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Hyrcan II

Hyrcan II ou Jean Hyrcan II est un grand-prĂȘtre du Temple de JĂ©rusalem et un roi appartenant Ă  la dynastie des HasmonĂ©ens (mort en ). Il est le fils d'Alexandre JannĂ©e et de SalomĂ© Alexandra. Il joue un rĂŽle dans la prise du contrĂŽle du royaume de JudĂ©e par les Romains en Puis il permet Ă  HĂ©rode le Grand de devenir roi en

Sa vie peut ĂȘtre reconstituĂ©e Ă  partir des AntiquitĂ©s judaĂŻques de Flavius JosĂšphe (livres XIII Ă  XV).

Biographie

ArrivĂ©e au pouvoir d’Hyrcan et son Ă©cartement aprĂšs la mort de sa mĂšre

Le royaume Hasmonéen en .

La nomination d'Hyrcan II Ă  la charge de grand-prĂȘtre intervient dans le violent conflit qui oppose sadducĂ©ens et pharisiens. De mĂȘme que Jean Hyrcan, Alexandre JannĂ©e « favorable Ă  la secte des SadducĂ©ens[1] » avait « persĂ©cutĂ© » les pharisiens qui, fortement opposĂ©s Ă  lui, avaient appelĂ© le roi sĂ©leucide de Syrie DĂ©mĂ©trios III pour qu'ils viennent le renverser[2]. AprĂšs avoir repoussĂ© les envahisseurs[2], il avait fait crucifier huit cents pharisiens, faisant Ă©gorger leurs femmes et leurs enfants devant les crucifiĂ©s pendant leur supplice, alors que lui-mĂȘme et ses concubines assistaient Ă  la scĂšne comme Ă  un spectacle tout en banquetant. À sa mort, Alexandre JannĂ©e (« le vieux lion ») lĂšgue la royautĂ© Ă  sa femme SalomĂ© Alexandra (). Alors qu'Alexandre JannĂ©e « avait embrassĂ© le parti des SadducĂ©ens et d'autres groupes sacerdotaux qui s'Ă©taient rangĂ©s Ă  ses cĂŽtĂ©s, la reine s'allia aux Pharisiens. La raison de cette volte-face Ă©tait purement politique. Sachant qu'elle ne pourrait pas plaire en mĂȘme temps aux SadducĂ©ens et aux Pharisiens, SalomĂ©-Alexandra, qualifiĂ©e par JosĂšphe de reine prudente et Ă©nergique mais un peu naĂŻve, choisit tout simplement le camp le plus utile Ă  sa cause[2]. » On ne sait s'il faut croire Flavius JosĂšphe, pour qui c'est Alexandre JannĂ©e lui-mĂȘme qui peu de temps avant sa mort, aurait suggĂ©rĂ© cette tactique Ă  sa femme.

SalomĂ© Alexandra associe aussi son fils aĂźnĂ© Hyrcan au pouvoir et lui transmet la charge de grand-prĂȘtre, fonction que s’étaient attribuĂ©e les princes hasmonĂ©ens. Selon Flavius JosĂšphe, Hyrcan Ă©tait « un ĂȘtre faible, dĂ©nuĂ© de cran pour la guerre ou pour les autres charges que les monarques de ce temps Ă©taient censĂ©s assumer[2] », « tandis qu'Aristobule aurait toute la fougue d'un jeune chef militaire[3]. » Ce serait la raison pour laquelle sa mĂšre l’aurait appuyĂ© lui plutĂŽt que son second fils, Aristobule II, de peur que celui-ci, disposant de cette haute fonction ne finisse par complĂštement Ă©carter la reine du pouvoir.

