Ozokérite
LâozokĂ©rite ou ozocĂ©rite (du grec Îζο oze, puanteur, et ÎșηÏÏÏ kĂȘrĂłs, cire), autrefois appelĂ© earthwax (cire de terre) est une roche naturellement odorante et ayant la consistance d'une cire (en raison de sa teneur en Paraffine). Il existe de nombreux gisements dans le monde de cet « hydrocarbure naturel »[1]. Il s'agit d'une roche riche en carbone fossile constituĂ©e d'un mĂ©lange naturel de paraffines Ă longue chaĂźne[2] et parfois classĂ© dans les huiles minĂ©rales[3].
On nomme parfois aussi (mais improprement) ozocérite une « cire » extraite (par traitement physicochimique) de la lignine[4].
Origines
Ce minĂ©ral a Ă©tĂ© dĂ©couvert dans au moins une trentaine de pays diffĂ©rents, notamment en Ăcosse, dans le Northumberland, au Pays de Galles et Ă Ein-Humar (Jordanie) sur la partie orientale de la Mer Morte[2].
Bien que beaucoup de ressources aient dĂ©jĂ Ă©tĂ© produites dans l'Utah, certains de ses gisements ont une importance particuliĂšre (ceux de l'Ăźle de Cheleken (devenue une pĂ©ninsule), prĂšs de Turkmenbashi, et quelques gisements situĂ©s dans l'Himalaya en Inde et dans l'Utah aux Ătats-Unis[5] - [6] (ex. : mines de Soldier Summit[7]).
Les sources actuellement exploitées commercialement sont situées en Galicie, à Boryslav[8] - [9], Dzwiniacz et Starunia[10], mais ce minéral est aussi présent en d'autres lieux sur les deux grands versants des Carpates[11].
Les dépÎts ozokéritiques sont des veines minérales, supposées avoir comme origine une lente évaporation de pétrole dans des conditions ayant permis son oxydation et un dépÎt de paraffine dissoute dans les fissures ou crevasses auparavant occupées par le liquide.
L'ozokérite native présente diverses formes : d'une cire trÚs douce à une masse noire d'une dureté comparable à celle du gypse.
Propriétés chimiques
Ce minĂ©ral est supposĂ© souvent ou toujours plus ou moins liĂ© Ă des huiles lourdes et des bitumes, dont il s'est sĂ©parĂ© par accumulation de paraffines de haut poids molĂ©culaire sous l'effet de la chaleur gĂ©othermique, puis d'une « prĂ©cipitation » lors de l'abaissement de la tempĂ©rature de la roche[2]. Il est chimiquement constituĂ© d'un mĂ©lange de divers hydrocarbures Ă longues chaĂźnes (C22 Ă C53 principalement), 85 Ă 87 % de son poids Ă©tant du carbone. Il peut ĂȘtre dĂ©pourvu de molĂ©cules aromatiques et cyclo-paraffiniques[2].
Il est soluble dans l'éther diéthylique, le pétrole, le benzÚne, l'essence de térébenthine, le chloroforme, le disulfure de carbone et d'autres solvants organiques.
Propriétés physiques
Sa densité varie 0,85 à 0,95 et son point de fusion de 58 à 100 °C.
L'ozokérite de Galicie a une couleur allant du jaune pùle au brun foncé, avec des reflets vert en raison d'un dichroïsme. Il fond généralement à 62 °C.
Exploitation miniĂšre
Au tout dĂ©but du XXe siĂšcle (en 1901), le seul gisement rĂ©putĂ© commercialement exploitable de « cire minĂ©rale » (ozocĂ©rite) d'Europe Ă©tait situĂ© en Pologne (Ă Boryslav, en Galicie) ; ceux de la houillĂšre d'Urpeth, prĂšs de Newcastle, ou de Slanik (en Moldavie) Ă©taient dĂ©jĂ connus, mais rĂ©putĂ©s de moindre intĂ©rĂȘt[12].
L'extraction industrielle d'ozokĂ©rite plus ou moins « pure » a commencĂ© en Galicie (Pologne) dans les annĂ©es 1880, mais ce minĂ©ral Ă©tait antĂ©rieurement exploitĂ© Ă la main dans des mines appartenant au Boryslaw Actien Gesellschaft et Ă la Banque de Galicie, qui ont pu ĂȘtre conduites jusqu'Ă 200 Ă 225 mĂštre de profondeur grĂące Ă l'utilisation d'Ă©lectricitĂ© pour le transport de l'ozokĂ©rite, le pompage de dĂ©noyage des galeries, la ventilation, l'Ă©clairage, etc. Une fois arrivĂ© en surface, un tri manuel Ă©tait encore nĂ©cessaire.
