Complément circonstanciel
En syntaxe traditionnelle, le complĂ©ment circonstanciel (CC) est un complĂ©ment formĂ© dâun ensemble hĂ©tĂ©rogĂšne de sous-espĂšces dĂ©finies notamment du point de vue sĂ©mantique[1]. ConformĂ©ment Ă la dĂ©finition traditionnelle, les CC expriment diverses circonstances de rĂ©alisation du procĂšs exprimĂ© par leur rĂ©gissant[2].
Le nombre de types de CC peut ĂȘtre diffĂ©rent dâun auteur Ă lâautre, selon la mesure dans laquelle ils dĂ©taillent la description sĂ©mantique[1]. Ă cause de la vision sĂ©mantique Ă©galement, certains types de complĂ©ments se trouvent chez certains parmi les CC, chez dâautres parmi les complĂ©ments dâobjet indirect (COI), chez dâautres encore, du moins certains types apparaissent sĂ©parĂ©ment, sans constituer une classe[3]. Sont gĂ©nĂ©ralement acceptĂ©s comme des CC celui de lieu, de temps et de maniĂšre. Une grammaire roumaine, Coteanu 1982, prend en compte deux de plus, celui de cause et celui de but[4]. Selon cette grammaire, les autres qui sont rangĂ©s parmi les CC par dâautres grammairiens, peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des COI[5]. Le Bon Usage (Grevisse et Goosse 2007) ajoute trois autres types aux cinq prĂ©cĂ©dents, les CC de mesure (sĂ©parĂ©ment du CC de maniĂšre), de condition et dâopposition. Ses auteurs mentionnent quâils nâont retenu que les types considĂ©rĂ©s comme utiles pour lâĂ©tude des adverbes et des propositions subordonnĂ©es, sur les vingt-neuf que comptait lâĂ©dition de 1980 de cette grammaire, et que certains types peuvent ĂȘtre inclus dans dâautres, par exemple les CC dâinstrument et dâassociation dans celui de maniĂšre. De plus, ils affirment quâil nâest pas utile de prĂ©voir un nom particulier pour tous les complĂ©ments selon leur sens[6]. Les ouvrages roumains Avram 1997 et Constantinescu-Dobridor 1998 prennent en compte quatorze types de CC, en ajoutant aux prĂ©cĂ©dents ceux de consĂ©quence, dâinstrument, dâassociation, de relation, dâopposition (dans un autre sens que dans Grevisse et Goosse 2007), de cumul et dâexception, mais en incluant le CC de mesure dans celui de maniĂšre[7] - [8] - [9]. Dâautres types de CC ont aussi Ă©tĂ© proposĂ©s par divers auteurs : dâĂ©change, de progression, de frĂ©quence, de rĂ©ciprocitĂ©, etc.[1].
Le hongrois est une langue dont les grammaires traditionnelles traitent Ă©galement de types de complĂ©ments mentionnĂ©s ci-dessus (au nombre de huit dans KĂĄlmĂĄnnĂ© Bors et A. JĂĄszĂł 2007, par exemple), sans les ranger dans une classe de complĂ©ments considĂ©rĂ©s comme circonstanciels dans dâautres grammaires, mais en les considĂ©rant ensemble avec ceux appelĂ©s dâobjet indirect, que les grammaires hongroises ne prennent pas en compte comme tels[10].