Les pharisiens au pouvoir se mettent Ă  « persĂ©cuter » tous leurs adversaires qui trouvent un dĂ©fenseur en la personne d'Aristobule II. AprĂšs que quelques-uns ont Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©s ou assassinĂ©s par les pharisiens, il obtient de sa mĂšre que les adversaires des pharisiens soient bannis plutĂŽt que tuĂ©s. Quelques-uns, jugĂ©s particuliĂšrement compĂ©tents et fidĂšles Ă  la famille hasmonĂ©enne, sont relĂ©guĂ©s Ă  la tĂȘte de lointaines forteresses. Alors que SalomĂ© Alexandra Ă©tait malade, Aristobule commence Ă  rassembler ses forces. Il fait passer de son cĂŽtĂ© tous les commandants des forteresses et se proclame roi. Lorsque Hyrcan s’en plaint Ă  sa mĂšre, celle-ci fait emprisonner la femme d’Aristobule et ses fils, sans que cela ne permette de mettre fin Ă  la rĂ©volte d’Aristobule.

AprĂšs la mort de SalomĂ© Alexandra en , « une autre guerre civile Ă©clata entre ses deux fils Hyrcan et Aristobule, partisans l'un des Pharisiens, l'autre des sadducĂ©ens[2]. » Hyrcan ajoute Ă  sa fonction de grand-prĂȘtre la couronne de roi[2], car il avait probablement Ă©tĂ© dĂ©signĂ© roi par sa mĂšre[4], mais son pouvoir est violemment contestĂ© par son jeune frĂšre Aristobule[5]. Celui-ci, Ă  qui Alexandra avait confiĂ© son armĂ©e, Ă©crase les partisans de son frĂšre prĂšs de JĂ©richo[5] - [4], puis prend possession de JĂ©rusalem. Hyrcan, assiĂ©gĂ© dans le Temple avec ses partisans, hĂ©site Ă  se servir de la famille d'Aristobule qu'il retient en otage. Les deux frĂšres se rencontrent dans le Temple et passent une alliance : Ă  Aristobule revient la royautĂ© et Ă  Hyrcan la charge de grand-prĂȘtre. Pour renforcer leur alliance, Alexandra, la fille d’Hyrcan Ă©pouse Jonathan Alexandre II, le fils d'Aristobule. Il paraĂźt alors renoncer au trĂŽne ainsi qu'Ă  la dignitĂ© de grand-prĂȘtre en faveur de son frĂšre cadet[4].

Influence d’Antipater l’IdumĂ©en et la guerre civile

En , la guerre civile juive semble terminĂ©e, lorsque intervient Antipater[5], un IdumĂ©en important d’une famille convertie au judaĂŻsme sous Jean Hyrcan et dont le pĂšre Antipas Ă©tait stratĂšge (gouverneur) d’IdumĂ©e sous Alexandre JannĂ©e. L'ambitieux Antipater a succĂ©dĂ© Ă  son pĂšre dans cette fonction[5] et « il possĂšde des troupes qui lui sont aussi fidĂšles qu'elles sont efficaces[3]. » Antipater a probablement choisi de soutenir Hyrcan Ă  cause des faiblesses de son caractĂšre[3]. Il en devient le principal conseiller. Antipater a plusieurs fils Ă  qui il confie des fonctions de gouverneurs d'autres territoires. L'un de ses fils rĂ©gnera par la suite en JudĂ©e sous le nom d'HĂ©rode le Grand[4]. Sous l’influence d’Antipater, Hyrcan dĂ©cide de revenir sur son accord avec Aristobule et d’exiger le pouvoir. Hyrcan et Antipater s’enfuient Ă  PĂ©tra auprĂšs d'ArĂ©tas III, roi des NabatĂ©ens[4]. Ils lui promettent de lui rendre plusieurs villes qu'Alexandre JannĂ©e lui avait prises quelques dĂ©cennies auparavant en Ă©change de son appui contre Aristobule[4].

