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Aqueducs antiques de Lyon

Les aqueducs antiques de Lyon alimentaient la ville gallo-romaine de Lugdunum. SituĂ©e en grande partie sur la colline de Fourvière, celle-ci pouvait atteindre une altitude de 300 mètres (contre 160 mètres pour la basse ville sur les berges de la SaĂ´ne). En outre, peu de sources jaillissaient de la colline, et aucune au-dessus du seuil de Trion. Afin de disposer d'eau potable dans toute la ville, un recours aux eaux des massifs montagneux proches (Monts d'Or, Monts du Lyonnais, massif du Pilat) Ă©tait nĂ©cessaire, via un système d'aqueducs.

Une des caractéristiques principales de ces aqueducs, par rapport aux systèmes d'aqueducs plus classiques de Nîmes ou Rome, est la nécessité pour tous les ouvrages de faire appel à des systèmes de siphons pour franchir les vallées de l'Yzeron et du ruisseau de Rochecardon, qui séparent la colline de Fourvière des hauteurs des Monts du Lyonnais et des Monts d'Or d'où provenait l'eau.

Photographie d'un aqueduc porté sur des arches de briques traversant un champ.
Arches du Plat de l'Air, Ă  Chaponost, sur l'aqueduc du Gier.

Histoire de l'Ă©tude des aqueducs lyonnais

Peinture du XVIIIe siècle reprĂ©sentant les ruines d'arches en maçonnerie de grand appareil, esquissant le dĂ©but d'un pont ruinĂ©.
Les restes de l'aqueduc du Gier à Sainte-Foy-lès-Lyon, dans les années 1780.

Au XVIe siècle

Les ruines romaines, dites « antiquailles », sont étudiées par des nobles comme Pierre Sala, Symphorien Champier, ou des religieux comme Claude de Bellièvre. Les aqueducs sont à l'époque souvent appelés « des Sarrasins », nom de ceux qui les ont en partie détruits. Ces premières recherches aboutissent notamment à distinguer plusieurs aqueducs différents : « Chapponot » (Chaponost, sur l'aqueduc du Gier), « Escuylly » (Écully, sur l'aqueduc de la Brévenne)[1].

Aux XVIIIe et XIXe siècles

Carte des aqueducs romains de Lyon, dressée par François Artaud d'après un manuscrit perdu de Guillaume Marie Delorme (1817)

Guillaume Marie Delorme (1700-1782) est le premier à consacrer une étude scientifique aux aqueducs lyonnais[2]. En 1760 il publie le résultat de ses recherches sur l’aqueduc du Gier[3]. Il effectue des relevés très précis des vestiges des ouvrages aériens des aqueducs, qui ne seront pas publiés faute d’avoir pu être gravés. Repérés par l’archéologue François Artaud en 1817-1818, puis longtemps perdus, ces dessins sont réapparus en 2003, ont été acquis par la ville de Lyon et déposés aux Archives Municipales[4] - [5]. En 1817, Artaud dessine, d’après un manuscrit perdu de Delorme, le tracé complet des aqueducs de Lyon que celui-ci avait reporté sur la carte de Cassini. Ce document est révélé en 1895 par André Steyert dans sa Nouvelle histoire de Lyon[6] puis également publié par François Gabut[7] et Camille Germain de Montauzan[8].

En réponse à la question mise au concours en 1834 par l'Académie Royale des sciences, belles-lettres et arts de Lyon[note 1], l'architecte Alexandre Flachéron (1811-1841) propose la restauration de l'aqueduc de la Brévenne comme un des meilleurs moyens d'approvisionner la ville de Lyon en eau potable, mais aucune des solutions proposées ne voit finalement le jour[9]. Les travaux de Flachéron sur trois aqueducs, ceux du Mont-d'Or, de la Brévenne et du Gier, sont publiés en 1840[10].

En 1835-1836 l'ingĂ©nieur Paul de Gasparin (1812-1893) effectue une reconnaissance complète de l'aqueduc du Gier, qu’il cartographie Ă  l’échelle 1:40 000[11] et dont il Ă©tablit le profil en long par un nivellement prĂ©cis. Ce profil en long est reproduit Ă  la fin de la thèse de Germain de Montauzan[12]. Les travaux de Gasparin ne sont publiĂ©s qu'en 1855[13].

De 1889 à 1896 François Gabut (1828-1911), chef du contentieux à la Compagnie des Eaux de Lyon, publie une série d’articles sur les aqueducs dans la Revue du Lyonnais[14] - [15] - [16]. Ses recherches, entreprises dès avant 1870, concernent plus particulièrement les aqueducs de la Brévenne et de l’Yzeron.

Aux XXe et XXIe siècles

Le XXe siècle commence par la publication de la très complète thèse de Camille Germain de Montauzan, qui s'appuie largement sur les travaux de ses prédécesseurs ; mais aussi sur des comparaisons avec les ouvrages comparables situés à Rome, en Tunisie, en Île-de-France, à Fréjus ; sur de nombreux calculs (vitesse, perte de charge, pression hydraulique, etc.) ; ainsi que sur des observations photographiques personnelles. La qualité de cet ouvrage est telle que peu de recherches sont effectuées à ce sujet jusque dans les années 1960[17].

