Acrocanthosaurus
Acrocanthosaurus atokensis
Stovall & Langston, 1950
Acrocanthosaurus (littĂ©ralement « lĂ©zard Ă hautes Ă©pines ») est un genre Ă©teint de grands dinosaures thĂ©ropodes carnivores de la famille Ă©galement Ă©teinte des Carcharodontosauridae, ayant vĂ©cu dans ce qui est maintenant l'AmĂ©rique du Nord au cours de l'Aptien et de l'Albien infĂ©rieur (CrĂ©tacĂ© infĂ©rieur). Comme pour la plupart des dinosaures, le genre Acrocanthosaurus n'est reprĂ©sentĂ© que par une seule espĂšce : Acrocanthosaurus atokensis ; son nom scientifique est francisĂ© en acrocanthosaure. Ses restes fossiles ont Ă©tĂ© dĂ©couverts dans les Ătats de l'Oklahoma et du Texas aux Ătats-Unis, mais des dents qui lui ont Ă©tĂ© attribuĂ©es ont Ă©tĂ© trouvĂ©es jusqu'au Maryland.
C'Ă©tait un prĂ©dateur bipĂšde. Il est surtout connu pour les longs processus Ă©pineux de ses vertĂšbres qui servaient trĂšs probablement Ă fixer une longue chaĂźne de muscles sur le cou, le dos et les hanches de l'animal. C'Ă©tait l'un des plus grands thĂ©ropodes, mesurant prĂšs de 12 mĂštres de longueur et pesant jusqu'Ă 7,2 tonnes. On a trouvĂ© de grandes empreintes de thĂ©ropodes au Texas qui ont pu ĂȘtre faites par un Acrocanthosaurus, mais il n'existe pas de lien direct entre empreintes et restes de squelette.
Des découvertes récentes élucident beaucoup de détails sur son anatomie, permettant de faire des études précises, notamment sur la structure de son cerveau et le fonctionnement de ses membres antérieurs. C'était le plus grand théropode prédateur de son écosystÚme et ses proies probables étaient les ornithopodes et les grands sauropodes.
Découverte et dénomination
Acrocanthosaurus doit son nom Ă ses longs processus vertĂ©braux. En effet, son nom dĂ©rive des mots du grec ancien ÉÎșÏÉ / akra « haut », ÉÎșÉÎœÎžÉ / akantha « Ă©pine » ou « colonne vertĂ©brale » et ÏÉÊÏÎżÏ / sauros « lĂ©zard »[1]. Sa dĂ©nomination spĂ©cifique, atokensis, vient du comtĂ© d'Atoka en Oklahoma, oĂč les spĂ©cimens originaux ont Ă©tĂ© trouvĂ©s. Le nom a Ă©tĂ© inventĂ© en 1950 par les palĂ©ontologues amĂ©ricains J. Willis Stovall et Wann Langston Junior[2]. Langston avait proposĂ© Acracanthus atokaensis comme nom dans sa thĂšse non publiĂ©e de 1947[3] - [4] mais le nom a Ă©tĂ© changĂ© en Acrocanthosaurus atokensis lors de la publication officielle.
L'holotype et le paratype (OMNH 10146 et OMNH 10147), dĂ©crits en mĂȘme temps en 1950, se composent de deux squelettes partiels et d'une partie de crĂąne provenant de la formation d'Antlers en Oklahoma[2]. Deux spĂ©cimens beaucoup plus complets ont Ă©tĂ© dĂ©crits dans les annĂ©es 1990. Le premier (SMU 74646) est un squelette partiel, auquel il manque la plus grande partie du crĂąne. Il a Ă©tĂ© trouvĂ© dans la formation des Twin Mountains, au Texas, et se trouve actuellement dans les collections du MusĂ©e des Sciences et de l'Histoire de Fort Worth[5]. Un squelette encore plus complet (NCSM 14345, surnommĂ© « Frank ») a Ă©tĂ© rĂ©cupĂ©rĂ© dans la formation Antlers en Oklahoma par des collectionneurs privĂ©s, il a Ă©tĂ© restaurĂ© par l'Institut de recherche gĂ©ologique des Black Hills au Dakota du Sud et se trouve maintenant au MusĂ©e des Sciences naturelles de Caroline du Nord, Ă Raleigh. Ce spĂ©cimen est le plus grand connu et comprend seulement un crĂąne complet et des membres antĂ©rieurs[6]. Les Ă©lĂ©ments du squelette de OMNH 10147 sont presque de la mĂȘme taille que ceux de NCSM 14345, tandis que l'holotype et SMU 74646 sont sensiblement plus petits[6].
