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Histoire du pays de Bitche

L'histoire du pays de Bitche (Nord-Est du département de la Moselle, au contact de l'Allemagne) se perd dans la nuit des temps.

Préhistoire

La prĂ©sence de l'homme de NĂ©anderthal (PalĂ©olithique moyen, entre - 200 000 et - 35 000 ans avant JĂ©sus-Christ)est attestĂ©e par de nombreuses dĂ©couvertes de surface dans la rĂ©gion de Rimling (prospections S. Schmit en collaboration avec le Service rĂ©gional de l'archĂ©ologie lorraine) : galets amĂ©nagĂ©s, nuclĂ©us, racloirs en quartz et quartzite, racloirs et produits Levallois (pointes, nuclĂ©us, Ă©clats)en silex local du Muschelkalk (voir Ă  ce propos l'article paru dans la revue de la SHAL de Bitche en avril 2005), un biface. Des galets amĂ©nagĂ©s ont Ă©galement Ă©tĂ© dĂ©couverts Ă  Haspelschiedt (Goret).

Le Mésolithique (- 9000 à - 5500 av. J.-C.) est connu par les stations de surface de Kalhausen (Sainty, Petit)et Walschbronn (Goret, Thévenin), et par des découvertes isolées à Rimling (armatures, microlithes, grattoirs en silex local, prospections S. Schmit).

Le Néolithique (-5500 à -2000 av. J.-C.) est représenté, entre autres, par des polissoirs sur blocs ou parois de grès (qui auraient servi à polir des ébauches de haches) localisés en divers endroits du massif des Vosges du Nord (Haspelschiedt, Phillipsbourg...) Dans la région de Rimling-Epping-Erching-Obergailbach ont été découvertes 31 lames polies de haches ou d'herminettes (prospections S. Schmit, voir article dans la revue de la SHAL de Bitche en avril 2006, et en avril 2007). Les roches utilisées pour confectionner ces lames proviennent des Vosges du Sud (pélite-quartz de Plancher-les-Mines et schiste noduleux de Saint-Amarin et du Markstein), de l'Hunsrück-Eifel (laves et roches volcaniques), et des côtes de Meuse (silex), ce qui indique des échanges avec des contrées lointaines. Parmi ces pièces, certaines sont exceptionnelles : une herminette rubanée (Néolithique ancien) à section plano-convexe (plat-courbe) caractéristique, des haches perforées, et une rarissime hache plate en cuivre (Néolithique final) vraisemblablement issue du courant métallurgique des Balkans. Des pointes de flèches en silex, des fragments de meule en grès dur, des bouchardes en quartzite et une lame de faucille avec lustre des céréales ont également été découverts (prospections S. Schmit). La région de Rimling et ses terres fertiles (lehm et lœss) semble avoir été la plus occupée.

L'âge du bronze est peu connu : des fragments de bracelets torques ont été découverts à Rimling.

L'âge du fer est représenté par des nécropoles sous tumulus (bois de Rimling et d'Ormersviller), et par des éperons barrés en rebord de plateau (ferme du Nassenwald à Weiskirch, forêt de Hanviller...).

Toutes ces données sont consultables au Service régional de l'archéologie de Lorraine, Carte archéologique.

Les Celtes

Vers le premier millénaire avant Jésus-Christ, les Celtes arrivèrent du sud de l’actuelle Allemagne et après avoir traversé le Rhin, s’installèrent en Lorraine et donc dans le pays de Bitche. Ils arrivèrent facilement à s’imposer car ils connaissaient la technique du travail du fer qui révolutionna la vie dans la région.

Le travail des métaux, permettant à la fois de faire des outils pour de paisibles paysans, mais aussi des armes pour des hommes plus belliqueux, il se développa une nouvelle caste à côté des paysans, destinée à les " protéger " et qui finalement domina ses protégés.

Bien que d’humeur assez belliqueuse, les Celtes n’étaient pas des barbares et ils avaient développé une civilisation assez florissante. Les armes et les outils finement ouvragés, datant de cette période, en témoignent. La religion n’était certes pas étrangère à cette évolution car les druides, à la fois sages et savants, jouissaient d’un respect unanime.

