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Judée (province romaine)

La Judée (en latin : Iudaea) est une province romaine créée en l'an 6[1] sur une partie du territoire des royaumes hasmonéen et hérodien. Elle tire son nom du royaume israélite de Juda. Elle couvre les régions de Judée, de Samarie et d'Idumée.

Judée romaine
(la) Provincia Iudaea
(grc) áŒ˜Ï€Î±ÏÏ‡ÎŻÎ± Î™ÎżÏ…ÎŽÎ±ÎŻÎ±Ï‚

6 ap. J.-C. – 135 ap. J.-C.

Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Province Iudaea au Ier siĂšcle ap. J.-C.
Informations générales
Statut Province de l'Empire romain
Capitale CĂ©sarĂ©e 32° 30â€Č N, 34° 54â€Č E
Langue(s) Araméen, KoinÚ (grec), Langues cananéennes
LĂ©gislation Synedrion / Sanhedrin
Histoire et événements
6 ap. J.-C. Recensement de Quirinius
30 ap. J.-C. Crucifixion de JĂ©sus
37 - 41 ap. J.-C. Crise sous Caligula
44 ap. J.-C. Incorporation de la Galilée et de la Pérée
4 août 70 Destruction du Second Temple
74 ap. J.-C. Gouverneur de rang prétorien et décoré de la 10e légion
132 – 135 RĂ©volte de Bar Kokhba
135 ap. J.-C. Incorporé dans la Syrie-Palestine
Préfets avant 41, Procurateurs aprÚs 44
6 – 9 ap. J.-C. Coponius
26 – 36 ap. J.-C. Ponce Pilate
64 – 66 ap. J.-C. Gessius Florus
117 ap. J.-C. Lusius Quietus
130 – 132 ap. J.-C. Tineius Rufus
Roi des Juifs
41–44 Agrippa I
48–93 / 100 Agrippa II

Entités précédentes :

Entités suivantes :

Aujourd'hui, une partie de :
Drapeau d’IsraĂ«l Israel
Drapeau de la Palestine Palestine
La province romaine de Judée vers 120.

L'implication de Rome dans les affaires de la JudĂ©e commence en avec la fin de la troisiĂšme guerre de Mithridate lorsque la Syrie passe sous protectorat romain. Le gĂ©nĂ©ral romain PompĂ©e se trouve en position d'arbitre dans la guerre civile opposant les princes hasmonĂ©ens Hyrcan II et Aristobule II. La JudĂ©e devient un royaume client de Rome sous la direction d'HĂ©rode Ier le Grand, puis au dĂ©but du Ier siĂšcle une province de l'Empire romain aprĂšs la dĂ©position d'HĂ©rode ArchĂ©laos. Elle connait trois rĂ©voltes contre Rome (premiĂšre guerre judĂ©o-romaine, guerre de Kitos, rĂ©volte de Bar Kokhba), Ă  la suite desquelles l'empereur Hadrien change le nom de la province en Syrie-Palestine et transforme JĂ©rusalem en une ville romaine baptisĂ©e Ælia Capitolina.

La Judée vassale de Rome

La JudĂ©e tombe sous domination romaine en 63 av. J.-C., Ă  la faveur de la rivalitĂ© entre Hyrcan II et Aristobule II, qui se disputent le trĂŽne. PompĂ©e, arrivĂ© Ă  Damas au printemps, prend le parti d’Hyrcan II. Aristobule II, vaincu par PompĂ©e dans JĂ©rusalem Ă  l’automne, est emprisonnĂ© Ă  Rome. L’oncle d’Aristobule II, Absalon, rĂ©siste pendant trois mois sur le mont du Temple puis est vaincu. PompĂ©e Ă©pargne le Temple de JĂ©rusalem et ses trĂ©sors, aprĂšs avoir nĂ©anmoins pĂ©nĂ©trĂ© dans le Saint des saints sans l'autorisation du grand-prĂȘtre d'IsraĂ«l. Hyrcan II, confirmĂ© ethnarque et grand-prĂȘtre, perd le titre de roi (fin en ). La JudĂ©e devient un protectorat romain et doit payer un tribut.