On dispose Ă©galement de restes beaucoup moins complets dâAcrocanthosaurus dĂ©couverts en dehors de l'Oklahoma et du Texas. Une dent dĂ©couverte dans le sud de l'Arizona a Ă©tĂ© attribuĂ©e au genre[7] et des marques de dents correspondantes ont Ă©tĂ© trouvĂ©es dans des os de sauropodes dans la mĂȘme rĂ©gion[8]. Plusieurs dents de la Formation d'Arundel au Maryland ont Ă©tĂ© dĂ©crites comme Ă©tant presque identiques Ă celles dâAcrocanthosaurus et peuvent correspondre Ă un reprĂ©sentant oriental du genre[9]. Beaucoup d'autres dents et os dĂ©couverts dans diverses formations gĂ©ologiques de tout l'Ouest des Ătats-Unis ont Ă©galement Ă©tĂ© attribuĂ©es Ă Acrocanthosaurus, mais la plupart l'ont Ă©tĂ© Ă la suite d'erreurs d'identification[10].
Quoique lĂ©gĂšrement plus petit que son parent, le Giganotosaurus, Acrocanthosaurus figure parmi les plus grands thĂ©ropodes qui aient jamais existĂ©. Le plus long individu connu mesurait 11,5 mĂštres du bout du museau au bout de la queue et pesait entre six et sept tonnes[11]. Sa tĂȘte Ă elle seule mesurait prĂšs de 1,3 mĂštre de longueur[6].
La tĂȘte dâAcrocanthosaurus, comme celle de la plupart des Allosauroidea, est longue et Ă©troite. Une trĂšs large ouverture faisant plus d'un quart de la longueur et les deux tiers de la hauteur du crĂąne situĂ©e en avant de l'orbite (fenĂȘtre antĂ©orbitaire) permet d'allĂ©ger le poids de la tĂȘte. La surface externe des maxillaires (mĂąchoire supĂ©rieure) et des os nasaux sur le dessus du museau n'est pas aussi rugueuse que celle de Giganotosaurus ou Carcharodontosaurus. De longues mais basses crĂȘtes partent de chaque narine, longeant le museau jusqu'aux yeux, pour continuer au-dessus d'eux sur les os lacrymaux[6]. Il s'agit lĂ d'une caractĂ©ristique de tous les allosauroidĂ©s[12]. Ă la diffĂ©rence dâAllosaurus, Il n'y a pas de crĂȘte proĂ©minente sur l'os lacrymal en avant de l'Ćil. Les os lacrymaux et postorbitaires forment un Ă©pais sourcil sur l'Ćil, comme on le retrouve chez les carcharodontosauridĂ©s et les abĂ©lisauridĂ©s. Chaque cĂŽtĂ© de la mĂąchoire supĂ©rieure porte dix-neuf dents courbes, crĂ©nelĂ©es mais le nombre de dents de la mĂąchoire infĂ©rieure n'est pas connu. Les dents dâAcrocanthosaurus sont plus longues que celles de Carcharodontosaurus et n'ont pas la texture ondulĂ©e qui caractĂ©rise celles des carcharodontosauridĂ©s. La partie antĂ©rieure du dentaire (os du maxillaire infĂ©rieur portant des dents) a une forme carrĂ©e, comme chez Giganotosaurus, et est peu profonde, tandis que la partie postĂ©rieure de la mĂąchoire est trĂšs haute. Acrocanthosaurus et Giganotosaurus partagent une crĂȘte horizontale Ă©paisse sur la face externe du surangulaire en dessous de son articulation avec le crĂąne[6].