Dans des grammaires françaises plus rĂ©centes, on traite de ce quâelles appellent « complĂ©ment de phrase (CP) », en le distinguant du « complĂ©ment du verbe (direct et indirect) ». Le premier comprend le complĂ©ment appelĂ© traditionnellement « circonstanciel » qui nâest pas obligatoire et peut changer de place dans la phrase. Le second inclut, Ă cĂŽtĂ© des complĂ©ments appelĂ©s traditionnellement dâobjet direct et dâobjet indirect, celui appelĂ© traditionnellement circonstanciel qui est obligatoire et non dĂ©plaçable. Ainsi, le mĂȘme complĂ©ment peut ĂȘtre des deux catĂ©gories, en fonction de son verbe rĂ©gent, par exemple[11] :
- (En GaspĂ©sie,) il a plu trĂšs peu cet Ă©tĂ© ou Il a plu trĂšs peu cet Ă©tĂ© (en GaspĂ©sie) â complĂ©ment de phrase ;
- Elle va en GaspĂ©sie tous les Ă©tĂ©s â complĂ©ment du verbe (indirect).
Essais de définition structurels
Dans des grammaires structuralistes on a tenté de définir le CC sur la base de traits structurels, par exemple comme complément exprimé par un adverbe ou remplaçable par un adverbe[12]. Cette vision est adoptée par certaines grammaires traditionnelles en essence, avec le terme « complément adverbial » au lieu de « circonstanciel », tout en établissant une typologie sémantique[13].
Il y a aussi des caractĂ©risations du CC par comparaison avec les complĂ©ments dâobjet (CO), direct (COD) et indirect (COI).
Les complĂ©ments dâobjet reprĂ©sentent des participants intĂ©grĂ©s au procĂšs, Ă la diffĂ©rence du CC[14]. Lâaction, par exemple, ne sâexerce pas sur le CC (comme sur le COD), ni en liaison avec le CC (comme en liaison avec le COI) mais, en exprimant une circonstance plus ou moins externe au rĂ©gissant, le CC est moins liĂ© Ă celui-ci. Par exemple, le verbe Ă©crire peut avoir toutes sortes de CC ou aucun : Nous Ă©crivons (Ă lâĂ©cole / le matin / proprement , etc.). Câest pourquoi, les verbes qui ne peuvent ĂȘtre utilisĂ©s correctement quâavec un CC, sont relativement peu nombreux (par exemple habiter)[15].
Par ailleurs, Ă la diffĂ©rence des CO, la prĂ©sence du CC ne dĂ©pend pas de la transitivitĂ© ou de lâintransitivitĂ© du rĂ©gissant. Tout verbe peut avoir un CC. Un CC de temps comme la semaine derniĂšre, par exemple, peut avoir un rĂ©gissant transitif (Le voisin a vendu sa maison la semaine derniĂšre) ou intransitif : Il est parti la semaine derniĂšre.
Le régissant du CC
Ce complĂ©ment peut ĂȘtre subordonnĂ© Ă des mots de plusieurs natures :
- verbe : (fr) Ils se sĂ©parĂšrent au carrefour[6], (ro) LocuieÈte aici « Il/Elle habite ici »[7] ;
- adjectif : (fr) Lâenfant [...] contemplait les quais maintenant silencieux (Marguerite Duras)[6], (ro) bolnav de supÄrare « malade de dĂ©pit »[7] ;
- adverbe : (fr) Ă cette Ă©poque-lĂ , je vivais loin de Paris[16] ; (en) Thereâs a cinema not far from here « Il y a un cinĂ©ma non loin dâici »[17] ;
- interjection appelée prédicative : (ro) Poc cu ciocanul! « Bang avec le marteau ! »[7] ;
- nom dâaction : (hu) iskolĂĄba jĂĄrĂĄs littĂ©ralement « action dâaller Ă lâĂ©cole »[10].