Alexandre, fils d’Aristobule II, Ă©chappĂ© lors du transfert Ă  Rome en 63, rassemble 10 000 fantassins et 1 500 cavaliers et menace JĂ©rusalem en Gabinius, le nouveau gouverneur de Syrie, envoie son lieutenant Marc-Antoine, qui dĂ©fait Alexandre prĂšs de JĂ©rusalem. RĂ©fugiĂ© dans la forteresse de l’AlexandrĂ©ion, Alexandre doit se rendre. Gabinius fait raser l’AlexandrĂ©ion, Hyrcania et MachĂ©ronte. Hyrcan est rĂ©tabli comme grand-prĂȘtre de JĂ©rusalem, mais semble perdre sa qualitĂ© d’ethnarque et son pouvoir politique. Les Juifs, gouvernĂ©s par le SanhĂ©drin de JĂ©rusalem, sont divisĂ©s en cinq circonscriptions judiciaires : JĂ©rusalem, Gadara, Amathonte, JĂ©richo et Sepphoris.

Crassus, gouverneur de Syrie en , s’empare du trĂ©sor du Temple de JĂ©rusalem. Son successeur Cassius rĂ©prime en un nouveau soulĂšvement d’Aristobule II sous la direction de Peitholaos, bientĂŽt exĂ©cutĂ© Ă  l’instigation d’Antipater. Pendant la guerre civile de , Aristobule II est libĂ©rĂ© par CĂ©sar qui veut l’utiliser pour reconquĂ©rir la Syrie. Il est assassinĂ© peu aprĂšs avec son fils Alexandre par les partisans de PompĂ©e.

À la mort de PompĂ©e en , Hyrcan II et Antipater se rallient Ă  CĂ©sar. Antipater soutient militairement et diplomatiquement la campagne de Mithridate III, alliĂ© de CĂ©sar, en Égypte (48/). Il dirige un corps auxiliaire juif, obtient l’appui des Arabes et des princes de Syrie et rallie les garnisons juives du « territoire d’Onias », Ă  l’est du Delta. En rĂ©compense, CĂ©sar confirme Ă  Hyrcan II son titre de grand-prĂȘtre et lui rend celui d’ethnarque. Il donne Ă  Antipater la citoyennetĂ© romaine avec exemption d’impĂŽts, le titre de procurateur (Ă©pitropos) de JudĂ©e et la permission de rebĂątir les murailles de JĂ©rusalem. JoppĂ© et les villes de la plaine sont Ă  nouveau rattachĂ©es Ă  Hyrcan II. Antipater nomme son fils aĂźnĂ© PhasaĂ©l stratĂšge de JĂ©rusalem et son fils cadet HĂ©rode stratĂšge de GalilĂ©e.

AprĂšs le meurtre de CĂ©sar en , Antipater et son fils HĂ©rode se rallient au gouverneur de Syrie, Caecilius Bassus, ex-partisan de PompĂ©e. Le dĂ©part de Cassius Longinus de Syrie entraĂźne des troubles en JudĂ©e. AprĂšs la bataille de Philippes, Antoine nomme PhasaĂ©l et HĂ©rode tĂ©trarques chargĂ©s de l’administration de la JudĂ©e. À la suite de l'invasion de la Syrie-Palestine par les Parthes en 40 av. J.-C., HĂ©rode est proclamĂ© roi de JudĂ©e par le SĂ©nat romain.

À la mort d’HĂ©rode en , son royaume est divisĂ© en trois tĂ©trarchies entre sa sƓur SalomĂ© et ses fils HĂ©rode ArchĂ©laos (JudĂ©e), HĂ©rode Antipas (GalilĂ©e et PĂ©rĂ©e) et HĂ©rode Philippe II (Transjordanie)[2]. Des troubles Ă©clatent contre Rome, rĂ©primĂ©s par le gouverneur de Syrie Varus. 2000 Juifs sont crucifiĂ©s Ă  JĂ©rusalem[3]. Judas, fils du « brigand » ÉzĂ©chias qu’HĂ©rode le Grand avait fait exĂ©cuter, prend la tĂȘte de la rĂ©volte armĂ©e en GalilĂ©e aprĂšs s’ĂȘtre emparĂ© des armes du palais royal de Sepphoris[4].

La province romaine de Judée

Carte montrant les frontiÚres politiques et les villes importantes de la Judée, au Ier siÚcle de notre Úre.