Cependant, d’incessantes rivalités tribales finirent par affaiblir les Celtes qui, malgré les efforts de Vercingétorix, pour unir ce peuple face au danger de l’envahisseur romain, finirent par tomber sous le joug de ce dernier, mieux équipé et surtout plus discipliné, après l’issue fatale de la bataille d’Alésia en

PĂ©riode gallo-romaine

À l'époque gallo-romaine, alors que le pays de Bitche appartient à la cité des Médiomatriques, en Gaule belgique, à la frontière de la Germanie et des Triboques d'Alsace, les indices d'occupation se multiplient. Des villas rurales (110 recensés par la Société d'histoire et d'archéologie de Bitche) s'implantent essentiellement en pays découvert, leur chiffre pouvant s'élever à une douzaine comme à Bettviller. Leur répartition apparaît plus dense dans le canton de Volmunster et dans la partie occidentale du canton de Rohrbach-lès-Bitche. Dans la partie orientale du pays, les prospections s'avèrent plus difficiles en raison du relief accidenté et du couvert forestier.

Mais c'est pourtant ici qu'ont été sculptés les célèbres rochers de Lemberg et de Roppeviller, représentant des dieux et des déesses du Panthéon romain (Diane, Mars, Hercule, Sylvain) mais surtout gaulois (Nantosvelta, déesse de la forêt et des sources). D'autres témoignages cultuels existent dans la région : Junon à Weidesheim et peut-être à Sturzelbronn, Mercure à Bitche, Enchenberg, Epping et Haspelschiedt, Rosmerta à Bitche.

Les habitants du pays de Bitche, comme ceux du reste de la Gaule, finissent par accepter la domination des Romains et leur nouveau mode de vie. La Pax Romana entraîne un bouleversement total de la société gauloise, tant sur le plan politique que sur le plan social et économique. L’administration du territoire est confiée à des fonctionnaires civils et militaires qui finirent par contenir les combats tribaux, plaie de la période précédente. On développa les axes routiers qui facilitent les déplacements de l’armée, mais aussi le commerce en favorisant les échanges. L’adoption du mode de construction des Romains transforme également le mode de vie des « Gallo-Romains ».

À la période romaine succède une occupation à l'époque mérovingienne, peu dense et limitée à quelques localités du pays découvert (Bettviller, Rimling et Altheim, aujourd'hui en Sarre). La christianisation, particulièrement tardive, semble avoir été diffusée par l'abbaye bénédictine de Hornbach fondée au VIIIe siècle par saint Pirmin.

Les invasions

Cette période de relative paix dura environ 300 ans. Au milieu du IIIe siècle, des hordes barbares venues d'Allemagne, les Francs et les Alamans vinrent troubler cette quiétude, profitant de la fragilité de la surveillance des légions romaines dont les mœurs militaires s’étaient quelque peu relâchées. Ces bandes, peu organisées, mais fortement déterminées, mirent la région à feu et à sang. Cette période de troubles intense, avec des périodes de latence, s’étala sur plus d’un siècle et amena une régression économique et sociale dans la région avec une vie qui retourna pratiquement à l’état sauvage.

La christianisation, particulièrement tardive, semble avoir été diffusée par l'abbaye bénédictine de Hornbach, fondée au VIIIe siècle par saint Pirmin.

Le Moyen Ă‚ge

En 843 eut lieu le traité de Verdun où les petits-fils de Charlemagne se partagèrent son immense empire. Charles le Chauve reçut la partie occidentale, Louis le Germanique, la partie orientale et Lothaire Ier, quant à lui se vit attribuer une bande centrale allant de la mer du Nord à l’Italie. Peu avant la mort de Lothaire Ier (855), son royaume est partagé entre ses trois fils. Lothaire II reçoit la partie nord. C’est du nom Lothaire II que fut tiré le nom de Lotharingie pour désigner ce territoire d’où naîtront plus tard les noms de Lothringen en allemand et Lorraine en français. Cette position centrale était peu enviable, en effet, Charles et Louis avaient fréquemment des différends et pour les régler, passaient forcément sur le territoire de Lothaire. Le Bitscherland, se trouvant sur un passage stratégique dut souvent être mis à contribution par l’un ou l’autre de ces belligérants quand ce n’était pas les deux en même temps.

La première mention du nom de Bitis se trouve dans une lettre datée du milieu de XIIe siècle et dans laquelle le duc de Lorraine, Matthieu Ier demande au comte de Sarrewerden de respecter les limites ainsi que les habitants de sa seigneurie. Dans cette lettre écrite en lettres gothiques, mais en latin, les limites de cette seigneurie sont parfaitement établies. Dès 1170, un Bitis Castrum (château de Bitche) apparaît dans un document où Frédéric Ier se dénomme lui-même comme " Dominus de Bites " (seigneur de Bitche).