Nature du complément circonstanciel
Les CC sont exprimĂ©s par des mots de diverses natures. Leur frĂ©quence dâutilisation dĂ©pend de leur nature, du type de CC et de la langue considĂ©rĂ©e :
- adverbe ou locution adverbiale : (fr) Venez demain[6], (ro) Mai vino din cùnd ßn cùnd « Viens de temps en temps »[7] ;
- nom : (fr) Il pleure de rage[6], (hr) Poslije veÄere odlaze u crkvu « AprĂšs le dĂźner ils/elles vont Ă lâĂ©glise »[18] ;
- pronom : (fr) Restez chez vous[6], (en) You saw the police car in front of you « Vous avez vu la voiture de police devant vous »[19] ;
- numéral : (fr) Charlemagne fut couronné empereur en huit cent[20], (hu) Hétkor talålkozunk « On se voit à sept heures »[21] ;
- verbe Ă lâinfinitif : (fr) Il sâĂ©carta pour le laisser passer[6], (ro) CĂąntÄ fÄrÄ a se uita la note « Il/Elle chante sans regarder la partition »[7] ;
- verbe au gĂ©rondif : (fr) Câest en forgeant quâon devient forgeron[22], Mike hurt his hand playing badminton « Mike sâest fait mal Ă la main en jouant au badminton »[23].
En grammaire roumaine on prend en compte une forme nominale du verbe appelĂ© supin, qui peut Ă©galement remplir la fonction de CC : S-a dus la vĂąnat « Il est allĂ© chasser »[24]. On trouve aussi dans cette langue des CC exprimĂ©s par un adjectif (De micÄ era talentatÄ la desen « Petite, elle avait dĂ©jĂ du talent pour le dessin » littĂ©ralement Depuis petite...) ou par une onomatopĂ©e : Vine pĂąÈ-pĂąÈ Â« Il/Elle vient Ă pas feutrĂ©s »[7].
Constructions à complément circonstanciel
Les constructions avec des CC exprimĂ©s par des adverbes et par des verbes sont simples. Les constructions avec des noms, des mots substantivĂ©s et des pronoms ressemblent Ă celles avec des COI, pouvant ĂȘtre diffĂ©rentes dâune langue Ă lâautre.
Constructions avec des adverbes
Le plus souvent, le CC exprimĂ© par un adverbe est reliĂ© Ă son rĂ©gissant sans adposition, câest-Ă -dire prĂ©position dans certaines langues comme le français, ou postposition dans dâautres, comme le hongrois. Exemples :
- (fr) HĂąte-toi lentement[6] ;
- (en) My friend came yesterday « Mon ami est venu hier »[25] ;
- (ro) Vino mùine! « Viens demain ! »[7] ;
- (cnr) OvÄe nema mjesta « Ici il nây a pas de place »[26] ;
- (hu) Gyakran kapok hĂrt felĆle « Je reçois souvent de ses nouvelles »[27].
Lâadverbe se construit parfois avec une prĂ©position :
- (fr) Partons dâici[6] ;
- (en) Planes take off from here « Les avions dĂ©collent dâici »[28] ;
- (ro) AÈtept pĂąnÄ mĂąine « Jâattends jusquâĂ demain »[7].
En hongrois, certains adverbes de lieu et de temps peuvent recevoir des dĂ©sinences casuelles qui correspondent Ă des prĂ©positions dans dâautres langues : KintrĆl jött « Il/Elle est venu(e) de dehors »[29]. Dâautres adverbes reçoivent une telle dĂ©sinence et une postposition en mĂȘme temps : holnaptĂłl fogva « Ă partir de demain »[30].
Constructions avec des verbes Ă des formes nominales
Le participe et le gĂ©rondif se construisent sans adposition. Le gĂ©rondif français en a une, en, toujours la mĂȘme, qui est en fait un morphĂšme de cette forme verbale. Dans dâautres langues, il leur correspond une seule forme, sans adposition Ă©galement. Exemples :
- (fr) Ne sachant pas conduire, il prend toujours des taxis[31], On sâinstruit en voyageant[6] ;
- (en) We sat there waiting patiently « Nous étions assis là , en attendant patiemment »[32] ;
- (ro) Vine ÈopÄind « Il/Elle vient en sautillant »[7] ;
- (cnr) Äita zastajkujuÄi « Il/Elle lit en sâinterrompant »[33] ;
- (hu) Az iskolĂĄba menve beszĂ©lgettek « Ils/Elles causaient en allant Ă lâĂ©cole »[34].