La caractĂ©ristique la plus remarquable dâAcrocanthosaurus est la longueur des processus Ă©pineux de ses vertĂšbres cervicales, dorsales, lombaires et de ses premiĂšres vertĂšbres caudales, qui peuvent dĂ©passer 2,5 fois la hauteur des vertĂšbres qu'ils prolongent[2]. D'autres dinosaures ont de longs processus Ă©pineux sur le dos, parfois mĂȘme beaucoup plus longs que ceux dâAcrocanthosaurus. Par exemple, le Spinosaurus, non-apparentĂ©, prĂ©sente des processus de presque deux mĂštres de hauteur, environ onze fois plus longs que le corps des vertĂšbres[13]. PlutĂŽt que de soutenir une « voile » cutanĂ©e comme on peut le voir chez Spinosaurus, les processus portent des attaches pour de puissants muscles, un peu comme chez le bison moderne, et forment probablement une longue crĂȘte Ă©paisse courant le long du dos[2]. Le rĂŽle de ces processus reste inconnu, mĂȘme si on peut penser qu'ils Ă©taient impliquĂ©s dans la communication, le stockage de graisses ou le contrĂŽle de la tempĂ©rature. Toutes les vertĂšbres cervicales et dorsales possĂšdent d'importantes dĂ©pressions sur les cĂŽtĂ©s (pleurocĂšles), tandis que les vertĂšbres caudales en ont de plus petites, rappelant plus celles des carcharodontosauridĂ©s que celles d'Allosaurus[5].
Le squelette dâAcrocanthosaurus est typique des allosauroidĂ©s. C'est un bipĂšde avec une longue et lourde queue contrebalançant la tĂȘte et le corps, en positionnant le centre de gravitĂ© au niveau des hanches. Ses pattes avant sont plus courtes et plus robustes que celles dâAllosaurus mais ont une forme similaire, chaque main portant trois doigts griffus. Ă la diffĂ©rence de beaucoup de petits dinosaures coureurs, ses fĂ©murs sont plus longs que ses tibias et ses mĂ©tatarsiens[6] - [5], ce qui laisse Ă supposer qu' Acrocanthosaurus n'Ă©tait pas un coureur[14]. Sans surprise, les os de ses pattes arriĂšre sont proportionnellement plus robustes que ceux du plus petit Allosaurus. Ses pieds ont chacun quatre doigts, comme la plupart des thĂ©ropodes. Le premier, beaucoup plus petit que les autres et orientĂ© vers l'arriĂšre, ne prend pas appui avec le sol[6] - [5].
Classification et systématique
Acrocanthosaurus est placĂ© dans la super-famille des Allosauroidea et dans le clade des Tetanurae. Les Allosauroidea se caractĂ©risent entre autres par une paire de crĂȘtes osseuses sur les os nasaux et lacrymaux sur le dessus du museau et par de grands processus Ă©pineux sur les vertĂšbres cervicales[12]. Il a Ă©tĂ© placĂ© Ă l'origine dans la famille des Allosauridae avec Allosaurus[2], une place maintenue par des Ă©tudes jusqu'en 2000[6]. La plupart des Ă©tudes ont montrĂ© qu'il devait ĂȘtre classĂ© dans la famille des Carcharodontosauridae[12] - [15] - [16] ou dans la famille des Allosauridae (notamment, T. R. Holtz, 1994[17], E. Buffetaut et al., 1996[18], R. A. Coria and P. J. Currie, 2006[19]).
Au moment de sa dĂ©couverte, Acrocanthosaurus et la plupart des autres grands thĂ©ropodes n'Ă©taient connus que par des restes d'os, sans que l'on ne dispose de squelettes complets, ce qui a abouti Ă des classifications trĂšs variables pour ce genre. J. Willis Stovall et Wann Langston Junior l'avaient placĂ© parmi les Antrodemidae, l'actuelle famille des Allosauridae, puis il a Ă©tĂ© transfĂ©rĂ© dans le « taxon poubelle » des Megalosauridae par Alfred Sherwood Romer en 1956[20]. Pour d'autres auteurs, ses longs processus vertĂ©braux suggĂšrent qu'il existe une certaine parentĂ© avec le genre Spinosaurus[21] - [22]. Cette classification dâAcrocanthosaurus dans les Spinosauridae a persistĂ© jusque dans les annĂ©es 1980[23] et a Ă©tĂ© reprise dans les ouvrages techniques sur les dinosaures de l'Ă©poque[24] - [25].
