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Napalm

Le napalm, inventé en 1942, est de l'essence gélifiée, habituellement utilisée dans les bombes incendiaires. Sa formule est faite pour brûler à une température précise et coller aux objets et aux personnes. En 1980, son usage contre les populations civiles a été interdit par une convention des Nations unies ainsi que par le Droit international humanitaire, prenant sa source dans les Conventions de Genève, qui proscrit toutes armes ne faisant pas la distinction entre les civils et les combattants.

Lance Ă  napalm depuis un Patrol Boat durant la guerre du ViĂŞt Nam.

Historique

Origines

Largage de napalm sur des positions Viet Minh par l'aéronavale française durant la guerre d'Indochine (1953).

Pendant la Seconde Guerre mondiale, autant les Alliés que l'Allemagne utilisèrent l'essence comme une arme dans les lance-flammes mais elle avait le défaut de brûler trop vite pour être un dispositif incendiaire efficace.

Le napalm fut inventé à l'université Harvard en 1942 pour l'utilisation dans des bombes et les lance-flammes. Le chimiste américain Louis F. Fieser (1899-1977)[1], qui l'avait inventé, en était si fier qu'il collectionnait les coupures de presse relatives à son utilisation.

Son nom provient de la contraction des deux mots naphtalène et palmitate : na[phtalène]-palm[itate] et s'explique par les possibilités de réaction d'une poudre contenant du naphtalène (na) et du palmitate (palm) de sodium (ou d'aluminium), formant une substance d'apparence semblable à celle du savon. La quantité relative de poudre change les propriétés incendiaires, et diffère selon qu'il s'agit de lance-flammes ou de bombes.

Un gel aux propriétés incendiaires améliorées, le napalm-B, fut introduit pour rendre le napalm moins dangereux à manipuler et plus précis et contrôlable en brûlant. Le napalm-B ne contient aucun des éléments originaux desquels le nom est dérivé, mais utilise le benzène et le polystyrène pour solidifier l'essence. Il est reconnaissable à l'odeur particulière produite par sa combustion.

Usage militaire

Explosion d'un mélange de napalm-B.
Une bombe Mark 77 placée sous un McDonnell Douglas F/A-18 Hornet en 1993.

Le napalm fut utilisĂ© pendant la Seconde Guerre mondiale par les AmĂ©ricains en juin 1944 dans le Pacifique pour la prise de l'Ă®le de Tinian[2] et plus ponctuellement pendant la bataille de Normandie[note 1]. La première grande opĂ©ration l'utilisant sur le front en Europe fut lors du bombardement de CĂ©zembre au large de Saint-Malo en aoĂ»t 1944[3] puis plus tard contre la poche de Royan et de la pointe de Grave. L'historien Howard Zinn, alors pilote de l'United States Army Air Forces, dĂ©crit dans ses mĂ©moires les 1 200 bombardiers qui furent lancĂ©s dans la nuit du 13 au sur cette poche de rĂ©sistance allemande et les bombes au napalm qui y furent employĂ©es (la dernière poche de rĂ©sistance allemande sera celle de Saint-Nazaire jusqu'au )[4] - [5]. Le napalm fut aussi utilisĂ© sur les villes allemandes (cf. OpĂ©ration Gomorrah sur Hambourg, Berlin et Dresde) et japonaises (cf. Bombardement de Tokyo).

Durant la guerre civile grecque (1946-1949), 388 bombes au napalm ont été larguées en 1949 par les États-Unis dans les montagnes Gramos-Vitsi contre l'Armée démocratique de Grèce[6].

La première utilisation du napalm en Indochine par les Français a eu lieu le , lors de la bataille de Vĩnh Yên, dans le but de stopper l'attaque des soldats viet-minh. Les forces des États-Unis l'employèrent également durant les guerres de Corée[7] et du Viêt Nam[8]. À partir de 1965, l'entreprise Dow Chemical fournit l'armée américaine, jusqu'en 1969[9].

Le Tribunal Russell mit en accusation les États-Unis pour leur recours au napalm au Viêt Nam.

En Chine, pendant la Révolution culturelle, Wei Guoqing utilisa des bombes au napalm pour réduire les rebelles à Wuzhou[10] - [11].