En français, le CC exprimĂ© par lâinfinitif se construit le plus souvent avec prĂ©position (On commença par lâinterroger), mais le CC de but des verbes de mouvement est sans prĂ©position : Il mĂšne son cheval boire Ă la fontaine[6]. En hongrois, la construction de ce CC est analogue Ă la française, sans postposition (Megyek bevĂĄsĂĄrolni « Je vais faire des achats »[35]), construction de lâinfinitif dâailleurs gĂ©nĂ©rale dans cette langue. Dans la langue roumaine actuelle, lâinfinitif CC se construit toujours avec prĂ©position (Am recitit cartea pentru a o ĂźnÈelege « Jâai relu le livre pour le comprendre »[7]), mais on lui prĂ©fĂšre dâordinaire un verbe Ă un mode personnel, donc une construction avec une proposition subordonnĂ©e.
Le CC exprimĂ© par le supin roumain a toujours une prĂ©position : Umbla dupÄ cerÈit « Il/Elle allait mendier »[7].
Constructions avec des noms et leurs substituts
Pour ce qui est des constructions avec des noms, dâautres mots utilisĂ©s en tant que noms et des pronoms, il y a une diffĂ©rence gĂ©nĂ©rale entre langues sans dĂ©clinaison et langues avec dĂ©clinaison. Dans les premiĂšres, ces mots expriment le CC avec ou sans adposition. Dans les derniĂšres, le CC est toujours Ă un certain cas grammatical, soit avec, soit sans adposition.
Le français nâa pas de dĂ©clinaison. La plupart des CC sont avec une prĂ©position ou une locution prĂ©positionnelle : Il conduit avec prudence Ă cause du verglas. On construit sans prĂ©position les CC de mesure et certains CC de temps (Ce meuble mesure deux mĂštres, Il reviendra la semaine prochaine[6]), ceux exprimĂ©s par les pronoms en et y, et celui exprimĂ© par le pronom relatif dont : Il est restĂ© dans son bureau toute la journĂ©e et vient juste dâen sortir, Il a un grand jardin, il y cultive des lĂ©gumes, Je connais le pays dont il vient. En et y sont Ă©galement utilisĂ©s dans les constructions de mise en relief dâune partie de la phrase, en anticipant ou en reprenant un CC exprimĂ© par un mot Ă sens lexical : Son enfer, elle en est revenu, Ă Paris, moi, je nây vais jamais, Jây suis allĂ© souvent, Ă Amsterdam[36].
Lâanglais aussi est une langue sans dĂ©clinaison. Il a certains CC avec prĂ©position (The coat was over his arm « Son manteau Ă©tait sur son bras ») et dâautres sans prĂ©position : The conference is every year « La confĂ©rence a lieu tous les ans »[37].
Le roumain a une dĂ©clinaison relativement rĂ©duite. La plupart des CC se construisent avec des prĂ©positions qui rĂ©gissent le cas accusatif. Comme la forme de celui-ci nâest diffĂ©rente de celle du nominatif (celui du sujet) que pour relativement peu de mots, cela rapproche Ă cet Ă©gard le roumain des langues sans dĂ©clinaison (ex. Ăn casÄ nu e cald « Dans la maison il ne fait pas chaud »). Il y a en petit nombre des CC construits avec des prĂ©positions et des locutions qui exigent le cas gĂ©nitif : Ăźmprejurul turnului « autour de la tour », Ăźn faÈa coloanei « devant la colonne ». Il y a aussi des CC Ă lâaccusatif sans prĂ©position : CÄrÈile apÄrute anul trecut s-au epuizat deja « Les livres parus lâannĂ©e derniĂšre sont dĂ©jĂ Ă©puisĂ©s »[38].