Des vertĂšbres Ă longs processus Ă©pineux datant du CrĂ©tacĂ© infĂ©rieur dĂ©couvertes en Angleterre ont Ă©tĂ© considĂ©rĂ©es comme trĂšs semblables Ă celles d'un Acrocanthosaurus[26] et, en 1988, Gregory S. Paul avait considĂ©rĂ© qu'elles appartenaient Ă une deuxiĂšme espĂšce du genre Acrocanthosaurus, A. altispinax[27]. Ces os avaient d'abord Ă©tĂ© placĂ©s dans le genre Altispinax, un genre de thĂ©ropodes anglais seulement connu par ses dents et cette interprĂ©tation a conduit au moins un auteur Ă proposer que le genre Altispinax soit lui-mĂȘme un synonyme du genre Acrocanthosaurus[26]. Ces vertĂšbres ont par la suite Ă©tĂ© placĂ©es dans un nouveau genre, Becklespinax, distinct Ă la fois des genres Acrocanthosaurus et Altispinax[28].
La plupart des analyses cladistiques s'intĂ©ressant au genre Acrocanthosaurus ont montrĂ© qu'il devrait ĂȘtre classĂ© dans les carcharodontosauridĂ©s, dans une position de base par rapport au genre africain Carcharodontosaurus et Ă Giganotosaurus d'AmĂ©rique du Sud[12] - [5] - [29]. Neovenator, dĂ©couvert en Angleterre, est souvent considĂ©rĂ© comme Ă©tant un Carcharodontosauridae encore plus primitif ou membre d'un groupe frĂšre primitif appelĂ© Neovenatoridae[14] - [16]. Ceci suggĂšre que la famille a ses origines en Europe et s'est ensuite dispersĂ©e dans les continents du sud (Ă l'Ă©poque unis dans le supercontinent Gondwana). Cela explique que certains membres de cette famille comme Acrocanthosaurus puissent se trouver en AmĂ©rique du Nord[5]. Tous les carcharodontosauridĂ©s connus ont vĂ©cu du dĂ©but jusqu'au milieu du CrĂ©tacĂ©[12].
Paléobiologie
Croissance et longévité
D'aprĂšs les caractĂ©ristiques osseuses de l'holotype OMNH 10146 et NCSM 14345, Acrocanthosaurus aurait mis au moins 12 ans pour se dĂ©velopper complĂštement. Ce nombre peut avoir Ă©tĂ© beaucoup plus Ă©levĂ© car dans le processus de remodelage osseux et de croissance du canal mĂ©dullaire, certaines lignes de Harris ont Ă©tĂ© perdues. Si l'on tient compte de ces lignĂ©es, Acrocanthosaurus avait besoin de 18 Ă 24 ans pour ĂȘtre mature[30].
RÎle des membres antérieurs
Comme chez la plupart des thĂ©ropodes non-aviaires, les membres antĂ©rieurs dâAcrocanthosaurus ne touchaient pas le sol et n'avaient donc aucun rĂŽle pour la locomotion, ils servaient plutĂŽt Ă la prĂ©dation. La dĂ©couverte d'un membre antĂ©rieur complet de NCSM 14345 a permis la premiĂšre analyse du fonctionnement et de l'amplitude des mouvements de la patte antĂ©rieure d'un Acrocanthosaurus[31]. L'Ă©tude a examinĂ© les surfaces osseuses qui auraient pu s'articuler avec d'autres os pour dĂ©terminer jusqu'oĂč les articulations pouvaient aller. Dans beaucoup d'articulations, les os ne s'emboĂźtent pas exactement, tĂ©moignant de la prĂ©sence d'une quantitĂ© considĂ©rable de cartilage, comme c'est le cas chez de nombreux archosauriens actuels. Entre autres conclusions, l'Ă©tude suggĂšre que, au repos, les membres antĂ©rieurs pendaient des Ă©paules avec les humĂ©rus lĂ©gĂšrement inclinĂ©s vers l'arriĂšre, les coudes flĂ©chis et les doigts tournĂ©s vers la face mĂ©diale (intĂ©rieur)[31].