Une utilisation massive du Napalm par la France pendant la guerre d'Algérie fut attestée lors du plan Challe de 1959-60[12] - [13]. L'Armée française disait viser « des structures diverses, des rassemblements de troupes, des grottes, des villages qui auraient dû être vides et parfois des convois terrestres »[12]. Des auteurs rapportent une utilisation du napalm dès 1956[12].

Une convention des Nations unies de 1980 l'interdit contre les populations civiles. Les États-Unis d'Amérique n'ont signé cette convention qu'en 2009[14], mais ont affirmé avoir détruit leur arsenal en 2001. Lors de l'invasion de l'Irak en 2003 les États-Unis utilisèrent des bombes incendiaires de type 77, dont le contenu n'est pas techniquement du napalm-B mais qui est similaire en composition avec du kérosène et moins de benzène[15].

Le napalm a été utilisé par plusieurs états dans de multiples conflits tels que : la France avec la guerre d'Algérie (1954-1962)[16] et d'Indochine (1946-1954)[17], l'Argentine avec la guerre des Malouines (1982)[18], le Cameroun pendant la guerre du Cameroun (1960-1970)[19], les États-Unis avec la guerre civile grecque (1946-49)[20] - [21], la guerre de Corée (1950-1953)[21] etc...

Autre usage

Un usage différent fut fait du napalm en 1967. Dans un effort pour arrêter une nappe de pétrole s'échappant du Torrey Canyon échoué entre les îles Scilly et les Cornouailles, la Royal Navy et la Royal Air Force lancent de grandes quantités de napalm ainsi que des bombes pour faire brûler le pétrole et essayer de couler le pétrolier. Ces efforts ont eu un succès mitigé et des plaques de pétrole atteindront les côtes britanniques et françaises[22].

Effets sur les victimes

Le napalm cause de graves brûlures sur les personnes exposées[23], par ses projections enflammées. Sa texture de gel colle à la peau et brûle les tissus jusqu'à l'os sans qu'il soit possible de stopper sa combustion. Il est illusoire de vouloir refroidir les plaies avec de l'eau. De plus, il est souvent combiné au phosphore blanc qui amplifie ses effets. Celui-ci permet d'enflammer le napalm et sert de détonateur dans ce type de bombe incendiaire. Lorsqu'une bombe au napalm explose au sol, le phosphore s'enflamme en premier à haute température, en laissant une traînée blanche caractéristique, puis le napalm s'enflamme. Il en résulte une grande boule de feu qui progresse rapidement et qui atteint la taille d'un immeuble de plusieurs étages pour les plus grosses munitions incendiaires.

En plus de sa puissance létale, le napalm est connu pour l'impact psychologique important qu'il exerce sur ses victimes[23]. De plus, les écosystèmes touchés par le napalm sont détruits pour plusieurs années (politique de la terre brûlée). La photo de la vietnamienne Phan Thị Kim Phúc, le corps brûlé après une attaque au napalm sur son village, a fait le tour du monde.

