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Gouvernement Georges Clemenceau (1)

Le , Georges Clemenceau, alors ministre de l'Intérieur et homme fort du Parti radical, est appelé à la présidence du Conseil par le président de la République Armand Fallières. Il forme un gouvernement qui se maintient près de trois ans. Georges Clemenceau bénéfice de plus d'un fort soutien à la chambre des députés (337 députés et 57,6 % de sièges). Ce gouvernement est confronté à une période charnière pour le régime : il s'agit d'un côté d'entériner le caractère laïc de la République, et de l'autre, de faire face aux mouvements sociaux qui se développent et prennent un tour de plus en plus radical.

Gouvernement Georges Clemenceau (1)

Troisième République

Description de cette image, également commentée ci-après
Le gouvernement Georges Clemenceau,
carte postale, vers 1906.
Président de la République Armand Fallières
Président du Conseil Georges Clemenceau
Formation
Fin
DurĂ©e 2 ans, 8 mois et 25 jours
Composition initiale
Coalition RI - PRRRS - ARD - SI
Représentation
Chambre des députés
295 / 585

Composition

Georges Clemenceau
Portefeuille Titulaire Parti
Président du Conseil Georges Clemenceau RI
Ministres
Ministre de l'Intérieur Georges Clemenceau RI
Ministre des Affaires étrangères Stephen Pichon PRRRS
Ministre de la Guerre Georges Picquart SE
Ministre des Finances Joseph Caillaux ARD
Ministre du Travail et de la Prévoyance sociale René Viviani SI
Ministre de la Justice (et des Cultes Ă  partir du ) Jean Guyot-Dessaigne (jusqu'au ) PRRRS
Aristide Briand SI
Ministre de la Marine Gaston Thomson (jusqu'au ) ARD
Alfred Picard SE
Ministre de l'Instruction publique, des Beaux-Arts et Cultes
(de l'Instruction publique et des Beaux-Arts Ă  partir du )
Aristide Briand (jusqu'au ) SI
Gaston Doumergue PRRRS
Ministre de l'Agriculture Joseph Ruau PRRRS
Ministre des Colonies Raphaël Milliès-Lacroix PRRRS
Ministre des Travaux publics, des Postes et Télégraphes Louis Barthou ARD
Ministre du Commerce et de l’Industrie Gaston Doumergue (jusqu'au ) PRRRS
Jean Cruppi PRRRS
Sous-secrétaires d’État
Sous-secrétaire d'État à l'Intérieur et à la présidence du Conseil Albert Sarraut (jusqu'au ) PRRRS
Adolphe Maujan PRRRS
Sous-secrétaire d'État aux Beaux-Arts Henri Dujardin-Beaumetz RI
Sous-secrétaire d'État à la Guerre Henry Chéron PRRRS
Sous-secrétaire d'État aux Postes et Télégraphes Julien Simyan PRRRS

Le premier gouvernement Clemenceau, 25 octobre 1906 - 20 juillet 1909

1906

Fin de la crise ministérielle et formation du cabinet Clemenceau, L'Illustration, .
  • CrĂ©ation du ministère du Travail par Clemenceau. Le poste est confiĂ© Ă  RenĂ© Viviani et dĂ©note une volontĂ© de prise en compte de la condition ouvrière, Ă  laquelle Clemenceau se dit "sensible". Le Ministère du Travail deviendra un poste incontournable dans les futurs gouvernements.
  • Premières applications de la loi sur le repos hebdomadaire, votĂ©e sous le prĂ©cĂ©dent gouvernement dirigĂ© par Ferdinand Sarrien.
  • Le gouvernement met en route un projet de loi sur les retraites ouvrières et paysannes, qui ne sera adoptĂ© que le .
  • La France connaĂ®t son premier excĂ©dent de la balance commerciale depuis 25 ans, grâce aux exportations d'automobiles.
  • Le gouvernement Ĺ“uvre pour le renforcement de l'alliance franco-britannique, scellĂ©e depuis la signature de l'Entente cordiale.
  • Le 20 novembre, les inventaires des biens du clergĂ© s'achèvent, la loi de sĂ©paration des Églises et de l'État entre en vigueur le . L'auditeur de la nonciature du Vatican Ă  Paris, considĂ©rĂ© comme un « agent secret du Saint-Siège Â», est expulsĂ©. La loi prĂ©voyait que les biens pourraient ĂŞtre attribuĂ©s aux catholiques constituĂ©s en association. Le clergĂ© Ă©tait totalement opposĂ© au principe de la constitution d'associations. Le , une loi prĂ©voit que les Ă©difices cultuels non rĂ©clamĂ©s par dĂ©faut d'associations ou de contrat entre autoritĂ©s laĂŻques et religieuses, sont repris par l'État et les communes. Le pape Pie X condamne cette loi ; en revanche, le 30 janvier, l'Ă©piscopat dĂ©clare accepter cette loi mais demande des garanties pour la permanence et la « sĂ©curitĂ© morale Â» du service religieux. Le 28 mars, une loi assimilant les rĂ©unions culturelles aux rĂ©unions publiques est adoptĂ©e, ce qui règle le conflit entre l'Église et l'État en garantissant la libertĂ© du culte. Le , le texte de la loi sur la dĂ©volution des biens du clergĂ© est votĂ©, les Ă©glises deviennent la propriĂ©tĂ© des communes.