En BCMS (bosnien, croate, monténégrin et serbe) la déclinaison est relativement développée. Il y existe des CC sans préposition à plusieurs cas :
- gĂ©nitif : (sr) Grad je razruĆĄen zemljotresom godine 1667 « La ville a Ă©tĂ© dĂ©truite par un tremblement de terre en lâan 1667 »[39] ;
- datif : (hr) Priƥao sam krevetu « Je me suis approché du lit »[18] ;
- accusatif : (hr) Jedno vrijeme slao sam ispravke i odgovore « Pendant quelque temps jâai envoyĂ© des corrections et des rĂ©ponses »[18] ;
- instrumental : (cnr) Dugo smo ƥetali ulicama « Nous nous sommes longtemps promenés dans les rues »[26].
Quand les CC sont construits avec des prépositions, celles-ci régissent certains cas :
- gĂ©nitif : (sr) MeÄ je prekinut zbog kiĆĄe « Le match a Ă©tĂ© interrompu Ă cause de la pluie »[39] ;
- datif : (cnr) Zaputio sam se prema izlazu iz dvorane « Je me suis dirigé vers la sortie de la salle »[40] ;
- accusatif : (hr) Na vratima se pojavi Ema « Ema apparaßt à la porte »[18] ;
- instrumental : (bs) Sjedim sam u vinogradu pred kolibom « Je suis assis seul dans le vignoble, devant la cabane »[41];
- locatif : u vinogradu « dans le vignoble » de lâexemple prĂ©cĂ©dent.
Certaines prĂ©positions de lieu sont utilisĂ©es avec deux cas, en fonction du sens du verbe rĂ©gissant. Sâil nâexprime pas un dĂ©placement vers le lieu en cause, le cas est lâinstrumental ou le locatif (dans les exemples ci-dessus), mais si le verbe exprime un tel dĂ©placement, les mĂȘmes prĂ©positions sont employĂ©es avec lâaccusatif : (bs) Zamandalih vrata i uÄoh u kuÄu « Je verrouillai le portail et jâentrai dans la maison »[41], (cnr) Ćutra svi doÄite pred ĆĄkolu « Demain venez tous devant lâĂ©cole »[42].
Le hongrois a une dĂ©clinaison encore plus dĂ©veloppĂ©e. Parmi les cas grammaticaux il y en a dix, chacun avec sa dĂ©sinence spĂ©cifique, qui expriment par leur sens de base, concret, des CC de lieu. Parmi ces cas, neuf se diffĂ©rencient selon quâil sâagit dâun intĂ©rieur, dâune surface ou de la proximitĂ© dâun lieu, et selon que le rĂ©gissant exprime un dĂ©placement vers le lieu en question, depuis ce lieu, ou quâil nâexprime pas un tel dĂ©placement (voir La dĂ©clinaison). La plupart de ces CC sont exprimĂ©s uniquement par des dĂ©sinences mais dâautres, non seulement de lieu, sont exprimĂ©s par des postpositions. La majoritĂ© des postpositions de lieu ont Ă©galement trois variantes en fonction du sens du rĂ©gissant. Le plus grand nombre de postpositions exigent des mots Ă dĂ©sinence zĂ©ro, considĂ©rĂ©s comme Ă©tant au cas nominatif, et certaines demandent des mots Ă dâautres cas. Exemples :
- sans postposition, au cas superessif, qui exprime lâidĂ©e « sur une surface », demandĂ© par un verbe qui nâexprime pas de dĂ©placement vers ou depuis ce lieu : A sarkon vĂĄrlak titeket « Je vous attends au coin de la rue »[27] ;
- avec postposition, au nominatif : Az autĂłt a gyĂłgyszertĂĄr mögött hagytam « Jâai laissĂ© la voiture derriĂšre la pharmacie »[27] ;
- avec postposition, Ă lâinstrumental : A mozival szemben van egy kĂĄvĂ©hĂĄz « En face du cinĂ©ma il y a un cafĂ© »[43].