Les découvertes archéologiques complémentaires de l'après-guerre, la redécouverte de manuscrits comme ceux de Delorme, la constitution d'associations d'histoire et d'archéologie et les nouvelles techniques d'investigation permettent alors l'enrichissement de l'étude des aqueducs romains[18]. Parallèlement, le Service régional de l’archéologie de Rhône-Alpes intègre les quatre ouvrages dans sa politique de conservation[19].

Les différents aqueducs de Lugdunum

Quatre aqueducs ont approvisionné la ville en eau (deux autres, présentés à la fin de ce paragraphe, sont plus discutés). Ils cumulent 220 kilomètres de canalisations[20]. Ce sont, du plus court au plus long (et du plus ancien au plus récent[21]) :

L'aqueduc des Monts d'Or

Source captée dans un tunnel de briques.
Source du vallon d'Arches, prise d'eau de l'aqueduc des monts d'Or.

L'aqueduc des Monts d'Or, le premier construit, (sans doute par Marcus Vipsanius Agrippa, vers l'an 20 avant JĂ©sus-Christ[22]), s'alimentait aux sources du ruisseau du Thou, sur le versant septentrional des Monts-d'Or (aujourd'hui sur la commune de Poleymieux-au-Mont-d'Or)[23]. Il mesure 26 kilomètres, dont 22 en tranchĂ©e couverte.

Son altitude de dĂ©part Ă©tait assez basse (370 mètres), et sa pente ne permettait qu'une arrivĂ©e Ă  Fourvière Ă  l'altitude de 260 mètres environ, tout juste suffisante pour passer le seuil de Trion. Quant Ă  son dĂ©bit, il est très variable suivant les sources. Camille Germain de Montauzan l'estime entre 8 000 m3 par jour (93 L/s) et 15 000 m3 par jour (174 L/s)[24] ; Jean Burdy, entre 2 000 m3 par jour (23 L/s) et 6 000 m3 par jour (70 L/s)[25].

L'aqueduc de l’Yzeron

Deux massifs de briques proches, hauts d'une douzaine de mètres et entièrement recouverts de lierre.
Les piles du Tourillon, anciens vestiges du réservoir intermédiaire du siphon double de l'Aqueduc de l'Yzeron à Craponne, après rénovation en septembre 2019.

L'aqueduc de l'Yzeron fut le second dans l'ordre de construction, durant le règne d'Auguste, peut-être vers l'an 9 avant Jésus-Christ[26]. Il possède une particularité qui le distingue des trois autres : c'est le seul aqueduc ramifié de Lugdunum. Il prend sa source principale à Yzeron, mais d'autres existent, notamment à Pollionnay et Vaugneray. Les différentes canalisations confluent à Grézieu-la-Varenne et Craponne, d'où le nom d'« aqueduc de Craponne » donné à cet ouvrage par Camille Germain de Montauzan[27].

Contrairement aux aqueducs du Gier et des Mont-d'Or, l'ouvrage d'Yzeron prenait sa source Ă  une altitude particulièrement Ă©levĂ©e : 710 mètres Ă  715 mètres (mais 600 mètres pour la branche de Vaugneray). Toutefois, cela ne constituait pas forcĂ©ment un atout, une pente trop forte pouvant entraĂ®ner une vitesse excessive de l'eau et, en consĂ©quence, une usure rapide de la structure du canal[28]. D'ailleurs, des rĂ©parations sont visibles Ă  plusieurs endroits sur cet ouvrage : le fond de la cunette est recouvert par endroits de parfois plus de cinq recharges limono-graveleuses plus ou moins compactes, preuve soit que le fond d'origine a Ă©tĂ© altĂ©rĂ© par l'eau et a nĂ©cessitĂ© rĂ©paration, soit que l'Ă©quipe d'entretien de l'ouvrage a jugĂ© nĂ©cessaire de redessiner la pente pour freiner le courant[29].

Aussi cet aqueduc fut-il le lieu d'expĂ©rimentation du procĂ©dĂ© des chutes brise-pente (voir ci-dessous). Long de 26 Ă  40 kilomètres suivant les branches, il arrivait Ă  une altitude estimĂ©e Ă  268 mètres, dans l'actuel quartier du Point-du-Jour[28]. Selon Camille Germain de Montauzan, son dĂ©bit se situait entre 12 000 m3 par jour (129 L/s) et 15 000 m3 par jour (176 L/s)[24]. Les Ă©tudes actuelles se montrent moins assurĂ©es et Jean Burdy ne donne pas de volume.

Une autre particularité remarquable de cet ouvrage est le double siphon permettant de franchir d'une part le plateau légèrement concave de Craponne, et d'autre part la profonde vallée d'Alaï. Le premier siphon permettait d'éviter la construction d'une très longue section (plus d'un kilomètre) sur des arcades particulièrement hautes[note 2], le second de franchir la vallée d'Alaï. Un seul siphon était inenvisageable, la remontée intermédiaire au niveau des Tourillons aurait provoqué une accumulation d'air à cet endroit, ce qui aurait brisé à long terme le siphon[30] - [31].

Schéma en noir et blanc, reconstituant à partir des ruines existantes (en noir) la configuration d'un réservoir placé à une grande hauteur (environ quinze mètres) entre un siphon amont et un siphon aval.
Reconstitution de Germain de Montauzan du réservoir du Tourillon, à la fois réservoir de fuite du siphon de Craponne et réservoir de Chasse du siphon d'Alaï. Les parties en noir correspondent aux éléments toujours debout à l'époque (1908).

