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Aline Cloutier

Aline Cloutier, née en 1927 et morte le [1], est considérée comme la premiÚre caricaturiste québécoise[2].

Aline Cloutier
une illustration sous licence libre serait bienvenue
Biographie
Naissance
DĂ©cĂšs
Nationalité
Formation
Activité

Biographie

Famille

Aline Cloutier a cinq enfants — Jean, Serge, Claude, Yves et Sylvain — et Ă©galement trois petits-enfants[1].

Un parcours artistique

Durant son adolescence, Aline Cloutier dĂ©veloppe une passion pour le dessin de portraits d'actrices de cinĂ©ma, s'inspirant des photos publiĂ©es dans le magazine hollywoodien Silver Screen. Dans les annĂ©es 1950[3], elle envisage de se spĂ©cialiser en peinture ou en art publicitaire. C'est pourquoi, elle choisit de prĂ©senter sa candidature Ă  l'École des beaux-arts en utilisant des dessins rĂ©alisĂ©s dans ce style. MalgrĂ© les rĂ©serves exprimĂ©es par le directeur de l'Ă©cole, Jean-Baptiste Soucy, Ă  propos de son style de dessin, elle est tout de mĂȘme acceptĂ©e[4].

Elle dĂ©couvre la caricature durant troisiĂšme annĂ©e[2] lors d'un cours de croquis, oĂč le professeur demande aux Ă©tudiants de rĂ©aliser des caricatures de leurs camarades de classe. C'est une rĂ©vĂ©lation pour Aline Cloutier[4]. « Au bout de la troisiĂšme annĂ©e, j’avais un dessin ordinaire, je ne me trouvais pas trĂšs bonne. Une semaine, notre professeur nous a demandĂ© de caricaturer un ou une camarade de classe. Ça m’est venu trĂšs naturellement. Le prof a Ă©tĂ© Ă©patĂ©, il trouvait que je dessinais des caricatures un peu comme celles qui se faisaient en Europe » raconte-t-elle, qui dit s’ĂȘtre inspirĂ©e des magazines europĂ©ens auxquels son pĂšre Ă©tait abonnĂ©[2]. Elle ajoute : « Moi, ça a cliquĂ© comme ça. J’ai fait une de mes amies. Je l’ai eue tout de suite. Et puis, mon Dieu, le professeur Ă©tait Ă©bahi! Ensuite, il nous en faisait faire souvent et j’avais toujours la meilleure note. Il Ă©tait surpris, il trouvait que ça ressemblait aux caricatures qu’on voyait en Europe. Il trouvait que c’était plus stylisĂ©. Je ne mettais pas beaucoup de dĂ©tails, j’essayais de faire le plus simple possible »[4]

Elle décide alors de poursuivre dans cette direction et décide de retirer la lettre « r » de son nom, signant désormais Cloutié[4].

Portrait-charge et caricature de célébrités

Aline Cloutier se concentre principalement sur la caricature en tant que « portrait-charge », expliquant qu'elle se sent moins Ă  l'aise dans le domaine du dessin Ă©ditorial, malgrĂ© son intĂ©rĂȘt certain pour la politique Ă  tous les niveaux, que ce soit au niveau local, national ou international[4].

Journal Vanity Fair.

Elle se spécialise donc principalement dans le portrait-charge, qui consiste à exagérer et déformer les traits du sujet dessiné sans toutefois ridiculiser les personnalités qu'elle représente ni adopter une approche critique ou insolente. Ses dessins se rapprochent d'un autre courant, celui de la caricature de célébrités, à la mode au début du XXe siÚcle dans des magazines américains tels que Vanity Fair à New York[4].

Les Ɠuvres d'Aline Cloutier se distinguent par leur intention principale de prĂ©senter une interprĂ©tation vivante des personnalitĂ©s cĂ©lĂšbres, qu'elles proviennent des domaines des arts, du spectacle, de la politique ou des affaires. Contrairement Ă  une approche satirique et critique, ses portraits caricaturaux visent Ă  capturer l'essence des individus de maniĂšre vivante et expressive. Ils offrent une reprĂ©sentation plus dynamique et expressive qu'une simple photographie ou un portrait traditionnel au fusain. L'objectif est de permettre aux spectateurs de reconnaĂźtre aisĂ©ment les cĂ©lĂ©britĂ©s du moment, dans un style artistique moderne[4].