Napalm dans les arts

  • Dans Full Metal Jacket, le sergent instructeur chante cette chanson pendant l’entraĂ®nement : « Le napalm c'est bon c'est chaud, et en plus ça colle Ă  la peau ».
  • Le cinĂ©ma a tĂ©moignĂ© de cet effet avec dans les annĂ©es 1970 et 1980 des films comme Voyage au bout de l'enfer, Nous Ă©tions soldats, Apocalypse Now, d'oĂą vient la citation cĂ©lèbre : « I love the smell of napalm in the morning » (« J'adore l'odeur du napalm au petit matin »), et Platoon. Le napalm apparaĂ®t aussi dans le film français sur la guerre d'AlgĂ©rie L'Ennemi intime et dans le film Course Ă  la mort ainsi que dans le film 28 semaines plus tard oĂą il est utilisĂ© pour tuer les rĂ©fugiĂ©s Ă  la suite d'une contamination incontrĂ´lable.
  • L'Ĺ“uvre de Banksy : la cĂ©lèbre petite Vietnamienne brĂ»lĂ©e au Napalm, accompagnĂ©e par Mickey et Ronald Mc Donald : image gaie et dĂ©calĂ©e, provocatrice, crĂ©e un malaise et fait rĂ©flĂ©chir aux atrocitĂ©s de la guerre. L'univers merveilleux des personnages de BD opposĂ© Ă  la brutale rĂ©alitĂ© des adultes, contestation alliĂ©e Ă  l'humour[24].
  • La sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e canadienne quĂ©bĂ©coise Une grenade avec ça ? fait rĂ©fĂ©rence au napalm avec leur sauce Ă  « burdog » nommĂ©e ici « sauce napalm ».
  • Il apparaĂ®t aussi dans le film Évolution rĂ©alisĂ© par Ivan Reitman. Son utilisation a pour but d’anĂ©antir la menace extraterrestre.
  • En 2003 dans le film Prisonniers du temps un des personnages parle du feu grĂ©geois, ici sous-entendu du Napalm.
  • Dans la scène d'introduction de l'Ă©pisode 5 de la 2e saison de la sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e The Walking Dead, on peut voir l'armĂ©e larguer du napalm sur la ville d'Atlanta afin de lutter contre l'invasion de zombies. (« Ils bombardent la ville au napalm »).
  • Dans la chanson du film Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil : « […] quand dans le ciel calme l'avion par-dessus les toits, largue son napalm sur le peuple indochinois […] ».
  • Il apparaĂ®t aussi dans le film Forrest Gump rĂ©alisĂ© par Robert Zemeckis. Une frappe de napalm est lancĂ©e quand Forrest part sauver Bubba durant la guerre du ViĂŞt Nam.
  • Dans le film Fight Club pendant la discussion entre Norton et Tyler Durden qui se dĂ©roule Ă  bord d'un avion, Tyler rĂ©cite la recette artisanale du napalm : « Vous savez qu'en mĂ©langeant des parts Ă©gales d'essence et de concentrĂ© de jus d'orange congelĂ© on peut faire du napalm ? »
  • Il apparaĂ®t dans les derniers instants du film Law Abiding Citizen.
  • Un groupe de Grindcore s'appelle Napalm Death.
  • L'album Primo Victoria du groupe de power metal Sabaton parle de l'usage du napalm pendant la guerre du Vietnam dans sa chanson Into the Fire.
  • Le DJ parisien Coni a sorti en Comfort Zone, un EP qui contient un morceau nommĂ© Napalm.
  • Serge Gainsbourg fait rĂ©fĂ©rence au napalm dans le texte de la chanson Malaise en Malaisie, Ă©crit pour Alain Chamfort en 1981.
  • Il est fait rĂ©fĂ©rence au napalm dans la sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e The Night Manager qui est une mini-sĂ©rie amĂ©ricano-britannique de six Ă©pisodes rĂ©alisĂ©e par la cinĂ©aste danoise Susanne Bier et diffusĂ©e du au sur BBC One. Aux États-Unis, elle a Ă©tĂ© diffusĂ©e du au sur AMC1.
  • L'artiste photographe amĂ©ricaine Diane Severin Nguyen utilise rĂ©gulièrement du napalm dans ses Ĺ“uvres, en tant que matĂ©riau brut et inflammable.
  • Dans le jeu vidĂ©o Call of duty: Black ops (sortit le 27 septembre 2012) dans le mode zombie, sur la map Shangri-la, une espèce de zombie est appelĂ© Zombie napalm et est un zombie fait de Napalm qui lâche une flaque de cette matière lorsqu'il meurt.
  • Dans son morceau Ocean Eyes, diffusĂ© le 18 novembre 2016, Billie Eillish Ă©voque le napalm dans l'un de ses couplet : "Burning cities and napalm skies", traduit par "Villes brulĂ©es et ciel de napalm".

Notes et références

Notes

  1. Le napalm aurait été utilisé pour la première fois par l’aviation américaine à Coutances, près de Saint-Lô, le 17 juillet 1944. (Campbell, James, "Unit History - 370th Fighter Group". Air Force Historical Research Agency.)