L'aqueduc de la Brévenne

Photographie d'arches antiques supportant une conduite en forte pente (et donc sous pression).
Rampant du siphon des Massues de l'aqueduc de la Brévenne à Tassin-la-Demi-Lune.

L'aqueduc de la Brévenne fut construit sous le règne de Claude[32]. L'altitude de sa source et la localisation de celle-ci au cœur des Monts du Lyonnais sont assez proches de celles de l'aqueduc précédent. En revanche, le tracé et les procédés mis en œuvre sont radicalement différents.

L'aqueduc de la Brévenne présente la caractéristique de bénéficier d’un renfort doublant le piédroit, non maçonné et qui apparaît à partir du niveau de la fondation du canal[33].

Comme l'aqueduc d'Yzeron, celui de la BrĂ©venne avait recours Ă  plusieurs captages (tous situĂ©s sur des affluents de rive droite de la BrĂ©venne, d'oĂą son nom), pour augmenter et sĂ©curiser son dĂ©bit. Mais ces diffĂ©rents captages Ă©taient tous effectuĂ©s sans ramification, directement sur le tracĂ© de l'aqueduc. Comme ces captages sont situĂ©s sur le versant occidental (opposĂ© au versant lyonnais) des Monts du Lyonnais, l'aqueduc de la BrĂ©venne dĂ©veloppe une longueur bien supĂ©rieure (66 kilomètres, dont 59 en tranchĂ©e couverte) Ă  celle de l'ouvrage de l'Yzeron. Il part de 630 mètres d’altitude pour arriver environ Ă  280 mètres Ă  Saint-Just, après une section en siphon particulièrement longue (3 500 mètres). Camille Germain de Montauzan estime que son dĂ©bit Ă©tait le plus important des quatre ouvrages alimentant Lyon (28 000 m3 par jour, soit 324 L/s)[24]. Toutefois, Jean Burdy est plus rĂ©servĂ© et n'accorde que 10 000 m3 par jour (115 L/s) Ă  cet ouvrage[25].

L'aqueduc du Gier

Longue succession d'arches portant une conduite située le long d'une route.
Vestiges de l'aqueduc du Gier Ă  Chaponost.

L'aqueduc du Gier est de loin le plus long, le plus ambitieux et le plus complexe techniquement des quatre ouvrages alimentant Lyon, il se caractérise notamment par une grande utilisation des siphons (quatre siphons, représentant cinq kilomètres de longueur cumulée). Dernier construit, la récente découverte de restes de coffrages en bois datés de l’an 110[34] a permis de situer sa construction sous le règne de l’empereur Trajan, sans exclure cependant qu’il ait été achevé sous Hadrien, comme l’a avancé Camille Germain de Montauzan[35].

La longueur de ce canal est de 86 kilomètres, dont 73 en tranchĂ©e couverte. Dans cette longueur, il faut toutefois compter les 11 kilomètres du dĂ©doublement qui s'opère au passage de la vallĂ©e de la Durèze. La prise d'eau s'effectue dans le Gier, au-dessus de Saint-Chamond, Ă  l'altitude d'environ 410 mètres. L'altitude d'arrivĂ©e Ă©tant de 300 mètres (rĂ©servoir de Cybèle Ă  la Sarra, l'aqueduc du Gier Ă©tant le seul Ă  atteindre le sommet de la colline de Fourvière), la pente Ă©tait particulièrement faible (0,5 Ă  1,2 â€°, contre une moyenne double pour les autres ouvrages[25]) et constituait une rĂ©alisation technique remarquable. En arrivant sur la colline de Fourvière, le canal traversait d'abord toute la partie la plus haute, qui correspond aujourd'hui Ă  Sainte-Foy-lès-Lyon et au quartier de Saint-IrĂ©nĂ©e, traversait le seuil de Trion perpendiculairement aux trois autres ouvrages, par un siphon, et atteignait le sommet de la Sarra, sur la partie de la colline consacrĂ©e au forum.

Paul de Gasparin estime son dĂ©bit Ă  24 000 m3 par jour, soit 278 L/s)[36]. Camille Germain de Montauzan confirme le calcul de Gasparin[24]. Jean Burdy, quoiqu'il minimise les dĂ©bits suggĂ©rĂ©s par ses prĂ©dĂ©cesseurs, affirme que le dĂ©bit de cet aqueduc Ă©tait le plus abondant de tous (15 000 m3 par jour, soit 173 L/s)[25].

Comparativement aux autres aqueducs, en particulier à celui de la Brévenne dont la longueur est comparable, l'aqueduc du Gier est également celui dont la structure du canal était la plus résistante, soit du fait d'un matériau mieux adapté, soit du fait de meilleures techniques constructives. En tout cas, les sondages archéologiques menés dans les années 1980 et 1990 ont révélé des sections intactes beaucoup plus nombreuses et beaucoup plus longues sur les tranchées de l'aqueduc du Gier que sur les autres sections en tranchées[37].

Les aqueducs de Cordieux et de Miribel

Deux autres aqueducs romains ont laissé des traces dans l'agglomération lyonnaise ; à la différence des quatre premiers, ils ne venaient pas de l'ouest et n'alimentaient pas Fourvière, mais la basse ville (Amphithéâtre des Trois Gaules, Presqu'île, Ainay). Il s'agit des aqueducs de Cordieux et de Miribel, dont l'existence, les caractéristiques et la finalité ne sont pas complètement reconnues[38].