Parcours professionnel

Une fois son diplÎme obtenu en 1951, elle travaille comme secrétaire-comptable aux cÎtés de son pÚre, courtier en douanes à Québec, jusqu'en 1957. AprÚs un séjour de quatre mois en Europe avec une amie, à son retour, elle cherche un emploi dans le domaine du dessin et du graphisme[4].

Aline Cloutier tente sans succÚs de proposer ses talents de caricaturiste au quotidien L'Action catholique. Lorsqu'elle est reçue par un haut responsable religieux, sa présence en tant que femme caricaturiste est mal perçue[4].

Lors des vacances de Raoul Hunter, le caricaturiste du journal Le Soleil, elle se rend au journal pour proposer ses services de caricaturiste pendant son absence. Sa proposition est cependant mal interprétée et crée un malentendu. On pense à tort qu'elle cherche à le remplacer, alors que ce n'était pas son intention. En conséquence, sa démarche est rejetée[4].

« J’ai beaucoup frappĂ© aux portes, j’ai envoyĂ© des caricatures Ă  des magazines, mais ça ne leur convenait jamais vraiment. En rĂ©alitĂ©, mon travail aurait Ă©tĂ© plus appropriĂ© pour des journaux. Sauf qu’à l’époque, on les comptait sur les doigts d’une main ! [2]»

Journal Le Soleil

Entre 1958 et 1960, elle est finalement employée par le journal Le Soleil en tant que dessinatrice publicitaire et graphiste au sein de la division des impressions. Pendant cette période, elle conçoit des dépliants publicitaires pour des hÎtels de Québec et réalise également des dessins de mode à la demande des journalistes spécialisés. Cette activité lui permet de constituer une collection de dessins de mode féminine et de coiffures, qui met en lumiÚre les derniÚres tendances vestimentaires et coiffures de l'époque[4].

Logo du journal Le Soleil.

Le 16 avril 1960, le journal Le Soleil acquiert et publie une seule caricature politique d'Aline Cloutier intitulĂ©e « SOUHAITS DE PÂQUES... » La mention fait rĂ©fĂ©rence Ă  un sommet qui Ă©tait prĂ©vu Ă  Paris entre quatre leaders politiques, mais qui a finalement Ă©tĂ© annulĂ©[2]. La caricature reprĂ©sente un panier d'Ɠufs de PĂąques avec les tĂȘtes des dirigeants britannique Harold Macmillan, soviĂ©tique Nikita Khrouchtchev, amĂ©ricain Dwight Eisenhower et français Charles de Gaulle. Une lĂ©gende accompagne le dessin : « ... Qu'ils Ă©closent en paix ! ». Ce dessin illustre les tensions de la guerre froide Ă  cette pĂ©riode[4].

En 1965, le Carnaval de QuĂ©bec accepte sa proposition d'affiche : « C’était un concours pour le Carnaval. J’avais gagnĂ© 300 $ en 1965. J’avais obtenu le deuxiĂšme prix. Mon ancien professeur, Omer Parent, avait envoyĂ© une de ses affiches. Mais ils ont publiĂ© la mienne, parce qu’ils trouvaient peut-ĂȘtre que cela faisait plus commercial. La sienne, je ne l’ai jamais vue. ». Cette affiche est Ă©galement reproduite en premiĂšre page d'un cahier thĂ©matique du journal Le Soleil[4].

En 1960, elle quitte le journal pour retourner travailler avec son frĂšre au bureau de son pĂšre dĂ©cĂ©dĂ© l'annĂ©e d'avant. Elle consacre cependant tout son temps libre Ă  la caricature ou elle dessine les personnalitĂ©s les plus marquantes de l'actualitĂ© nationale et internationale de l'Ă©poque et tente de faire publier ses Ɠuvres dans des revues et des magazines, comme par exemple, le quotidien La Presse, mais sans succĂšs[4].

Le congrÚs de fondation du Parti québécois

En octobre 1968, le Parti québécois est fondé lors d'un congrÚs à Québec, réunissant le Mouvement souveraineté-association de René Lévesque et le Ralliement national de Gilles Grégoire. Aline Cloutier, membre du nouveau parti, contribue à la décoration de la scÚne en créant des caricatures géantes de Gilles Grégoire et de René Lévesque. Elle le fait bénévolement, animée par l'enthousiasme de participer à cet événement historique. Le Parti québécois participe à ses premiÚres élections générales en avril 1970[4].