En hongrois, les pronoms personnels ont des formes supplĂ©tives qui expriment des CC. Elles sont constituĂ©es de dĂ©sinences casuelles ou de postpositions auxquelles on ajoute des suffixes personnels possessifs correspondant aux adjectifs possessifs dâautres langues : Jöjjön fel hozzĂĄm egy kĂĄvĂ©ra « Venez prendre un cafĂ© chez moi »[44], Egy idĆs Ășr ĂŒlt le mellĂ©nk « Câest un vieux monsieur qui sâest assis Ă cĂŽtĂ© de nous »[27].
Structures de complément circonstanciel
Dans certaines grammaires on Ă©tablit une typologie des CC selon leur structure, en dehors de leur liaison avec le rĂ©gissant. Dans ce sens il y CC simple, exprimĂ© par un seul mot Ă sens lexical, y compris sâil est accompagnĂ© dâune adposition, et CC formĂ© de plus dâun mot, sans compter une Ă©ventuelle adposition, entre lesquels il y a coordination ou subordination, ou bien qui forment un syntagme figĂ©. Ces combinaisons sont Ă prendre comme un seul CC. Selon Constantinescu-Dobridor 1989 il y a encore[45] :
- CC complexe, formĂ© dâun mot Ă sens lexical accompagnĂ© dâun mot appelĂ© adverbe, qui peut ĂȘtre de prĂ©cision, de renforcement, de restriction ou dâapproximation : (fr) Il Ă©crit fort mal[46], (ro) Ănainta cam Ăźncet « Il/Elle sâavançait un peu lentement »[45] ;
- CC multiple, exprimé par deux ou plusieurs mots à sens lexical, de nature identique ou différente, coordonnés entre eux : (fr) Il répondit calmement et en pesant ses mots[47], (en) We can meet here or in town « Nous pouvons nous rencontrer là ou en ville »[48] ;
- CC dĂ©veloppĂ©, construction constituĂ©e dâun verbe Ă un mode non personnel et un mot de nature nominale : (fr) Ătant absent tout le week-end, je nâai pas pu ĂȘtre prĂ©venu[49], (ro) Devenind arhitect, se afla mereu pe Èantier « Ătant devenu ingĂ©nieur, il Ă©tait tout le temps sur le chantier »[45].
Kålmånné Bors et Jåszó 2007 aussi prend en compte les CC multiple et développé, en leur ajoutant[10] :
- le CC double, formĂ© dâun mot rĂ©pĂ©tĂ© ou de deux mots diffĂ©rents, exprimant un point initial et un point final : (fr) petit Ă petit[50], (hu) lĂ©pĂ©srĆl lĂ©pĂ©sre « pas Ă pas »[10] ;
- les CC interconnectĂ©s, dont lâun prĂ©cise le sens de lâautre : (fr) hier matin[51], (hu) mĂĄhoz egy hĂ©tre « dâici une semaine »[10].
Phrase simple comportant plus dâun CC
Dans une phrase il peut y avoir plus dâun CC sans rapport entre eux, sinon le fait quâils sont subordonnĂ©s au mĂȘme rĂ©gissant. Ce sont dâordinaire des CC de types diffĂ©rents :
- (fr) Le capitaine Pieter Van Deyssel se pencha par-dessus son ventre pour poser le jeu de tarot devant Robinson (Michel Tournier)[52] ;
- (en) Today the train left on time « Aujourdâhui, le train est parti Ă lâheure »[53] ;
- (ro) Ulciorul nu merge de multe ori la apÄ Â« Tant va la cruche Ă lâeau, quâĂ la fin elle se casse » (litt. « La cruche ne va pas beaucoup de fois Ă lâeau »)[54] ;
- (hr) Poslije veÄere odlaze u crkvu « AprĂšs le dĂźner, ils/elles vont Ă lâĂ©glise »[18] ;
- (hu) Sosem voltunk Kuala Lumpurban « Nous ne sommes jamais allé(e)s à Kuala Lumpur »[55].