Ce Bitis castrum semble plutôt être un pavillon de chasse situé sur le Schlossberg dans la proche forêt de Lemberg. Il semblerait qu’à la même époque, sans qu’il soit possible de dater l’événement, un autre pavillon fut construit sur le Schlossberg de Bitche cette fois-ci, à l’emplacement de l’actuelle Citadelle. L’intérêt stratégique de ce promontoire avec vision panoramique sur plusieurs vallées n’a pu échapper aux seigneurs de l’époque. Un acte du comte Ferriprécise de nouveau les limites de la seigneurie en 1196.

La seigneurie de Bitche faisait partie du duché de Lorraine et était souvent donnée comme seigneurie personnelle au fils aîné du duc. Deux hameaux se développèrent au pied du promontoire rocheux : Rohr (roseau, allusion au sol marécageux de l’époque) et Kaltenhausen (maisons froides, du côté de la gare actuelle).

Les habitants de ces deux hameaux allaient à l’église de Schorbach, village bien plus ancien et dont l’église avait été construite en 1143 sur les directives des moines de Sturzelbronn.

Au XIIIe siècle, la seigneurie de Bitche était le seul territoire du duc de Lorraine à se trouver dans le domaine linguistique allemand et du fait du morcellement des possessions des comtes de Deux-Ponts, elle se trouvait géographiquement isolée. Le comte Eberhard II de Deux-Ponts proposa alors un accord d’échange au duc de Lorraine. Cette transaction se fit par deux traités : celui du et celui du .

Le comte Eberhard II de Deux-Ponts épousa en 1309 Agnès, comtesse de Bitche, fille de Tiébald II et prit le titre de « comte de Deux-Ponts et seigneur de Bitche » et après l’avoir transformé, fit du château de Bitche, sa résidence principale.

Le début du XIVe siècle marqua les prémices d’une longue période de malheurs pour Bitche et sa région. En 1305, un incendie ravagea le hameau de Kaltenhausen et de 1315 à 1317 une grande famine sévit en Lorraine et au pays de Bitche. Quelques années plus tard, en 1337, débuta la guerre de Cent Ans qui opposa jusqu’en 1453, la France à l’Angleterre et dans laquelle le pays de Bitche ne fut pas épargné.

En 1348 vint s’ajouter une épidémie de peste noire à la longue liste des maux dont souffrait déjà la région. La guerre de Cent Ans offrait certes des périodes de répit entre les combats, mais les soldats qui n’étaient pas payés en temps de paix, vivaient sur le pays et se servaient largement. Ces grandes Compagnies étaient la plaie du Moyen Âge et les paysans, comme les citadins d’ailleurs, ne savaient s’il fallait préférer la guerre ou la paix.

De plus, les comtes de Bitche n’étaient pas toujours des anges, leur comportement parfois très violent nécessita l’intervention du prince-électeur du Palatinat Ruprecht pour neutraliser les comtes Simon II et Hanemann Ier de Bitche.

En 1387, un incendie ravagea une seconde fois le hameau de Kaltenhausen, puis une nouvelle épidémie de peste (1411-1439) vint endeuiller la Lorraine. Enfin, les continuelles querelles des seigneurs de Bitche les obligèrent à s’endetter et ils s’attirèrent les inimitiés des voisins.

En , le château de Bitche fut attaqué, sans préavis, et pris par les comtes Jacob et Wilhelm de Lutzelstein (La Petite-Pierre). Le comte Friedrich de Bitche parvint à s’enfuir mais ses enfants furent gardés en otage. Cette action, contraire à toutes les règles de la chevalerie souleva la réprobation générale et une forte coalition s’en vit pour rendre gorge aux Lutzelstein. Durant cette action, le hameau de Kaltenhausen connut un troisième incendie, mais le comte de Bitche décida de le faire reconstruire et il tint parole. La lignée des Lutzelstein que cette aventure n’avait pas grandie s’éteignit définitivement en 1452.