Arétas III entre en guerre contre Aristobule et détruit une partie de son armée[4]. Celui-ci se réfugie à Jérusalem et se retrouve assiégé dans le Temple[4]. Arétas et son armée, avec Hyrcan et Antipater, assiÚgent Aristobule[6] pendant la Pùque « Le peuple et les Pharisiens soutiennent Hyrcan qui fait figure de souverain légitime en raison de son droit d'aßnesse, mais la puissante caste des Sadducéens reste majoritairement fidÚle à Aristobule[6]. » Au cours du siÚge, Flavius JosÚphe raconte la mort de Honi haMe'aguel, un sage qui savait faire tomber la pluie grùce à ses priÚres. Il est exécuté par les partisans d'Hyrcan, pour avoir refusé de maudire Aristobule. Le Talmud raconte une autre version. Puni par Dieu, pour avoir fait une réflexion sur l'inutilité de planter des caroubiers puisque l'arbre met 70 ans à pousser, il aurait été plongé dans un sommeil de 70 ans. Toutefois, lorsqu'il s'est réveillé, 70 ans plus tard, personne ne l'a reconnu.

L’intervention de Rome

La Judée romaine sous Hyrcan II.

Le siĂšge cesse lorsque le gĂ©nĂ©ral romain PompĂ©e, en campagne militaire en Orient, envoie Aemilius Scaurus Ă  Damas. Aristobule et Hyrcan lui envoient immĂ©diatement des ambassadeurs[7]. « Le choix de Scaurus se porte sur le client le plus solvable: Aristobule maĂźtre du Temple et du trĂ©sor sacrĂ©[7]. » De plus, rĂ©fugiĂ© dans le Temple qui est une vĂ©ritable forteresse, il est plus difficile Ă  vaincre qu'Hyrcan et ses alliĂ©s nabatĂ©ens[7], ce qui devrait permettre d'Ă©viter un siĂšge long et difficile[8]. La seule menace du Romain oblige ArĂ©tas et Antipater Ă  se retirer immĂ©diatement de JĂ©rusalem[8]. Entre-temps, PompĂ©e vainqueur de Tigrane II d'ArmĂ©nie, arrive lui-mĂȘme dans la rĂ©gion[8], Aristobule prend dans le Temple une extraordinaire piĂšce d’orfĂšvrerie : une vigne en or massif qui ne vaut pas moins de 500 talents et l'envoie en cadeau Ă  l'Imperator[8].

Antipater, se rend toutefois auprĂšs de PompĂ©e et parvient Ă  le convaincre de fournir un arbitrage entre Hyrcan et Aristobule[9]. « PompĂ©e convoque alors les deux frĂšres et les somme de s'expliquer[9]. » Il fait secrĂštement le choix d'Hyrcan, plus faible Ă  ses yeux, mais ne dit rien et fait avancer ses troupes en prĂ©textant une expĂ©dition contre les NabatĂ©ens[9]. Alors que son armĂ©e longe le Jourdain, il convoque Aristobule et lui ordonne de lui livrer immĂ©diatement toutes les places fortes de JudĂ©e, ce qu'Aristobule s'empresse de faire[9]. Parvenu Ă  JĂ©richo, il fait prisonnier Aristobule et le contraint Ă  Ă©crire une lettre Ă  ses officiers et aux prĂȘtres de JĂ©rusalem, dans laquelle il ordonne de livrer la ville aux Romains[10]. Mais les partisans d'Aristobule, refusent d'obĂ©ir tant que celui-ci est l'otage de PompĂ©e et se barricadent dans le Temple[11].

PompĂ©e assiĂšge JĂ©rusalem, mais les hommes de Jean Hyrcan II ouvrent les portes de la ville aux Romains[12]. L'assaut final se conclut en carnage contre les partisans d'Aristobule[11] (-63), qui se rĂ©fugient dans le Temple. Vers la fin de l'automne -63, aprĂšs trois mois de siĂšge, PompĂ©e investit le Temple[12]. L'imperator pĂ©nĂštre mĂȘme dans le Temple[11] et constate Ă©berluĂ© que le saint des saints, oĂč seul le grand-prĂȘtre a le droit d'entrer une fois par an, est complĂštement vide. Il fait lui-mĂȘme l'inventaire du trĂ©sor sacrĂ©, estimĂ© Ă  2000 talents, mais s'abstient d'y toucher[11]. « Le lendemain, il remet officiellement le titre de grand-prĂȘtre Ă  Hyrcan II, en mĂȘme temps que la garde du trĂ©sor[11] » et ordonne pour le lendemain la purification du sanctuaire et la reprise des rites[12]. Les Psaumes de Salomon, 2 et 8, font Ă©cho de maniĂšre cryptĂ©e Ă  ces Ă©vĂ©nements[13].