Synonymie syntaxique
Le mĂȘme sens peut parfois ĂȘtre portĂ© par deux CC du mĂȘme type mais construits diffĂ©remment, ou par un CC et une autre entitĂ© syntaxique.
Il peut sâagir, par exemple, du mĂȘme CC sans prĂ©position et avec prĂ©position. En roumain, on utilise le nom Ă lâaccusatif dans les deux constructions : Trec pe la tine sÄptÄmĂąna / Ăźn sÄptÄmĂąna viitoare « Je passe chez toi la semaine prochaine »[7]. En BCMS, les cas sont diffĂ©rents dans les deux variantes : (cnr) ove nedelje (gĂ©nitif) / u ovoj nedelji (locatif) « cette semaine »[56].
Il peut y avoir Ă©quivalence entre le CC et un autre constituant de la phrase. En roumain, par exemple, cela peut ĂȘtre ce quâon appelle « Ă©lĂ©ment prĂ©dicatif supplĂ©mentaire », considĂ©rĂ© par Grevisse et Goosse 2007 comme une Ă©pithĂšte dĂ©tachĂ©e, si câest un adjectif[57] : Apa curge liniÈtit (CC) « Lâeau coule tranquillement » / Apa curge liniÈtitÄ (ĂPS) « Lâeau coule tranquille » [58].
Le plus souvent, le CC est Ă©quivalent Ă une proposition subordonnĂ©e du mĂȘme type. Câest le cas, par exemple, de la construction avec un infinitif transformable en subordonnĂ©e, lâinfinitif Ă©tant en gĂ©nĂ©ral prĂ©fĂ©rĂ© en français : Vous pourrez participer Ă la compĂ©tition Ă condition de vous entraĂźner / Ă condition que vous vous entraĂźniez[59]. Il y a en roumain aussi une telle Ă©quivalence, mais pas toujours dans les mĂȘmes cas quâen français, et avec une prĂ©fĂ©rence pour la subordonnĂ©e : Am recitit cartea pentru a o ĂźnÈelege / ca s-o ĂźnÈeleg « Jâai relu le livre pour le comprendre »[7]. On peut aussi dĂ©velopper un nom dâaction en prĂ©dicat dâune subordonnĂ©e CC : (ro) Ne-am ĂźntĂąlnit la deschiderea expoziÈiei / cĂąnd s-a deschis expoziÈia « Nous nous sommes rencontrĂ©(e)s Ă lâouverture de lâexposition / quand lâexposition a Ă©tĂ© ouverte »[58].
Exemples de CC selon leur type sémantique
Parmi les nombreux types de CC qui peuvent ĂȘtre dĂ©limitĂ©s du point de vue sĂ©mantique, voici des exemples de ceux retenus par Grevisse et Goosse 2007[6] :
- temps : (fr) Il reviendra la semaine prochaine, (en) When are you coming back? « Quand reviendras-tu ? »[60] ;
- lieu : (fr) Ils se sont rencontrĂ©s au QuĂ©bec, (ro) Merge (pĂąnÄ) la scoalÄ Â« Il/Elle va (jusquâ)Ă lâĂ©cole »[7] ;
- maniĂšre : (fr) Elle marche Ă pas pressĂ©s, (cnr) Nekako Äemo se snaÄi « Nous allons nous dĂ©brouiller dâune façon ou dâune autre »[26] ;
- mesure : (fr) allonger une robe de deux centimĂštres, (hu) Ătlagon felĂŒl okos « Il/Elle est intelligent(e) au-dessus de la moyenne »[61] ;
- opposition : (fr) Je lâai reconnu malgrĂ© lâobscuritĂ©, (cnr) Nastavili su s poslom uprkos nevremenu « Ils ont continuĂ© le travail malgrĂ© le mauvais temps »[26] ;
- but : (fr) Il sâĂ©carta pour le laisser passer, (ro) Hai la cumpÄrÄturi! « Allons faire des achats ! »[7] ;
- cause : (fr) Il agit par jalousie, (en) The match is off because of the weather « Le match est annulé à cause du temps »[62] ;
- condition : (fr) Appelez-moi en cas de besoin, (ro) AvĂąnd rÄbdare ai sÄ afli la timpul cuvenit « Ayant de la patience, tu le sauras en temps voulu »[7].