Malgré ses tentatives vaines de se faire connaßtre à travers ses dessins sur la Crise d'octobre ou l'affaire Lucien Rivard, Aline Cloutier ne laisse pas tomber sa passion pour le dessin. Elle continue à persévérer dans sa pratique artistique, cherchant d'autres opportunités pour partager son talent jusqu'au référendum québécois de 1995[2].

Reconnaissance tardive

Aline Cloutier va ensuite rĂ©sider Ă  Ottawa pendant une vingtaine d'annĂ©es, se consacrant Ă  l'Ă©ducation de sa fille tout en occupant divers emplois. De temps en temps, elle dessine des costumes et des dĂ©cors de thĂ©Ăątre pour enfants. Elle rĂ©alise Ă©galement quelques caricatures, jusqu' aux environ de 2000, oĂč elle dresse le portrait de personnalitĂ©s politiques contemporaines telles que Brian Mulroney, Lucien Bouchard, StĂ©phane Dion et François Ouimet[4].

Peu connue et peu exposĂ©e jusqu'Ă  rĂ©cemment, ses dessins commencent Ă  ĂȘtre reproduits dans quelques publications, tels que les livres du professeur Alain Lavigne sur le marketing des partis politiques[5] et la biographie du maire de QuĂ©bec Gilles Lamontagne par l'historien FrĂ©dĂ©ric Lemieux[6]. Ces auteurs contribuent Ă  mettre en avant le travail d'Aline Cloutier, rare caricaturiste du XXe siĂšcle. Elle est probablement la premiĂšre artiste Ă  avoir publiĂ© une caricature dans un grand journal quĂ©bĂ©cois[4].

La collection d'Aline Cloutier

En 2010, Aline Cloutier dĂ©cide de faire don de prĂšs de 460 documents Ă  la BibliothĂšque de l'AssemblĂ©e nationale du QuĂ©bec. Cette collection comprend 249 caricatures, 201 esquisses et 7 dessins[7]. Les documents couvrent une pĂ©riode allant de 1948 Ă  2010, mais la plupart des Ɠuvres sont crĂ©Ă©es entre 1950 et 1970[4]. Suite Ă  ce don, son travail connaĂźt un renouveau d'intĂ©rĂȘt.

Les caricatures sont numérisées et publiées dans le Bulletin de la BibliothÚque de l'Assemblée nationale, un journal institutionnel. En 2016, ses caricatures sont mises en couverture du bulletin et un dossier spécial lui est dédié. De plus, une sélection de ses caricatures est exposée lors de l'exposition « Coups de crayon ! »[8], dédiée à son talent artistique[7].

Ces caricatures, publiées dans divers journaux, servent comme une sorte d'annuaire de l'époque, offrant un panorama des personnalités du monde telles qu'elles sont perçues depuis le Québec au temps de son vivant. Elles témoignent de l'actualité et permettent aux lecteurs de se tenir informés sur les personnalités marquantes et les événements importants de cette époque, reflétant ainsi la société et les enjeux contemporains[4].

La collection comprend Ă©galement un cahier d'esquisses provenant des collĂšgues et amis de Aline Cloutier Ă  l'École des beaux-arts de QuĂ©bec, ainsi que quelques photographies de ces individus[9].

Caricatures de la scĂšne politique

Les grands noms de la politique québécoise et canadienne de toutes appartenances se trouvent dans la collection, de Paul Sauvé à Jean-Jacques Bertrand, de Jean Lesage à Pierre Laporte et Robert Bourassa, de René Lévesque à Pierre Bourgault, en passant par Daniel Johnson pÚre, Maurice Bellemare, Paul Gérin-Lajoie, Claire Kirkland et Yves Michaud[4].

Les premiers ministres canadiens, de John Diefenbaker Ă  Pierre Trudeau, y sont Ă©galement prĂ©sents. Aline Cloutier offre aussi un panorama des leaders et des personnalitĂ©s politiques de la scĂšne mondiale des annĂ©es soixante, tels que Konrad Adenauer, Fidel Castro, David Ben Gourion, LĂ©onid Brejnev, Lyndon Johnson, Mao, Gamal Abdel Nasser, Richard Nixon, le Shah d’Iran, le marĂ©chal Tito et Zhou Enlai[4].