La JudĂ©e est dĂ©sormais « assujettie Ă  Rome : Hyrcan n'a plus le droit d'user du titre royal ; il s'engage Ă  payer aux Romains un tribut annuel au nom des Juifs[11]. » « C'est la fin de l'indĂ©pendance juive gagnĂ©e un siĂšcle plus tĂŽt sur les SĂ©leucides[11]. » Le royaume hasmonĂ©en a vĂ©cu[11] et est dĂ©membrĂ©. Les villes hellĂ©nistiques qui avaient Ă©tĂ© conquises par les souverains hasmonĂ©ens, depuis Jonathan jusqu’à Alexandre JannĂ©e, telles que Jaffa, Beth ShĂ©an, Gaza, JoppĂ©, la Tour de Straton, ainsi que Pella, GĂ©rasa et Dion en DĂ©capole, sont rendues Ă  leurs anciens habitants et intĂ©grĂ©es Ă  la province romaine de Syrie[14]. La JudĂ©e ne devient pas une province romaine, mais « elle n'est dans les faits qu'un protectorat romain[11]. »

De plus, le gouvernement réel revient à Antipater. Hyrcan II conserve le pontificat et le pouvoir du parti pharisien se trouve renforcé. Pompée rentre à Rome emmenant en captivité avec lui Aristobule et ses fils[14]. Arétas III conserve son trÎne en payant 300 talents à Scaurus, qui est bientÎt remplacé au poste de gouverneur de Syrie par Philippus (59-), Marcellinus (58-) puis Gabinius (57-)[14].

La rĂ©volte d’Alexandre II

En -58, Jonathan Alexandre II, un fils d’Aristobule, s’enfuit de Rome et rejoint la JudĂ©e. Il rĂ©unit des hommes et se proclame roi. Hyrcan est obligĂ© de fuir JĂ©rusalem et de se tourner vers Gabinius pour recevoir son aide. Gabinius rĂ©prime la rĂ©volte, fait prisonnier Alexandre et fait rentrer Hyrcan Ă  JĂ©rusalem. De toutes ses fonctions, il ne reste plus Ă  Hyrcan que la charge de grand-prĂȘtre[15].

Hyrcan II et son mentor Antipater demeurent fidĂšles Ă  Rome, en dĂ©pit de l'abaissement de l'Ă©tat judĂ©en et des mesures vexatoires imposĂ©es par la nouvelle puissance conquĂ©rante. En -54, le proconsul Crassus passe par la JudĂ©e en allant mener une campagne contre les Parthes. Il pille le trĂ©sor du Temple de JĂ©rusalem, comme il a spoliĂ© diffĂ©rents sanctuaires de la rĂ©gion[16]. La population trouve une occasion de rĂ©agir aprĂšs la dĂ©faite romaine face aux Parthes Ă  la bataille de Carrhes, oĂč le proconsul Crassus est tuĂ© (-53). Bien qu'Aristobule II soit toujours prisonnier Ă  Rome, Peitholaos, un de ses partisans organise alors une rĂ©volte qui est matĂ©e par le proconsul Cassius Longinus[17]. Les Romains continuent Ă  poursuivre les partisans d’Aristobule et dĂ©truisent la ville de Taricheae sur les bords du lac de TibĂ©riade (identifiĂ©e par la suite Ă  Magdala[18]), rĂ©duisant 30 000 Juifs en esclavage[17]. Sur les conseils d'Antipater, Cassius fait mettre Ă  mort Peitholaos, puis impose Ă  Jonathan Alexandre II un traitĂ© qui le contraint Ă  l'inaction[19].