Références

  1. « LOUIS F. FIESER », sur Encyclopædia Universalis.
  2. « Napalm », page 572, World War II, The Encyclopedia of the War Years, de Norman Polmar et Thomas B. Allen, éditions Random House, New York, 1996
  3. VĂ©ra Kornicker, CĂ©zembre, l'ĂŽle interdite, La Rochelle, la DĂ©couvrance, , 142 p. (ISBN 978-2-84265-578-5), p. 36
  4. (en) Howard Zinn, A People's History of the United States : 1492-present, Harper Perennial Modern Classics, , 2005 p. (ISBN 978-0-06-083865-2 et 0-06-083865-5)
  5. François d’Alançon, L’historien Howard Zinn et le bombardement de Royan, la-croix.com, 31 janvier 2010
  6. « Costas Pateras, Notes sur la guerre civile grecque (1946-1949) »
  7. Jean Krauze et Stéphane Joseph, « Déflagration au pays du matin calme », dans Grands reporters. Prix Albert Londres : 100 reportages d'exception de 1950 à aujourd'hui, Éditions 10/18, (ISBN 978-2-264-05887-4), p. 19
    « Les avions continuaient à lâcher leurs bombes au napalm sur la plage à deux cents mètres devant nous. »
  8. (en) « Napalm and The Dow Chemical Company | American Experience », sur pbs.org (consulté le )
  9. (en-US) Kevin Roose, « Why Napalm Is a Cautionary Tale for Tech Giants Pursuing Military Contracts », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )
  10. Marie-Claire Bergère, La Chine de 1949 à nos jours, Paris, Armand Colin, 2000, p. 135
  11. Collectif, Le Livre noir du communisme, Paris, Robert Laffont, 1998, p. 628
  12. Renaud de Rochebrune et Benjamin Stora, La guerre d'Algérie vue par les algériens –Tome 2: De la bataille d’Alger à l’Indépendance, Denoël, , 448 p. (ISBN 220711192X)
  13. Raphaëlle Branche, « France-Algérie, deux siècles d’histoire — Quand l’armée française « pacifiait » au napalm », sur Orient XXI,
  14. (en) « Napalm in US Bombing Doctrine and Practice, 1942-1975 | Sciences Po Mass Violence and Resistance - Research Network », sur sciencespo.fr, (consulté le )
  15. http://www.globalsecurity.org/military/systems/munitions/mk77.htm Global Security: MK 77
  16. Jean-Charles Jauffret, Maurice Vaïsse, Charles Robert Ageron, Militaires Et Guérilla Dans la Guerre D’Algérie, 2001, p. 388, Consulté le 13 août 2012
  17. Indochine-Algérie: Du bon usage colonial du napalm sur amnistia.net
  18. (en) Gordon Smith, « SAN CARLOS LANDINGS AND CONSOLIDATION (Parts 33-40) Part 38. 2 PARA'S APPROACH TO and BATTLE FOR DARWIN and GOOSE GREEN », sur naval-history.net, Ian Allan, (consulté le )
  19. Gaëlle Le Roy et Valérie Osouf, Cameroun, autopsie d’une indépendance, Program33 (avec la participation de France 5), 2007,www.Program33.com
  20. Marie-Laure Coulmin Koutsaftis, « La guerre civile en Grèce, laboratoire de la guerre froide », sur Club de Mediapart (consulté le )
  21. « page web de science po »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), sur sciencespo.fr
  22. http://news.bbc.co.uk/onthisday/hi/dates/stories/march/29/newsid_2819000/2819369.stm BBC: On this Day: 1967: Bombs rain down on Torrey Canyon
  23. Darren Conway, Ian Pannell, Gary Beelders et Paul Ingvarsson, « Des enfants sous les bombes », Temps Présent, Radio télévision suisse,‎ (lire en ligne [[vidéo]])
    « Deux médecins britanniques sillonnent la Syrie et découvrent l'impact ravageur de la guerre sur les enfants prisonniers du conflit. Pendant leur périple, une bombe explose dans une école. Alors que le personnel d'un hôpital de fortune tente de faire face à l'afflux des jeunes victimes, toutes recouvertes d'une étrange poudre blanche, les médecins suspectent le dispositif explosif d'être une bombe incendiaire au napalm. »
  24. « La petite fille au napalm… 40 ans après »

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) John Mercer, Spanish Sahara, Londres, George Allen & Unwin Ltd, , 264 p. (ISBN 0-04-966013-6)
  • « 100 armes qui ont fait l'histoire », Guerre et Histoire, no hors sĂ©rie n°1,‎ , p. 60-71 (ISSN 2115-967X).

Articles connexes

Liens externes

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