Aqueduc de Cordieu

Le premier prendrait naissance à Cordieux (dans la commune de Montluel), sur le plateau de la Dombes. Il aurait alimenté l'Amphithéâtre des Trois-Gaules, notamment pour les naumachies.

Aqueduc de Miribel

Dessin d'une coupe sur une double arcade en plein cintre.
Chambre d'aboutissement des galeries jumelles de l'aqueduc romain de Miribel.

Le second circulait au niveau infĂ©rieur, dans la vallĂ©e. Il est connu localement sous le nom de Sarrasinières. Son existence est attestĂ©e par les galeries jumelles de Neyron, situĂ©es largement au-dessus du RhĂ´ne, et dont Guillaume Marie Delorme affirme avoir retrouvĂ© les traces jusqu'Ă  l'HĂ´tel de ville. Son utilitĂ© est par contre incertaine : s'il est quasiment certain que les eaux du RhĂ´ne ne l'empruntaient pas, on comprend mal pourquoi un ouvrage d'une telle dimension (deux galeries de 1,90 mètre de largeur pour 2,85 mètres de hauteur sous voĂ»te) aurait Ă©tĂ© construit pour alimenter la presqu'Ă®le, alors qu'on sait que les ouvrages se terminant Ă  Fourvière alimentaient Ă  peu de frais l'actuel quartier d'Ainay[38].

Techniques mises en place

Canaux en tranchée

Dessin en noir et blanc représentant une coupe sur une section presque entièrement enterrée de l'aqueduc.
Section d'une tranchée sur l'aqueduc du Gier (relevé et dessin par C. Germain de Montauzan).

Les canaux en tranchée représentent l'immense majorité du tracé des aqueducs (à titre d'exemple, la partie en tranchée représente 90 % du tracé de l'aqueduc du Gier, et 94 % du tracé de l'aqueduc de la Brévenne)[39].

La tranchée était creusée, puis son radier constitué par des moellons debout, de vingt à trente centimètres de hauteur. Au-dessus de ceux-ci, un mortier figeait quatre ou cinq épaisseurs de petits matériaux réguliers, la plupart du temps taillés en parallélépipèdes de manière sommaire ; la partie supérieure de cet assemblage constituait le point bas du canal proprement dit, tandis qu'un assemblage de même nature de chaque côté en formait les montants. La section supérieure de la galerie était la plupart du temps voûtée, avec des moellons de relativement grande taille (15 à 25 centimètres). L'ouvrage maçonné terminé, la tranchée était remblayée ; dans tous les cas, la face externe de la partie supérieure de la galerie n'était jamais à une profondeur inférieure à un mètre, afin d'assurer la pérennité de l'ouvrage[40].

Une tranchĂ©e mesurait en moyenne deux mètres de largeur pour trois Ă  quatre mètres de profondeur. On peut ainsi calculer que les deux aqueducs du Gier et de la BrĂ©venne reprĂ©sentaient 500 000 m3 chacun de terrassements en dĂ©blais pour la rĂ©alisation de ces tranchĂ©es, et l'ensemble des quatre aqueducs 1,2 million de mètres cubes. la quantitĂ© de maçonnerie nĂ©cessaire Ă  la rĂ©alisation de chacun des deux plus grands aqueducs est quant Ă  elle environ de 300 000 m3 (800 000 m3 pour les quatre ouvrages)[39].

Tunnels

Les tunnels correspondaient Ă  la traversĂ©e souterraine d'un relief, afin de s'Ă©pargner un long trajet de contournement, qui s'avĂ©rait non seulement coĂ»teux mais qui faisait perdre de l'altitude au canal. Ils n'Ă©taient pas nĂ©cessaires sur les premiers aqueducs de Lyon, qui descendaient en droite ligne des reliefs proches des Monts-d'Or et du Lyonnais. En revanche, il est possible, mais non prouvĂ©, que le constructeur romain y ait eu recours pour l'aqueduc de la BrĂ©venne ; pour l'aqueduc du Gier, dont le tracĂ© suit le flanc sud-ouest des monts du Lyonnais, huit tunnels sont attestĂ©s, trois autres sont plus douteux. Les tunnels cumulent une longueur de 3 400 mètres, le plus long mesurant 825 mètres ; ces ouvrages permettent de raccourcir l'aqueduc de 6 kilomètres, ce qui reprĂ©sente 3 Ă  8 mètres de gain vertical[41].

Pentes

Une pente minimale était nécessaire pour assurer un débit suffisant et éviter toute stagnation. La pente ne devait pas non plus être trop importante (voir paragraphe ci-dessous), afin de ne pas éroder le revêtement interne du conduit. Afin d'assurer une pente constante et aussi précise que possible, particulièrement pour l'aqueduc du Gier, dont le point de départ était assez bas, le point d'arrivée plus haut et la longueur plus importante que pour les autres ouvrages. L'outil utilisé était le chorobate, sorte de niveau à eau[42].

Toutefois, l'extrême régularité du tracé n'empêche pas des accidents ponctuels qui se manifestent par des raccords imparfaits, auxquels cas une brève section à plus forte pente était insérée[43]. Dans d'autres cas, le relevé du fond de la cunette montre de légères contre-pentes, mesurant jusqu'à une dizaine de mètres de longueur[44]. Ces accidents sont imputables à des malfaçons de pose pour les plus petits, à des raccords entre deux équipes travaillant sur des sections différentes pour les plus importants[45].