L’attitude tyrannique du tĂ©trarque HĂ©rode ArchĂ©laos provoque l’envoi d’une dĂ©lĂ©gation de JudĂ©ens et de Samaritains Ă  Rome. En 6, Auguste convoque ArchĂ©laos Ă  Rome, le dĂ©pose et l’exile Ă  Vienne, en Gaule. La JudĂ©e, la Samarie et l’IdumĂ©e deviennent provinces romaines. Elles sont rattachĂ©es Ă  la Syrie et administrĂ©es par un prĂ©fet ou procurateur qui rĂ©side Ă  CĂ©sarĂ©e mais se rend Ă  JĂ©rusalem au moment des fĂȘtes. Il dispose d’une troupe d’auxiliaires pour maintenir l’ordre, recrutĂ©s parmi les habitants de la plaine de Sharon et de la Samarie, les Juifs proprement dits Ă©tant exemptĂ©s de servir dans l’armĂ©e romaine[2].

Selon saint Luc(I,2), le gouverneur de Syrie Publius Sulpicius Quirinius procĂšde, toujours en 6, Ă  un recensement provincial en JudĂ©e[5], qui est divisĂ©e en dix toparchies (JĂ©rusalem, Gophna, Akrabatta, Thamna, Lydda, EmmaĂŒs, PellĂ©, HĂ©rodium, JĂ©richo, l’IdumĂ©e et Engaddi) pour faciliter la collecte des impĂŽts, dont certains sont directement perçus par l’administration romaine tandis que d’autres, tels les droits de douane, sont affermĂ©s Ă  des publicains.

Ce recensement provoque une révolte dirigée par Judas le Galiléen appuyé par le pharisien Sadoq[6], durement réprimée. Les rebelles sont crucifiés. Cette révolte est à l'origine du mouvement des zélotes, qui considÚrent Dieu comme leur seul chef et maßtre.

HĂ©rode Agrippa Ier, d'abord tĂ©trarque de JudĂ©e sous Caligula (37), obtient de Claude le titre de roi[2]. La JudĂ©e redevient un royaume jusqu'Ă  sa mort en 44. D’aprĂšs Flavius JosĂšphe, les troupes romaines de CĂ©sarĂ©e maudissent le souvenir d’Agrippa, entrent de force dans sa maison, violent ses filles et cĂ©lĂšbrent sa mort publiquement par des fĂȘtes et des libations. La JudĂ©e est de nouveau gouvernĂ©e par des procurateurs romains.

Cuspius Fadus est le premier (44-46)[2]. Il réprime la révolte de Theudas qui est décapité[7].

En 46, Tiberius Julius Alexander, un Juif apostat d’Alexandrie, devient procurateur jusqu'en 48. Il fait face Ă  une famine et fait exĂ©cuter Jacques et Simon, fils de Judas le GalilĂ©en, probablement chefs du parti zĂ©lote[2].

Sous le procurateur Ventidius Cumanus (48-52). une Ă©meute Ă©clate Ă  JĂ©rusalem vers 48/49 lors d’une fĂȘte religieuse quand un soldat romain montre son sexe Ă  la foule des pĂšlerins[8]. Elle est rĂ©primĂ©e par le procurateur. Peu aprĂšs un soldat romain dĂ©chire et brĂ»le un rouleau de la Loi de MoĂŻse, et la foule juive se rend Ă  CĂ©sarĂ©e pour exiger qu’il soit puni. Cumanus fait exĂ©cuter le coupable pour Ă©viter la rĂ©volte. La situation s'aggrave en 51 quand des pĂšlerins galilĂ©ens sont assassinĂ©s dans un village de Samarie. Cumanus ne punissant pas les meurtriers, une bande de ZĂ©lotes se met Ă  massacrer plusieurs villages samaritains. Ils sont arrĂȘtĂ©s et exĂ©cutĂ©s par les troupes de Cumanus. L’affaire est portĂ©e devant le gouverneur de Syrie Ummidius Quadratus (en) qui envoie des dĂ©lĂ©guĂ©s Ă  Rome, oĂč appuyĂ©s par le jeune HĂ©rode Agrippa II (fils d’HĂ©rode Agrippa Ier), les Juifs obtiennent gain de cause. Cumanus est exilĂ© en 52.