Des types de CC relativement souvent retenus par dâautres grammairiens, en plus de ceux-ci-dessus, sont :
- consĂ©quence : (ro) MunceÈte pĂąnÄ la epuizare « Il/Elle travaille jusquâĂ Ă©puisement »[7], (cnr) Smijali smo se do suza « Nous avons ri jusquâaux larmes »[26] ;
- instrument : (fr) enfoncer une cheville avec un marteau[63], (hu) Pista vonattal érkezett « Pista est arrivé en train »[64] ;
- association : (fr) voyager avec un ami[63], (bs) Ona nije govorila o tom s Muharemagom « Elle nâa pas parlĂ© de ça avec Muharemaga »[65].
Notes et références
- Bidu-VrÄnceanu 1997, p. 101.
- DĂ©finition donnĂ©e par Dubois 2002 (p. 85), Coteanu 1982 (p. 295), Constantinescu-Dobridor 1998 (article circumstanÈial), BariÄ 1997 (p. 428) ou ÄirgiÄ 2010 (p. 274), par exemple.
- Par exemeple dans la grammaire roumaine BÄrbuÈÄ 2000 (p. 261-268).
- Coteanu 1982, p. 295.
- Coteanu 1982, p. 293.
- Grevisse et Goosse 2007, p. 390-393.
- Avram 1997, p. 380-394.
- Constantinescu-Dobridor 1998, article circumstanÈial.
- Voir des exemples par types de CC dans la derniĂšre section de cet article.
- KĂĄlmĂĄnnĂ© Bors et A. JĂĄszĂł 2007, p. 383â387.
- « Le complément de phrase », sur vitrinelinguistique.oqlf.gouv.qc.ca, Office québécois de la langue française (consulté le ), sans nommer des grammaires qui traitent du CP.
- Par exemple la linguiste roumaine Valeria GuÈu Romalo, cf. Bidu-VrÄnceanu 1997, p. 101.
- Grevisse et Goosse 2007, par exemple (p. 390).
- Eifring 2005, chap. 2, p. 40.
- ÄirgiÄ 2010, p. 274-275. Les exemples de cette section sont traduits de cette source.
- Grevisse et Goosse 2007 p. 798.
- Eastwood 1994, p. 18.
- BariÄ 1997, p. 429-431.
- Eastwood 1994, p. 261.
- Grevisse et Goosse 2007 p. 768.
- P. Lakatos 2006, p. 135.
- Grevisse et Goosse 2007 p. 980.
- Eastwood 1994, p. 171.
- BÄrbuÈÄ 2000, p. 261.
- Eifring 2005, chap. 2, p. 39.
- ÄirgiÄ 2010, p. 274-277.
- Szende et Kassai 2007, p. 391.
- Eastwood 1994, p. 177.
- P. Lakatos 2006, p. 133.
- Szende et Kassai 2007, p. 156.
- Delatour 2004, p. 118.
- Eastwood 1994, p. 168.
- ÄirgiÄ 2010, p. 180.
- P. Lakatos 2006, p. 137.
- P. Lakatos 2006, p. 149.
- Wyler 2018, page Détachement et thématisation.
- Eastwood 1984, p. 6.
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- Eastwood 1994, p. 307.
- Type mentionné par Grevisse et Goosse 2007 comme inutile à retenir (p. 391).
- Kålmånné Bors et A. Jåszó 2007, p. 405.
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