Chutes

Schéma montrant deux sections d'aqueduc presque horizontales séparées par une chute verticale dans un puits dont le fond est situé plus bas que la conduite aval.
Chute brise-pente sur l'aqueduc d'Yzeron.

La pente moyenne idĂ©ale Ă©tait situĂ©e autour de 1,5 mm/m, c'est-Ă -dire 1,5 â€°. Au-delĂ , la vitesse de l'eau risquait d'excĂ©der 1 m/s et de dĂ©tĂ©riorer par son action Ă©rosive le tunnel. Or, on a vu que deux des aqueducs, ceux de la BrĂ©venne et surtout d'Yzeron, partaient d'une altitude assez Ă©levĂ©e. Pour l'aqueduc de la BrĂ©venne, la pente moyenne Ă©tait de ‰ ; pour celui d'Yzeron, presque de 11 â€°[25] - [46]. Il Ă©tait donc indispensable aux Romains de casser cette pente. La solution retenue fut de construire de courts biefs horizontaux ou de très faible pente, sĂ©parĂ©s par des chutes pratiquĂ©es dans des puits. Ces chutes mesuraient environ 2,3 mètres Ă  2,5 mètres. Souvent de nombreuses chutes, constituant un vĂ©ritable escalier hydraulique, se succĂ©daient, comme Ă  Chevinay, sur l'aqueduc de la BrĂ©venne, oĂą l'eau descend de 87 mètres en seulement 300 mètres de distance[46].

Digues et chaussées

Dessin en noir et blanc représentant une coupe sur une section dont toute la partie supérieure émerge.
Conduite semi-enterrée à Sainte-Foy-lès-Lyon, sur l'aqueduc du Gier.

Le canal était dans certains lieux semi-enterré ou posé sur un remblai. Souvent, cette structure était une transition entre une section en tranchée ou en tunnel et une section aérienne en viaduc.

Regards

En tunnel comme en tranchĂ©e, mais aussi dans les sections semi-Ă©mergĂ©es, des regards Ă©taient nĂ©cessaires afin d'aller examiner, entretenir ou rĂ©parer le canal. Ces trous d'homme ont Ă©tĂ© retrouvĂ©s en faible nombre sur l'aqueduc des Monts-d'Or (1 retrouvĂ© Ă  ce jour) et de la BrĂ©venne (9). Sur l'aqueduc du Gier, en revanche, 88 regards avaient Ă©tĂ© identifiĂ©s en 2008, dont 7 sur des substructions aĂ©riennes, 52 sur des tranchĂ©es et 29 sur des tunnels, la profondeur de ces derniers variant de 6 Ă  20 mètres. Dans le cas de tunnels, les regards Ă©taient creusĂ©s au dĂ©but des travaux et servaient Ă  la fois Ă  la reconnaissance du terrain, Ă  l'extraction des dĂ©blais et au contrĂ´le du cheminement. Les regards trouvĂ©s jusqu'ici sont sĂ©parĂ©s par une distance moyenne de 77 mètres, cette distance pouvant ĂŞtre divisĂ©e par deux (38 mètres dans le cas d'un tunnel profond comme Ă  Mornant). En extrapolant cette distance sur toute la longueur de l'aqueduc du Gier, on calcule qu'il devait y avoir environ 1 000 regards sur cet aqueduc[47].

Ponts

Les viaducs constituent la partie la plus visible et la plus emblématique des aqueducs romains, quoiqu'ils ne représentent qu'environ 5 % de la longueur totale[48]. Ils servaient soit à franchir une vallée sans avoir la nécessité de construire un onéreux et complexe siphon (vallée du Mornantet, des deux Bozançon), soit à garder une altitude élevée le plus longtemps possible avant un siphon (Craponne, Chaponost).

Dans le premier cas, le pont-canal sortait souvent directement d'un tunnel (comme à Mornant) et franchissait la vallée en un point fréquemment choisi soit pour son étroitesse (moindre besoin d'arches), soit pour sa faible déclivité (arches moins hautes nécessaires). Le relief étant moins contraignant dans l'Ouest lyonnais que dans les Cévennes ou l'Estérel, aucun ouvrage de l'ampleur du pont du Gard ou des ouvrages à contreforts de l'aqueduc de Mons à Fréjus n'a dû être construit. En revanche, il existe un grand nombre de ces ouvrages (une cinquantaine de ponts recensés sur l'aqueduc du Gier)[49].

Dans le second cas, il s'agissait de maintenir une hauteur quasi constante Ă  l'eau juste avant un siphon, alors que le terrain naturel Ă©tait en lĂ©gère descente. De lĂ  des ouvrages peu hauts, mais d'une très grande portĂ©e horizontale, comme Ă  Soucieu-en-Jarrest et surtout Ă  Chaponost. Ă€ noter que ces ouvrages s'appuient sur des fondations posĂ©es Ă  une assez grande profondeur, des fouilles menĂ©es Ă  Chaponost jusqu'Ă  1,2 mètre n'ayant pu en atteindre la base[50].

Siphons

Schéma montrant l'arrivée d'un aqueduc de faible pente, placé sur des arches, au réservoir de chasse, ainsi que le départ en forte pente du siphon.
Réservoir de chasse (amont) du siphon de Beaunant : franchissement de la vallée de l'Yzeron par l'aqueduc du Gier.