Claude envoie alors son favori Antonius Felix, un Grec, comme procurateur. Il Ă©pouse Drusilla, la sƓur d’Agrippa. Sa politique maladroite et injuste entraĂźne le dĂ©veloppement du parti zĂ©lote. FĂ©lix arrĂȘte leur chef ElĂ©azar par trahison. Il fait exĂ©cuter le grand-prĂȘtre Jonathan fils d'Anne par des sicaires armĂ©s de poignards[9] — que Flavius JosĂšphe appelle des « brigands ». Les sicaires exĂ©cutent frĂ©quemment leurs compatriotes ralliĂ©s aux Romains. À cette Ă©poque paraissent plusieurs prophĂštes rassemblant les foules et leur promettant la libertĂ©, ce qui entraĂźne la rĂ©action immĂ©diate des Romains. FĂ©lix fait ainsi exĂ©cuter les partisans de « l’Égyptien » qui voulaient pĂ©nĂ©trer dans JĂ©rusalem. Profitant de l’agitation, les grands-prĂȘtres s’emparent des dĂźmes dues aux simples prĂȘtres, ce qui accentue les tensions sociales[10].

En 54, de nouvelles violences Ă©clatent Ă  CĂ©sarĂ©e Ă  propos du statut de la ville et des droits civiques des Juifs. Juifs et Syriens s’affrontent. Les Juifs, armĂ©s de gourdins et d’épĂ©es, ont le dessus. Le procurateur de JudĂ©e Antonius Felix les somme de se disperser, puis ordonne Ă  ses troupes de charger et les laisse piller les maisons des Juifs[11]. Les troubles continuent et les notables juifs demandent l’arbitrage de NĂ©ron, qui tranche en faveur des Syriens, relĂ©guant les Juifs au rang de citoyens de deuxiĂšme classe. Cette dĂ©cision ne fait qu’accroĂźtre leur fureur[12].

En 60, le procurateur Antonius Felix est rappelĂ© par NĂ©ron et remplacĂ© par Porcius Festus, qui fait transfĂ©rer Ă  Rome Paul (SaĂŒl), ex-pharisien devenu le leader chrĂ©tien le plus actif pour l’admission des paĂŻens[2]. Il doit rĂ©primer une rĂ©volte dans le dĂ©sert. À sa mort en 62, le grand-prĂȘtre sadducĂ©en de JĂ©rusalem Anne fils d’Anne profite de la vacance du pouvoir pour liquider ses ennemis, en particulier Jacques, fils de DamnĂ©e, membre de la caste sacerdotale. Le despotisme d’Anne entraĂźne l’intervention d’HĂ©rode Agrippa II, qui le dĂ©pose au profit de JĂ©sus, fils de DamnĂ©e (62-63)[13]. Sous le nouveau procurateur Albinus (62-64), qui ne cherche qu’à s’enrichir par la libĂ©ration de prisonniers contre rançon, la situation politique et sociale se dĂ©tĂ©riore encore. Pour libĂ©rer leur camarades prisonniers, les sicaires recourent de plus en plus Ă  la prise d’otage (capture du fils de l’ancien grand prĂȘtre Anan[14]), tandis que les partisans de JĂ©sus fils de DamnĂ©e et ceux de JĂ©sus fils de Gamla se battent dans les rues pour la charge de grand-prĂȘtre. Albinus est rappelĂ© Ă  Rome aprĂšs avoir vidĂ© les prisons. Sous son successeur Gessius Florus, la situation empire avec la multiplication des pillages (64-66)[15]. Selon certains historiens, ces pillages seraient toutefois des prĂ©lĂšvements fiscaux parfaitement lĂ©gaux mais la rĂ©sistance populaire prouverait combien la puissance romaine Ă©tait dĂ©sormais mal vue[16].

Entre les révoltes

AprĂšs la prise de JĂ©rusalem en 70, Vespasien fait de la JudĂ©e une province impĂ©riale proprĂ©torienne[17]. À la suite de la destruction du Temple, il institue le Fiscus judaicus : Les Juifs sont assujettis Ă  un impĂŽt spĂ©cial dans tout l'Empire romain, affectĂ© au temple de Jupiter capitolin[18]. Le pays juif conquis devient la propriĂ©tĂ© du peuple romain et annexĂ© Ă  l'Ager publicus. En 72 Vespasien ordonne Ă  Lucilius Bassus d'affermer toutes les terres des Juifs et charge son procurateur Lucius Laberius Maximus d'effectuer cette opĂ©ration. Ces terres sont affectĂ©es comme domaine particulier de l'empereur. Les paysans qui ne sont pas expulsĂ©s peuvent les exploiter sans jouir de leur propriĂ©tĂ©[19].

Au cours des campagnes menĂ©es par Trajan contre l’empire Parthe la diaspora juive se soulĂšve Ă  CyrĂšne, en Égypte, Ă  Chypre et en MĂ©sopotamie. C'est la guerre de Kitos (115-117), rĂ©primĂ©e dans le sang, notamment en JudĂ©e par le procurateur Lusius Quietus[20].