1907

  • Le 7 fĂ©vrier, le ministre des Finances Joseph Caillaux dĂ©pose un projet de loi d'ImpĂ´t sur le revenu visant Ă  remplacer les diffĂ©rents impĂ´ts existants (contribution foncière, impĂ´t sur les portes et fenĂŞtres, contribution mobilière, patente, contribution sur les revenus des valeurs mobilières). L'impĂ´t serait de 3 % sur les revenus du travail, 3,5 % sur les revenus capital-travail et de 4 % sur les revenus du capital. Un impĂ´t progressif est prĂ©vu pour les revenus de plus de 5 000 francs. Dans un premier temps, le projet n'aboutira pas, mais il servira de base Ă  la rĂ©forme de la fiscalitĂ© directe mise en place de 1914 Ă  1917.
  • Troubles au Maroc : le 19 mars, le docteur Mauchamp, directeur du dispensaire de Marrakech, est assassinĂ©. Le Conseil des ministres dĂ©cide d'envoyer une expĂ©dition militaire. le Lyautey occupe Oujda. Le , près de Casablanca, le passage du chemin de fer dans un cimetière musulman provoque une Ă©meute, 8 EuropĂ©ens seront tuĂ©s dont 5 Français. Soutenue par l'Espagne, la France dĂ©cide d'envoyer des renforts sans pĂ©nĂ©trer Ă  l'intĂ©rieur du Maroc. Lorsque le gĂ©nĂ©ral Drude dĂ©barque avec ses troupes, il subit une attaque. En reprĂ©sailles, le 6 aoĂ»t, deux navires de guerre bombardent Casablanca. Moulay Hafid se proclame Sultan Ă  Marrakech. L'Allemagne proteste contre les initiatives françaises. Les 12 et , le ministre des Affaires Ă©trangères Stephen Pichon, interpellĂ©, se dĂ©fend de vouloir instituer un protectorat. Le , une bataille a lieu près de Settat, les troupes françaises doivent battre en retraite. Le 12 fĂ©vrier, elles occupent Settat. Le 9 mars, le gĂ©nĂ©ral d'Amade qui a remplacĂ© Drude, malade, est victorieux des tribus de la rĂ©gion de Mdakra et des Hafidiens. Six jours après, Le Matin rĂ©vèle qu'un camp marocain dĂ©sarmĂ© a Ă©tĂ© massacrĂ© par les troupes françaises, ce qui sera avĂ©rĂ©. La Chambre accorde sa confiance au gouvernement et adresse ses fĂ©licitations aux officiers et soldats d'Afrique. Fin mai 1908, la chancellerie allemande souhaite voir la convention d'AlgĂ©siras respectĂ©e. Le 18 juin le sultan Abd el-Aziz, alliĂ© de la France, est vaincu par Moulay Hafid près de Marrakech, ce dernier est proclamĂ© sultan dans toutes les villes du Maroc. Le 12 septembre, il acceptera l'acte d'AlgĂ©siras. Le 14, la France et l'Espagne s'accordent sur les conditions de reconnaissance de Moulay Hafid. Le 27 octobre, l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie acceptent ces conditions.
Caricature montrant Clemenceau arbitrant le combat des viticulteurs du Midi contre les betteraviers du Nord
  • Le , les vignerons du Midi tiennent des meetings pour dĂ©noncer la mĂ©vente du vin. En juin, le mouvement des vignerons prend une tournure insurrectionnelle. 500 000 manifestants Ă  Montpellier. Des bagarres Ă©clatent le lendemain Ă  Narbonne. Deux leaders apparaissent, un petit propriĂ©taire, Marcelin Albert, et le maire socialiste de Narbonne, le docteur Ernest Ferroul, qui dĂ©missionne le 10 juin, dĂ©clenchant une grève municipale suivie par des centaines de communes de l'HĂ©rault, de l'Aude et des PyrĂ©nĂ©es-Orientales. Clemenceau craint une paralysie administrative. Le 17 juin, le gouvernement engage des poursuites contre les dirigeants. Le docteur Ferroul est arrĂŞtĂ© après avoir fait arborer le drapeau noir sur la mairie. Le 20, 6 manifestants sont tuĂ©s. La prĂ©fecture de Perpignan et la sous-prĂ©fecture de Narbonne sont incendiĂ©es. Le 21, Ă  BĂ©ziers, les militaires du 17e, composĂ© de natifs de la rĂ©gion, refusent de tirer sur les manifestants. Ils seront envoyĂ©s Ă  Gafsa en Tunisie. Le 29 juin, la loi interdisant la chaptalisation est votĂ©e. La chaptalisation consiste Ă  ajouter du sucre au moment de la fermentation, ce qui augmente le degrĂ© alcoolique et permet ainsi d'ajouter de l'eau, ce qui serait Ă  l'origine de la surproduction (plus rĂ©cemment, des aides accordĂ©es Ă  la viticulture Ă©taient fondĂ©es notamment sur le degrĂ© alcoolique, ce qui a entraĂ®nĂ© une recrudescence des fraudes par chaptalisation). L'agitation se calmera peu Ă  peu et des non-lieux seront dĂ©cidĂ©s pour les dirigeants.
  • Le 11 aoĂ»t, au congrès de la SFIO, Jean Jaurès dĂ©fend la motion invitant tous les prolĂ©taires et les socialistes Ă  s'opposer Ă  la guerre par tous les moyens. Cette rĂ©solution sera Ă  l'origine de conflits entre les radicaux et les socialistes.
  • Le gouvernement prĂ©sente le premier budget dĂ©ficitaire de la IIIe RĂ©publique devant la Chambre. Le rejet du projet de loi fiscal du ministre Joseph Caillaux prive l’État de nouvelles recettes rendues nĂ©cessaires avec la hausse des dĂ©penses sociales.