Durant le premier quart du XVIe siècle, les paysans, voulant obtenir les mĂŞmes avantages que les citadins, se rĂ©voltèrent, c’est ce qui fut appelĂ© la guerre des paysans. Dans le pays de Bitche, la rĂ©volte fut menĂ©e par un certain Hans Zoller de Rimling. S’attaquant aux châteaux de la rĂ©gion qu’ils incendièrent, ils ravagèrent Ă©galement l’abbaye de Sturzelbronn. Les nobles, mieux organisĂ©s et possĂ©dant une armĂ©e de mĂ©tier rĂ©primèrent cette rĂ©volte dans le sang. Ă€ Saverne, 17 000 d’entre eux furent massacrĂ©s, sans compter les nombreux procès qui se sont terminĂ©s par des condamnations capitales et obligations de rĂ©parer. Finalement, le noblesse vit son pouvoir renforcĂ© Ă  la sortie de cette rĂ©volte.

C’est à cette époque également que le protestantisme fit son apparition et cette religion nouvelle profita du développement de l’imprimerie pour se répandre en Europe.

La seigneurie de Bitche devient lorraine

Jusqu’au dĂ©but du XVIe siècle, la seigneurie de Bitche dĂ©pendait en dĂ©finitive du Saint-Empire romain germanique. Lorsque Reinhard de Bitche mourut, en 1531, ses deux fils se partagèrent son domaine. Mais bien vite, ils se brouillèrent et se querellèrent si bien que le duc de Lorraine commença Ă  avoir des visĂ©es sur cette seigneurie. En fin de compte, AmĂ©lie de Bitche, fille de feu Simon Wecker et Ă©pouse de Philippe de Linange-Westerbourg (Philip von Leiningen-Westerburg), vendit la terre de Bitche au duc de Lorraine Charles II pour la somme de 50 000 Ă©cus.

Il semble pourtant que les choses ne se soient pas passées très facilement, puisqu’en 1563, le comte Jacob de Bitche racheta les maisons en bas du promontoire rocheux, les fit raser et fit construire des remparts pour se protéger des ducs de Lorraine auxquels il ne voulait pas payer les « aides ». Jacob mourut en 1570 sans laisser de descendants directs, il était le dernier comte de Deux-Ponts–Bitche.

Philippe V de Hanau-Lichtenberg réclama alors l’héritage de son beau-père le comte Jacques/Jacob. Le duc de Lorraine Charles III le lui reconnut. Cependant, le nouveau seigneur, protestant, voulut imposer cette religion à ses sujets selon la règle qui voulait à l’époque qu’on épouse la religion du souverain. Il y mit tant de vigueur, allant jusqu’à emprisonner le supérieur de l’abbaye de Sturzelbronn, qu’il incommoda le duc de Lorraine qui le convoqua devant les assises de Nancy. Philippe refusa de s’y rendre et fut déclaré félon. Le duc de Lorraine fit assiéger Bitche en 1572. Au bout de quelques jours, le château se rendit mais Philippe put s’enfuir. Les troupes du duc de Lorraine prirent même dans la foulée le château de Lemberg (Palatinat) et les villages environnants, obligeant la population à prêter serment au duc.

Ainsi, cet épisode contribua à confirmer l’autorité du duc de Lorraine sur la région de Bitche.

La religion catholique, interdite par Philippe V, fut rĂ©tablie dès 1572. Alors que les guerres de religion faisaient rage dans d’autres rĂ©gions, en cette fin du XVIe siècle, elles semblent avoir Ă©pargnĂ© le pays de Bitche. Mais l’intolĂ©rance religieuse et le fanatisme qui rĂ©gnaient Ă  l’état endĂ©mique engendrèrent, en partie, un autre flĂ©au : la sorcellerie et les procès iniques qui l’accompagnaient. Bitche et sa rĂ©gion n’y Ă©chappa pas. Personne n’était Ă  l’abri d’une dĂ©nonciation et une fois qu’on Ă©tait entre les mains de la justice, on n’avait que peu de chances d’en sortir indemne, car les tortures infligĂ©es pouvaient faire avouer les crimes les plus horribles. Hommes ou femmes pouvaient ĂŞtre « soumis Ă  la question Â» et plus d’un a prĂ©tendu avoir commis, notamment avec le Diable, des actes dont il ne soupçonnait mĂŞme pas l’existence. En 1588, quinze personnes furent brĂ»lĂ©es Ă  Bitche pour sorcellerie et contact avec le Malin et ce n’était pas une annĂ©e exceptionnelle.

