Sossipatré Assathiany
SossipatrĂ© Assathiany[1], en gĂ©orgien áĄááĄááááąá á ááĄáááááá, nĂ© le Ă Dgnarissa, province de Letchkhoumie (GĂ©orgie), Ă lâĂ©poque dans lâEmpire russe, et mort le Ă Paris 15e[2], est un homme politique gĂ©orgien, qui fut successivement gouverneur de province, chef de mission diplomatique, premier secrĂ©taire de la LĂ©gation gĂ©orgienne en France, directeur de lâOffice des rĂ©fugiĂ©s gĂ©orgiens en France et chef de section Ă lâOffice français de protection des rĂ©fugiĂ©s et apatrides[3].
Nom de naissance | áĄááĄááááąá á ááĄáááááá |
---|---|
Alias |
Tjitjiko |
Naissance |
Dgnarissa, GĂ©orgie, Empire russe |
DĂ©cĂšs |
15e arrondissement de Paris |
Nationalité | Russe, géorgienne, apatride d'origine géorgienne |
Pays de résidence | Empire russe, Suisse, Géorgie, France |
DiplĂŽme | |
Profession | |
Activité principale |
Premier secrétaire de la Légation géorgienne en France (1921-1933) |
Autres activités |
Directeur de l'Office des réfugiés géorgiens (1933- 1952) |
Conjoint |
Sarah Koutik |
Descendants |
Roland (1910-2008), Lucette (1921-1995) et Mireille (NĂ©e en 1927) |
Biographie
Fils dâEdith et de Samson Assathiany, des aristocrates de lâOuest gĂ©orgien, il effectue ses Ă©tudes secondaires au lycĂ©e de KoutaĂŻssi, puis rejoint lâĂ©cole supĂ©rieure dâagriculture de Kichinev (aujourdâhui ChiÈinÄu), en Bessarabie (aujourdâhui Moldavie).
LâEmpire russe, la dĂ©portation au Turkestan
Ă partir de 1903, il milite au sein du Parti ouvrier social-dĂ©mocrate gĂ©orgien, est chargĂ© de la propagande auprĂšs des employĂ©s des chemins de fer[4], est arrĂȘtĂ© Ă plusieurs reprises, notamment aprĂšs avoir dĂ©truit au revolver un portrait du tsar Nicolas II, ce qui lui vaut une dĂ©portation dâune annĂ©e au Turkestan.
LâEmpire russe, la prison et un 1er exil en Suisse
En 1905, il prend part Ă la rĂ©volution, est recherchĂ©. PourchassĂ© par les gendarmes russes, il se rĂ©fugie un temps au monastĂšre de GhĂ©lati grĂące Ă la complicitĂ© dâun archimandrite[5], est Ă nouveau arrĂȘtĂ© et emprisonnĂ© Ă KoutaĂŻssi. Afin dâĂ©chapper Ă la dĂ©portation en SibĂ©rie, un tunnel est creusĂ© avec plusieurs dĂ©tenus : il sâĂ©vade le , se cache Ă Tbilissi, gagne Batoumi et sâembarque clandestinement vers Constantinople, puis Marseille.
Il se rĂ©fugie Ă GenĂšve en 1908 parmi dâautres proscrits de lâEmpire russe, dont le chef de file est Gueorgui Plekhanov, LĂ©nine faisant de frĂ©quents allers-retours avec la France, Trotski essayant de rĂ©concilier Bolcheviks et Mencheviks.
Il sâinscrit Ă lâuniversitĂ© et obtient une licence de droit. Il y rencontre sa deuxiĂšme femme, avec laquelle il aura trois enfants.
La Russie de mai Ă octobre 1917
Le , il arrive Ă Petrograd aprĂšs un long pĂ©riple par lâAllemagne et la Russie en guerre, dans le train plombĂ© de 25 wagons rapatriant LĂ©nine[6], avec une diffĂ©rence : il souhaite la dĂ©faite de lâEmpire allemand alors que LĂ©nine souhaite une paix sĂ©parĂ©e afin de prendre le contrĂŽle de la Russie. Il y trouve les GĂ©orgiens Nicolas TchkhĂ©idzĂ© et Irakli Tsereteli en responsabilitĂ© au sein du Soviet central et du gouvernement provisoire, et partage leurs idĂ©es[7].
La GĂ©orgie et la diplomatie
AprĂšs le coup dâĂtat bolchevik dâ Ă Petrograd, il regagne la GĂ©orgie : il est nommĂ© gouverneur de deux provinces gĂ©orgiennes par EvguĂ©ni GuĂ©guĂ©tchkori, chef de lâexĂ©cutif transcaucasien.
