Un filet de pĂȘche est un outil de pĂȘche passif permettant de capturer des poissons, ou certains crustacĂ©s (langoustines). Le filet est tendu verticalement dans l'eau et permet de capturer des poissons d'une taille prĂ©cise grĂące aux mailles dimensionnĂ©es, en fonction du type de poissons que l'on dĂ©sire attraper, pour retenir un poisson par la tĂȘte ou l'avant du corps. Chaque pĂȘche et chaque espĂšce pĂȘchĂ©e utilise un filet diffĂ©rent par sa couleur, sa taille, la grosseur de son cordage et la dimension de ses mailles.
Certains filets peuvent ou doivent[1] ĂȘtre Ă©quipĂ©s de pingers, Ă©metteurs d'impulsions sonores destinĂ©s Ă Ă©loigner les cĂ©tacĂ©s des filets.
Des bouées surmontées d'un pavillon permettent de signaler le filet s'il est en surface ou de le retrouver s'il est calé sur le fond.
Les filets les plus simples sont les filets droits, maintenus en surface, gĂ©nĂ©ralement par du liĂšge et lestĂ©s en bas par des cailloux ou des plombs maintenus par des ganses. Les filets tournants fonctionnent selon le mĂȘme principe, mais leur fond se referme sur le poisson en formant une poche.
PĂȘcheurs et leurs filets au Bangladesh
PĂȘcheurs burkinabĂš dans le barrage de Ouagadougou
Filet de pĂȘche Ă Carystos, GrĂšce.
Texture orange composĂ©e d'un filet de pĂȘche sur une planche de bois Ă l'heure dorĂ©e Ă Don Det, Si Phan Don, Laos. DĂ©cembre 2021.
Sommaire
Histoire
L'utilisation du filet semble courante dÚs la période mésolithique (de -13000 à -5000). Des plombs de filet vieux de presque 30 000 ans ont été retrouvés en Corée[2].
La filet de pĂȘche d'Antrea est le plus ancien filet retrouvĂ© en Europe, en CarĂ©lie, au lac Ancylus (mer Baltique actuelle), et date d'environ 10 000 ans.
PĂ©troglyphe du site d'art rupestre d'Alta (Altafjord, NorvĂšge)
Poids de filet, culture de Cucuteni-Trypillia (Roumanie-Moldavie-Ukraine)
MosaĂŻque de Leptis Magna (Libye)Â : scĂšne de pĂȘche sur le Nil
PĂȘche au lamparo, Empire byzantin, Codex SkylitzĂšs Matritensis
Ăpervier
L'Ă©pervier[3] est un filet Ă lancer utilisĂ© pour la pĂȘche en riviĂšre, en lac ou en Ă©tang, plus rarement pour la pĂȘche cĂŽtiĂšre. Il est constituĂ© d'un filet circulaire (la « coiffe ») de 3,5 m Ă 6 m de diamĂštre lestĂ© de plombs sur sa pĂ©riphĂ©rie et muni dâune corde de jet fixĂ©e en son centre. On distingue lâĂ©pervier ordinaire, Ă mailles de 27 mm, le « goujonnier », Ă mailles de 10 mm, et des filets intermĂ©diaires, ou « bĂątards », Ă mailles de 15 mm, rĂ©servĂ©s aux Ă©tangs et viviers particuliers.
D'une technique demandant force et adresse, lâĂ©pervier peut ĂȘtre lancĂ© depuis la berge, voire en s'avançant dans l'eau, ou depuis une embarcation immobile ou trĂšs lente. Il peut se pratiquer en Ă©quipe de plusieurs Ă©perviers secondaires dans la zone entourant le filet central et lancĂ©s quasi simultanĂ©ment afin de limiter la fuite des poissons lors du lancer de celui-ci.
Filet calé
L'expression filet calĂ© dĂ©signe tout filet fixĂ© au fond. GĂ©nĂ©ralement, il est calĂ© grĂące Ă un lest plus lourd (plomb, pierres, ciment, âŠ). Un tel filet peut mesurer plusieurs kilomĂštres et ĂȘtre Ă©ventuellement constituĂ© de plusieurs sections mouillĂ©es par un mĂȘme navire. GrĂące aux matiĂšres synthĂ©tiques (solides et lĂ©gĂšres), un navire de vingt mĂštres peut en mouiller cinquante kilomĂštres[4].
