Inversion (linguistique)
En linguistique, lâinversion est un procĂ©dĂ© par lequel on change lâordre canonique (attendu, consacrĂ©, habituel, normal) de deux entitĂ©s grammaticales, en intervertissant leurs places. Ces entitĂ©s peuvent ĂȘtre les Ă©lĂ©ments dâune forme grammaticale composĂ©e, les composants dâun syntagme, des termes Ă fonction syntaxique dâune phrase simple ou des propositions dâune phrase complexe[1] - [2] - [3] - [4] - [5] - [6].
Lâordre canonique caractĂ©rise la phrase simple isolĂ©e (non intĂ©grĂ©e Ă une phrase complexe ni Ă un contexte plus large, complĂšte quant Ă sa structure (contenant au moins un prĂ©dicat), Ă©nonciative quant au but de la communication (non interrogative, non impĂ©rative) et positive (non nĂ©gative)[7], ainsi que le syntagme, la phrase simple ou complexe dont aucun composant nâest mis en relief, qui nâexprime pas dâaffectivitĂ© (par exemple, ce nâest pas une phrase exclamative) et ne vise aucun but stylistique[8]. Lâinversion est lâun des procĂ©dĂ©s par lesquels le locuteur change une ou plus dâune de ces caractĂ©ristiques, pour intĂ©grer sa phrase dans un contexte en thĂ©matisant ou rhĂ©matisant une de ses parties, pour demander une information, pour donner un ordre, pour nier un fait, pour mettre en relief ce qui est important pour lui, pour exprimer un sentiment, pour obtenir un effet stylistique, etc. Par une mĂȘme inversion, on peut rĂ©aliser plusieurs de ces buts.
La mise en relief, lâexpression de lâaffectivitĂ© et lâobtention dâun effet stylistique font de lâinversion un procĂ©dĂ© rhĂ©torique appelĂ© anastrophe, utilisĂ© surtout dans la littĂ©rature. Ă part ces raisons, les poĂštes peuvent Ă©galement pratiquer lâinversion rien que pour les nĂ©cessitĂ©s de la versification[9] - [3] - [10].
Inversion grammaticale
Il y a inversion surtout au niveau syntaxique, mais il existe aussi des inversions morphologiques, parfois liées au changement du type de phrase.
Inversion morphologique
Dans certaines langues, lâinversion peut affecter certaines formes verbales composĂ©es. En roumain, par exemple, il peut y avoir inversion entre le verbe auxiliaire et le verbe Ă sens lexical, ex. am cĂąntat â cĂąntat-am « jâai chantĂ© »[11], vom porni â porni-vom ânous partironsâ[12]. Cette inversion a le but stylistique de crĂ©er une atmosphĂšre archaĂŻque.
En BCMS (bosnien, croate, montĂ©nĂ©grin et serbe), lâordre canonique des formes verbales composĂ©es est verbe Ă sens lexical + verbe auxiliaire, quand le sujet nâest pas exprimĂ© par un mot Ă part, le premier composant est accentuĂ© et le second atone, mais si devant le prĂ©dicat il y a un mot accentuĂ©, par exemple le sujet mot Ă part, lâauxiliaire reste atone et la place des composants sâinverse, ex. Vid(j)eli smo Mariju â Mi smo vid(j)eli Mariju « Nous avons vu Marija »[13].
En BCMS, la phrase nĂ©gative aussi se caractĂ©rise par cette inversion, le mot nĂ©gatif Ă©tant lâun des mots accentuĂ©s quâon place devant le verbe : (cnr) Äitao bih « Je lirais » â Ne bih Äitao « Je ne lirais pas »[14].