AprĂšs le retour Ă lâindĂ©pendance de la GĂ©orgie, en , il est nommĂ© chef de la mission diplomatique gĂ©orgienne en Ukraine et en Roumanie, par NoĂ© Ramichvili et NoĂ© Jordania, les deux chefs successifs de lâexĂ©cutif gĂ©orgien.
En janvier 1919, Nicolas TchkhĂ©idzĂ© lâappelle pour se joindre Ă la dĂ©lĂ©gation gĂ©orgienne Ă la confĂ©rence de la paix de Paris oĂč il effectue ses premiĂšres armes face aux diplomates britanniques et français.
Le , la France reconnait la RĂ©publique dĂ©mocratique de GĂ©orgie ; une LĂ©gation gĂ©orgienne est ouverte Ă Paris sous lâautoritĂ© dâAkaki TchenkĂ©li ministre plĂ©nipotentiaire pour lâEurope occidentale. SossipatrĂ© Assathiany en est nommĂ© Premier secrĂ©taire.
En fĂ©vrier, les armĂ©es de la Russie soviĂ©tique envahissent le territoire gĂ©orgien. En mars, la classe politique gĂ©orgienne, le Parlement et le gouvernement prennent le chemin de lâexil pour entreprendre la reconquĂȘte et sâinstallent Ă Paris ; la LĂ©gation gĂ©orgienne devient un point central du dispositif vis-Ă -vis des autoritĂ©s françaises[8].
Lâexil dĂ©finitif en France
Le , la signature dâun pacte de non-agression entre lâURSS et la RĂ©publique française entraĂźne la fermeture de cette lĂ©gation qui se transforme en Office des rĂ©fugiĂ©s, et dont les missions sont officiellement limitĂ©es aux missions consulaires pour 1200 « apatrides dâorigine gĂ©orgienne ».
SossipatrĂ© Assathiany en est nommĂ© directeur, devenant l'interlocuteur des autoritĂ©s françaises (PrĂ©fecture de police de Paris, MinistĂšre de lâIntĂ©rieur, MinistĂšre du Travail) et internationales chargĂ© des rĂ©fugiĂ©s politiques.
Bien que la structure soit dissoute durant lâoccupation allemande, remplacĂ©e par une antenne du rĂ©gime de Vichy et un Office des rĂ©fugiĂ©s caucasiens pilotĂ© par Berlin, il se rapproche clandestinement du responsable de cette derniĂšre (Sacha Korkia, un Allemand dâorigine gĂ©orgienne dont le fils a Ă©tĂ© un hĂ©ros de la Luftwaffe) et de Joseph Eligoulachvili (figure de lâĂ©migration juive gĂ©orgienne) : ils utilisent lâargument fallacieux d'attribution aux juifs gĂ©orgiens de l'ethnie gĂ©orgienne et d'une simple conversion de religion, aidĂ©s par la position d'universitaires et d'hommes politiques gĂ©orgiens (dont Michel Kedia) en cour Ă Berlin. Il parvient ainsi Ă faire dispenser les Juifs gĂ©orgiens du port de lâĂ©toile et de la dĂ©portation, et Ă©tend cette disposition Ă 243 familles juives non-gĂ©orgiennes (originaires du Turkestan, dâIran, des Balkans et dâEspagne), en « gĂ©orgianisant » leurs patronymes, sauvant ainsi prĂšs dâun millier de personnes[9].
En fĂ©vrier 1943, il est arrĂȘtĂ© sur dĂ©nonciation et enfermĂ© au Fort de Romainville, dont il sera libĂ©rĂ© un mois et demi plus tard grĂące Ă lâintervention de Sacha Korkia. En avril, son Ă©pouse est arrĂȘtĂ©e Ă son tour et libĂ©rĂ©e dans les mĂȘmes conditions.
Ă partir de septembre 1944, il retrouve les missions antĂ©rieures Ă la Seconde Guerre mondiale, auxquelles sâajoute la protection des anciens soldats gĂ©orgiens de lâArmĂ©e rouge faits prisonniers, passĂ©s par lâAllemagne et ayant abouti en France, quâun accord avec Staline destinait Ă un retour en URSS et au mieux Ă une dĂ©portation en SibĂ©rie. Il Ćuvre non seulement comme conseiller technique auprĂšs des autoritĂ©s françaises, mais aussi auprĂšs des instances internationales comme lâOrganisation internationale des rĂ©fugiĂ©s mise en place par les Nations unies.
De janvier Ă octobre 1952, conjointement avec dâautres directeurs dâOffice de rĂ©fugiĂ©s, comme Vassili Maklakoff pour les Russes et JiraĂŻr Artinian pour les ArmĂ©niens, il alerte la classe politique française de lâurgence de la mise en place d'une structure nationale destinĂ©e Ă la protection des rĂ©fugiĂ©s[10].