Trémail
Le trĂ©mail est un filet calĂ© sur le fond. Il est composĂ© de trois nappes de filet aux mailles inĂ©gales (deux nappes externes ou « aumĂ©es » Ă grandes mailles, et une nappe dite interne ou « flue » lĂąche Ă petites mailles dans lesquelles les poissons s'emmĂȘlent aprĂšs avoir passĂ© le filet externe Ă plus grosses mailles. Cette technique est par exemple utilisĂ©e en baie de Seine pour pĂȘcher la sole ou le turbot. Les trĂ©mailleurs peuvent poser plusieurs trĂ©mails mis bout Ă bout pouvant constituer l'Ă©quivalent d'un filet de dix kilomĂštres. Ils les relĂšvent tous les jours ou tous les deux jours. Le trĂ©mail est utilisĂ© Ă FĂ©camp pour pĂȘcher la sole, le carrelet et la lotte lors de plusieurs sorties quotidiennes. Sur l'Ăźle de RĂ©, il permet de pĂȘcher soles, bars, seiches⊠En MĂ©diterranĂ©e, c'est encore un engin traditionnel dĂ©clinĂ© sous plusieurs formes pour notamment pĂȘcher le rouget, la langouste et la rascasse. Les pĂȘcheurs du Pays basque l'utilisent avec le filet droit Ă un seul filet.
La fabrication et l'utilisation de ces filets sont réglementés.
En France, la pÚche de loisir à l'aide de filets de pÚche dits fixes est réglementée localement d'une année sur l'autre[5].
Filet maillant
Filet maillant de fond
Il est conçu pour piĂ©ger le poisson par la tĂȘte en le retenant prisonnier par les ouĂŻes (s'il a une taille correspondant Ă la taille de la maille), par opposition aux filets dits « emmĂȘlants » (ou « lĂąches ») qui accrochent leurs prises par n'importe quelle aspĂ©ritĂ© (nageoire, Ă©pine, pince, etc.).
Le filet maillant de fond est posĂ© sur le fond car son lestage est supĂ©rieur Ă sa flottabilitĂ©. Il est mis Ă lâeau depuis le navire en plusieurs sections de quelques mĂštres, jusqu'Ă une cinquantaine de kilomĂštres. Selon la profondeur de la mer Ă l'endroit oĂč il est posĂ© et selon la taille des mailles du filet, diverses espĂšces de poissons sont ciblĂ©es. Il s'agit d'une pĂȘche artisanale largement pratiquĂ©e en MĂ©diterranĂ©e, notamment dans les eaux italiennes et grecques.
Filet maillant dérivant
Le filet maillant dérivant est positionné en surface et n'est pas retenu par un ancrage. C'est un filet droit muni de flotteurs sur sa partie supérieure qui dérive avec le courant.
Il peut ĂȘtre constituĂ© dâune ou de plusieurs nappes rectangulaires de filet, qui pendent verticalement dans lâeau grĂące Ă un lest fixĂ© dans le bas du filet. C'est une technique trĂšs ancienne utilisĂ©e pour pĂȘcher le hareng, de nuit lorsqu'il remonte en surface.
Avec l'industrialisation de la pĂȘche, les filets devenus gĂ©ants (longueurs de plus d'un kilomĂštre) ont contribuĂ© Ă l'augmentation de la pression de pĂȘche Ă la surexploitation de certains stocks de poissons, mais aussi Ă une mortalitĂ© importante de cĂ©tacĂ©s, tortues capturĂ©es et asphyxiĂ©es dans ces filetsâŠ). Cette pĂȘche est aujourd'hui en dĂ©clin, pour des raisons rĂ©glementaires et de rentabilitĂ© (les chalutiers sont devenus plus performants pour pĂȘcher de gros tonnages). Ces filets peuvent se prendre dans les hĂ©lices et ĂȘtre des obstacles Ă la circulation des navires.
Filet dérivant pélagique
Le filet dĂ©rivant pĂ©lagique est un large et long filet droit (en une seule nappe) laissĂ© provisoirement dĂ©rivant au large par les pĂȘcheurs. Ils sont utilisĂ©s dans le Pacifique sud par les pĂȘcheurs asiatiques pour pĂȘcher le thon et ailleurs pour pĂȘcher des espĂšces pĂ©lagiques et dĂ©mersales telles que sardine, bar, maquereau, hareng. Mais cette technique capture aussi toutes sortes d'espĂšces non ciblĂ©es comme des dauphins, des baleines et des tortues. La convention de Wellington de 1989 a interdit les filets dĂ©rivants de plus de 2,5 kilomĂštres dans le Pacifique. Le Japon a alors arrĂȘtĂ© la pĂȘche au filet dĂ©rivant en 1992.
Chalut
Le chalut est un filet de grande taille en forme d'entonnoir utilisĂ© pour la pĂȘche cĂŽtiĂšre ou hauturiĂšre. UtilisĂ© prĂšs du plancher ocĂ©anique (chalut de fond) ou en pleine eau (chalut pĂ©lagique), il peut ĂȘtre tractĂ© par un seul ou par deux navires (chalutiers).
Senne
Filets horizontaux
Dans diverses parties du monde, Ă partir des berges en gĂ©nĂ©ral, aux eaux marines, douces ou saumĂątres, et parfois Ă partir d'une pĂȘcherie (ponton dĂ©diĂ© Ă cette pratique) ou d'un bateau, on utilise aussi des sections horizontales de filets (ronds ou carrĂ©s) qu'on remonte aprĂšs les avoir posĂ©s sur le fond (avec ou sans appĂąt selon les cas et les espĂšces visĂ©es). Ils sont dits « balances » ou « carrelets » (filets de forme carrĂ©e). Ces filets peuvent ĂȘtre soumis Ă rĂ©glementation ou taxes.