Jules CĂ©sar

L'arrivĂ©e au pouvoir de Jules CĂ©sar Ă  Rome donne une derniĂšre occasion Ă  Aristobule et Ă  ses partisans. La maison d’Hyrcan Ă©tait jusqu’à prĂ©sent protĂ©gĂ©e par les partisans de PompĂ©e qui Ă©taient engagĂ©s dans une guerre civile avec la puissance montante de CĂ©sar. Aristobule reçoit le commandement de deux lĂ©gions en Syrie, mais il est empoisonnĂ© par des hommes de PompĂ©e. Son fils, Jonathan Alexandre II, est Ă©gorgĂ© Ă  Antioche sur ordre de PompĂ©e.

AprĂšs la dĂ©faite de PompĂ©e Ă  Pharsale, CĂ©sar poursuit PompĂ©e en Égypte, oĂč il arrive quatre jours aprĂšs la mort de son vieil ami[20]. Il se retrouve en difficultĂ© aprĂšs s'ĂȘtre impliquĂ© dans les querelles entre ClĂ©opĂątre et son frĂšre, le jeune roi PtolĂ©mĂ©e XIII[20]. ConfrontĂ© au soulĂšvement de la population, il fait appel Ă  une expĂ©dition de secours[20]. De nombreux dynastes et citĂ©s de Syrie s'empressent d'y participer et en particulier Antipater[20], le conseiller d'Hyrcan. Tous deux manifestent leur soutien Ă  CĂ©sar et encouragent les Juifs d’Égypte Ă  s’associer Ă  ses soldats. CĂ©sar confirme Hyrcan dans la grande prĂȘtrise, le nomme ethnarque des Juifs et nomme Antipater administrateur de la JudĂ©e. Jaffa est rĂ©intĂ©grĂ©e dans les limites du royaume. CĂ©sar permet Ă  Hyrcan de reconstruire les murailles de JĂ©rusalem rasĂ©es par PompĂ©e.

Les fils d'Antipater

Antipater nomme en son fils aĂźnĂ© PhasaĂ«l stratĂšge de JĂ©rusalem et son fils cadet HĂ©rode stratĂšge de GalilĂ©e[21]. L'exĂ©cution d'un haut personnage appelĂ© EzĂ©chias, chef des insurgĂ©s galilĂ©ens sert de prĂ©texte Ă  l'Ă©lite sacerdotale pour contester son action[22]. Hyrcan pour jouer son jeu personnel ou parce qu'il est contraint de sauver les apparences, convoque HĂ©rode pour qu'il vienne s'expliquer. HĂ©rode est contraint de se justifier devant le SanhĂ©drin[23]. AppuyĂ© par le gouverneur de Syrie Sextus CĂ©sar et Ă  la suite d'une intervention ambiguĂ« du leader pharisien SamĂ©as (Shemayah ou ShammaĂŻ[24] ?), HĂ©rode est acquittĂ©[23]. Sextus CĂ©sar le nomme alors stratĂšge de CƓlĂ©-Syrie et de Samarie ()[23].

AprÚs le meurtre de César le , Antipater et son fils Hérode se rallient au gouverneur de Syrie, Caecilius Bassus, ex-partisan de Pompée[23].

ArrivĂ©e au pouvoir d’Antigone II

Lorsqu'Antipater est assassiné en -43, son fils Hérode prend sa place et se rallie au nouveau pouvoir romain. En , les Parthes envahissent toute la Syrie romaine, pendant que leur allié Labienus[25], un général romain partisan de Pompée qui s'était réfugié chez les Parthes aprÚs la défaite de son mentor, prend le contrÎle des territoires du sud de la Turquie actuelle[25]. Les rois arabes se rallient sans difficultés aux Parthes comme Ptolémée Mennaeus, puis son fils Lysanias, rois d'Iturée[26], c'est aussi le cas d'autres rois de la région, jusque-là rois clients des Romains[26].

Le prince hasmonéens Antigone II Mattathiah (Antigone ben Aristobule) qui s'était réfugié chez Ptolémée Mennaus, aprÚs le meurtre de son pÚre par les romains et sa disgrùce au profit de son frÚre Hyrcan II, s'allie aux Parthes. C'est Ptolémée Mennaus qui a joué le rÎle d'intercesseur[26].

Antigone profite de la situation pour rassembler ses partisans, prendre le contrĂŽle de JĂ©rusalem avec ses propres forces et se proclamer roi. Lysanias parvient alors Ă  convaincre le satrape BarzapharnĂšs de soutenir les prĂ©tentions royales d'Antigone contre Hyrcan II et son soutien principal HĂ©rode, qui sont trop liĂ©s aux Romains pour pouvoir se rallier facilement aux Parthes. Selon les dĂ©tracteurs d'Antigone et Flavius JosĂšphe, pour emporter cette dĂ©cision, il aurait promis 1 000 talents et cinq cents femmes »[27] de la noblesse de la rĂ©gion au satrape qui conduit les armĂ©es parthes en direction de la JudĂ©e, Ă  condition qu'il l'aide Ă  Ă©liminer les fils d'Antipater, dont HĂ©rode[25].

BarzapharnĂšs fournit alors Ă  un gĂ©nĂ©ral parthe, qui comme le fils du roi OrodĂšs s'appelle Pacoros[28], une armĂ©e parthe composĂ©e essentiellement de cavalerie. Ce dernier s'avance jusqu'Ă  JĂ©rusalem[29] que les partisans d'Antigone contrĂŽlent, mais oĂč HĂ©rode et Hyrcan sont solidement retranchĂ©s dans une forteresse[30]. Les troupes de Pacoros restent Ă  l'extĂ©rieur de JĂ©rusalem. Usant de duplicitĂ©, Pacoros invite PhasaĂ«l et HĂ©rode Ă  se rendre en GalilĂ©e auprĂšs de BarzapharnĂšs[30]. HĂ©rode refuse, mais PhasaĂ«l accepte avec Hyrcan II[30], pour que BarzapharnĂšs arbitre le conflit entre les deux prĂ©tendants au trĂŽne[31].

Toutefois, peu de temps aprĂšs ĂȘtre parvenus dans la rĂ©gion de PtolĂ©mais, les deux hommes se rendent compte qu'ils sont prisonniers[32] - [25]. PhasaĂ«l se suicide et Antigone obtient qu'une des oreilles d'Hyrcan soit coupĂ©e, ce qui l'empĂȘche dĂ©finitivement d'ĂȘtre grand-prĂȘtre, car un homme ayant un dĂ©faut physique est disqualifiĂ© pour cette fonction. Les adversaires d'Antigone feront courir le bruit que c'est Antigone lui-mĂȘme qui lui aurait arrachĂ© l'oreille avec les dents. Hyrcan est ensuite envoyĂ© chez les Parthes dans la partie nord de la MĂ©sopotamie, oĂč il est bien accueilli par les communautĂ©s juives de la rĂ©gion. De son cĂŽtĂ© HĂ©rode parvient Ă  sortir de JĂ©rusalem avec 9 000 de ses partisans, en emmenant sa famille avec lui[25].

Sa vie dans l’ombre d’HĂ©rode et la fin de la dynastie hasmonĂ©enne

En -39, envoyé par Marc Antoine, le général romain Publius Ventidius Bassus chasse les Parthes de Syrie[33] - [34] - [35]. Au printemps , Hérode met le siÚge devant Jérusalem[36]. Laissant ses hommes à l'ouvrage, il s'absente quelques jours, le temps d'aller se marier en Samarie avec Mariamne l'Hasmonéenne, petite fille d'Hyrcan et la niÚce d'Antigone[36]. Jérusalem tombe au bout de cinq mois[36] (le 8 juillet).