DĂšs la crĂ©ation de lâOffice français de protection des rĂ©fugiĂ©s et apatrides, SossipatrĂ© Assathiany, Ă lâĂąge de 76 ans, se met Ă la disposition de la RĂ©publique française et devient lâun de ses premiers officier de protection de rĂ©fugiĂ©s : professionnel du droit administratif des Ă©trangers et poseur de relais auprĂšs des institutions françaises et internationales, il nâhĂ©site pas à « Ă©lever la voix » lorsque les propos des demandeurs ne sont pas crĂ©dibles.
En 1958, lors de son dĂ©part Ă la retraite, il Ă©crit au ministre de tutelle, M. Couve de Murville, ministre des Affaires Ă©trangĂšres, pour sâassurer d'un successeur Ă la tĂȘte de sa section : ce sera Alexandre Kintzourichvili, lieutenant-colonel de la LĂ©gion Ă©trangĂšre française, lui aussi dâorigine gĂ©orgienne.
Lâhomme
Humaniste, social-dĂ©mocrate, SossipatrĂ© Assathiany a Ă©tĂ© un homme dâopposition face aux dictatures tsariste, soviĂ©tique et nazie. Jusqu'Ă son dernier souffle, il dĂ©nonce le rĂ©gime soviĂ©tique : « Qui oserait parler ou Ă©crire autrement que ce pensent les dirigeants ? Les rĂ©fractaires sont poursuivis et envoyĂ©s dans des maisons d'aliĂ©nĂ©s - il paraĂźt que ce genre de maison est de plus en plus nombreux. Aussi les esprits sont enfermĂ©s jusqu'Ă la mort ou le mea culpa »[11].
Il a Ă©galement Ă©tĂ© un homme de construction, conduisant la crĂ©ation et le renouveau dâoffices de rĂ©fugiĂ©s durant trente annĂ©es afin de sauver la nationalitĂ© gĂ©orgienne, avant de participer Ă lâinvention de lâOFPRA : la plaquette annonçant le colloque consacrĂ© Ă cette invention, le , porte sa photographie[12].
Il meurt en 1971 et repose au carré géorgien du cimetiÚre de Leuville-sur-Orge[13].
Notes et références
- Le patronyme géorgien Assathiany signifie celui qui possÚde cent dix.
- Acte de décÚs (avec date et lieu de naissance) à Paris 15e, n° 1865, vue 5/31.
- Colisée : Sossipatré Assathiany (1876-1971), directeur de l'Office des réfugiés géorgiens 9 janvier 2014.
- Mémoires inédites de Sossipatré Assathiany (1956), page 9.
- Mémoires inédites de Sossipatré Assathiany (1956), page 25.
- Mémoires inédites de Sossipatré Assathiany (1956), page 105.
- Mémoires inédites de Sossipatré Assathiany (1956), pages 107 et 108.
- Samchoblo : le combat singulier de SossipatrĂ© Assathiany (1876-1971), durant 37 annĂ©es, dont lâinvention de lâOFPRA 12 dĂ©cembre 2014.
- OFPRA, Pascal Brice, Directeur général : Comité histoire, page 4 18 mars 2013.
- Les lettres de SossipatrĂ© Assathiany, JiraĂŻr Artinian et Vassili Maklakoff sont consultables aux Archives de lâOffice français de protection des rĂ©fugiĂ©s et apatrides, en particulier dans le dossier privĂ© de SossipatrĂ© Assathiany.
- Revue Le Droit du Peuple n°7: "Un grand écrivain mort en exil, Grigol Robakidzé" par Sossipatré Assathiany, Paris, mai 1963.
- Lâinvention de lâOFPRA 12 dĂ©cembre 2014.
- Luc Méloua : "Les tombes géorgiennes du cimetiÚre de Leuville-sur-Orge Site Samchoblo consulté le 4 novembre 2015
Sources
- (ka) áĄááĄááááąá á ááĄáááááá
- « Des GĂ©orgiens pour la France. ItinĂ©raires de rĂ©sistance. 1939-1945 » de Françoise et RĂ©vaz NicoladzĂ©, Ăditions L'Harmattan, Paris, , page 63.
- « Les combats indĂ©pendantistes des Caucasiens entre URSS et puissances occidentales. Le cas de la GĂ©orgie (1921-1945) » de Georges Mamoulia, Ăditions L'Harmattan, Paris, , page 295.
- « RĂ©fugiĂ©s et apatrides », Ouvrage collectif, dont « De la nationalitĂ© gĂ©orgienne au statut dâapatride dâorigine gĂ©orgienne, le combat de SossipatrĂ© Assathiany (1921-1958) » de Mirian MĂ©loua, Ădition Presses Universitaires de Rennes, , page 91.
Voir aussi
Liens externes
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :