Ă©tait de se muer inĂ©luctablement, une fois la dictature disparue, en le grand parti de la droite espagnole, apte Ă  recueillir et conserver la part principale du patrimoine de l’UP et Ă  s’engager avec succĂšs dans les futurs affrontements Ă©lectoraux. Tout la prĂ©disposait Ă  devenir l’hĂ©ritiĂšre des grands partis conservateurs de l’Espagne contemporaine[155].

L’UP ne survĂ©cut pas au rĂ©gime qui l’avait crĂ©Ă©e, toutefois, selon ce qu’affirme Eduardo GonzĂĄlez Calleja, « l’emprise de l’UP perdura bien au-delĂ  de sa disparition : en son sein surgirent ou furent dĂ©veloppĂ©es des idĂ©es corporatistes et autoritaires qui allĂšrent ensuite se cristalliser dans l’idĂ©ologie de groupes tels que l’Union monarchiste nationale, le Parti nationaliste espagnol, l’Action populaire, RenovaciĂłn Española, la CEDA, la Phalange espagnole, ou dans la revue AcciĂłn Española. Elle fut, en dĂ©finitive, un vivier de futurs dirigeants pour les partis de droite sous la RĂ©publique, et favorisa la convergence des positions de groupes en principe aussi irrĂ©conciliables que les alfonsins et les carlistes, qui ne tardĂšrent pas Ă  conclure une alliance tactique Ă  caractĂšre anti-rĂ©publicain »[84].

De façon gĂ©nĂ©rale, la masse de la droite espagnole n’a jamais su ĂȘtre un Ă©lĂ©ment dynamisant de la politique nationale, et son rĂŽle politique se borna Ă  servir d’appui aux rĂ©gimes autoritaires, comme ostensible toile de fond avalisant muettement les dictatures et les gouvernants « de l’ordre »[156]. La mince strate de la droite progressiste et rĂ©formatrice, totalement Ă©loignĂ©e de toute vellĂ©itĂ© crypto-fasciste, fut battue sur tous les fronts par la vague dictatoriale, et allait s’évanouir sous la dictature franquiste, avant de presque disparaĂźtre ensuite du champ de vision universitaire et politique de l’Espagne[150].

L’historiographie antifranquiste a tendu Ă  considĂ©rer l’UP comme une prĂ©figuration du parti unique de la dictature franquiste ; cela serait faire injure, estime JosĂ© Manuel Cuenca Toribio, « aux valeurs morales, Ă  religion de l’effort, Ă  la foi en la mĂ©ritocratie, au patriotisme fruste mais limpide qui s’était nichĂ© dans la conscience d’un nombre estimable d’Espagnols appartenant pour la plupart au peuple le plus authentique » ; ces historiens auraient « trop mis en relief le rĂŽle des cadres de l’UP, en portant une attention sous-proportionnĂ©e aux affiliĂ©s de base »[157].

Notes et références

Notes

  1. Il a Ă©tĂ© notĂ©, sur la foi des rares registres d’affiliation disponibles, que l’UP d’Alicante p. ex. se caractĂ©risait par la forte hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© de ses adhĂ©rents, mĂȘme si l’on comptait dans ses rangs avant tout des membres de la dĂ©nommĂ©e « droite d’intĂ©rĂȘts », autrement dit la « bourgeoisie provinciale », idĂ©ologiquement conservatrice et se composant d’industriels, de nĂ©gociants, de personnages aisĂ©s et de membres Ă©minents des institutions reprĂ©sentatives de la bourgeoisie telles que chambres de commerce et d’industrie, associations agricoles, etc. Un rĂŽle de premier plan Ă©tait dĂ©volu Ă©galement aux classes moyennes (fonctionnaires, professions libĂ©rales, techniciens, professions mĂ©dicales, militaires, etc.). De façon gĂ©nĂ©rale, ce sont les groupes les mieux situĂ©s dans la pyramide sociale qui surent se faire attribuer les postes Ă  responsabilitĂ© du parti. Quant aux ouvriers, leur prĂ©sence aux postes de direction n’était souvent que symbolique (cf. J. Poveda Jover (2016), p. 340-341). Cependant, la composition sociale variait assez sensiblement d’une commune Ă  l’autre, ainsi qu’il ressort des chiffres pour la petite ville d’Utiel (13 000 habitants en 1920), oĂč sur les 1 011 membres de l’UP, 266 Ă©taient des journaliers (sans terre), 211 des propriĂ©taires, 131 des commerçants, 66 des agriculteurs, 8 des mĂ©caniciens, 6 des maçons, 4 des mĂ©decins, 2 des prĂȘtres, et 1 Ă©tait instituteur, les 316 autres appartenant Ă  d’autres catĂ©gories ; chiffres qui contrastent avec ceux pour le district du ThĂ©Ăątre dans la ville de Valence, lesquels donnent, sur 921 affiliĂ©s : 163 commerçants, 103 employĂ©s, 91 Ă©tudiants, 30 industriels, 29 mĂ©decins, 12 professeurs et 493 autres (cf. J. LĂłpez Iñíguez (2014), p. 298 & 316).
  2. Guy Hermet rĂ©sume le processus de mise sur pied de l’UP de la façon succincte suivante :
    « Cette conjoncture faste [succĂšs Ă©conomiques, solution du problĂšme marocain] encourage le dictateur Ă  amĂ©nager de façon plus prĂ©cise l’État fort promis aux Espagnols. Il le fait d’abord en tentant, sans grand rĂ©sultat, de moraliser une administration nonchalante et d’amĂ©liorer son rendement minĂ© par l’habitude des cumuls abusifs de postes et de salaires. Il s’efforce ensuite de jeter les bases d’une alternative politique au rĂ©gime « corrompu » des partis. ImprovisĂ©e de bric et de broc, cette alternative prend le visage d’un projet unique — l’Union patriotique — dans le style du parti fasciste italien. Cependant, il apparaĂźt vite que les sociĂ©tĂ©s espagnole et italienne ne se ressemblent guĂšre en ce qui concerne leur rĂ©ceptivitĂ© Ă  un tel dessein. »
    Guy Hermet, la Guerre d’Espagne, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Points/Histoire », , 339 p. (ISBN 2-02-010646-9), p. 40-41.

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  14. E. GonzĂĄlez Calleja (2005), p. 180.
  15. Pour l’expression Madre de partidos (Mùre de partis), cf. J. G. Pecharromán (1994).
  16. J. Poveda Jover (2016), p. 333.
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