La révolte de Bar Kokhba

L’intention probable d’Hadrien de faire de JĂ©rusalem une citĂ© dĂ©diĂ©e Ă  Jupiter Capitolin provoque une rĂ©volte en JudĂ©e dirigĂ©e par Simon dit Bar Kochba (« le fils de l'Ă©toile »), saluĂ© comme le Messie (132-135). Celui-ci est tuĂ© en dĂ©cembre 135 Ă  BĂ©thar dans la forteresse oĂč il s'Ă©tait rĂ©fugiĂ©. Les Juifs sont de nouveau dispersĂ©s dans tout l'empire romain. JĂ©rusalem, de nouveau mise Ă  sac, est remplacĂ©e par une colonie romaine de vĂ©tĂ©rans (Aelia Capitolina). Un autel Ă  Jupiter est Ă©rigĂ© Ă  l’emplacement du Temple.

Pendant la rĂ©pression de la rĂ©volte juive, les Romains ont pris 50 forteresses, dĂ©truit 985 villages, tuĂ© 580 000 Juifs (chiffres probablement fortement exagĂ©rĂ©s) dans des escarmouches ou des batailles en plus des innombrables membres de la population victime des famines et des Ă©pidĂ©mies oĂč brĂ»lĂ©s dans l’incendie de leur maison. Les lĂ©gions ont souffert de pertes trĂšs lourdes[21].

AprÚs la seconde révolte (132-325)

Les deux-tiers de la population juive de Judée sont annihilés. Les Juifs sont désormais interdits de séjour dans la région autour de la ville de Jérusalem sous peine de mort. Ils émigrent en masse dans les villes de la cÎte et en Galilée, qui devient le centre des études juives et institutions autonomes. La province est nommée officiellement Palestine. Elle semble reprendre une certaine importance : elle devient province consulaire, une nouvelle légion y est affectée, des hommes en vue y sont envoyés comme légats et à Jérusalem stationne une importante force militaire[22].

L'urbanisation reprend pendant le rĂšgne des SĂ©vĂšres (193-235), et de nombreux empereurs renouent de bonnes relations avec les Juifs, notamment des scholarques reprĂ©sentant l'Ă©lite intellectuelle. Septime SĂ©vĂšre autorise les Juifs Ă  devenir dĂ©curions et Ă  participer aux affaires municipales et Caracalla entretient une relation privĂ©e avec Juda Hanassi. La Palestine devient plus paisible, Juifs et paĂŻens renouant des liens solides, et la rĂ©gion prospĂšre. Dans son Histoire romaine (rĂ©digĂ©e en grec), XXXVII, 17, l'historien et consul Dion Cassius (v. 155 - ap. 235), proche des SĂ©vĂšres, prĂ©cise qu' « il y a des Juifs mĂȘme parmi les Romains : souvent arrĂȘtĂ©s dans leur dĂ©veloppement, ils se sont nĂ©anmoins accrus au point qu'ils ont obtenu la libertĂ© de vivre d'aprĂšs leurs lois »[23].

Dans la deuxiĂšme moitiĂ© du IIIe siĂšcle, la Palestine semble souffrir des crises politiques et Ă©conomiques qui frappent l'empire. En effet, des rĂ©fĂ©rences talmudiques attestent de la peur des villageois de rester dans leurs champs, de la construction de fortification et de populations qui se rĂ©fugient dans les places fortifiĂ©es. L’instabilitĂ© dans l’empire (guerres civiles, raids des Germains, guerre contre les Sassanides) entraĂźne une augmentation extrĂȘmement lourde des impĂŽts. Les sĂ©cheresses et les famines se multiplient. De nombreux Juifs quittent la Palestine pour rejoindre les communautĂ©s Ă©loignĂ©es. Entre 260 et 266, la Palestine tombe dans l'orbite d'OdĂ©nat de Palmyre.

Sous DioclĂ©tien, aprĂšs la crise du IIIe siĂšcle, l'empire entre dans une pĂ©riode de transition radicale. Le pouvoir des gouverneurs provinciaux est diluĂ© dans des unitĂ©s territoriales plus larges. En 295, la Legio X Fretensis est transfĂ©rĂ©e d'Ælia Ă  Aila (Aqaba) Ă  la suite de l'agitation des tribus arabes. Le NĂ©guev (y compris PĂ©tra), jusqu'alors rattachĂ© Ă  l'Arabie, dĂ©pend dĂ©sormais de la Palestine, tandis que Trachonitide et BatanĂ©e dĂ©pendent de l'Arabie[22].