L'Ă©paule dâAcrocanthosaurus Ă©tait limitĂ©e dans l'amplitude de ses mouvements par rapport Ă celle des humains. Il Ă©tait impossible de faire faire au bras un cercle complet, mais l'humĂ©rus pouvait aller fortement en arriĂšre jusqu'Ă faire un angle de 109° avec la verticale et ĂȘtre donc lĂ©gĂšrement ascendant en rĂ©tropulsion complĂšte. L'antĂ©pulsion (Ă©lĂ©vation antĂ©rieure simple) Ă©tait limitĂ©e Ă 24° Ă partir de la verticale. Il ne parvenait pas tout Ă fait Ă la position verticale quand il Ă©tait en adduction (Ă©lĂ©vation antĂ©rieure vers le centre du corps dans un plan frontal) et pouvait atteindre 9° au-delĂ de l'horizontale en abduction (Ă©lĂ©vation Ă©cartant les bras du corps dans un plan frontal). Les mouvements au niveau du coude Ă©taient Ă©galement limitĂ©s par rapport aux ĂȘtres humains, avec une amplitude totale de seulement 57°. L'avant-bras ne pouvait pas s'Ă©tendre complĂštement ni se flĂ©chir entiĂšrement et il Ă©tait notamment incapable de former un angle droit avec le bras. Le radius et le cubitus (les os de l'avant-bras) Ă©taient solidaires, Ă©liminant ainsi toute possibilitĂ© de pronation ou supination (rotation de la main) comme c'est le cas pour les avant-bras chez l'homme[31].
Aucun des os du carpe (os du poignet) ne s'emboĂźte avec prĂ©cision, ce qui suggĂšre la prĂ©sence d'une grande quantitĂ© de cartilage au niveau du poignet. Lorsque tous les doigts Ă©taient en extension (tirĂ©s vers l'arriĂšre) ils pouvaient presque aller jusqu'Ă toucher le poignet. En flexion, le mĂ©dian convergeait vers le pouce, tandis que le troisiĂšme se tordait vers l'intĂ©rieur. Le pouce portait la plus grande des griffes, qui Ă©tait tenue de façon permanente en flexion vers la paume de la main. De mĂȘme, la griffe du mĂ©dian Ă©tait constamment flĂ©chie, tandis que la troisiĂšme griffe, la plus petite, Ă©tait capable de flexion et d'extension[31].
AprĂšs avoir dĂ©terminĂ© les amplitudes des mouvements dans les articulations des pattes antĂ©rieures, les recherches ont portĂ© sur les habitudes de prĂ©dateur dâAcrocanthosaurus. Les membres antĂ©rieurs Ă©tant incapables d'aller trĂšs loin vers l'avant, l'animal ne pouvait pas par exemple se gratter le cou. Les bras ne pouvaient donc pas ĂȘtre utilisĂ©s pour capturer les proies et il les attrapait probablement avec la gueule. Comme les membres antĂ©rieurs pouvaient facilement se rapprocher vers l'axe du corps, on peut supposer qu'une fois la proie saisie dans la gueule, les membres antĂ©rieurs trĂšs musclĂ©s pouvaient se rapprocher et tenir la proie Ă©troitement serrĂ©e contre son corps l'empĂȘchant de s'Ă©vader. En cas de tentative de la proie de se dĂ©tacher, elle se serait seulement plus empalĂ©e sur les griffes flĂ©chies en permanence des deux premiers doigts. L'hyperlaxitĂ© des doigts Ă©tait peut-ĂȘtre une adaptation permettant Ă Acrocanthosaurus de maintenir des proies sans crainte de luxation des doigts. Une fois la proie bloquĂ©e contre le corps, Acrocanthosaurus pouvait en dĂ©chirer les chairs avec les mĂąchoires. Une autre possibilitĂ© est quâAcrocanthosaurus pouvait tenir ses proies avec la gueule, et les griffer Ă plusieurs reprises en leur infligeant de profondes entailles[31].