Dans d'autre cas les stĂ©riles ont Ă©tĂ© sĂ©parĂ©es de la roche carbonĂ©e en faisant bouillir le tout dans de l'eau, dans de grandes cuves de cuivre oĂč la cire fondue remonte en surface.
Dans d'autres cas elle est fondue sans eau et les impuretĂ©s en sont Ă©liminĂ©es par « Ă©crĂ©mage », la cire pouvant ensuite ĂȘtre moulĂ©e avant d'ĂȘtre mise sur le marchĂ©.
Les mines d'ozokérite ont peu à peu fermé à partir des années 1940 en raison de la concurrence des cires de paraffine synthétisées à partir du pétrole. Cependant son point de fusion plus élevé que celui de la plupart des cires de pétrole le favorise encore pour certaines applications (isolants électriques, bougies, additif pour la fabrication de mouchoirs en papier extra-doux).
Traitement industriel
L'ozokĂ©rite peut encore ĂȘtre affinĂ©e par un premier traitement Ă l'acide sulfurique puis au charbon de bois pour produire une cire plus pure dite cĂ©rĂ©sine (ou cĂ©rasine). Cette cĂ©rĂ©sine ou mĂȘme l'ozokĂ©rite pure a un point de fusion de 16 Ă 26 °C qui en a fait un adultĂ©rant courant (lĂ©gal et brevetĂ©[13] ou illĂ©gal) de cires mises sur le marchĂ©, alors gĂ©nĂ©ralement artificiellement colorĂ©e pour ressembler Ă une cire normale.
La distillation d'ozokérite dans un flux de vapeur surchauffée permet de produire un matériau proche de la paraffine obtenue à partir de pétrole ou d'huile de schiste, mais avec un point de fusion plus bas.
Utilisations
Son point de fusion plus haut que celui de la cire lui donne une grande valeur pour les usages (ex. : bougies, ou stabilisateur de produits explosifs tel que le TNT[14]) faits dans des climats chauds). Il a été proposé et/ou trÚs utilisé comme composant dans plusieurs produits cosmétiques[15] pour les cheveux ou la peau[16] (exemple : stick antitranspiration[17], produits cosmétiques pour les lÚvres[18] - [19], produit à blanchir la peau, à base d'hydroquinone[20], crÚmes solaires[21], stick de répulsif pour insecte[22]).
Il a été utilisé (et l'est encore ?) comme additif alimentaire, au Japon par exemple[23].
On en tire aussi des huiles légÚres de distillation et un produit ressemblant à de la vaseline.
Le rĂ©sidu des alambics est une substance cireuse noire et dure qui, en mĂ©lange avec du latex (naturel) a Ă©tĂ© utilisĂ© sous le nom d'okonite comme isolant Ă©lectrique. Ce mĂȘme rĂ©sidu a aussi Ă©tĂ© utilisĂ© pour produire un matĂ©riau permettant d'obtenir une surface polie sous les talons et semelles de chaussures. L'ozokĂ©rite pure a aussi Ă©tĂ© utilisĂ©e comme isolant de fil Ă©lectrique au XIXe siĂšcle (en remplacement de la paraffine pour impermĂ©abiliser le fil de soie ou le tissu qui entourait le fil Ă©lectrique[24].
Fossiles et intĂ©rĂȘt palĂ©ontologique
Comme dans d'autres roches fossiles non liquides (telles que la tourbe, certains schistes et divers types de charbon) ce minĂ©ral peut renfermer des fossiles, parfois en quelque sorte momifiĂ©s[25] ou selon JC Gall « confits » dans une roche liquide qui s'est peu Ă peu transformĂ©e en un minĂ©ral cireux impermĂ©able)[26]. On a pu y trouver des fossiles de grande taille dont par exemple deux rhinocĂ©ros laineux dans les ozocĂ©rites de Starunia (anciennement Pologne)[27] de mĂȘme que des insectes de divers ordres, dont celui des colĂ©optĂšres, parfaitement prĂ©servĂ©s[28].
Biodégradation ?
Une étude publiée en 1962 par deux microbiologistes fait état de la découverte d'un champignon du genre Candida trouvé sur de la roche carbonée provenant de veines d'ozokérite[29].
Notes et références
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