Les siphons constituaient la partie à la fois la plus originale et la plus technique des aqueducs lyonnais. Comme il a été dit en introduction, les contreforts des monts du Lyonnais sont séparés de la colline de Fourvière par la profonde vallée qu'empruntent au nord le ruisseau de Rochecardon, qui se dirige vers Vaise, et au sud l'Yzeron, qui se jette dans le Rhône à Oullins.

Nécessité des siphons

Les trois premiers aqueducs devaient atteindre le seuil de Trion Ă  au moins 265 mètres d'altitude. Regardons quelles auraient Ă©tĂ© les dimensions d'Ă©ventuels ponts-canaux franchissant cette vallĂ©e.

Le premier, celui des Monts-d'Or, avait 3 500 mètres de distance Ă  franchir depuis Champagne-au-Mont-d'Or pour retrouver cette altitude, avec un point bas en dessous de 180 mètres d'altitude. Le second, celui de l'Yzeron, avait Ă  franchir le point bas d'AlaĂŻ : 3 600 mètres de longueur depuis Craponne, avec une altitude de dĂ©part Ă  290 mètres, un point bas Ă  195 mètres, et une arrivĂ©e Ă  273 mètres. Pour l'ouvrage de la BrĂ©venne, c'Ă©taient environ les mĂŞmes chiffres, avec 3 500 mètres de longueur et 90 mètres de dĂ©nivelĂ© environ entre le point haut amont et le point bas[51] - [52].

Diagramme montrant le profil en long (altitude en fonction de la distance au point de captage). L'échelle verticale est plus grande que l'échelle horizontale, ce qui met en valeur trois gros franchissements de vallées.
Profil en long de la section terminale de l'aqueduc du Gier, avec les trois derniers siphons (Soucieu, Beaunant et Trion).

Pour l'aqueduc du Gier, les contraintes Ă©taient encore plus importantes. Non seulement le cahier des charges de l'aqueduc imposait qu'il amène l'eau jusqu'au sommet de la colline de Fourvière, Ă  300 mètres d'altitude, mais encore la vallĂ©e de l'Yzeron, franchie plus en aval, Ă  Beaunant, y est-elle plus basse (176 mètres d'altitude). En revanche, la longueur, compte tenu des pentes plus escarpĂ©es de Chaponost et Sainte-Foy, n'y est que de 2 660 mètres[51] - [52].

Dans tous les cas, à la fois sur le plan de la longueur et de la hauteur des ouvrages, il était inenvisageable de réaliser ces ponts-canaux démesurés. Le siphon s'imposait.

Morphologie des siphons

Un siphon se compose en amont d'un réservoir, placé en hauteur (souvent sur des piles comme les Tourillons de Craponne), nommé réservoir de chasse. À ce réservoir aboutit le canal circulant à pression atmosphérique. Le réservoir permet d'ennoyer complètement le siphon et d'éviter qu'il se désamorce.

La partie centrale du siphon est sous pression, donc entièrement ennoyée. La pression atmosphérique permet théoriquement de faire remonter l'eau aussi haut que le point d'où elle est partie. En pratique, la perte de charge due aux frottements interdit un tel aménagement, et l'eau sort du siphon à une altitude plus basse que celle d'où elle est partie.

Le réservoir de sortie du siphon se nomme réservoir de fuite.

Le problème de la pression
Plan coté d'un réservoir, coupé à hauteur des départs de conduites forcées (neuf en l'occurrence).
Plan du réservoir de Soucieu, sur l'aqueduc du Gier ; arrivée (en haut) du canal, répartition dans les conduites forcées (en bas).

Les siphons ont une flèche correspondant Ă  la diffĂ©rence de niveau entre le point haut amont du siphon et le point bas. Cette flèche correspond Ă  la colonne d'eau exerçant une pression sur les parois du siphon. Pour le plus haut d'entre eux, celui de Beaunant (qui permet Ă  l'aqueduc du Gier de franchir l'Yzeron), cette flèche faisait 113 mètres de hauteur, ce qui correspond Ă  une pression de 12 bars (120 t/m2, pression qui aurait largement suffit Ă  rompre la conduite[53]. De surcroĂ®t, celle-ci Ă©tait en plomb, matĂ©riau plus facile Ă  usiner que le fer, mais plus fragile ; et, compte tenu de sa raretĂ© et de son coĂ»t, les conduites ne mesuraient, selon Camille Germain de Montauzan, que 6,3 millimètres d'Ă©paisseur[54] (selon Jean Burdy, cette Ă©paisseur doit ĂŞtre portĂ©e Ă  2,5 centimètres[55]). Pour rĂ©soudre ce problème, les Romains divisaient la conduite principale en petites conduites de diamètre bien plus faible (environ 23 centimètres de diamètre extĂ©rieur). En fonction du dĂ©bit, il y avait de quatre (siphon d'AlaĂŻ sur l'aqueduc de l'Yzeron) Ă  onze (siphon de Beaunant sur l'aqueduc du Gier) et peut-ĂŞtre quatorze (siphon d'Écully sur l'aqueduc de la BrĂ©venne)[51] tuyaux, qui Ă©taient toujours juxtaposĂ©s horizontalement, ce qui explique que les ouvrages constituant les siphons Ă©taient très larges.

Les ponts-siphons
Dessin en noir et blanc montrant, à partir des ruines retrouvées, la reconstitution d'un pont-siphon, à deux niveaux d'arches (le niveau supérieur beaucoup plus haut).
Reconstitution du pont-siphon des Planches, à Écully, sur l'aqueduc de la Brévenne.