Structure du cerveau et oreille interne
En 2005, les scientifiques ont construit une rĂ©plique d'endocrĂąne (le contenu de la boite crĂąnienne) d'un Acrocanthosaurus en utilisant la tomodensitomĂ©trie (TDM) pour Ă©tudier l'espace Ă l'intĂ©rieur de la boĂźte crĂąnienne de l'holotype OMNH 10146. Chez l'animal vivant, une grande partie de cet espace aurait Ă©tĂ© occupĂ© par les mĂ©ninges et le Liquide cĂ©rĂ©brospinal, en plus du cerveau lui-mĂȘme. Toutefois, les caractĂ©ristiques gĂ©nĂ©rales du cerveau et des nerfs crĂąniens peuvent ĂȘtre dĂ©terminĂ©es Ă partir de la connaissance de l'endocrĂąne et on peut les comparer aux autres thĂ©ropodes dont les endocrĂąnes ont Ă©tĂ© recrĂ©Ă©s. Bien que son cerveau soit semblable Ă celui de nombreux thĂ©ropodes, il prĂ©sente des similitudes encore plus fortes avec les allosauroidĂ©s. Les ressemblances les plus marquantes sont celles des cerveaux de Giganotosaurus et de Carcharodontosaurus avant celles d'Allosaurus ou de Sinraptor, ce qui corrobore l'hypothĂšse suivant laquelle Acrocanthosaurus est un carcharodontosauridĂ©[32].
Son cerveau avait une forme lĂ©gĂšrement sigmoĂŻde (en forme de S), avec des hĂ©misphĂšres cĂ©rĂ©braux peu dĂ©veloppĂ©s, rappelant davantage celui d'un crocodile que celui d'un oiseau, ce qui est en accord avec la conception du cerveau des thĂ©ropodes non-coelurosauriens. Acrocanthosaurus avait de grands bulbes olfactifs, et donc vraisemblablement un odorat bien dĂ©veloppĂ©. La reconstruction des canaux semi-circulaires de l'oreille interne, organe de contrĂŽle de l'Ă©quilibre qui montre que l'animal maintenait sa tĂȘte avec une inclinaison d'environ 25° vers le bas. Cet angle a Ă©tĂ© calculĂ© Ă partir de l'orientation que devait avoir l'endocrĂąne pour qu'un canal semi-circulaire soit parallĂšle au sol, comme c'est habituellement le cas quand un animal est dans une posture d'alerte[32].
De possibles empreintes
La formation de Glen Rose (en), situĂ© au centre du Texas, possĂšde de nombreuses traces de dinosaures, notamment de grands thĂ©ropodes tridactyles. La plus cĂ©lĂšbre de ces sĂ©ries d'empreintes a Ă©tĂ© dĂ©couverte le long de la riviĂšre Paluxy dans le parc d'Ătat de Dinosaur Valley, et une partie de ces empreintes est maintenant exposĂ©e au musĂ©e amĂ©ricain d'histoire naturelle de New York[33] mais il existe aussi plusieurs autres sites de la rĂ©gion oĂč de telles empreintes ont Ă©tĂ© mises au jour[34] - [35]. Il est impossible de savoir quelle espĂšce exacte a laissĂ© ces empreintes, puisqu'elles ne sont associĂ©es Ă aucun ossement fossile. Cependant, les scientifiques estiment qu'il est probable que ces traces appartiennent Ă Acrocanthosaurus[36]. Une Ă©tude des empreintes rĂ©alisĂ©e en 2001 les a comparĂ© aux pieds de divers grands thĂ©ropodes, mais sans parvenir Ă les affecter Ă un genre particulier. Toutefois, il a Ă©tĂ© constatĂ© que la taille et la forme des empreintes Ă©taient compatibles avec celles d'un Acrocanthosaurus. Or comme la formation de Glen Rose se trouve proche des formations Antlers et Twin Mountains, tant gĂ©ographiquement qu'au niveau des temps gĂ©ologiques oĂč elles se sont formĂ©es, et que le seul grand thĂ©ropode connu dans ces formations est Acrocanthosaurus, l'Ă©tude a conclu que ce genre Ă©tait le plus susceptible d'avoir laissĂ© ces empreintes[37].