Bitche au XVIIe siècle

En 1601, pour régler des différends de frontière, des dignitaires des duchés de Lorraine et de Deux-Ponts se réunirent au couvent de Hornbach. Ils se rendirent sur place pour constater de visu les points litigieux, trouvèrent un accord et décidèrent que des pierres-bornes délimiteraient désormais les deux territoires.

" En ce début du XVIIe siècle, le comté de Bitche comptait 68 localités subdivisées en 52 villages domaniaux, un village d’église et 15 localités données en fief par la Lorraine ". Le pays de Bitche se trouvait à un carrefour routier important ce qui facilitait les échanges commerciaux.

Après que les problèmes de frontière furent réglés, un accord fut signé le entre les maisons de Hanau et de Lorraine, selon lequel, toute la seigneurie de Lemberg (Palatinat) fut donnée en fief à Reinhard, fils de Philippe V de Hanau-Lichtenberg. En revanche, il abandonnait toute prétention sur le comté et le château de Bitche. Cet accord fut ratifié deux ans plus tard () et cette date marque le rattachement officiel au duché de Lorraine. De nouvelles pierres bornes pour marques les frontières entre les territoires furent posées et certaines sont encore visibles de nos jours.

Ce traité mit fin à de longues querelles entre les maisons de Hanau-Lichtenberg et le duché de Lorraine et très rapidement, les habitants du comté prêtèrent serment de fidélité à Charles III, duc de Lorraine.

À la mort de ce dernier, en 1608, le gouverneur de Bitche, Jacques de Raigecourt fit sonner les cloches de toutes les églises durant quatre semaines à la tombée de la nuit et fit lire des messes pour le repos de l’âme du défunt.

Le nouveau duc, Henri II vint faire une visite à Bitche et modernisa l’administration et la justice de son territoire. Il créa un tabellionage et un sceau pour Bitche. Un nouveau tribunal fut créé pour remplacer le tribunal du Moyen Âge qui siégeait à Rimling. La justice civile fut rendue à la mairie de Schorbach par le maire de ce village assisté de quatre échevins. Les procès en sorcellerie continuaient et les exécutions capitales bitchoises se faisaient au lieu-dit Galgenberg, à gauche de l’actuelle Rosselle.

En 1611, le duc de Lorraine établit une prévôté à Bitche dont la tâche principale était de rendre la justice, mais elle s’occupa également de finances.

La vie économique semble avoir prospéré dans ce premier quart du XVIIe siècle. Il y avait une trentaine de moulins à eau dans le comté de Bitche qui appartenaient bien entendu au duc de Lorraine ou à la noblesse car ils rapportaient de l’argent, la population étant obligée d’y moudre son grain. On exportait également du bois vers la Hollande. Les grumes étaient transportées par flottage le long de la Horn.

Cependant, le deuxième quart de ce siècle marqua le début d’une longue récession économique due en grande partie au passage nombreux des troupes qui vivaient sur le pays ainsi qu’à des épidémies qui désorganisèrent la vie économique et la famine apparut.

Les malheurs du XVIIe siècle et la restauration de Léopold Ier

Les guerres de religion ayant pris un caractère international, la Lorraine en général et le pays de Bitche en particulier vit le passage de soldats de nationalités très diverses amenant toutes leur lot de malheurs et de misères.

En 1622, ce furent d’abord les Croates et les Cosaques de l’archiduc Léopold qui pillèrent le duché de Deux-Ponts puis saccagèrent Bitche et les villages de Rohr et Kaltenhausen. L’abbaye de Sturzelbronn fut également dévastée.

Par suite de disputes et d’alliances entre les princes, le comté de Bitche échoua finalement à Charles IV de Lorraine, un souverain belliqueux qui, après avoir combattu les protestants se mit au service de Ferdinand II contre les Suédois, il devint ainsi l’ennemi de Richelieu. Parmi ses nombreux ennemis, il fallut encore compter les Français. En 1627, une épidémie de peste décima la population. C’est à cette époque que les moines capucins vinrent s’installer à Kaltenhausen pour soigner les malades.

Après avoir subi le passage des Croates et des Cosaques, les Suédois s’installèrent dans le pays en 1633 et il fut mis à sac. Dans certains villages, seules deux ou trois personnes avaient pu échapper au massacre.