1908

1909

L'Humanité, dessin de H.-P. Gassier le , la chute du gouvernement Clemenceau.

Impact sur les relations entre les composantes de la gauche

Selon le biographe de Clemenceau et historien de la gauche Michel Winock, ce gouvernement "accuse la coupure entre deux gauches" et débouche sur des conséquences durables.

A la formation du gouvernement, les parlementaires de la SFIO s'abstiennent lors de la question de confiance (au lieu de voter contre, comme ils le font traditionnellement vis-à-vis de ce qu'ils désignent comme les « gouvernements bourgeois ») tandis que le nouveau président du conseil tend la main aux socialistes pour mettre en place des réformes sociales. Cette relation s'explique par le fait que Clemenceau soit alors le président du conseil le plus à gauche jamais entré en fonction, défend de longue date la nécessité du progrès social et présente comme objectifs de son gouvernement une série de réformes socio-économiques allant dans le sens d'un développement de l'Etat social et de la protection des salariés. En outre, la gauche républicaine et les socialistes sortent alors de séquences comme l'affaire Dreyfus et la laïcisation du pays qui ont pu les voir s'associer pour préserver le régime dans une entende parfois désignée comme "le parti républicain"[1].

L'apparition de mouvements sociaux virulents sous le gouvernement Clemenceau dès 1906 plonge néanmoins ces forces dans une relation conflictuelle. Le président du conseil et ministre de l'intérieur y répond en choisissant le maintien strict de l'ordre public et de l'autorité de l'Etat via la répression tandis que son bilan en matière de réforme sociale est par ailleurs très inférieur aux attentes. Pour leur part, les parlementaires socialistes sont d'autant plus poussés à l'opposition qu'ils ne remettent pas en question la ligne anarcho-syndicaliste d'organisations à l'œuvre comme la CGT et sont eux-mêmes marqués par une position de rejet du parlementarisme et de la légitimité de "l'Etat bourgeois" inspirée de la pensée du marxiste Jules Guesde. Cette divergence conduit les socialistes à s'opposer vivement au gouvernement puis à se réjouir de sa chute. Mais elle se prolonge de manière plus profonde dans les années suivantes entre une gauche républicaine attachée à l'autorité de la loi tout en échouant désormais à occuper véritablement le champ du progrès social et une gauche socialiste, puis pour partie communiste, qui adopte une approche révolutionnaire. L'unité d'action entre les deux est ainsi rendue plus délicate et n'opère plus que par intermittence[2].

Bibliographie

Notes et références

  1. Michel Winock, Clemenceau, Éditions Perrin, (ISBN 978-2-262-03878-6, lire en ligne), p. 407-423
  2. Michel Winock, Clemenceau, Éditions Perrin, (ISBN 978-2-262-03878-6, lire en ligne), p. 425-459
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