Cette inversion est propre Ă la phrase interrogative aussi, entre lâauxiliaire et le verbe Ă sens lexical pouvant ĂȘtre insĂ©rĂ© un autre terme de la phrase :
- interrogation totale : (sr) Da li sam dobro uradio? « Est-ce que jâai bien fait ? »[15], (hr) Je li ĆĄto kupio? « A-t-il achetĂ© quelque chose ? »[16]
- interrogation partielle : (hr) Kada ÄeĆĄ se vratiti? « Quand est-ce que tu reviendras ? »[17]
En hongrois il y a inversion Ă la forme de futur. Sâil nây a aucun mot accentuĂ© devant la verbe, le composant Ă sens lexical porte lâaccent le plus fort et lâordre est composant Ă sens lexical + auxiliaire (ex. Keresni foglak « Je vais te chercher »)[18], mais dans le cas contraire, lâordre est inverse : Gyula PĂ©csen fog lakni « Gyula va habiter Ă PĂ©cs »[19].
En hongrois, beaucoup de verbes peuvent avoir un prĂ©fixe qui change seulement leur aspect, dâordinaire dâimperfectif Ă perfectif, ou Ă la fois leur aspect et leur sens lexical. Le prĂ©fixe reste un prĂ©fixe si la phrase est canonique, mais si on met en relief le sujet, qui est devant le verbe, ou quâon mette Ă sa place un autre terme, pour le mettre en relief, le prĂ©fixe passe aprĂšs le verbe, ex. PĂ©ter kimegy a strandra « PĂ©ter va Ă la plage » (phrase canonique) â PĂ©ter megy ki a strandra « Câest PĂ©ter qui va Ă la plage » â A strandra megy ki PĂ©ter « Câest Ă la plage que va PĂ©ter »[20].
La phrase impérative positive implique elle aussi le passage du préfixe aprÚs le verbe : Menj ki a strandra! « Va à la plage ! »[21]
La phrase nĂ©gative Ă©galement se caractĂ©rise par ces inversions, le mot nĂ©gatif Ă©tant lâun des mots accentuĂ©s quâon place devant le verbe :
- Dolgozni fogok « Je vais travailler » â Nem fogok dolgozni « Je ne vais pas travailler »[22] ;
- PĂ©ter kimegy a strandra « PĂ©ter va Ă la plage » â PĂ©ter nem megy ki a strandra « PĂ©ter ne va pas Ă la plage »[20].
Ces inversions ont lieu dans la phrase interrogative partielle aussi, celle du préfixe seulement aux formes temporelles simples :
Inversion syntaxique
Dans certaines langues, lâinversion de lâordre pronom conjoint en fonction de complĂ©ment + verbe contribue au changement du type de phrase selon le but de la communication dâĂ©nonciative Ă impĂ©rative positive. Exemples :
- (fr) Vous lâappelez â Appelez-la ![25] ;
- (ro) Ăl aÈtepÈi « Tu lâattends » â AÈteaptÄ-l! « Attends-le ! »[26] ;
- (cnr) Ti mi doneseĆĄ ÄaĆĄu vode « Tu mâapportes un verre dâeau » â Donesi mi ÄaĆĄu vode! « Apporte-moi un verre dâeau ! »[27]
En roumain, une telle inversion, le verbe Ă©tant Ă lâindicatif, peut avoir un but stylistique (ex. te rog â rogu-te « je te prie »), ainsi que lâinversion de lâordre spĂ©cifique Ă lâimpĂ©ratif, pour revenir Ă lâordre de ces termes en phrase Ă©nonciative : UitÄ-te! â Te uitÄ! (verbe pronominal) « Regarde ! »[12]
Une autre inversion afin de changer le type de la phrase selon le but de la communication, cette fois dâĂ©nonciative Ă interrogative, est celle de la place du sujet et du prĂ©dicat, dans certaines langues oĂč lâordre canonique est sujet + prĂ©dicat.
En anglais, lâordre gĂ©nĂ©ral de lâinterrogation est avec lâinversion entre la copule be « ĂȘtre », les verbes modaux et les verbes auxiliaires avec le sujet, mĂȘme quand celui-ci est exprimĂ© par un mot accentuĂ© : That is true « Câest vrai » â Is that true? « Est-ce vrai ? »[5], Caroline has eaten « Caroline a mangĂ© » â Has Caroline eaten? « Caroline a-t-elle mangĂ© ? »[28], Where did John say that he was going? « OĂč John disait-il quâil allait ? »[29]
Dans certaines langues, lâinversion prĂ©dicat + sujet se fait seulement dans lâinterrogation partielle avec lâaccent le plus fort sur le mot interrogatif, indĂ©pendamment du registre de langue :
- (ro) CĂąnd Ăźncepe conferinÈa? « Quand est-ce que la confĂ©rence commence ? »[30] ;
- (cnr) Äe je olovka? « OĂč est le crayon ? »[31] ;
- (hu) Hol jĂĄtszanak a gyerekek? « OĂč jouent les enfants ? »[32]
En français aussi il y a cet ordre des mots, mais seulement dans lâune des deux variantes dans le registre courant, lorsque le sujet est exprimĂ© par un mot accentuĂ©, ex. Quand arrivera FrĂ©dĂ©ric ?[33]
Dans le registre soutenu il y a inversion prĂ©dicat + sujet dans tout type de question, Ă condition que le sujet soit exprimĂ© par un pronom conjoint : Tu es malade (phrase Ă©nonciative) â Es-tu malade ? Si le sujet est exprimĂ© par un nom ou par un pronom accentuĂ©, il reste devant le verbe mais est repris dans le registre soutenu par le pronom personnel conjoint qui lui correspond : Paul est-il malade ?[34]
Un autre type de phrase oĂč le verbe prend la place du sujet est, dans certaines langues, la proposition incise indiquant le locuteur dans les dialogues, que le sujet soit exprimĂ© par un mot accentuĂ© ou non, y compris en français. Exemple :
- (fr) Je reviendrai, dit-elle, dĂšs ce soir[35] ;
- (ro) Aici avem o crimÄ, zise poliÈistul « LĂ , nous avons un meurtre, dit le policier » [36] ;
- (sr) Jeste li ĆŸedni? â upita domaÄica « Avez-vous soif ? â demanda la maĂźtresse de maison »[37] ;
- (hu) Esik az esĆ â mondta JĂĄnos « Il pleut, dit JĂĄnos »[38].
Inversion pragmatique
Du point de vue pragmatique (logique, communicatif), dans certaines langues, dans la phrase simple isolĂ©e, son thĂšme (ce dont on dit quelque chose) occupe la premiĂšre place et coĂŻncide avec le sujet (ou son groupe nominal), et le reste de la phrase est son rhĂšme (ce quâon dit du thĂšme). Lorsque la phrase est dans un contexte, il peut ĂȘtre nĂ©cessaire de lây intĂ©grer par la rhĂ©matisation du sujet, cas dans lequel le prĂ©dicat devient le thĂšme et occupe la place du sujet. Cela arrive, par exemple, lorsque la phrase antĂ©rieure est une question qui vise Ă identifier le sujet, si lâon nâĂ©vite pas la rĂ©pĂ©tition, cas plus rare en dialogue. Exemple :
- (fr) â Qui a Ă©tĂ© reçu Ă lâexamen ? â Ont Ă©tĂ© reçus Pierre, Paul et Marie [8].
Lâinversion peut aussi ĂȘtre un procĂ©dĂ© de thĂ©matisation de divers termes de la phrase, et non seulement dans des dialogues. Exemples :
- (fr) â Que fait Paul Ă Paris ? â Ă Paris, Paul travaille â Le complĂ©ment circonstanciel de lieu Ă Paris est une partie du rhĂšme dans la question et thĂšme dans la rĂ©ponse[39].
- (en) â What did you say hapened yesterday? â Yesterday John gave the money to Peter « â Quâas-tu dit quâil est arrivĂ© hier ? â Hier, John a donnĂ© lâargent Ă Peterâ â Le complĂ©ment circonstanciel de temps yesterday est une partie du rhĂšme dans la question et thĂšme dans la rĂ©ponse[40].
- (BCMS) Slavko vidi Olgu. Olgu vidimo i mi « Slavko voit Olga. Olga, nous la voyons nous aussi » â Le complĂ©ment d'objet direct Olga est une partie du rhĂšme dans la premiĂšre phrase et thĂšme dans la seconde[41].
- (hu) â Mit csinĂĄlt JĂĄnos a könyvvel? â A könyvet feltette JĂĄnos a polcra « â Quâest-ce que JĂĄnos a fait du livre ? â Le livre, JĂĄnos lâa mis sur le rayon » â Le complĂ©ment d'objet indirect a könyvvel est une partie du rhĂšme dans la question et thĂšme dans la rĂ©ponse[42].
Inversion emphatique et affective
Lorsquâun Ă©lĂ©ment dâinformation est important pour le locuteur, celui-ci cherche Ă le mettre en relief. Lâun des procĂ©dĂ©s de le faire est lâinversion[43], parfois en mĂȘme temps avec la thĂ©matisation et la rhĂ©matisation. Cette inversion est appelĂ©e emphatique. Elle peut ĂȘtre en mĂȘme temps affective. Dans ces cas, de neutre, objectif, lâordre des mots devient subjectif[44], tant dans le langage du locuteur ordinaire, quâen qualitĂ© de procĂ©dĂ© stylistique dans les Ćuvres littĂ©raires.
En syntagme
Dans certaines langues, il y a inversion Ă but emphatique entre lâadjectif Ă©pithĂšte et son rĂ©gissant. Dans des langues comme le français ou le roumain, lâordre canonique est rĂ©gissant + Ă©pithĂšte, lâinversion consiste donc Ă antĂ©poser lâĂ©pithĂšte :
- (fr) un paysage splendide â un splendide paysage[45] ;
- (ro) Doamna Alexandrescu este o actriÈÄ remarcabilÄ Â« Madame Alexandrescu est une actrice remarquable » â Doamna Alexandrescu este o remarcabilÄ actriÈÄ! « Madame Alexandrescu est une remarquable actrice ! »[46]
Dans dâautres langues, lâordre canonique dâun tel syntagme est Ă©pithĂšte + rĂ©gissant. Lâinversion de cet ordre a les mĂȘmes buts que ci-dessus :
- (hr) Sad ruke ove trudne ĆŸive u srcu tog kamena « Maintenant, ces mains meurtries par le travail vivent au cĆur de cette pierre » (Mak Dizdar) (ordre canonique : ove trudne ruke)[47] ;
- (ru) ĐĐłŃĐ°Đ”Ń Đž ĐČĐŸĐ”Ń, ĐșĐ°Đș Đ·ĐČĐ”ŃŃ ĐŒĐŸĐ»ĐŸĐŽĐŸĐč, Đ·Đ°ĐČОЎДĐČŃĐžĐč пОŃŃ ĐžĐ· ĐșлДŃĐșĐž Đ¶Đ”Đ»Đ”Đ·ĐœĐŸĐč Igraet i voet, kak zverâ molodoĂŻ, zavidevchiĂŻ pichtchu iz kletki jeleznoĂŻ (Alexandre Pouchkine) littĂ©ralement « Il joue et rugit comme une bĂȘte jeune voyant la nourriture depuis la cage de fer » (ordre canonique : ĐŒĐŸĐ»ĐŸĐŽĐŸĐč Đ·ĐČĐ”ŃŃ molodoĂŻ zverâ, Đ¶Đ”Đ»Đ”Đ·ĐœĐŸĐč ĐșлДŃĐșĐž jeleznoĂŻ kletki)[4] ;
- (hu) TisztessĂ©ges legyen csak ĂłrĂĄm utolsĂł (MiklĂłs ZrĂnyi) litt. « Pourvu quâelle soit honorable, mon heure derniĂšre » (ordre canonique : utolsĂł Ăłram « ma derniĂšre heure »)[10].
En phrase simple
Lâinversion emphatique et/ou affective concerne Ă©galement dâautres termes de la phrase que lâĂ©pithĂšte, avec leur syntagme et Ă©ventuellement avec des mots supplĂ©mentaires par rapport Ă la situation oĂč lâordre est canonique. Dans le mĂȘme temps, câest sur le mot mis en relief que tombe lâaccent le plus fort. Exemples :
- le prédicat (verbal ou nominal) :
- (fr) Louis est venu â Il est venu, Louis[48] ;
- (ro) Mama a venit « Maman est venue » â A venit mama « Elle est venue, maman »[49], Copilul e vesel « Lâenfant est gai » â E vesel copilul « Il est gai, lâenfant »[50] ;
- (sr) DeÄaci vole koĆĄarku « Les garçons aiment le basket » â Vole koĆĄarku deÄaci « Ils aiment le basket, les garçons »[37] ;
- (hu) A gyerekeik szĂ©pek Ă©s okosak « Leurs enfants sont beaux et intelligents » â SzĂ©pek Ă©s okosak a gyerekeik « Ils sont beaux et intelligents, leurs enfants »[51] ;
- lâattribut :
- (fr) La montagne est haute â Haute est la montagne ![1] ;
- (ro) EÈti frumoasÄ Â« Tu es belle » â (Ce) frumoasÄ eÈti! « (Comme) tu es belle ! »[52] ;
- (sr) Kinezi su Äudni ljudi « Les Chinois sont des gens bizarres » â Äudni su ljudi ti Kinezi! « Des gens bizarres, ces Chinois ! »[53] ;
- le complĂ©ment dâobjet direct :
- sans mot(s) supplémentaire(s) :
- (ro) O Ăźntreb pe Maria « Je questionne Maria » â Pe Maria o Ăźntreb « Câest Maria que je questionne »[54] ;
- (en) I havenât seen that film yet « Je nâai pas encore vu ce film » â That film I havenât seen yet « Ce film, je ne lâai pas encore vu »[5] ;
- (hr) Republikance vodi Stipa « Ce sont les rĂ©publicains que conduit Stipa » (Miroslav KrleĆŸa) (ordre canonique : Stipa vodi republikance « Stipa conduit les rĂ©publicains »)[55];
- (ru) ĐŻ ĐČŃĐ”ŃĐ° ĐČОЎДл ĐžĐœŃĐ”ŃĐ”ŃĐœŃŃ ĐșĐœĐžĐłŃ Ia vtchera videl interesnouĂŻou knigu « Hier, jâai vu un livre intĂ©ressant » â ĐĐœŃĐ”ŃĐ”ŃĐœŃŃ ĐșĐœĐžĐłŃ Ń ĐČŃĐ”ŃĐ° ĐČОЎДл IntersnouĂŻou knigu ia vtchera videl « Câest un livre intĂ©ressant que jâai vu hier »[4] ;
- (hu) A pincĂ©r a bort az asztalra teszi « Le garçon met le vin sur la table » â A bort teszi az asztalra a pincĂ©r « Câest le vin que le garçon met sur la table »[56] ;
- avec un mot/des mots supplémentaire(s) :
- (fr) Je vois la ville â La ville, je la vois (reprise par le pronom personnel correspondant)[1], Je ne veux pas voir un vendeur mais le chef de rayon â Ce nâest pas un vendeur que je veux voir, mais le chef de rayon ! (construction de mise en relief)[57];
- (ro) Am gÄsit cartea mea « Jâai trouvĂ© mon livre » â Cartea mea am gÄsit-o « Mon livre, je lâai trouvĂ© » (reprise par le pronom personnel correspondant)[58] ;
- autre complément :
- (fr) Les habitants du quartier rĂ©clament depuis des annĂ©es lâamĂ©nagement dâun espace de jeux pour les enfants â Depuis des annĂ©es, les habitants du quartier rĂ©clament lâamĂ©nagement dâun espace de jeux pour les enfants[59] ;
- (ro) Solului nu i se taie capul « Ă un ambassadeur, on ne lui coupe pas la tĂȘte » (Constantin Negruzzi)[60] (ordre canonique : ''Nu i se taie capul solului « On ne coupe pas la tĂȘte Ă un ambassadeur ») ;
- (hu) Fel fog hĂvni holnap « Il/Elle va mâappeler demain » â Holnap fog felhĂvni « Câest demain quâil/elle va mâappeler »[23] ;
- (sr) SasluĆĄao sam vas s velikom paĆŸnjom « Je vous ai Ă©coutĂ©(e)(s) avec grande attention » â S velikom paĆŸnjom sam vas sasluĆĄao « Câest avec grande attention que je vous ai Ă©coutĂ©(e)(s) »[61].
En phrase complexe
Du moins dans certaines langues, dans le cas de certaines propositions subordonnĂ©es, lâordre des propositions est libre, câest-Ă -dire lâordre canonique est proposition rĂ©gissante + subordonnĂ©e, mais il peut ĂȘtre inversĂ© pour mettre la subordonnĂ©e en relief. Exemples :
- (fr) Tout le monde reconnaĂźt que ce cinĂ©aste est un grand artiste â Que ce cinĂ©aste soit un grand artiste, tout le monde le reconnaĂźt[62] ;
- (ro) Despre cine sĂźntem, de unde venim Èi unde ne ducem, sÄ nu se afle nimic « Sur qui nous sommes, dâoĂč nous venons et oĂč nous allons, quâon ne puisse rien savoir » (Mihail Sadoveanu)[63] ;
- (cnr) NaÄi Äete, ako traĆŸite « Vous trouverez si vous cherchez » â Ako traĆŸite, naÄi Äete « Si vous cherchez, vous trouverez »[64] ;
- (hu) Majd elvĂĄlik, hogy mi lesz belĆle « On verra bien ce quâil/elle deviendra » â Hogy mi lesz belĆle, majd elvĂĄlik « Ce quâil/elle deviendra, on le verra bien »[65].
Inversions spécifiquement rhétoriques
On ne trouve pratiquement certaines inversions que dans des aphorismes et des Ćuvres littĂ©raires, surtout des poĂšmes. En français, par exemple, câest le cas de lâantĂ©position du complĂ©ment du nom : Jâaime de vos longs yeux la lumiĂšre verdĂątre (Charles Baudelaire)[9]. On trouve de telles inversions dans la poĂ©sie roumaine aussi : Ei cinarÄ-n mĂąndre muzici / Cu de aur vase, linguri (Mihai Eminescu) litt. « Ils dĂźnĂšrent en belles musiques / Dans en or assiettes, cuillers »[3]. En roumain câest Ă©galement le cas de lâantĂ©position de lâadjectif possessif : steagul nostru â al nostru steag « notre drapeau »[66].
Lâinversion prĂ©dicat + sujet sans anticipation du dernier par un pronom, prĂ©sente dans le registre courant dâautres langues, ne se trouve, en français, que dans la littĂ©rature : Claque le revolver des dĂ©parts, et je tressaute. (Henry de Montherlant)[9]
Le chiasme est un cas spĂ©cial dâinversion, faisant apparaĂźtre dans une mĂȘme phrase des entitĂ©s syntaxiques dâabord dans un certain ordre, puis dans lâordre inverse. Exemples :
- (fr) Il faut manger pour vivre et non vivre pour manger[67] ;
- (ro) Cu zĂąmbetul tÄu dulce tu mĂąngĂąi ochii mei, / Femeie Ăźntre stele Èi stea Ăźntre femei litt. « Avec ton doux sourire, tu caresses mes yeux, / Femme parmi les Ă©toiles et Ă©toile parmi les femmes » (Eminescu)[68] ;
- (en) The French live to eat, the English eat to live « Les Français vivent pour manger, les Anglais mangent pour vivre »[69] ;
- (hu) Ăltem ĂĄlom, ĂĄlmom Ă©let « Ma vie est rĂȘve, mon rĂȘve est vie » (Gyula Reviczky)[70].
Références et notes
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- Bidu-VrÄnceanu 1997, p. 260-261.
- Dragomirescu 2008, article inversiune.
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- Bussmann 1998, p. 593.
- Crystal 2008, p. 254.
- Cf. la typologie de la phrase simple selon Avram 1997, p. 305-320.
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- Bidu-VrÄnceanu 1997, p. 32.
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