Verveux
Les verveux sont de petits filets piĂšges d'une dizaine de mĂštres en forme de chalut. Ă lâintĂ©rieur de ce filet se trouve, tous les mĂštres, une piĂšce de filet en forme d'entonnoir par laquelle les poissons et les crevettes arrivent Ă entrer mais qui les empĂȘche de ressortir.
Certains verveux sont Ă©quipĂ©s d'ailes sur les cĂŽtĂ©s qui dĂ©routent le poisson vers l'entrĂ©e : ce systĂšme permet de pĂȘcher une zone plus Ă©tendue.
Ils sont utilisés en eau douce comme en mer. Pour l'eau douce, ils sont immergés avec une embarcation tandis qu'en mer on les pose à marée basse et on les attache avec des piquets.
Avec ce genre de filets, on peut attraper des anguilles, des poissons-chats, des mulets, des bars, des poissons plats, etc.
Impacts environnementaux, « filets fantÎmes »
Les filets ne sont pas recyclĂ©s et beaucoup sont abandonnĂ©s ou perdus en mer. Selon leur longueur et profondeur, leur taille de maille, leur sĂ©lectivitĂ©, la durĂ©e et le lieu de leur pose, les filets ont une influence directe (surpĂȘcheâŠ) ou indirecte (prises involontaires de tortues, dauphins, filets fantĂŽmesâŠ) sur les Ă©cosystĂšmes marins et ocĂ©aniques. MĂȘme des filets d'apparence modeste ou fragiles peuvent capturer et noyer de grandes espĂšces de cĂ©tacĂ©s, ou requins[6]. Depuis les annĂ©es 1980, des recherches visent Ă Ă©valuer leur quantitĂ©[7] et rĂ©duire leur impact, particuliĂšrement en MĂ©diterranĂ©e[8]. Sous forme de chalut de fond, les filets ont des impacts significatifs qui commencent Ă ĂȘtre bien Ă©tudiĂ©s.
Les filets perdus en mer (du fait des tempĂȘtes ou d'accrochages avec des grands cĂ©tacĂ©s, des cargos, des sous-marins ou Ă la suite d'accrochages sur des rĂ©cifs ou sur des Ă©paves constitueraient environ 10 % du plastique des ocĂ©ans (macro-dĂ©chets marins). Ils continuent longtemps Ă piĂ©ger des animaux marins, d'autant plus qu'ils sont faits en matiĂšre synthĂ©tique solide et peu dĂ©gradable (PA6âŠ) et que n'importe quel objet flottant en surface ou prĂšs de la surface entre deux eaux attire les poissons (fait exploitĂ© par les dispositifs de concentration du poisson ou DCP).
D'autres, plus ou moins dĂ©chiquetĂ©s par la mer ou des hĂ©lices, finissent en microplastiques ou par ĂȘtre rejetĂ©s dans les laisses de mer. De petits morceaux de filet, parfois couverts de pontes de poissons ou d'autres organismes marins, sont frĂ©quemment ingĂ©rĂ©s par des oiseaux marins (albatros par exemple).
1 459 filets fantĂŽmes Ă©taient gĂ©olocalisĂ©s en France par GhostMed (science participative) avec l'Institut mĂ©diterranĂ©en d'ocĂ©anologie dont 127 avaient Ă©tĂ© retirĂ©s en 2021, annĂ©e oĂč l'Office français de la biodiversitĂ© a lancĂ© un appel Ă projet (150 000 euros) pour retirer des engins de pĂȘche fantĂŽmes devant les cĂŽtes d'Occitanie, de Provence-Alpes-CĂŽte d'Azur et de Corse, et les traiter[9].
Notes et références
- Les pingers sont obligatoires dans certains pays (rÚglement européen)
- « Cast from the past: World's oldest fishing net sinkers found in South Korea », sur m.phys.org
- Le Chasseur français, no 599, , p. 274.
- Page sur les filets, par Ifremer
- ex dans le calvados http://www.calvados.gouv.fr/filet-fixe-r1820.html
- Exemple filmé prÚs de l'ßle d'Elbe d'un grand requin mort pris dans un filet
- Fanny Bouchaud, « La mer MĂ©diterranĂ©e, une beauté⊠plastique ? », Actu-Environnement,â (lire en ligne, consultĂ© le ) .
- SynthĂšse de la FAO, de 2006, sur les impacts des engins de pĂȘche en mĂ©diterranĂ©e, avec informations sur des outils permettant une pĂȘche plus sĂ©lective
- Fanny Bouchaud, « L'OFB lance un appel Ă projet pour retirer les engins de pĂȘche fantĂŽmes et les traiter », Actu-Environnement,â (lire en ligne, consultĂ© le ) .