Pour rĂ©duire la flèche en fond de vallĂ©e, des ponts Ă©taient tout de mĂŞme rĂ©alisĂ©s. GĂ©nĂ©ralement assez hauts (jusqu'Ă  33 mètres pour le pont-siphon d'AlaĂŻ), ils se caractĂ©risaient surtout par une grande largeur : jusqu'Ă  quatre fois plus larges qu'un pont-canal, (par exemple 7,35 mètres pour le pont-siphon de Beaunant), Ă  cause de l'alignement horizontal des tuyaux de plomb. Surtout, ils Ă©taient beaucoup plus rĂ©sistants, Ă  cause des pressions très importantes qu'ils subissaient[56]. Ainsi les voĂ»tes perpendiculaires au cheminement de l'eau, initialement rĂ©alisĂ©es sur les arches de Beaunant pour Ă©conomiser les matĂ©riaux, durent-elles ĂŞtre remblayĂ©es d'urgence car l'Ă©difice menaçait ruine, chaque voĂ»te supportant un poids d'environ 500 tonnes[56].

La partie supérieure de ces ponts-siphons n'était pas entièrement plane : elle accusait une pente ascendante assez sensible (environ 1 %, ce qui, sur un pont siphon comme celui de Beaunant, faisait tout de même deux mètres et demi de différence entre le début et la fin de l'ouvrage). Cette pente avait plusieurs atouts : tout d'abord, favoriser l'évacuation d'éventuelles bulles d'air qui se seraient introduites dans le tuyau, en suivant logiquement le sens d'écoulement de l'eau ; d'autre part, permettre une vidange des tuyaux en cas de nécessité d'entretien. Vitruve suggère l'existence d'un tel dispositif de vidange[57].

Matériaux de construction

Les aqueducs, qu'ils soient souterrains ou aériens, étaient constitués de maçonnerie. Cette maçonnerie était appareillée de différentes manières, et liée par un mortier.

Maçonnerie

Les matériaux structurels formant aussi bien les substructions du canal que ses montants ou sa couverture étaient des briques ou des pierres. Pour l'aqueduc du Mont-d'Or, c'était de préférence du calcaire. Pour les aqueducs de l'Yzeron, de la Brévenne et du Gier, il s'agissait essentiellement de gneiss, micaschistes et de granites[58].

Au fond de la tranchée du canal, la semelle de fondation était construite à partir des deux piédroits qui délimitaient un blocage de moellons[59].

Si le matĂ©riau employĂ© a usuellement une origine locale, les quantitĂ©s requises Ă©tant Ă©normes, dans certains ouvrages d’art il ne provient pas nĂ©cessairement du lieu mĂŞme oĂą ceux-ci ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s. Ainsi les pierres des arches du Plat de l'Air, Ă  Chaponost, sont constituĂ©es Ă  85% d’un gneiss clair Ă  feuilletage rĂ©gulier et Ă  15% d’un microgneiss gris et rose, contrairement au substrat local[60]. Ă€ Mornant, si une partie du canal est rĂ©alisĂ©e avec des pierres dont les gisements potentiels ont Ă©tĂ© localisĂ©s dans un rayon de 500 Ă  3 500 mètres[61], on y trouve aussi du granite massif, dont aucune trace n'est retrouvable Ă  proximitĂ©[62].

La maçonnerie de la voûte du canal était conçue de manière à éviter toute formation de concrétions. De fait, les sections étudiées lors des fouilles menées entre 1990 et 2010 n'ont révélé la formation de dépôts calcaires que dans le seul aqueduc des Monts-d'Or, sans qu'on puisse dater ce dépôt de la phase d'utilisation ou de celle d'abandon de l'ouvrage et de stagnation des eaux[63].

Liant

Le mortier romain était un mortier de chaux grasse et aérienne, produit par calcination de calcaire blanc[64].

Type d'appareillage

Plusieurs techniques ont été utilisées pour assembler les éléments formant la structure de l'aqueduc.

RĂ©gulier

En gĂ©nĂ©ral, pour les structures appelĂ©es Ă  soutenir les ouvrages les plus grands et les plus contraints (arcades, ponts-siphons), c'est l'opus quadratum (maçonnerie en pierres taillĂ©es en parallĂ©lĂ©pipèdes rectangles rĂ©guliers) qui Ă©tait prĂ©fĂ©rĂ©, avec des variantes : « grand appareil » pour des pierres de plus de 60 centimètres (et jusqu'Ă  1,5 mètre environ) de hauteur d'assise ; « moyen appareil » pour des pierres dont la plus grande dimension Ă©tait comprise entre 20 et 50 centimètres ; enfin, « petit appareil » pour les pierres dont les dimensions n'excĂ©daient pas 20 centimètres ; et l’opus latericium pour le cas particulier des structures en briques[65].

Irrégulier

Pour l'énorme majorité du tracé, cependant, la taille de pierre n'était pas nécessaire, la hauteur de l’ensemble d'un ouvrage en tranchée ou tunnel étant, comme on l'a vu, inférieure à quatre mètres. Les structures pouvaient alors être composées de pierre non taillées, réunies simplement par le mortier. Dans le cas de pierres diverses assemblées grossièrement, on obtenait un opus incertum : dans le cas où c'étaient des pierres plates posées en épi dans un mortier liant, on parlait d'opus spicatum.