En 1634, Richelieu, pour punir Charles IV de Lorraine décida de le déposséder de ce qui lui restait encore. Le maréchal d’Humières fut chargé de prendre le château de Bitche qui se rendit après un siège de dix jours. Les Français s’installèrent dans le pays et les malheurs continuèrent. Voici ce qu’écrivait le receveur des finances de Bitche : « Les pauvres sujets (de Bitche) furent ruinés sept ou huit années consécutives par les troupes qui passaient et repassaient quotidiennement dans le comté. Ils connurent la misère la plus noire et le dénuement le plus complet. En plus, l’armée royale, commandée par le maréchal d’Humières assiégea le château de Bitche, maltraitant, volant et asservissant les pauvres sujets, leur prenant tout ce dont ils avaient besoin pour vivre, obligeant la plupart d’entre eux à partir ailleurs pour y gagner leur pain ».

Les français restèrent jusqu’en 1641, jusqu’à ce que Charles IV de Lorraine entre à nouveau en possession de ses terres. Mais ce n’était pas fini, les Lorrains, les Impériaux et les Suédois prirent le relais et ils finirent par transformer la région en un immense désert. À tel point qu’un " garde pauvres " dut être créé pour s’occuper de nourrir les indigents et de les empêcher de mendier.

Une autre conséquence de ces troubles fut la disparition de nombreux châteaux forts et de villages du pays de Bitche. À partir de 1662, des immigrants suisses suivis de Tyroliens vinrent s’installer dans la région. Mais la Lorraine subit une nouvelle fois l'invasion des troupes françaises en 1670. Cette énième occupation devait durer près de 30 ans. Le roi de France imposa une acculturation politique et chercha à « franciser » le pays de Bitche en y faisant venir, dès 1672, des immigrants francophones, d'abord savoisiens puis, vers 1680, des Picards vinrent s’installer sur ces terres germaniques.

Avec ces nouveaux arrivés, les villages de Rohr et de Kaltenhausen se mirent très vite à grossir et finirent par se toucher. La ville de Bitche était née. Elle était entourée de remparts percés par deux portes : la porte de Strasbourg et la porte de Sturtzelbronn.

Durant l’hiver de 1673 à 1674, Turenne pris ses quartiers d’hiver dans le Palatinat. Il vint visiter Bitche et fut impressionné par l’importance stratégique du site. Il finit par convaincre Louis XIV de fortifier ce point. En 1679, le roi chargea Vauban de ce travail.

Le duc Charles IV mourut en 1675 et son neveu Charles V de Lorraine fut reconnu duc légitime par les puissances européennes (sauf la France). Ses talents firent bientôt de lui le généralissime de l'armée impériale. Le chef de l'armée française, Turenne, lui aussi, était mort en 1675 et à partir de cette date, faute d'officier charismatique, les Français connurent de cruels échecs face aux impériaux. Louis XIV, n’ayant pas assez de troupes, décida d’employer la cruelle méthode dite de la table rase (ou terre brûlée) pour que ses ennemis ne puissent se nourrir sur le pays. Environ 400 villages furent incendiés ainsi que Deux-Ponts. Cette politique fut un succès militaire et les impériaux se retirèrent du pays, mais les malheureux habitants de la région de Bitche furent réduits à se réfugier dans les bois et dans les montagnes, se nourrissant de ce que la nature ravagée leur laissait.

En 1678, le traité de Nimègue mit fin à la guerre entre les Provinces-Unies et la France. La Lorraine fut restituée à l’empereur Léopold Ier du Saint-Empire et les troupes françaises se retiraient du pays quand le duc Charles V, qui dans le même temps avait épousé la sœur de l'empereur, n’accepta pas les termes humiliants du traité de Nimègue concernant la Lorraine et le Barrois. Aussitôt, le roi de France revint occuper le pays de Bitche ce qui renforça son empire de ce côté.

Vauban fit fortifier le Schlossberg et il fit aussi entourer la ville de remparts renforcés de bastions. Ces travaux attirèrent de nombreux ouvriers. Un arrêté du Conseil d’État de Louis XIV autorisant à tous les habitants du comté et à tous ceux qui acceptaient de s’y installer de défricher autant de terres qu’ils pouvaient en cultiver avec exemption de toutes taxes durant 10 ans, permit à notre région de revivre et à l'armée française de se nourrir... En peu de temps, 60 villages se créèrent ou reprirent vie.