Notes et références

  1. Jean-Marc Prost-Tournier, « Judée » [html], sur EncyclopÊdia Universalis (consulté le ).
  2. Louis-SĂ©bastien Le Nain de Tillemont, Histoire des empereurs et des autres princes qui ont rĂ©gnĂ© durant les six premiers siĂšcles de l’Église, vol. 1, Paris, Charles Robustel, (prĂ©sentation en ligne).
  3. Craig A. Evans, Of scribes and sages : early Jewish interpretation and transmission of scripture, Continuum International Publishing Group, , 362 p. (ISBN 978-0-567-08083-7, présentation en ligne).
  4. Daniel T Unterbrink, Judas the Galilean, iUniverse, (ISBN 978-0-595-77000-7, présentation en ligne).
  5. Jean-Pierre LĂ©monon, Ponce Pilate, Ivry-sur-Seine, Éditions de l'Atelier, , 301 p. (ISBN 978-2-7082-3918-0, prĂ©sentation en ligne).
  6. Girardin 2020, p. 119-123.
  7. Daniel Marguerat, Les Actes des ApÎtres (1-12), vol. 1, GenÚve/Paris, Labor et Fides, , 446 p. (ISBN 978-2-8309-1229-6, présentation en ligne).
  8. Hadas-Lebel 2009, p. 95.
  9. Hadas-Lebel 2009, p. 97.
  10. Jean-Claude Viland, Au berceau du christianisme : un regard laĂŻque sur l'histoire des origines, Paris, Éditions L'Harmattan, , 356 p. (ISBN 978-2-296-13604-5, prĂ©sentation en ligne).
  11. Flavius JosÚphe, Antiquités juives, XX, 177
  12. Flavius JosÚphe, Antiquités juives, livre XX, 184
  13. Jean-Pierre LĂ©monon, op. cit, p. 82.
  14. Flavius JosÚphe, Antiquités juives, XX, 208
  15. Jean-Claude Viland, op. cit, p. 66.
  16. Girardin 2020, p. 100-102.
  17. Maurice Sartre, L'Orient romain, vol. 9, Éditions du Seuil, , 631 p. (ISBN 978-2-02-012705-9, prĂ©sentation en ligne).
  18. Francis Dumortier, La patrie des premiers chrĂ©tiens, Éditions de l'Atelier, , 321 p. (ISBN 978-2-7082-2564-0, prĂ©sentation en ligne).
  19. FĂ©lix-Marie Abel, Histoire de la Palestine depuis la conquĂȘte d'Alexandre jusqu’à l'invasion arabe, vol. 2, J. Gabalda, (prĂ©sentation en ligne).
  20. Louis-SĂ©bastien Le Nain de Tillemont, Histoire des empereurs et des autres princes qui ont rĂ©gnĂ© durant les six premiers siĂšcles de l’Église, vol. 2, Paris, Charles Robustel, (prĂ©sentation en ligne).
  21. Louis SĂ©bastien Le Nain de Tillemont, op. cit volume 2, p. 309.
  22. Thomas E. Levy, The archaeology of society in the Holy Land, Continuum International Publishing Group, , 624 p. (ISBN 978-0-8264-6996-0, présentation en ligne).
  23. (grk) « Dion Cassius : Histoire Romaine : livre XXXVII (texte bilingue) », sur remacle.org (consulté le ).

Voir aussi

Bibliographie

  • Caroline Arnould-BĂ©har, La Palestine Ă  l'Ă©poque romaine (ISBN 978-2-251-41036-4)
  • MichaĂ«l Girardin, La FiscalitĂ© dans le judaĂŻsme ancien (VIe s. av. J.-C.-IIe s. apr. J.-C.), Paris, Geuthner, coll. « Culture archĂ©ologique du judaisme ancien » (no 1), (ISBN 978-2-7053-4054-4)
  • Mireille Hadas-Lebel, Rome, la JudĂ©e et les Juifs, Picard,
  • Gilbert LabbĂ©, L'Affirmation de la puissance romaine en JudĂ©e (63 a.C.-136 p.C.), Les Belles Lettres, 2012

Articles connexes

Liens externes

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