RevĂŞtement du canal

Le revêtement du canal était constitué d'une épaisse couche de ciment dont le fond et les côtés de celui-ci étaient enduites. Un relevé effectué dans l'aqueduc gallo-romain d'Augustodunum indique une épaisseur de dix-huit centimètres. Dans les aqueducs un raccord circulaire en quart de cercle d'un rayon d'environ dix centimètres, le solin, faisait le joint entre les parois verticales et le fond[note 3]. La présence du solin empêchait qu'il y eût des infiltrations entre l’enduit et le mur ; ces dernières auraient causé un gonflement puis un éclatement de l’enduit et finalement une destruction du piédroit du canal[59].

Plomb

Comme on l'a vu plus haut, le plomb Ă©tait utilisĂ© pour les siphons. Les siphons requĂ©raient une quantitĂ© considĂ©rable de mĂ©tal, qui contrairement aux pierres, ne pouvait ĂŞtre extrait sur place (de petits gisements existaient dans la vallĂ©e de la BrĂ©venne ou dans le Forez, mais l'essentiel a Ă©tĂ© importĂ© de Grande-Bretagne ou d'Espagne)[67] - [68]. Camille Germain de Montauzan estime le poids nĂ©cessaire de plomb pour les quatre aqueducs de l'ouest lyonnais entre 10 000 et 15 000 tonnes[69], mais Burdy monte Ă  40 000 tonnes[67]. Cette quantitĂ© considĂ©rable est Ă  rapprocher de la production annuelle totale de plomb de l’Empire romain, estimĂ©e entre 60 000[70] et 80 000 tonnes au maximum[71].

Protection des ouvrages

Photographie couleur d'une pierre gravée portant un texte latin.
La Pierre de Chagnon, témoin de lois protégeant l'aqueduc.

Les aqueducs, en tant que « bien public », étaient spécialement protégés par des lois propres. Une pierre, dite « pierre de Chagnon », a été exhumée à Saint-Romain-en-Jarez[11] - [72] - [73] - [74]. Elle porte une inscription faisant référence à l'empereur Hadrien :

« Ex auctoritate imp(eratoris) Caes(aris) Trajani Hadriani Aug(usti), nemini arandi, serendi pangendive jus est intra id spalium agri quod iutelae duclus destinatum est

(En vertu de l’autorité de l’empereur César Trajan Hadrien Auguste, le droit n’est donné à personne de labourer, de semer ou de planter dans cet espace de terrain qui est destiné à la protection de l’aqueduc)[75]. »

Un système d'amendes, de confiscations et de pertes de propriété réglait les différentes infractions à la détérioration volontaire ou involontaire de l'aqueduc[76].

Cependant, à la fin de l'Empire Romain, avec l'abandon à la fois des règles régissant le respect des réseaux, la perte des forces chargées de faire respecter ces règles, et la déshérence de Lyon, en particulier des hauts quartiers, les pillards se laissèrent tenter par le vol de matériaux, en particulier du plomb. Les invasions sarrasines au VIIIe siècle achevèrent de ruiner les constructions ; le plomb étant très utilisé dans la construction médiévale, les siphons furent méthodiquement pillés jusqu'à ce qu'il n'en restât pas une trace aujourd'hui[55].

Notes et références

Notes

  1. Fondation Christin de Ruolz : Indiquer le meilleur moyen de fournir à la ville de Lyon les eaux nécessaires pour l'usage de ses habitans (sic), pour l'assainissement de la ville, et les besoins de l'industrie lyonnaise.
  2. La même hauteur que le réservoir des Tourillons, c'est-à-dire plus de douze mètres.
  3. Ce dispositif est en pan coupé ou chanfrein sur l'ouvrage plus ancien des Monts-d'Or[66].

Références

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  10. Alexandre Flachéron 1840.
  11. Paul de Gasparin, « Copie partielle du Plan joint au Mémoire de M. Paul de Gasparin sur l'aqueduc romain qui amenait à Lyon les eaux de la vallée du Gier : Tracé sur le département de la Loire », Annexe au mémoire de MM. Thiollier et Testenoire-Lafayette de 1887 indiquant le lieu où a été découverte la pierre gravée de Chagnon, sur Gallica / BnF, Lyon, (consulté le ).
  12. Camille Germain de Montauzan 1908, « Planche V - Profil en long de l'aqueduc du Gier », p. in fine.
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  14. François Gabut 1889.
  15. François Gabut 1890.
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  18. Macabéo & Coquidé 2010, Introduction, p. 4.
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  21. Camille Germain de Montauzan 1908, « Chapitre I - Aperçu historique », p. 13 à 39.
  22. Camille Germain de Montauzan 1908, « Chapitre I - Aperçu historique », p. 16.
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  34. « Quand l’eau courante est arrivée à Lyon : la datation de l’aqueduc du Gier enfin révélée ? », Communiqué de presse, Archeodunum,‎ (lire en ligne).
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  36. Paul de Gasparin 1855, « §4. - Débit », p. 228 à 237.
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  54. Camille Germain de Montauzan 1908, « Chapitre III — § III. — Siphons. », p. 182.
  55. Jean Burdy 2008, « Les siphons », p. 88.
  56. Jean Burdy 2008, « Le pont-siphon de l'aqueduc du Gier : une architecture d'exception », p. 92 & 93.
  57. Jean Burdy 2008, « Le pont-siphon de l'aqueduc du Gier : une architecture d'exception », p. 91.
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Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

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Voir aussi

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