Sous la protection de Marc Antoine qui gouverne l’Orient, HĂ©rode qui avait Ă©tĂ© proclamĂ© roi de JudĂ©e Ă  l'unanimitĂ© du SĂ©nat romain en [37], se proclame roi des Juifs devant la population de JĂ©rusalem. Hyrcan, toujours en exil Ă  Babylone, est libĂ©rĂ© grĂące Ă  l’intervention d’HĂ©rode (). Le roi de JudĂ©e craint en effet qu’Hyrcan ne s’attire les faveurs de la riche communautĂ© juive de Babylonie et que cela ne constitue un danger pour son pouvoir. Il l’invite donc Ă  rentrer Ă  JĂ©rusalem. Selon MoĂŻse de KhorĂšne et Thomas Arçrouni, Ma'nu Saphul qui espĂ©rait tirer une rançon de la libĂ©ration d'Hyrcan, se retourne alors contre le juif Enanus qui l'a laissĂ© partir. Enanus est un gĂ©nĂ©ral qui a le titre prestigieux de « pose-couronne », car il posait la couronne sur la tĂȘte des rois. Il sera tourmentĂ© par Ma'nu Saphul, mais celui-ci lui laissera finalement la vie sauve grĂące Ă  l'intervention d'un de ses ancĂȘtres, Dchadchour prince de la maison des Ardzrouni, prĂ©cise Thomas Arçrouni.

Aristobule III, petit-fils d’Hyrcan et frĂšre de Mariamne l'HasmonĂ©enne, est alors le dernier prĂ©tendant lĂ©gitime de la dynastie hasmonĂ©enne. Avec Hyrcan, il reprĂ©sente un danger pour HĂ©rode. HĂ©rode lui accorde la charge de grand-prĂȘtre bien qu'il n'ait que 17 ans, puis le fait noyer dans son palais de JĂ©richo. Cela soulĂšve contre lui sa femme Mariamne, sa belle-mĂšre Alexandra et Hyrcan. HĂ©rode fait finalement tuer Hyrcan en , Alexandra et Mariamne en [38], puis les deux fils qu’il avait avec Mariamne, Alexandre et Aristobule IV, quelques annĂ©es plus tard, en [39] Il est enterrĂ© Ă  l'Alexandrion[40].

Selon Flavius JosĂšphe, Hyrcan II a laissĂ© le souvenir d’un personnage de peu d'Ă©nergie et de faible dĂ©termination, qui par son alliance avec les Romains s'est rendu complice de l'abaissement de la JudĂ©e et de la profanation du Temple, qui n’a pas su s’opposer avec vigueur aux menĂ©es dirigĂ©es contre lui par ses neveux et qui enfin est restĂ© sous la coupe de son mentor Antipater. Il faut cependant remarquer que l'histoire de JosĂšphe s'appuie sur des historiens hellĂ©nisĂ©s donc gĂ©nĂ©ralement hostiles aux souverains juifs hasmonĂ©ens. Nicolas de Damas en particulier, en tant que secrĂ©taire d'HĂ©rode, cherche Ă  mettre en valeur la personnalitĂ© d'Antipater au dĂ©triment de celle d'Hyrcan.

Hyrcan II a maintenu la lĂ©gislation et les traditions religieuses juives. Au cours de son pontificat, ce sont les pharisiens qui ont eu la haute main sur l’interprĂ©tation de la Loi, et sous son rĂšgne les EssĂ©niens, marquĂ©s par la profanation du Temple, dĂ©veloppĂšrent des idĂ©es messianiques. Le Commentaire d’Habacuc, un des manuscrits de la mer Morte de type midrash pesher qui applique la prophĂ©tie biblique Ă  l’histoire de la secte, laisse entendre que son chef spirituel, le MaĂźtre de Justice, a Ă©tĂ© suppliciĂ© par un « prĂȘtre impie ». Ce « prĂȘtre impie » est peut-ĂȘtre Hyrcan II.

Notes et références

  1. Michael Wise, Martin Abegg, Edward Cook, Les Manuscrits de la mer Morte, Paris, Ă©d. Perrin, 2003, p. 40.
  2. Michael Wise, Martin Abegg, Edward Cook, Les Manuscrits de la mer Morte, Paris, Ă©d. Perrin, 2003, p. 30.
  3. Christian-Georges Schwentzel, "HĂ©rode le Grand", Pygmalion, Paris, 2011, p. 28.
  4. Simon Claude Mimouni, Le JudaĂŻsme ancien du VIe siĂšcle avant notre Ăšre au IIIe siĂšcle de notre Ăšre, Paris, 2012, Ă©d. PUF, p. 366.
  5. Christian-Georges Schwentzel, "HĂ©rode le Grand", Pygmalion, Paris, 2011, p. 27.
  6. Christian-Georges Schwentzel, "HĂ©rode le Grand", Pygmalion, Paris, 2011, p. 29.
  7. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 30.
  8. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 31.
  9. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 32.
  10. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 32-3.
  11. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 33.
  12. Simon Claude Mimouni, Le JudaĂŻsme ancien du VIe siĂšcle avant notre Ăšre au IIIe siĂšcle de notre Ăšre, Paris, 2012, Ă©d. PUF, p. 367.
  13. Simon Claude Mimouni, Le JudaĂŻsme ancien du VIe siĂšcle avant notre Ăšre au IIIe siĂšcle de notre Ăšre, Paris, 2012, Ă©d. PUF, p. 367-368.
  14. Christian-Georges Schwentzel, ‘’HĂ©rode le Grand’’, Pygmalion, Paris, 2011, p. 34.
  15. Stéphane Moronval, Rome et les Parthes, Champ de bataille (Thématique), no 11, 2009, p. 29.
  16. Stéphane Moronval, Rome et les Parthes, Champ de bataille (Thématique), no 11, 2009, p. 12.
  17. Stéphane Moronval, Rome et les Parthes, Champ de bataille (Thématique), no 11, 2009, p. 32.
  18. La premiÚre mention de la ville de Magdala, retrouvée dans la littérature antique ou l'épigraphie, date du IIIe siÚcle.
  19. Stéphane Moronval, Rome et les Parthes, Champ de bataille (Thématique), no 11, 2009, p. 32-33.
  20. Stéphane Moronval, Rome et les Parthes, Champ de bataille (Thématique), no 11, 2009, p. 41.
  21. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 37.
  22. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 38.
  23. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 39.
  24. Mireille-Hadas Lebel, Le contexte historique des débuts du Talmud : Le conflit entre pharisiens et saducéens, conférence pour Akadem, campus numérique juif, 28/05/2007, conférence en ligne.
  25. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 40.
  26. Stéphane Moronval, Rome et les Parthes, Champ de bataille (Thématique), no 11, 2009, p. 50.
  27. Flavius JosĂšphe, Guerre des Juifs, livre I, XIII, 1 (248).
  28. Ce Pacoros est aussi Ă©chanson de BarzapharnĂšs, ce qui permet de le distinguer du fils du roi OrodĂšs II qui s'appelle aussi Pacoros.
  29. Stéphane Moronval, Rome et les Parthes, Champ de bataille (Thématique), no 11, 2009, p. 51.
  30. Stéphane Moronval, Rome et les Parthes, Champ de bataille (Thématique), no 11, 2009, p. 52.
  31. Flavius JosĂšphe, Guerre des Juifs, livre I, XIII, 3 (253).
  32. Flavius JosĂšphe, Guerre des Jufs, livre I, XIII, 4 (256).
  33. Periochae de Tite-Live, 127.
  34. Plutarque, Vie d’Antoine, 33.
  35. ClĂ©ment Huart & Louis Delaporte, L'Iran antique, Albin Michel, coll. « L'Évolution de l'HumanitĂ© », Paris, 1943 p. 325.
  36. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 47.
  37. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 42.
  38. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 56.
  39. Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011, p. 76.
  40. Antiquités juives, XVI, 394; Mireille Hadas-Lebel, Hérode, Fayard, .

Bibliographie

  • Christian-Georges Schwentzel, HĂ©rode le Grand, Pygmalion, Paris, 2011 (ISBN 9782756404721)
  • Michael Wise, Martin Abegg, Edward Cook, Les Manuscrits de la mer Morte, Paris, Ă©d. Perrin, 2003
  • Simon Claude Mimouni, Le JudaĂŻsme ancien du VIe siĂšcle avant notre Ăšre au IIIe siĂšcle de notre Ăšre, Paris, 2012, Ă©d. PUF.
  • Mireille Hadas-Lebel, Rome, la JudĂ©e et les Juifs, Paris, A. & J. Picard, , 231 p. (ISBN 978-2-7084-0842-5).

Articles connexes

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