Les chapelles de Bitche étant bientôt trop petite, on commença, en 1684 la construction d’une première église dédiée à sainte Catherine à l’emplacement de l’actuelle église tandis que le duc Charles V se distinguait en sauvant Vienne de la menace ottomane et en conquérant la Hongrie pour l'empereur. Il mourut en 1690 deux ans après le déclenchement de la guerre de la Ligue d'Augsbourg, réaction des puissances européennes à la politique des "réunions" de Louis XIV.

Le traité de Ryswick mit fin à cette énième guerre en 1697 et stipulait que la Lorraine (donc Bitche) devait être rendue à son souverain légitime Léopold Ier de Lorraine, fils et successeur de Charles V. Les nouvelles fortifications devaient être rasées. Un régiment de Flandre, avant de quitter la ville se chargea de cette besogne de l’automne 1697 à l’été 1698.

Une nouvelle vague d’émigrants eut lieu entre 1690 et 1706. Bitche avait déjà une vocation cosmopolite, pourtant le nombre important d’immigrés créa des réactions xénophobes de la part des autochtones.

En 1701, éclata la guerre de Succession d'Espagne. Une nouvelle fois une garnison française vint occuper Bitche. Les soldats s’efforcèrent aussitôt à reconstruire les fortifications construites par Vauban et rasées peu de temps avant.

Une grande famine régna dans la région entre 1709 et 1714, au cours de laquelle 10 à 12 % de la population mourut de faim.

En 1710, un courrier permanent fut instauré entre Bitche, Phalsbourg et le prévôt de Bitche, Zollern engagea Dominique Perottey pour enseigner aux enfants le français et l’allemand.

En 1727, le duc de Lorraine Léopold Ier obtint des grandes puissances la neutralité de la Lorraine. Le duc mourut en 1729 laissant le trône à son fils François III qui terminait à Vienne, auprès de l'empereur, son éducation.

Le règne de Stanislas Leszczinski et de Bombelles

En 1735 et 1736 furent signés des accords spécifiant que le duc de Lorraine François III-Étienne renonçait aux duchés de Bar et de Lorraine au profit du roi de Pologne en exil : Stanislas Leszczyński, dont la fille avait épousé le roi de France Louis XV. Le roi polonais déchu vint donc s’installer à Lunéville et prit le titre fantoche de duc de Lorraine et de Bar (par le traité de Meudon, il cédait au roi de France la réalité du pouvoir). Louis XV ordonna donc la reconstruction de la place forte de Bitche sur les plans de Vauban. Et sous la direction du maréchal de camp de Bournay. Quand celui-ci mourut en 1740, il fut remplacé par un homme qui, tout en servant la France, se révéla providentiel pour la ville de Bitche : le comte Henri François de Bombelles.

Dès 1741, Bombelles se mit à l’ouvrage et lorsqu’en 1744 les mercenaires guerroyant pour l’Autriche s’approchèrent de Bitche, ils furent repoussés. Les travaux de fortification durèrent jusqu’en 1754. Sous l’impulsion du comte de Bombelles, de très importants travaux furent réalisées tant au château qu’aux remparts de la ville qui comptaient alors quatre portes. Lorsqu’il mourut, en 1760, ce constructeur éclairé fut regretté de tous et son souvenir est encore vivace dans la population bitchoise.

Bien qu’officiellement lorrain, le comté de Bitche était sous l’influence de la France dès cette époque, d’ailleurs, mena de nouveau une politique d'acculturation de la population en publiant dès le un décret qui instaurait la langue française comme langue officielle. Celle-ci remplaça progressivement le latin dans les registres paroissiaux. Ainsi, les personnels administratifs et le clergé n'avaient d'autres choix que de devenir francophones et la population ne pouvaient à terme que les suivre dans cette voie.

D'ailleurs, le sort des habitants ne s’améliora pas beaucoup et c’est à cette époque que beaucoup de familles émigrèrent dans le Banat et la Batschka en Hongrie, terres impériales sur lesquelles régnait leur ancien souverain devenu l'empereur François Ier du Saint-Empire.

À la mort de Stanislas Leszczyński, le , les duchés de Lorraine et de Bar furent officiellement rattachés à la France. Bitche devint française.

En , l’illustre écrivain Johann Wolfgang von Goethe, venant de Deux-Ponts passa par Bitche pour se rendre en Alsace et consigna cet événement dans ses écrits. Peu avant la Révolution française, le , une nouvelle église Sainte-Catherine fut inaugurée par la célébration d’une première messe.

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