Vedettes du cinéma

Le monde des arts et de la culture, qu'il soit local ou international, est une source d'inspiration pour Aline Cloutier. Elle rĂ©alise des caricatures de vedettes du cinĂ©ma telles que Brigitte Bardot, Jean-Paul Belmondo, Catherine Deneuve, Yul Brynner, GeneviĂšve Bujold, Fernandel, Sophia Loren, Marie LaforĂȘt, et bien d'autres[4].

Artistes musicaux

Elle met en lumiÚre des artistes de la musique et de la chanson tels que Guy Béart, Juliette Gréco, Maria Callas, Maurice Chevalier, Robert Charlebois, Michel Louvain, Gilles Vigneault, ainsi que les icÎnes contemporaines[4].

Célébrités de la télévision québécoise

La collection comprend des caricatures des tĂȘtes d'affiche de la tĂ©lĂ©vision quĂ©bĂ©coise de son temps, parmi lesquelles Dominique Michel, Jacques Desrosiers, Michelle Tisseyre et l'annonceur Gabi Drouin[4].

Personnalités sportives

Elle réalise des portraits de personnalités du monde du sport, dont les frÚres Maurice et Henri Richard du Canadien de Montréal[4].

Auteurs littéraires

Elle réalise des portraits d'écrivains et des auteurs contemporains, tels que des caricatures de Marie-Claire Blais, Françoise Sagan, Pierre ValliÚres ainsi que de l'historien Henri Guillemin[4].

Mort

Aline Cloutier meurt chez elle à l'ùge de 92 ans le 4 juin 2019 à l'HÎtel-Dieu-de-Sorel, situé à Sorel-Tracy. Les funérailles ont lieu dans l'aprÚs-midi du 14 juin au Centre funéraire Yves Houl à Sorel-Tracy au Québec, en présence de la famille. Une liturgie de la Parole à lieu à la chapelle du salon et son inhumation au cimetiÚre de St-Joseph-de-Sorel, quelques jours plus tard[1].

Références

  1. « Avis de décÚs Aline Cloutier » AccÚs libre, sur Centre funéraire Yves Houle, (consulté le )
  2. Sylvie St-Jacques, « Dans les carnets d’Aline Cloutier », sur Le Devoir, (consultĂ© le )
  3. « Cloutier Aline - Festival 1001 Visages » (consulté le )
  4. « Aline Cloutier : une caricaturiste méconnue de la Révolution tranquille », sur PREMIÈRE LECTURE, (consulté le )
  5. Marie-Ève Carignan, « Alain Lavigne, Lesage le chef tĂ©lĂ©gĂ©nique, le marketing politique de « l’équipe du tonnerre », QuĂ©bec, Septentrion, 2014, 186 p., IllustrĂ©. (PrĂ©face de Jean-Marc LĂ©ger) », Recherches sociographiques, vol. 57, no 1,‎ , p. 229–231 (ISSN 0034-1282 et 1705-6225, DOI 10.7202/1036637ar, lire en ligne, consultĂ© le )
  6. Étienne Berthold, « FrĂ©dĂ©ric Lemieux, Gilles Lamontagne. Sur tous les fronts, Outremont, Les Éditions Carte Blanche, 2010, 669 p. », Recherches sociographiques, vol. 52, no 3,‎ , p. 909–910 (ISSN 0034-1282 et 1705-6225, DOI 10.7202/1007705ar, lire en ligne, consultĂ© le )
  7. MaĂ«l Rannou, Quand la BibliothĂšque de l’AssemblĂ©e nationale du QuĂ©bec met en avant ses caricaturistes., Revue trimestrielle Papiers NickelĂ©s, , 5 p. (lire en ligne), p. 4-5
  8. « DerniĂšre chance : exposition « Coups de crayon ! » Ă  l’AssemblĂ©e (...) », sur ActuaBD (consultĂ© le )
  9. « Collection Aline Cloutier (C6) - BibliothĂšque de l’AssemblĂ©e nationale du QuĂ©bec - Guides thĂ©matiques », sur www.bibliotheque.assnat.qc.ca (consultĂ© le )
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