Les pistes des empreintes de Glen Rose exposĂ©es Ă New York comprennent des traces de thĂ©ropodes appartenant Ă plusieurs individus, qui se dĂ©plaçaient dans le mĂȘme sens que celles de douze dinosaures sauropodes. Comme les empreintes de thĂ©ropodes sont situĂ©es au-dessus des empreintes de sauropodes, on peut dire qu'elles ont Ă©tĂ© faites plus tard. On peut donc imaginer qu'un petit groupe dâAcrocanthosaurus poursuivait un troupeau de sauropodes[33]. Bien qu'intĂ©ressante et plausible, cette hypothĂšse est difficile Ă prouver et d'autres explications existent. Par exemple, plusieurs thĂ©ropodes solitaires auraient transitĂ© dans le mĂȘme sens Ă des moments diffĂ©rents aprĂšs le passage des sauropodes, pour donner l'impression qu'un groupe d'entre eux poursuivait des proies. Il en est de mĂȘme pour le prĂ©tendu « troupeau » de sauropodes, qui peut avoir Ă©tĂ© fait par plusieurs individus solitaires comme par un groupe en dĂ©placement[38]. Ă un endroit oĂč un chemin de sauropode croise une piste de thĂ©ropodes, une empreinte disparaĂźt, ce qui pourrait indiquer une attaque[39]. Toutefois, d'autres scientifiques doutent de la validitĂ© de cette interprĂ©tation car le sauropode n'a pas changĂ© son allure, comme on aurait pu s'y attendre si un grand prĂ©dateur l'avait attaquĂ© par le cĂŽtĂ©[38].
Paléoécologie
Tous les fossiles dont on est sûr qu'ils appartiennent au genre Acrocanthosaurus ont été trouvés dans la formation de Twin Mountains dans le Nord du Texas et la formation Antlers du Sud de l'Oklahoma. Ces formations géologiques n'ont pas été datées radiométriquement, mais les scientifiques ont utilisé la biostratigraphie pour estimer leur ùge. En tenant compte de l'évolution des ammonites, on peut estimer que la formation de Glen Rose, dans laquelle on a retrouvé les empreintes d'Acrocanthosaurus, appartenait aux étages Aptien et Albien (Crétacé inférieur), et elle se trouve juste au-dessus de la formation des Twin Mountains datée de l'Aptien. Cela montre que cette formation ne se trouve que dans l'Aptien, qui a duré de 125 à 112 millions d'années avant le présent[40]. La formation d'Antlers contient des fossiles de Deinonychus et de Tenontosaurus, deux genres de dinosaures également retrouvés dans la formation de Cloverly au Montana, qui a été datée radiométriquement et correspond aux étages Aptien et Albien, tout comme la formation Antlers[41]. Par conséquent, Acrocanthosaurus a vécu probablement entre 125 et 100 millions d'années avant le présent[12].
Ă cette Ă©poque, les rĂ©gions des Twin Mountains et d'Antlers Ă©taient de vastes plaines inondables qui se drainaient vers une mer intĂ©rieure peu profonde. Quelques millions d'annĂ©es plus tard, cette mer devait s'Ă©tendre vers le nord, devenant ainsi la voie maritime intĂ©rieure de l'Ouest qui va diviser l'AmĂ©rique du Nord en deux pendant presque tout le CrĂ©tacĂ© supĂ©rieur. La formation Glen Rose prĂ©sentait un environnement cĂŽtier, et d'Ă©ventuelles pistes d'Acrocanthosaurus ont probablement Ă©tĂ© conservĂ©es dans des vasiĂšres situĂ©es Ă l'Ă©poque le long du rivage. Comme Acrocanthosaurus Ă©tait un grand prĂ©dateur, on pense qu'il avait besoin d'un vaste domaine vital et traversait de nombreux environnements de la rĂ©gion[37]. Ses proies potentielles comprenaient les sauropodes comme Paluxysaurus[42] ou mĂȘme l'Ă©norme Sauroposeidon[43], ainsi que de grands ornithopodes comme Tenontosaurus[44]. Un autre thĂ©ropode, Deinonychus, habitait aussi la rĂ©gion, mais Ă©tait beaucoup plus petit avec ses 3 mĂštres de longueur. Il n'Ă©tait trĂšs probablement qu'un concurrent Ă minima pour Acrocanthosaurus[41].
Culture populaire
Acrocanthosaurus est, de par son appartenance au groupe des grand dinosaures carnivores, tel le tyrannosaure, le spinosaure, Giganotosaurus ou encore Carcharodontosaurus, trÚs connu du public et apparaßt dans plusieurs médias :
- Acrocanthosaurus apparaßt dans l'épisode 5 de Monster Resurrected, un adulte et un jeune, qui est tué par une meute de Deinonychus ;
- Acrocanthosaurus apparaßt dans la l'univers de Dinosaur King ainsi que dans sa série éponyme, dans l'épisode 15 de la saison 1 "Menace volcanique" ;
- Acrocanthosaurus apparaßt dans l'univers de Jurassic Park, dans les jeux Android "Jurassic World le jeu" et "Jurassic Park Builder", mais aussi dans les jeux Jurassic Park Opération Genesis, Warparth : Jurassic Park et dans Jurassic World Evolution dans le pack "Carnivore Dinosaur Pack" ;
- Acrocanthosaurus apparaĂźt dans le jeu Primal Carnage Extinction, en tant que dinosaure jouable mais aussi en tant qu'un des boss du mode Survival du jeu ;
- Acrocanthosaurus est présent dans le jeu The Isle sur Steam ;
- Acrocanthosaurus est présent dans le documentaire Washington.
Notes et références
Notes
Références
- (en) Henry George Liddell et Robert Scott, GreekâEnglish Lexicon, Abridged Edition, Oxford, Oxford University Press, (ISBN 978-0-19-910207-5, LCCN 33031054).
- (en) J. Willis Stovall et Wann. Langston, « Acrocanthosaurus atokensis, a new genus and species of Lower Cretaceous Theropoda from Oklahoma », American Midland Naturalist, vol. 43,â , p. 696â728 (DOI 10.2307/2421859, JSTOR 2421859).
- (en) Wann R. Langston, A new genus and species of Cretaceous theropod dinosaur from the Trinity of Atoka County, Oklahoma. Unpublished M.S. thesis, University of Oklahoma, .
- (en) Nicholas J. Czaplewski, Richard L. Cifelli et Wann R. Langston Jr., « Catalog of type and figured fossil vertebrates. Oklahoma Museum of Natural History », Oklahoma Geological Survey Special Publication, vol. 94, no 1,â , p. 1â35.
- (en) Jerald D. Harris, « A reanalysis of Acrocanthosaurus atokensis, its phylogenetic status, and paleobiological implications, based on a new specimen from Texas », New Mexico Museum of Natural History and Science Bulletin, vol. 13,â , p. 1â75.
- (en) Philip J. Currie et Kenneth. Carpenter, « A new specimen of Acrocanthosaurus atokensis (Theropoda, Dinosauria) from the Lower Cretaceous Antlers Formation (Lower Cretaceous, Aptian) of Oklahoma, USA », Geodiversitas, vol. 22,â , p. 207â246 (lire en ligne).
- (en) Ronald P. Ratkevich, Dinofest International: Proceedings of a Symposium Held at Arizona State University, Philadelphia, Academy of Natural Sciences, (ISBN 978-0-935868-94-4), « Dinosaur remains of southern Arizona ».
- (en) Ronald P. Ratkevich, « New Cretaceous brachiosaurid dinosaur, Sonorasaurus thompsoni gen. et sp. nov., from Arizona », Journal of the Arizona-Nevada Academy of Science, vol. 31, no 1,â , p. 71â82.
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Annexes
Articles connexes
Liens externes
- (en) "Fran" the Acrocanthosaurus atokensis, (Worldwide Museum of Natural History).
- (en) Acro FAQ, (North Carolina Museum of Natural Sciences).
Bibliographie
- (en) Philip J. Currie et Kenneth Carpenter, « A new specimen of Acrocanthosaurus atokensis (Theropoda, Dinosauria) from the Lower Cretaceous Antlers Formation (Lower Cretaceous, Aptian) of Oklahoma, USA », Geodiversitas, vol. 22, no 2,â , p. 207-246 (lire en ligne [PDF])
Références taxinomiques
- (en) Référence Paleobiology Database : Acrocanthosaurus Stovall & Langston, Jr. 1950
- Ressources relatives au vivant :
- Global Biodiversity Information Facility
- (en) Paleobiology Database
- (mul + en) iNaturalist